European Commission v Czech Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2009:620
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-343/08
Date06 October 2009
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
Celex Number62008CC0343

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. YVES Bot

présentées le 6 octobre 2009 (1)

Affaire C‑343/08

Commission des Communautés européennes

contre

République tchèque


«Manquement – Transposition de la directive 2003/41/CE sur les institutions de retraite professionnelle – Non‑transposition des dispositions de la directive imposant des obligations à l’État d’établissement des institutions de retraite professionnelle – Compétence des États membres d’organiser librement leurs systèmes de retraite»





1. La présente procédure en manquement porte sur la transposition de la directive 2003/41/CE du Parlement européen et du Conseil (2) par la République tchèque.

2. La directive 2003/41 a pour objet de faciliter l’exercice par les institutions de retraite professionnelle de leurs activités dans des États membres autres que celui dans lequel elles sont établies. Elle prévoit, à cet effet, des règles prudentielles rigoureuses afin de protéger les bénéficiaires des retraites dues par ces institutions. Cependant, la directive 2003/41 ne met pas en cause la compétence des États membres d’organiser librement leurs régimes de retraite.

3. La République tchèque, afin de se conformer aux prescriptions de cette directive, a adopté des dispositions autorisant les institutions de retraite professionnelle établies dans d’autres États membres à fournir leurs prestations sur son territoire et permettant aux entreprises établies sur celui‑ci de recourir à de telles prestations. En revanche, elle n’a pas transposé les dispositions de ladite directive qui imposent des obligations à l’État d’origine de ces institutions au motif qu’il n’y a pas d’institutions de retraite professionnelle sur son territoire et qu’une telle transposition mettrait en cause l’organisation de son système de retraite.

4. La Commission des Communautés européennes estime que l’argumentation de la République tchèque n’est pas fondée et demande à la Cour de constater que cet État membre a manqué ainsi à ses obligations en s’abstenant de transposer plusieurs dispositions de la directive 2003/41.

5. Nous sommes d’avis que le recours de la Commission est bien fondé. Dans les présentes conclusions, nous indiquerons que les dispositions de la directive 2003/41 qui imposent des obligations aux États membres en tant qu’États d’origine des institutions de retraite professionnelle ne régissent pas le rôle et les fonctions de telles institutions dans le système de ces États. Nous en déduirons que la transposition complète de cette directive ne porte pas atteinte à l’organisation, par la République tchèque, de son système de retraite. Nous rappellerons ensuite que, selon la jurisprudence, l’inexistence dans un État membre d’une activité visée par une directive ne dispense pas cet État de transposer celle‑ci et nous soutiendrons que cette jurisprudence est applicable dans la présente affaire.

I – La directive 2003/41

6. Les institutions de retraite professionnelle relèvent de ce qu’il est convenu d’appeler le «deuxième pilier» dans le mode d’organisation des systèmes de retraite par les États membres (3).

7. La directive 2003/41 vise à permettre à ces institutions de fournir leurs services dans d’autres États membres (4). Aux termes du sixième considérant de cette directive, celle‑ci constitue un premier pas vers la création d’un marché intérieur des régimes de retraite professionnelle. À cet effet, elle prévoit des règles prudentielles rigoureuses en ce qui concerne les activités et les conditions de fonctionnement des institutions de retraite professionnelle afin de garantir un niveau de protection élevé aux futurs retraités appelés à bénéficier des retraites versées par lesdites institutions (5).

8. Cependant, il est indiqué au neuvième considérant de la directive 2003/41 que celle‑ci ne met pas en cause l’organisation par les États membres de leurs régimes de retraite et, en ce qui concerne en particulier le deuxième pilier, la définition, par chaque État, du rôle et de la fonction des institutions qui fournissent des prestations de retraite professionnelle (6).

9. Les dispositions pertinentes de la directive 2003/41 pour la présente affaire portent sur le champ d’application de celle‑ci, les conditions d’exercice des activités des institutions de retraite professionnelle et le régime particulier de leurs activités transfrontalières.

1. Le champ d’application de la directive 2003/41

10. Les articles 2, 3 et 6 de la directive 2003/41 définissent en termes impératifs les institutions qui relèvent du champ d’application de celle‑ci et celles qui en sont exclues.

11. Il ressort ainsi de ces dispositions qu’elle s’applique aux institutions de retraite qui, quelle que soit leur forme juridique et leur dénomination, fonctionnent selon le principe du financement par capitalisation (7), ne relèvent pas des systèmes de sécurité sociale du premier pilier et ont pour but de fournir des prestations de retraite liées à une activité professionnelle sur la base d’un contrat ou d’un accord collectif.

