Fédération Nationale du Commerce Extérieur des Produits Alimentaires and Syndicat National des Négociants et Transformateurs de Saumon v French Republic.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1991:371
Date03 October 1991
Celex Number61990CC0354
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-354/90
EUR-Lex - 61990C0354 - FR 61990C0354

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 3 octobre 1991. - Fédération nationale du commerce extérieur des produits alimentaires et Syndicat national des négociants et transformateurs de saumon contre République française. - Demande de décision préjudicielle: Conseil d'Etat - France. - Aide accordée par l'Etat - Interprétation de l'article 93, par. 3, dernière phrase du traité - Défense de mettre à exécution les mesures projetées. - Affaire C-354/90.

Recueil de jurisprudence 1991 page I-05505
édition spéciale suédoise page I-00463
édition spéciale finnoise page I-00495


Conclusions de l'avocat général

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Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1 . Cette affaire a pour arrière-plan la répugnance persistante de certains États membres à se conformer aux obligations que leur imposent les règles en matière d' aides d' État des articles 92 à 94 du traité CEE . Elle a été renvoyée à la Cour par le Conseil d' État français qui demande une décision préjudicielle sur les conséquences devant les juridictions nationales de l' introduction d' une aide d' État en violation des conditions de procédure prescrites par l' article 93 . En particulier, le Conseil d' État français voudrait savoir si "la dernière phrase de l' article 93, paragraphe 3, du traité ... doit être interprétée comme imposant aux autorités des États membres une obligation dont la méconnaissance affecte la validité des actes comportant mise à exécution de mesures d' aide, compte tenu notamment de l' intervention ultérieure d' une décision de la Commission déclarant ces mesures compatibles avec le marché commun ".

2 . Cette question s' est posée à l' occasion d' un recours déposé par la Fédération nationale du commerce extérieur des produits alimentaires et le Syndicat national des négociants et transformateurs de saumon ( ci-après dénommés ensemble "demandeurs ") tendant à l' annulation d' un arrêté interministériel du 15 avril 1985 . Cet arrêté ( ci-après "arrêté litigieux ") est entré en vigueur le jour de sa publication, à savoir le 20 avril 1985, et portait application du décret n 84-1297, du 31 décembre 1984, instituant des taxes parafiscales au profit du comité central des pêches maritimes, des comités locaux des pêches maritimes et de l' Institut français de recherche pour l' exploitation de la mer . Nous exposerons plus loin, pour autant qu' il soit nécessaire, le contexte dans lequel ces mesures ont été adoptées .

3 . Les demandeurs font valoir que l' arrêté litigieux a été introduit en violation de la dernière phrase de l' article 93, paragraphe 3, du traité . Avant d' examiner l' effet de cette disposition, il convient de décrire brièvement les règles du traité en matière d' aides et la procédure de mise en oeuvre de ces règles, dans la mesure où ces questions sont pertinentes aux fins de la procédure devant la juridiction nationale .

Les règles du traité en matière d' aides

4 . La règle de base est prévue à l' article 92, paragraphe 1, du traité, qui stipule : "Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d' État sous quelque forme que ce soit, qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions ." L' article 92, paragraphe 2, cite les catégories d' aides qui, nonobstant les dispositions de l' article 92, paragraphe 1, doivent être considérées comme étant compatibles avec le marché commun . L' article 92, paragraphe 3, énumère quatre autres types d' aides qui peuvent être considérés comme compatibles avec le marché commun .

5 . La principale responsable du respect de l' article 92 est la Commission . L' article 93, paragraphe 1, exige qu' elle "procède avec les États membres à l' examen permanent des régimes d' aides" existant dans les États membres . Aux termes de l' article 93, paragraphe 2, si après avoir mis les intéressés en demeure de présenter leurs observations, la Commission constate que cette aide n' est pas compatible avec le marché commun aux termes de l' article 92, elle décide que l' État intéressé doit la supprimer ou la modifier dans un délai déterminé . Si l' État en cause ne se conforme pas à cette décision de la Commission, cette dernière peut saisir directement la Cour .

6 . L' article 93, paragraphe 3, définit un régime s' appliquant aux projets tendant à instituer de nouvelles aides ou à en modifier d' anciennes . Il est ainsi libellé :

"La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides . Si elle estime qu' un projet n' est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l' article 92, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent . L' État membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale ."

7 . Dans l' affaire 120/73, Lorenz/Allemagne, point 3 ( Rec . 1973, p . 1471 ), la Cour a énoncé que :

"En déclarant que la Commission doit être informée des projets d' aides nouvelles ou de modification d' aides existantes 'en temps utile pour présenter ses observations' , les auteurs du traité ont entendu ménager à cette institution un délai de réflexion et d' investigation suffisant pour se former une première opinion sur la conformité, partielle ou totale, avec le traité, des projets qui lui ont été notifiés .

Ce n' est qu' après avoir été mise en mesure de se former cette opinion que la Commission est tenue, si elle estime le projet incompatible avec le marché commun, d' ouvrir, sans délai, la procédure contradictoire, prévue au paragraphe 2 de l' article 93, en mettant l' État membre en demeure de présenter ses observations ."

La Cour poursuivait en disant que s' il était nécessaire que la Commission dispose d' un délai suffisant pour se faire une première opinion sur la compatibilité avec le traité des projets lui ayant été notifiés, elle devait définir sa position dans un délai raisonnable, l' État membre concerné voulant peut-être agir de manière urgente . Par analogie avec les articles 173 et 175 du traité, la Cour a fixé ce délai à deux mois . Si, passé ce délai, la Commission ne s' est pas encore prononcée, l' État membre concerné peut mettre le projet à exécution à condition qu' il en soit donné préavis à la Commission . La Cour a ajouté que lorsqu' aux termes de l' examen préliminaire la Commission conclut que l' aide est compatible avec le traité, elle doit en informer l' État concerné, mais qu' elle n' est pas obligée à ce stade d' adopter une décision au sens de l' article 189 du traité . Celle-ci n' est requise qu' à la fin de la procédure contradictoire prévue à l' article 93, paragraphe 2 .

8 . L' arrêt de la Cour dans l' affaire Lorenz a été repris dans un certain nombre d' autres arrêts rendus le même jour : voir affaire 121/73, Markmann/Allemagne ( Rec . 1973, p . 1495 ); affaire 122/73, Nordsee/Allemagne ( Rec . 1973, p . 1511 ); affaire 141/73, Lohrey/Allemagne ( Rec . 1973, p . 1527 ). De nombreuses considérations exposées dans ces décisions ont été réaffirmées par la suite dans l' affaire 84/82, Allemagne/Commission ( Rec . 1984, p . 1451 ).

9 . Le rôle des juridictions nationales dans l' application du régime d' aides du...

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