Federal Republic of Germany v European Parliament and Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2000:324
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-376/98
Date15 June 2000
Celex Number61998CC0376
Procedure TypeRecours en annulation - fondé
EUR-Lex - 61998C0376 - FR 61998C0376

Conclusions jointes de l'avocat général Fennelly présentées le 15 juin 2000. - République fédérale d'Allemagne contre Parlement européen et Conseil de l'Union européenne. - Directive 98/43/CE - Publicité et parrainage en faveur des produits du tabac - Base juridique - Article 100 A du traité CE (devenu, après modification, article 95 CE). - Affaire C-376/98. - The Queen contre Secretary of State for Health et autres, ex parte Imperial Tobacco Ltd et autres. - Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Crown Office) - Royaume-Uni. - Directive 98/43/CE - Publicité et parrainage en faveur des produits du tabac - Validité. - Affaire C-74/99.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-08419


Conclusions de l'avocat général

I - Introduction

1 Ces deux affaires mettent en cause la validité de la directive 98/43/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 juillet 1998, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière de publicité et de parrainage en faveur des produits du tabac (1) (ci-après la «directive» ou «directive sur la publicité»). Dans la première de ces deux affaires (ci-après l'«affaire Allemagne»), la République fédérale d'Allemagne a introduit un recours en annulation contre la directive sur la publicité, sur le fondement de l'article 173 du traité CE (devenu, après modification, article 230 CE). Dans la seconde affaire (ci-après l'«affaire Imperial Tobacco»), un certain nombre de fabricants de produits du tabac ont introduit une action au Royaume-Uni devant la High Court of Justice, Queen's Bench Division (Crown Office) (ci-après la «juridiction nationale ou le juge a quo»), visant notamment à voir dire et juger que l'intention ou l'obligation pour le Royaume-Uni de satisfaire aux exigences de la directive seraient illicites. La juridiction nationale a estimé que les sociétés demanderesses avaient soulevé des arguments susceptibles d'entraîner une décision d'annulation et a décidé de soumettre une question préjudicielle à la Cour de justice.

2 Comme l'a relevé le juge a quo, il existe des points communs importants (sans aller jusqu'à une coïncidence parfaite) entre la question qu'il pose et les moyens du recours introduit dans l'affaire Allemagne. Sa question définit avec concision les moyens invoqués par les demanderesses au principal: «la directive 98/43 du Conseil est-elle nulle, en tout ou en partie, en raison de:

a) l'inadéquation des articles 57, paragraphe 2, 66 et 100A comme base juridique;

b) l'atteinte à la liberté d'expression, qui est un droit fondamental;

c) la violation du principe de proportionnalité; d) la violation du principe de subsidiarité; e) la violation de l'obligation de motivation;

f) la violation de l'article 222 du traité CE et/ou l'atteinte au droit fondamental à la propriété?»

Dans l'affaire Allemagne, il est en outre soutenu que la directive sur la publicité est contraire à l'article 30 du traité CE (devenu, après modification, article 28 CE).

3 Le principal problème dans ces affaires est la question de la compétence ou de la base juridique. La mise en cause de la validité de la directive pour non-respect des principes de proportionnalité ou de subsidiarité, de l'obligation de motivation ou des droits fondamentaux n'appelle un examen qu'à titre subsidiaire, c'est-à-dire, uniquement dans le cas où la Cour parviendrait à la conclusion que la base juridique retenue par la directive était correcte.

4 La base juridique dont se réclame la directive sur la publicité est le marché intérieur. La compétence de la Communauté au regard du marché intérieur n'est limitée, a priori, par aucun domaine réservé aux États membres. Il s'agit d'une compétence horizontale, dont l'exercice se substitue à la compétence législative nationale dans le domaine en question. Le contrôle juridictionnel exercé sur la mise en oeuvre d'une telle compétence constitue une question délicate et complexe. D'un côté, un contrôle juridictionnel par trop restreint pourrait permettre aux institutions communautaires de jouir, en pratique, d'un pouvoir général ou illimité, contrairement au principe qui veut que la Communauté ne dispose que des compétences strictes, qu'elle qu'en soit l'étendue, qui lui ont été attribuées par le traité dans le but d'atteindre des objectifs précis. La Communauté pourrait ainsi empiéter illégalement sur les pouvoirs des États membres. D'un autre côté, la Cour ne doit pas empêcher le législateur communautaire d'accomplir comme il se doit sa mission d'élimination des entraves et distorsions aux échanges des produits et services. Il incombe à la Cour, en tant que dépositaire de la confiance des institutions communautaires, des États membres et des citoyens de l'Union, de s'acquitter de cette fonction difficile de maintien de la séparation constitutionnelle des pouvoirs respectifs de la Communauté et des États membres, sur la base de critères objectifs.

