Manuel de Castro Freitas (C-193/97) and Raymond Escallier (C-194/97) v Ministre des Classes moyennes et du Tourisme.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1998:91
Docket NumberC-193/97,C-194/97
Celex Number61997CC0193
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date05 March 1998
EUR-Lex - 61997C0193 - FR 61997C0193

Conclusions de l'avocat général Ruiz-Jarabo Colomer présentées le 5 mars 1998. - Manuel de Castro Freitas (C-193/97) et Raymond Escallier (C-194/97) contre Ministre des Classes moyennes et du Tourisme. - Demande de décision préjudicielle: Tribunal administratif - Grand-Duché de Luxembourg. - Liberté d'établissement - Directive 64/427/CEE - Activités non salariées de transformation - Conditions d'accès à la profession. - Affaires jointes C-193/97 et C-194/97.

Recueil de jurisprudence 1998 page I-06747


Conclusions de l'avocat général

1 Le tribunal administratif du Luxembourg demande à la Cour de se prononcer à titre préjudiciel sur l'interprétation de certaines dispositions de la directive 64/427/CEE (1) (ci-après la «directive 64/427») afin de pouvoir résoudre les litiges dont il a été saisi par M. Manuel de Castro Freitas, de nationalité portugaise, d'une part, et par M. Raymond Escallier, de nationalité française, d'autre part. Ces recours, qui sont tous les deux dirigés contre le ministre des Classes moyennes et du Tourisme, tendent à la réformation d'une décision administrative leur refusant l'autorisation de s'établir au Luxembourg en qualité de travailleurs indépendants pour y exercer les mêmes métiers que ceux qu'ils avaient exercés antérieurement au Portugal et en France respectivement.

I - Les faits des deux litiges

2 Il résulte des dossiers que, le 21 octobre 1993, M. de Castro Freitas a présenté aux autorités luxembourgeoises une demande d'autorisation d'établissement en vue de l'exercice de l'activité de «construction civile: construction et réparation de bâtiments, travaux de façade inclus». Le 10 janvier 1994, il a été avisé que sa demande ne pouvait pas être accueillie sur la base des certificats qu'il avait produits et il a été invité à produire une attestation CE, au sens de l'article 4, paragraphe 2, de la directive 64/427, qui lui serait délivrée par la Confederaçao de Industria Portuguesa (ci-après la «confédération») relativement aux activités qu'il avait exercées au Portugal. Il a alors présenté un certificat qui lui avait été délivré par l'Asociación Comercial e Industrial de Fafe, Cabeceiras de Basto y Celorico de Basto. Par décision du 3 mars 1994, les autorités luxembourgeoises lui ont refusé l'autorisation d'établissement parce qu'il n'avait pas fourni de certificat CE.

3 Après avoir reçu une attestation CE de la confédération, datée du 24 avril 1994, certifiant que M. de Castro Freitas avait exercé l'activité de construction civile au Portugal entre le 6 janvier 1981 et le 31 décembre 1989, les autorités luxembourgeoises lui ont délivré, le 15 juin 1994, une autorisation d'établissement en vue de l'exercice de l'activité d'entreprise de construction. Par lettre du 27 juin 1994, l'impétrant a été informé que l'autorisation d'établissement pour le métier de façadier ne pouvait pas lui être délivrée parce qu'après déduction des années prises en compte pour le métier d'entrepreneur en construction, il devait encore justifier d'une période supplémentaire d'exercice préalable pour satisfaire aux conditions prévues par l'article 3 de la directive 64/427.

4 Après s'être fait délivrer, par la confédération, une nouvelle attestation CE, datée du 27 septembre 1994, mentionnant qu'il avait en outre exercé, pendant la même période de neuf ans, l'activité de «finissages extérieurs, façades et toits» conformément à la monographie professionnelle qui avait été communiquée par les autorités grand-ducales, M. de Castro Freitas a introduit une nouvelle demande d'autorisation d'établissement pour l'activité de façadier. Cette autorisation lui a été refusée le 10 novembre 1994 pour le même motif parce qu'il n'avait pas apporté la preuve qu'il avait accompli une période supplémentaire d'activité afin de satisfaire à la condition lui imposant un exercice minimal de six ans de ce métier.

5 M. de Castro Freitas a alors introduit une troisième demande d'autorisation d'établissement en y joignant, cette fois, un certificat de la confédération, daté du 25 décembre 1994, attestant qu'il avait exercé durant la même période l'activité qualifiée cette fois de «construction civile» et d'«achèvements extérieurs, façades et toits». Par lettre du 20 janvier 1995, M. de Castro Freitas a été informé que sa nouvelle demande avait été rejetée à défaut d'éléments nouveaux, vu que les qualifications reprises dans le certificat avaient déjà été prises en considération lors de l'adoption des décisions antérieures. Le recours gracieux formé par le demandeur le 20 février 1995 a été rejeté par le ministre, faute d'éléments nouveaux, par décision du 17 mars 1995. L'intéressé a engagé un recours en réformation, sinon en annulation contre cette décision le 19 avril 1995.

