Heintz van Landewijck SARL v Staatssecretaris van Financiën.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2006:110
Date16 February 2006
Celex Number62004CC0494
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-494/04

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. M. Poiares Maduro

présentées le 16 février 2006 (1)

Affaire C‑494/04

Heintz van Landewijck SARL

contre

Staatssecretaris van Financiën

[demande de décision préjudicielle formée par le Hoge Raad der Nederlanden (Pays‑Bas)]

«TVA – Produits soumis à accise – Disparition avant utilisation des vignettes fiscales ‘tabac’»





1. Par cette demande de décision préjudicielle, le Hoge Raad der Nederlanden (Pays‑Bas) pose à la Cour des questions concernant l’interprétation de la directive 92/12/CEE du Conseil, du 25 février 1992, relative au régime général, à la détention, à la circulation et aux contrôles des produits soumis à accise (2) et de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (3).

2. Cette affaire concerne l’imposition de produits du tabac qui sont soumis, d’une part, à la TVA et, d’autre part, à un droit d’accises – impôt qui a la réputation de fournir des revenus au trésor public et, paradoxalement, de dissuader les fumeurs de fumer.

3. Il s’agit, plus concrètement, dans cette affaire, de la question de savoir si une société qui commercialise des produits du tabac est en droit d’obtenir le remboursement ou la compensation de sommes qu’elle a versées pour acquérir des timbres fiscaux, qui représentent les montants dus au titre du droit d’accises et de la TVA, lorsque ces timbres disparaissent avant d’avoir été apposés sur ces produits.

I – Le cadre juridique, le litige au principal et les questions préjudicielles soumises à la Cour

A – Les dispositions pertinentes de droit communautaire

4. Aux termes de l’article 6 de la directive sur les accises, laquelle s’applique en vertu de son article 3, paragraphe 1, aux tabacs manufacturés:

«1. L’accise devient exigible lors de la mise à la consommation ou lors de la constatation des manquants qui devront être soumis à accise conformément à l’article 14, paragraphe 3.

Est considérée comme mise à la consommation de produits soumis à accise:

a) toute sortie, y compris irrégulière, d’un régime suspensif;

b) toute fabrication, y compris irrégulière, de ces produits hors d’un régime suspensif;

c) toute importation, y compris irrégulière, de ces produits lorsque ces produits ne sont pas mis sous un régime suspensif.

2. Les conditions d’exigibilité et le taux de l’accise à retenir sont ceux en vigueur à la date de l’exigibilité dans l’État membre où s’effectue la mise à la consommation ou la constatation des manquants. L’accise est perçue et recouvrée selon les modalités établies par chaque État membre, étant entendu que les États membres appliquent les mêmes modalités de perception et de recouvrement aux produits nationaux et aux produits en provenance des autres États membres.»

5. L’article 14, paragraphe 1, de la même directive dispose que:

«1. L’entrepositaire agréé bénéficie d’une franchise pour les pertes intervenues en régime suspensif, dues à des cas fortuits ou à des cas de force majeure et établies par les autorités de chaque État membre. Il bénéficie également, en régime suspensif, d’une franchise pour les pertes inhérentes à la nature des produits durant le processus de production et de transformation, le stockage et le transport. Chaque État membre fixe les conditions dans lesquelles ces franchises sont accordées. Ces franchises s’appliquent également aux opérateurs visés à l’article 16 lors du transport des produits en régime suspensif de droits d’accises».

6. L’article 21, paragraphe 1, de ladite directive prévoit que «sans préjudice de l’article 6, paragraphe 1, les États membres peuvent prévoir que les produits destinés à être mis à la consommation sur leur territoire sont munis de marques fiscales ou de marques nationales de reconnaissance utilisées à des fins fiscales.»

7. L’article 22, paragraphe 2, sous d), de la même directive prévoit que «les produits soumis à accise et mis à la consommation dans un État membre et à ce titre munis d’une marque fiscale ou d’une marque de reconnaissance de cet État membre peuvent faire l’objet d’un remboursement de l’accise due auprès des autorités fiscales de l’État membre qui a délivré ces marques fiscales ou de reconnaissance, pour autant que la destruction de ces marques soit constatée par les autorités fiscales de l’État membre qui les a délivrées».

8. Aux termes de l’article 10 de la directive 95/59/CE du Conseil, du 27 novembre 1995, concernant les impôts autres que les taxes sur le chiffre d’affaires frappant la consommation des tabacs manufacturés (4):

«1. Les modalités de perception de l’accise sont harmonisées au plus tard au stade final. Au cours des étapes précédentes, l’accise est perçue, en principe, au moyen de marques fiscales. S’ils perçoivent l’accise au moyen de marques fiscales, les États membres sont tenus de mettre ces marques à la disposition des fabricants et négociants des autres États membres. S’ils perçoivent l’accise par d’autres moyens, les États membres veillent à ce que, de ce fait, aucune entrave, ni administrative ni technique, n’affecte les échanges entre les États membres.

