Albert Merckx and Patrick Neuhuys v Ford Motors Company Belgium SA.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1995:227
Docket NumberC-171/94,C-172/94
Celex Number61994CC0171
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date06 July 1995
Conclusions
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. CARL OTTO LENZ
présentées le 6 juillet 1995 (1)



Affaires jointes C-171/94 et C-172/94

Albert Merckx
et
Patrick Neuhuys
contre
Ford Motors Company Belgium SA


(demandes de décision préjudicielle formées par la cour du travail de Bruxelles)

«Maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprises»






A ─ Introduction 1. MM. Merckx et Neuhuys étaient employés auprès de la société Anfo Motors SA (ci-après Anfo Motors) en qualité de vendeurs de véhicules automobiles. Depuis 1985, Anfo Motors était le concessionnaire de la SA Ford Motors Company Belgium (ci-après Ford) pour la vente de véhicules automobiles dans un certain secteur de l'agglomération bruxelloise. Ford était également l'actionnaire principal d'Anfo Motors. 2. Par courrier du 8 octobre 1987, Anfo Motors a informé MM. Merckx et Neuhuys de ce qu'elle cesserait toute activité à dater du 31 décembre 1987 et que, à partir du 1 er novembre 1987, Ford travaillerait, dans le secteur couvert jusqu'à présent par Anfo Motors (2) , avec un concessionnaire indépendant, la SA Novarobel (ci-après Novarobel).Dans ces lettres, Anfo Motors a en outre fourni les explications suivantes:Au cours de nos discussions, Novarobel a accepté de reprendre des fonctions bien déterminées. Les dispositions de la convention collective de travail 32 bis sont applicables aux travailleurs exerçant ces fonctions. Conformément à ces dispositions, ils seront par conséquent transférés à Novarobel à partir du 1 er novembre 1987.A partir de cette date, vous serez transféré avec maintien de votre fonction, de votre ancienneté et de tous les autres droits contractuels. 3. Ainsi qu'il ressort de l'ordonnance de renvoi, ladite convention collective 32 bis transpose en droit belge la directive 77/187/CEE du Conseil, du 14 février 1977, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements (3) (ci-après la directive). 4. Par lettres du 27 octobre 1987, MM. Merckx et Neuhuys ont fait savoir à Anfo Motors qu'ils refusaient leur transfert auprès de Novarobel. Ils faisaient valoir dans ces lettres qu'Anfo Motors ne pouvait pas leur imposer d'aller travailler dans une autre firme, à un autre endroit et dans des conditions de travail différentes, et sans la moindre garantie quant au maintien de la clientèle et la réalisation d'un chiffre de vente. Ils considéraient que la décision d'Anfo Motors était constitutive d'une rupture unilatérale du contrat de travail et demandaient le versement d'une indemnité de rupture, ainsi que d'autres montants. 5. Par lettres des 30 octobre et 2 novembre 1987, Anfo Motors a confirmé son point de vue selon lequel MM. Merckx et Neuhuys devraient poursuivre leur travail pour le compte de Novarobel à partir du 1 er novembre 1987, avec le maintien intégral de tous droits et avantages acquis auprès d'Anfo Motors. Elle précisait qu'elle garantissait le respect de ces obligations par Novarobel pour une durée de deux ans. Elle a indiqué, en outre, que les organisations syndicales avaient signé le 30 octobre 1987 une convention collective reconnaissant l'application de la convention collective 32 bis et dès lors la validité des transferts. 6. MM. Merckx et Neuhuys ont refusé de travailler pour le compte de Novarobel et ont saisi le tribunal du travail de Bruxelles afin d'obtenir notamment une indemnisation. Le recours était dirigé initialement contre Anfo Motors, et ensuite contre Ford qui en avait repris l'instance, Anfo Motors ayant été entre-temps mise en liquidation. Ce recours a été déclaré non fondé par jugement du 20 juillet 1990, contre lequel les requérants ont interjeté appel devant la cour du travail de Bruxelles. 