12. En sont exclus, notamment, les institutions qui gèrent des régimes de sécurité sociale visés par les règlements communautaires de coordination, les établissements financiers déjà couverts par un acte communautaire (assurance, organismes de placement collectif en valeurs mobilières, entreprises de services d’investissement) ainsi que les institutions de retraite professionnelle qui fonctionnent par répartition.

13. La directive 2003/41 prévoit également des dispositions à caractère facultatif.

14. Ainsi, aux termes de l’article 4 de cette directive, les États membres d’origine (8) peuvent choisir d’appliquer les dispositions de ladite directive aux activités de fourniture de retraite professionnelle exercées par les entreprises d’assurances. De même, en vertu de l’article 5 de la directive 2003/41, les États membres peuvent choisir de ne pas appliquer celle‑ci en tout ou partie aux institutions établies sur leur territoire qui gèrent des régimes de retraite comptant au total moins de 100 affiliés, ainsi qu’aux institutions pour lesquelles la fourniture de retraites professionnelles a un caractère statutaire, conformément à la législation, et est garantie par une autorité publique.

2. Les conditions d’exercice des activités des institutions de retraite professionnelle

15. La directive 2003/41 prévoit que les États membres doivent imposer plusieurs obligations aux institutions de retraite professionnelle établies sur leur territoire.

16. Chaque État membre doit ainsi les obliger à limiter leurs activités à la fourniture des prestations de retraite (article 7) et à être juridiquement séparées des entreprises d’affiliation (9) (article 8). Il doit également veiller, en vertu de l’article 9, à ce que toute institution établie sur son territoire soit inscrite dans un registre national, gérée par des personnes honorables et soumise à des règles appropriées.

17. Chaque État membre doit également s’assurer que toute institution établie sur son territoire fournisse des comptes annuels (article 10) et communique les informations énumérées à l’article 11 de la directive 2003/41 aux affiliés et aux bénéficiaires. Il doit également créer une autorité compétente dotée des pouvoirs suffisants pour contrôler effectivement l’activité de telles institutions (article 13).

18. Enfin, chaque État membre est tenu de veiller à ce que toute institution établie sur son territoire déclare à échéance régulière les principes qui guident sa politique de placements financiers (article 12), dispose d’une réserve suffisante pour couvrir ses engagements (articles 15 à 17) et place ses actifs conformément au principe de prudence (article 18).

3. Le régime particulier des activités transfrontalières

19. Aux termes de l’article 20, paragraphe 1, de la directive 2003/41, les États membres doivent autoriser les entreprises établies sur leur territoire à recourir aux services d’institutions de retraite professionnelle agréées dans d’autres États membres. Ils doivent également permettre aux institutions de retraite professionnelle agréées sur leur territoire de fournir leurs services à des entreprises établies dans d’autres États membres.

20. Une institution qui souhaite fournir des services transfrontaliers doit obtenir l’agrément préalable de son État membre d’origine (article 9, paragraphe 5).

21. À cet effet, elle doit, selon l’article 20, paragraphe 3, de la directive 2003/41, indiquer à l’autorité compétente de cet État le ou les États membres dans lequel ou lesquels elle a décidé de fournir ses prestations, le nom de l’entreprise d’affiliation ainsi que les principales caractéristiques du régime de retraite à gérer. Conformément à l’article 20, paragraphe 4, de cette directive, l’autorité compétente de l’État membre d’origine doit, sauf si elle estime que l’institution en cause n’est pas en mesure de fournir la prestation envisagée, en informer l’autorité compétente de l’État membre d’accueil dans un délai de trois mois.

22. L’article 20, paragraphes 5 à 10, de la directive 2003/41 prévoit les modalités du dialogue entre les autorités compétentes des États membres concernés ainsi que leurs pouvoirs respectifs afin d’assurer, notamment, que la prestation de services soit effectuée dans le respect du droit social et du droit du travail de l’État membre d’accueil.

23. Aux termes de l’article 22, paragraphe 1, de la directive 2003/41, les États membres devaient mettre en œuvre les dispositions nécessaires afin de se conformer à celle-ci avant le 23 septembre 2005 et en informer la Commission. Selon le même article, paragraphes 3 et 4, les États membres pouvaient reporter jusqu’au 23 septembre 2010 l’application des articles 17, paragraphes 1 et 2, et 18, paragraphe 1, sous f), dans les conditions prévues par ces paragraphes.

II – La procédure précontentieuse

24. Le 11 juillet 2006, la République tchèque a informé la Commission qu’elle avait transposé la...

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