2. Les importateurs et les fabricants des tabacs manufacturés sont soumis au régime visé au paragraphe 1 en ce qui concerne les modalités de perception et de paiement de l’accise.»

9. L’article 2 de la sixième directive dispose que:

«Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée:

1. les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel;

2. les importations de biens.»

10. L’article 5, paragraphe 1, de la sixième directive dispose, en outre, qu’«est considéré comme ‘livraison d’un bien’ le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire».

11. L’article 10 de la même directive, dispose que:

«1. Sont considérés comme:

a) fait générateur de la taxe: le fait par lequel sont réalisées les conditions légales, nécessaires pour l’exigibilité de la taxe;

b) exigibilité de la taxe: le droit que le Trésor peut faire valoir aux termes de la loi, à partir d’un moment donné, auprès du redevable pour le paiement de la taxe, même si le paiement peut en être reporté.

2. Le fait générateur de la taxe intervient et la taxe devient exigible au moment où la livraison du bien ou la prestation de services est effectuée. […]

[…]»

12. Selon l’article 11 de la même directive, la base d’imposition est constituée, pour les livraisons de biens, par tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur pour ces opérations de la part de l’acheteur, du preneur ou d’un tiers. Ledit article, C, paragraphe 1, premier alinéa, prévoit que:

«En cas d’annulation, de résiliation, de résolution, de non‑paiement total ou partiel ou de réduction de prix après le moment où s’effectue l’opération, la base d’imposition est réduite à due concurrence dans les conditions déterminées par les États membres.»

13. De plus, l’article 27 de la sixième directive, concernant les «mesures de simplification» (5), dispose que:

«1. Le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, peut autoriser tout État membre à introduire des mesures particulières dérogatoires à la présente directive, afin de simplifier la perception de la taxe ou d’éviter certaines fraudes ou évasions fiscales. Les mesures destinées à simplifier la perception de la taxe ne peuvent influer, sauf de façon négligeable, sur le montant de la taxe due au stade de la consommation finale.

2. L’État membre qui souhaite introduire des mesures visées au paragraphe 1 en saisit la Commission et lui fournit toutes les données utiles d’appréciation.

[ ... ]

5. Les États membres qui appliquent, au 1er janvier 1977, des mesures particulières du type de celles visées au paragraphe 1 peuvent les maintenir, à la condition de les notifier à la Commission avant le 1er janvier 1978 et sous réserve qu’elles soient conformes, pour autant qu’il s’agisse de mesures destinées à simplifier la perception de la taxe, au critère défini au paragraphe 1.»

14. En vertu de l’article 1er de la neuvième directive 78/583/CEE du Conseil, du 26 juin 1978, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires (6), certains États membres ont été autorisés à mettre en application la sixième directive au plus tard le 1er janvier 1979.

B – La réglementation néerlandaise, les faits du litige au principal et les questions préjudicielles

15. Selon l’article 1er de la loi sur les accises (Wet op de accijns, du 31 octobre 1991, Staatsblad 1991, 561, ci‑après la «loi sur les accises»):

«1. Une taxe, appelée droit d’accises, est perçue sur:

[…]

f. les produits du tabac.

2. Le droit d’accises est dû à l’occasion de la mise à la consommation et de l’importation des biens visés au paragraphe 1.»

16. Aux termes de l’article 73, paragraphe 1 de la même loi «les produits du tabac doivent, au moment de la mise à la consommation et de l’importation, être pourvus du timbre d’accises prescrit pour le produit du tabac en question».

17. Selon l’article 76, paragraphes 1 et 2, de cette loi:

«1. Le montant des droits d’accises représenté par les timbres d’accises selon leur valeur faciale doit être acquitté au moment de la demande [de timbres].

2. Par dérogation au paragraphe 1, le paiement peut être différé, au plus tard, jusqu’au dernier jour du troisième mois suivant le mois au cours duquel les timbres d’accises ont été demandés, à condition qu’une garantie soit constituée à cet effet.»

18. La société Heintz van Landewijck SARL (ci‑après «van Landewijck») exploite au Luxembourg un commerce de gros de tabacs manufacturés pour lequel elle dispose d’une licence d’entrepositaire agréé.

19. Le 6 octobre 1998, van Landewijck a introduit...

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