Georgetown University v Octrooicentrum Nederland.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2013:745
Date14 November 2013
Celex Number62012CC0484
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC‑484/12
62012CC0484

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 14 novembre 2013 ( 1 )

Affaire C‑484/12

Georgetown University

contre

Octrooicentrum Nederland, agissant sous le nom NL Octrooicentrum,

[demande de décision préjudicielle formée par le Rechtbank ’s‑Gravenhage (Pays-Bas)]

«Médicaments à usage humain — Règlement (CE) no 469/2009 — Articles 3 et 14 — Certificat complémentaire de protection (CCP) — Renonciation à un certificat — Droit applicable et effets dans le temps — Choix entre plusieurs demandes d’octroi en cours»

I – Introduction

1.

Les présentes conclusions portent en substance sur l’incidence, aux fins de l’interprétation du règlement (CE) no 469/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 6 mai 2009, concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments ( 2 ) (ci-après le «règlement CCP»), de la jurisprudence de la Cour selon laquelle l’article 3, sous c), dudit règlement doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce que, lorsqu’un brevet de base en vigueur couvre plusieurs produits, un certificat complémentaire de protection pour les médicaments (ci-après «CCP») soit délivré au titulaire dudit brevet pour chaque produit protégé.

2.

Un CCP permet de prolonger la protection pour un produit qui est protégé par un brevet de base. Selon le règlement CCP et la jurisprudence de la Cour, un produit est soit un principe actif, soit une composition de principes actifs d’un médicament. L’objectif du système est de remédier aux inconvénients liés à la durée de la procédure d’autorisation de mise sur le marché, laquelle raccourcit la période de protection effective découlant du brevet. Toutefois, le système établi par le règlement CCP vise non pas la prolongation de la durée de vie du brevet de base en soi, mais seulement la protection d’un produit ( 3 ).

3.

Il convient de rappeler que le droit de brevet n’est pas harmonisé dans l’Union européenne. Pour cette raison, les CCP sont délivrés dans un contexte où la réglementation concernant les CCP a été uniformisée par le règlement CCP, mais leur fondement (les brevets) ne l’est pas, ce qui crée des problèmes. L’articulation entre le régime applicable aux CCP et le droit national fait l’objet de l’article 19 du règlement CCP.

4.

Le règlement CCP a déjà été interprété par la Cour notamment dans les arrêts du 24 novembre 2011, Medeva ( 4 ), ainsi que Georgetown University e.a. ( 5 ), ayant pour objet des demandes de décision préjudicielles déférées par deux juridictions britanniques ( 6 ).

5.

Dans la présente affaire, le Rechtbank ’s-Gravenhage (Pays‑Bas) pose cinq questions à titre préjudiciel, dont la première recoupe les questions préjudicielles traitées dans l’arrêt Medeva, précité. En effet, le présent renvoi est la conséquence directe de l’interprétation du règlement CCP donnée par la Cour à cette occasion et selon laquelle, lorsqu’un brevet protège un produit, conformément à l’article 3, sous c), dudit règlement, il ne saurait être délivré plus d’un CCP pour ce brevet de base ( 7 ).

6.

En ce qui concerne la présente affaire, Georgetown University cherche, par l’interprétation qu’elle propose à la juridiction de renvoi, à remédier à la situation dans laquelle le titulaire d’un brevet a obtenu un CCP pour un produit qui n’est pas celui qu’il souhaitait en fin de compte protéger, et alors que seul un CCP par brevet de base peut être délivré.

7.

Au vu de la jurisprudence de la Cour et des conclusions de l’avocat général Trstenjak dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts précités Medeva ainsi que Georgetown University e.a., la Cour est d’ores et déjà suffisamment éclairée pour répondre à ladite première question. Ainsi, dans la présente affaire, il y a lieu de conclure uniquement sur les deuxième à cinquième questions, qui sont inédites. En outre, il convient de noter que ces quatre dernières questions ont été posées par la juridiction de renvoi seulement au cas où la réponse à la première question serait affirmative, ce qui explique la prémisse présentée au point 1 des présentes conclusions.

8.

Les questions préjudicielles à traiter dans les présentes conclusions peuvent être regroupées. Elles portent, d’une part, sur le point de savoir si le titulaire d’un CCP qui a déjà été accordé peut renoncer à celui‑ci avec effet rétroactif (voir quatrième et cinquième questions posées par la juridiction de renvoi) et, d’autre part, sur certains aspects procéduraux propres à une situation dans laquelle plusieurs demandes d’octroi de CCP sont pendantes au même moment (voir deuxième et troisième questions posées par la juridiction de renvoi).

9.