7. La juridiction d'appel estime qu'une décision à titre préjudiciel de la Cour de justice est nécessaire pour rendre son jugement dans les litiges qui lui sont soumis. Dans son ordonnance de renvoi, la cour du travail de Bruxelles relève que, à partir du 15 octobre 1987, la concession de vente des voitures Ford dans le secteur en question a été confiée à Novarobel. Selon les constatations de la juridiction de renvoi, Anfo Motors a licencié plus des trois quarts de son personnel, n'ayant plus à son service à la fin du mois d'octobre que trois mécaniciens, un chef de vente-directeur, cinq vendeurs, un chef magasin, deux magasiniers, un employé planning et un employé livraison véhicule. Ces membres du personnel restant au service d'Anfo Motors (y compris MM. Merckx et Neuhuys) ont été priés de travailler pour le compte de Novarobel à partir du début du mois de novembre 1987. 8. La juridiction de renvoi fait, en outre, référence à une convention et garantie du 15 octobre 1987, conclue par Novarobel et Ford, que cette dernière aurait produite au dossier. Il y est exposé notamment que Ford a décidé d'arrêter les activités de sa filiale Anfo Motors ... et de confier la concession de vente exploitée par cette société à Novarobel avec effet au 15 octobre 1987; Novarobel est disposée à reprendre certaines fonctions exercées au sein d'Anfo Motors dans le cadre de la convention collective de travail 32 bis, moyennant des garanties de la part de Ford.... D'après les constatations faites par la juridiction de renvoi, c'est toutefois Anfo Motors elle-même qui a décidé de mettre fin à son activité. 9. La juridiction de renvoi n'aperçoit pas quels actifs Anfo Motors a pu transmettre à Novarobel. Elle indique qu'il n'est même pas acquis qu'Anfo Motors ait transmis son fichier clientèle. 10. La cour du travail de Bruxelles demande par conséquent à la Cour de justice de répondre dans chacun des présents cas d'espèce à la question préjudicielle suivante:Y a-t-il transfert d'entreprise au sens de la directive 77/187 du 14 février 1977 lorsqu'une entreprise ayant décidé de mettre fin à ses activités au 31 décembre 1987 licencie la plus grande part de son personnel, ne gardant que quatorze personnes sur un total supérieur à soixante, décide que ces quatorze personnes, dans le respect de leurs droits acquis, devront travailler à partir du 1 er novembre 1987 dans une entreprise avec laquelle aucune convention ne la lie mais qui bénéficie, depuis le 15 octobre 1987, de la concession de vente auparavant détenue par elle et alors aussi que la première société n'a transmis aucun élément de patrimoine à la seconde? B ─ Analyse 11. La juridiction de renvoi souhaite savoir s'il s'agit en l'espèce, compte tenu des circonstances décrites dans la question préjudicielle, d'un transfert d'entreprise au sens de la directive. Aux termes de l'article 1 er , paragraphe 1, de la directive, celle-ci est applicable aux transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements à un autre chef d'entreprise, résultant d'une cession conventionnelle ou d'une fusion. En vertu de l'article 3, paragraphe 1, de la directive, en pareil cas, les droits et obligations qui résultent pour le cédant d'un contrat de travail ou d'une relation de travail existant à la date du transfert sont transférés au cessionnaire. Il ressort de l'ordonnance de renvoi que l'applicabilité de la directive paraît douteuse au juge a quo, et ce principalement pour deux motifs. D'une part, la cour du travail de Bruxelles se demande si, en définitive, un transfert d'entreprise existe en l'espèce. D'autre part, la question se pose de savoir si un tel transfert a résulté d'une cession conventionnelle au sens de la directive. Transfert d'entreprise 12. Les appelants au principal estiment qu'il n'y a pas eu en l'espèce transfert d'entreprise, d'établissement ou de partie d'établissement. Un tel transfert impliquerait le maintien, du moins partiel, de la structure ou de l'organisation de l'entreprise concernée. Or, Anfo Motors a cessé ses activités et licencié la majeure partie de son personnel. Ce qui restait de l'entreprise a été liquidé. Il s'agissait donc non pas d'un transfert d'entreprise, mais d'une liquidation. Celle-ci a été opérée indépendamment du contrat de concession conclu entre Ford et Novarobel. Peu importe à cet égard que Novarobel mène les mêmes activités que celles déployées auparavant par Anfo Motors, puisque chaque concessionnaire Ford exerce à l'évidence une activité similaire. D'ailleurs, même le nom de la société Anfo Motors n'a pas été transféré au nouveau concessionnaire. 13. Toutes les autres parties qui sont intervenues devant la Cour de justice en l'espèce, à savoir Ford,...

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