6 Le demandeur au principal dans l'autre litige pendant devant le tribunal administratif est M. Raymond Escallier. Par lettre du 16 juillet 1995, celui-ci avait demandé à l'administration luxembourgeoise l'autorisation d'exercer au Grand-Duché les métiers de charpentier, de couvreur et de ferblantier-zingueur.

Sur avis de la commission consultative prévue à l'article 2 de la loi du 28 décembre 1988 réglementant l'accès aux professions d'artisan, de commerçant, d'industriel ainsi qu'à certaines professions libérales, le ministre lui a délivré, le 24 janvier 1996, l'autorisation d'exercer le métier de couvreur, mais lui a refusé cette même autorisation pour les métiers de charpentier et de ferblantier-zingueur. Les autorités luxembourgeoises ont justifié ce refus en disant que M. Escallier n'avait pas encore accompli le nombre d'années d'activité effective exigé par l'article 3, sous a) et c), de la directive 64/427 pour chacun des métiers en cause, les conditions prévues à l'article 3 devant, selon leur interprétation, être remplies séparément pour chacun des métiers concernés.

7 Le 14 février 1996, M. Escallier a introduit un recours en réformation pour cause de violation de la loi à l'encontre de la décision du 24 janvier 1996. A l'appui de son recours, il a fait valoir que les certificats qu'il avait produits attestaient qu'il était autorisé à exercer les trois métiers en France et qu'il remplissait les conditions énoncées à l'article 3 de la directive 64/427. Il a renvoyé, à cet égard, à l'attestation prévue par l'article 4, paragraphe 2, de la directive, qui lui avait été délivrée par la chambre du commerce et de l'industrie de la Moselle, document dont il résulte qu'il avait exercé les trois activités en cause à titre de dirigeant chargé de la gestion d'une entreprise pendant la période allant du 21 janvier 1983 au 5 février 1990.

II - Les questions préjudicielles

8 Afin de pouvoir résoudre ces deux litiges, le tribunal administratif du Luxembourg a adressé les questions préjudicielles suivantes à la Cour:

«1) L'alinéa premier de l'article 3 de la directive 64/427, visant d'une part l'accès à `l'une des activités mentionnées à l'article premier paragraphe 2' ou l'exercice de `celles-ci' et d'autre part in fine `l'exercice effectif ... de l'activité considérée', couvre-t-il également la situation d'un ressortissant communautaire ayant exercé simultanément dans l'État membre de provenance plusieurs activités tombant sous le champ d'application de cette directive et demandant l'établissement de son entreprise dans un autre État membre avec la continuation de l'exercice simultané de ces activités ou métiers [(2)], au regard notamment du principe de la liberté d'établissement consacrée par l'article 52 du traité ... instituant la Communauté économique européenne?

2) Dans l'affirmative, la période d'exercice requise par l'article 3, sous a), se trouve-t-elle modifiée par toutes ou par certaines des activités considérées en raison de l'exercice simultané de celles-ci?

3) Quelle est l'incidence éventuelle de la connexité, voire de l'absence de connexité, entre les activités considérées?»

III - La législation nationale

9 La loi du 28 décembre 1988, qui réglemente l'accès aux professions d'artisan, de commerçant, d'industriel ainsi qu'à certaines professions libérales, soumet l'exercice d'activités artisanales, industrielles ou commerciales à l'obtention préalable d'une autorisation écrite, qu'il s'agisse de personnes physiques ou de personnes morales. Son titre V prévoit des peines de privation de liberté et des amendes pour toute infraction à cette loi.

Le chapitre II du titre II, qui contient les règles applicables au secteur de l'artisanat et des entreprises industrielles de construction, dispose, en son article 13, que sont établis, par règlements d'exécution de la loi, adoptés sur avis des associations professionnelles concernées, une liste des métiers principaux et secondaires ainsi que leur champ d'activité. Pour exercer un métier principal, les artisans devront être en possession du diplôme de maîtrise ou d'un titre universitaire d'ingénieur dans la branche correspondante. Néanmoins, le paragraphe 2 de l'article 13 dispose que la qualification professionnelle suffisante pour l'exercice soit de l'ensemble soit d'une partie d'un métier repris dans cette liste pourra être reconnue à un postulant qui ne possède aucun de ces titres s'il produit des pièces justificatives reconnues comme équivalentes. Les critères d'équivalence qui permettent de reconnaître cette qualification professionnelle ont été établis par le règlement du 15 septembre 1989.

10 La liste des métiers figure dans le règlement du 19 février 1990, qui les classe conformément à une numérotation de cinq chiffres: le premier chiffre détermine le groupe professionnel; le groupe de chiffres formé par le deuxième et le troisième chiffre est réservé à la numérotation des différents métiers dans un groupe donné et à un classement selon la connexité technique des différents métiers du groupe; le groupe des chiffres formé par le quatrième et le cinquième chiffre distingue les métiers principaux, désignés par les...

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