En outre, je rappelle que deux autres affaires actuellement pendantes devant la Cour portent également sur l’interprétation du règlement CCP. Étant donné que les questions préjudicielles déférées par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (Royaume‑Uni), dans les affaires Actavis Group et Actavis UK (C‑443/12) ainsi que Eli Lilly and Company (C‑493/12) se chevauchent partiellement avec celles de la présente affaire, la Cour a organisé une audience commune pour les trois affaires le 12 septembre 2013, tout en étant précisé qu’elle a décidé de statuer sur les deux dernières affaires sans le bénéfice de conclusions.

II – Le cadre juridique

A – Le règlement CCP

10.

Selon l’article 3 du règlement CCP, le CCP est délivré, si, dans l’État membre où est présentée la demande et à la date de cette demande, le produit est protégé par un brevet de base en vigueur [sous a)] et le produit n’a pas déjà fait l’objet d’un CCP [sous c)].

11.

Selon l’article 14 du règlement CCP, le CCP s’éteint, entre autres, au terme de sa durée [sous a)], si le titulaire du CCP y renonce [sous b)] ou si la taxe annuelle fixée n’est pas acquittée dans les délais [sous c)].

12.

Le CCP est nul, en vertu de l’article 15, paragraphe 1, du règlement CCP, s’il a été délivré contrairement aux dispositions de l’article 3 [sous a)], si le brevet de base s’est éteint avant l’expiration de sa durée légale [sous b)], si «le brevet de base est annulé ou limité de telle sorte que le produit pour lequel le CCP a été délivré n’est plus protégé par les revendications du brevet de base ou si, après l’extinction du brevet de base, il existe des motifs de nullité qui auraient justifié l’annulation ou la limitation» [sous c)].

13.

L’article 19, paragraphe 1, du règlement CCP prévoit que, en l’absence de dispositions de procédure dans ce règlement, les dispositions de procédure applicables au brevet de base, en vertu de la législation nationale, s’appliquent à l’égard du CCP, à moins que la législation nationale ne fixe des dispositions de procédure spéciales relatives aux CCP.

B – La loi néerlandaise relative aux brevets de 1995

14.

En vue de répondre à la cinquième question préjudicielle, il est utile de reproduire l’article 63 de la loi néerlandaise relative aux brevets de 1995 (Nederlandse Rijksoctrooiwet 1995), lequel dispose comme suit:

«1. Un titulaire de brevet peut renoncer à son brevet en totalité ou en partie. Cette renonciation a un effet rétroactif en vertu de l’article 75, paragraphes 5 à 7.

[…]»

15.

L’article 75 de ladite loi énonce, pour sa part:

«[…]

5. Un brevet est réputé avoir été totalement ou partiellement dépourvu dès l’origine des effets juridiques visés aux articles 53, 53a, 71, 72 et 73, selon que le brevet est totalement ou partiellement annulé.

6. L’effet rétroactif de la nullité est sans incidence sur:

a.

une décision, qui n’est pas une mesure provisoire, relative à des actes contraires au droit exclusif du titulaire de brevet visé aux articles 53 et 53a, ou à des actes au sens des articles 71, 72 et 73, passée en force de chose jugée et mise en application avant l’annulation;

b.

un accord conclu avant l’annulation, pour autant qu’il ait été exécuté avant l’annulation; toutefois, la restitution de sommes versées en vertu dudit accord, dans la mesure où les circonstances le justifient, peut être réclamée pour des raisons d’équité.

7. Aux fins de l’application du paragraphe 6, point b), la conclusion d’un accord comprend également l’établissement d’une licence sous une des autres formes mentionnées à l’article 56, paragraphe 2, à l’article 59 ou à l’article 60.»

16.

Il convient de noter qu’il ne ressort pas de la demande de décision préjudicielle que la législation néerlandaise comporte des règles de procédure spéciales en matière de CCP.

III – Le litige au principal, les questions préjudicielles et la procédure devant la Cour

17.

Le 24 juin 1993, Georgetown University a introduit une demande de brevet européen intitulée «Vaccin contre le papillomavirus», enregistrée par l’Office européen des brevets, sous le numéro EP 0647140, pour une protéine de papillomavirus humain capable d’induire des anticorps neutralisants contre les virions de papillomavirus. Ce brevet a été délivré le 12 décembre 2007.

18.

S’appuyant sur des autorisations de mises sur le marché délivrées respectivement pour les médicaments Gardasil et Cervarix, Georgetown University a, le 14 décembre 2007, introduit auprès du NL Octrooicentrum sept demandes de CCP faisant référence au brevet EP 0647140. Deux CCP ont été délivrés le 15 janvier 2008, une demande portant la référence 300321 a été rejetée le 19 mai 2010 et quatre autres sont restées pendantes.

19.

Georgetown University a contesté ladite décision de refus de délivrance d’un CCP devant la juridiction de renvoi.

20.

À la suite des arrêts précités Medeva...

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