II - Le cadre législatif et historique

i) Les dispositions pertinentes du traité

5 La controverse portant sur la base juridique de la directive sur la publicité n'intéresse qu'un nombre limité de dispositions du traité. Il s'agit principalement des dispositions relatives au marché intérieur et à la libre prestation de services.

6 En vertu de la combinaison des articles 57, paragraphe 2, du traité CE (devenu, après modification, article 47, paragraphe 2, CE) et 66 du traité CE (devenu article 55 CE), le Conseil, conformément à la procédure prévue à l'article 189B du traité CE (devenu, après modification, article 251 CE, procédure généralement connue sous le nom de «procédure de co-décision») «arrête, ..., les directives visant à la coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant l'accès aux activités non salariées et l'exercice de celles-ci», y compris la libre prestation de services (2).

7 L'article 100A du traité CE est devenu, après modification, l'article 95 CE. Par dérogation à l'article 100 du traité CE (devenu article 94 CE), et sauf si le traité en dispose autrement, l'article 100A autorise le Conseil, statuant conformément à la procédure visée à l'article 189B et après consultation du Comité économique et social pour la réalisation des objectifs énoncés de l'article 7A du traité CE (devenu, après modification, article 14 CE) à «arrête[r] les mesures relatives au rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres qui ont pour objet l'établissement et le fonctionnement du marché intérieur».

8 L'article 100A, paragraphe 3, dispose que la Commission, «dans ses propositions prévues au paragraphe 1 en matière de santé, de sécurité, de protection de l'environnement et de protection du consommateur, prend pour base un niveau de protection élevé» (3). L'article 100A, paragraphe 4, autorise les États membres, après l'adoption d'une mesure d'harmonisation par le Conseil statuant à la majorité qualifiée, à appliquer des dispositions nationales justifiées, notamment, par des exigences importantes visées à l'article 36 du traité CE (devenu, après modification, article 30 CE), sous réserve de confirmation par la Commission et d'une procédure spéciale accélérée de saisine de la Cour de justice.

9 Les parties demanderesses ont particulièrement insisté sur l'article 129 du traité CE (devenu, après modification, article 152 CE). En son paragraphe 1, cet article énonce que «la Communauté contribue à assurer un niveau élevé de protection de la santé humaine en encourageant la coopération entre les États membres et, si nécessaire, en appuyant leur action» et que «les exigences en matière de protection de la santé sont une composante des autres politiques de la Communauté». L'article 129, paragraphe 4, prévoit que le Conseil contribue à la réalisation des objectifs visés dans cet article, en statuant conformément à la procédure de co-décision et après consultation du Comité économique et social et du Comité des régions, par l'adoption d'actions d'encouragement, à l'exclusion de toute harmonisation des dispositions législatives et réglementaires des États membres. Le Conseil peut également adopter des recommandations.

ii) Les autres réglementations

10 La référence à d'autres réglementations antérieures est nécessaire ici pour pouvoir apprécier la légalité de la directive sur la publicité. Avant l'adoption de la directive, la Communauté avait en effet déjà arrêté un certain nombre de dispositions législatives intéressant la commercialisation des produits du tabac, soit sur la base de l'article 100A du traité CE, soit sur celle de l'article 57, paragraphe 2, du traité lu en combinaison avec l'article 66. Le texte le plus important à cet égard est l'article 13 de la directive 89/552/CEE du Conseil, du 3 octobre 1989, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice de l'activité de radiodiffusion télévisuelle (4). Il suffira de rappeler ici que cet article interdit toute forme de publicité télévisée en faveur des cigarettes et des autres produits du tabac. L'article 2 bis, paragraphe 1, de cette même directive prévoit que, de façon générale, «les États membres assurent la liberté de réception et n'entravent pas la retransmission sur leur territoire d'émissions télévisées en provenance d'autres États membres pour des raisons qui relèvent des domaines coordonnés par la présente directive».

11 Quant à la directive 89/622/CEE du Conseil, du 13 novembre 1989, concernant le rapprochement des dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres en matière d'étiquetage des produits de tabac ainsi que d'interdiction de certains tabacs à usage oral (5), elle impose de faire figurer sur les...

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