Commission of the European Communities v Augusto Brazzelli Lualdi and others.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1993:829
CourtCourt of Justice (European Union)
Date05 October 1993
Docket NumberC-136/92
Procedure TypeRecurso de casación - inadmisible
Celex Number61992CC0136
EUR-Lex - 61992C0136 - FR 61992C0136

Conclusions de l'avocat général Lenz présentées le 5 octobre 1993. - Commission des Communautés européennes contre Augusto Brazzelli Lualdi et autres. - Pourvoi - Fonctionnaires - Rémunérations - Intérêts moratoires et compensatoires. - Affaire C-136/92 P.

Recueil de jurisprudence 1994 page I-01981


Conclusions de l'avocat général

++++

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

A Introduction

1. Dans la présente affaire, la Cour de justice est invitée à se prononcer sur un pourvoi introduit par la Commission contre un arrêt rendu par le Tribunal de première instance (ci-après : Tribunal), le 26 février 1992 (affaires jointes T-17/89, T-21/89 et T-25/89) (1) sur un recours introduit par 619 fonctionnaires affectés au Centre commun de recherche d' Ispra (ci-après : les fonctionnaires). La Cour doit en outre se prononcer sur un pourvoi incident que les fonctionnaires ont introduit avec leur mémoire en réponse.

2. Les fonctionnaires avaient fait valoir devant le Tribunal (2) certaines prétentions liées au fait que, selon eux, le règlement nº 3294/88 (3) qui a modifié le coefficient correcteur pour leur lieu d' affectation, dans le cadre de l' adaptation quinquennale pour la période de 1976 à 1980 (et partant, au 1er janvier 1981) avait été adopté tardivement. Ce règlement avait été adopté après que la Cour ait annulé (4), pour violation de l' article 64 du statut, l' adaptation à laquelle il avait été procédé par le règlement nº 3619/86 (5). Les fonctionnaires avaient conclu à ce qu' il plaise au Tribunal

a) condamner la Commission à la réparation du préjudice résultant de la perte de pouvoir d' achat qui a affecté les arriérés de rémunération qui leur ont été versés au titre du règlement nº 3294/88

b) ainsi qu' au paiement d' intérêts moratoires, à partir de la date d' échéance desdits arriérés et jusqu' à celle du versement effectif (6).

3. La Commission avait conclu au rejet du recours.

4. S' agissant de leur demande d' "intérêts moratoires" les fonctionnaires s' étaient fondés sur le retard injustifié avec lequel la Commission leur avait versé les arriérés de rémunération qu' elle leur devait. Ces arriérés étaient dûs en novembre 1981 et non pas en novembre 1988 (date à laquelle ils ont été versés).

5. Le Tribunal a rejeté cette demande au motif qu' il n' existait, dans le chef des requérants, aucun droit au versement d' arriérés de rémunération avant l' adoption du règlement nº 3294/88, du 24 octobre 1988 et que, dans ces conditions, il ne pouvait, jusqu' à cette date, y avoir de retard dans la liquidation d' une dette due (7). Selon le Tribunal, après l' adoption dudit règlement, la Commission s' est acquittée avec diligence de son obligation de paiement (8).

6. Le Tribunal a, par contre, admis la demande d' indemnisation du préjudice résultant de la perte du pouvoir d' achat.

7. Cette demande était fondée, d' une part, sur la violation des articles 64 et 65 du statut des fonctionnaires. Les fonctionnaires ont soutenu devant le Tribunal qu' en leur versant simplement la valeur nominale des arriérés de rémunération, la Commission avait violé ces articles. Cette valeur nominale ne suffirait pas, en effet, à assurer l' équivalence des rémunérations en termes de pouvoir d' achat. Au soutien de cette allégation, ils ont produit des données statistiques sur la dépréciation de la lire italienne entre janvier 1981 et novembre 1988 (9).

8. Par ailleurs, les fonctionnaires ont reproché à la Commission de n' avoir pas exécuté correctement l' arrêt de la Cour dans l' affaire 7/87, en ne compensant pas la perte du pouvoir d' achat susmentionné, bien que la Cour ait insisté sur la nécessité d' une application rétroactive (à la date déjà mentionnée du 1er janvier 1981 (10)) du nouveau coefficient correcteur (11).

9. Selon le Tribunal, cette réglementation aurait dû être adoptée dès le 1er janvier 1984, conformément au règlement nº 3294/88 (12). Le fait qu' un règlement valable n' ait été adopté qu' en octobre 1988 serait contraire au principe général, selon lequel les décisions dans ce domaine doivent être prises sans retard injustifié (13) et par conséquent, constitutif d' une faute (14). Le Conseil disposait, en effet, dès 1986 de tous les éléments nécessaires pour adopter un règlement conforme aux exigences du statut (15). Le Tribunal a considéré que même si le Conseil avait adopté un tel règlement dès 1986, la procédure qui avait mené aux différentes propositions de la Commission au Conseil aurait déjà été excessivement longue (16).

10. S' agissant du préjudice subi par les fonctionnaires, il est indiqué dans l' arrêt litigieux (point 40 des motifs)

Le Tribunal tient pour établi que, du fait de ce retard fautif, les requérants ont subi un préjudice constitué par la perte du pouvoir d' achat des arriérés de rémunération qui auraient dû être liquidés au cours du premier trimestre de 1984 et qui ne l' ont été que plusieurs années plus tard. Dans ce contexte, il y a lieu de remarquer qu' il serait impossible, sauf circonstances particulières, d' établir comment les requérants auraient dépensé les arriérés de rémunération qui leur étaient dûs si ceux-ci leur avaient été versés en temps utile. Toutefois, il ne s' agit pas, dans les présentes affaires, de rechercher la preuve de pertes individuelles, mais de vérifier l' existence de faits qui sont objectivement démontrables sur la base de données précises et rendues publiques. En produisant des statistiques pertinentes, qui n' ont pas été contestées par la partie défenderesse, les requérants ont ainsi rapporté à suffisance de droit la preuve de la détérioration du pouvoir d' achat qui a affecté leurs arriérés de rémunération pendant la période en cause.

11. Le Tribunal a par conséquent condamné la Commission à verser aux requérants des intérêts compensatoires en réparation du préjudice qu' ils ont subi, lors de la liquidation de leurs arriérés de rémunération, en raison de la perte de pouvoir d' achat qui a affecté ces derniers entre le 1er janvier 1984 et novembre 1988. Selon le dispositif de l' arrêt, le montant des intérêts compensatoires devra être calculé sur la base des statistiques officielles de la Communauté relatives à l' évolution du pouvoir d' achat dans les différents Etats membres et être fixé d' un commun accord entre les parties.

12. Le pourvoi introduit contre cet arrêt par la Commission se fonde sur trois moyens.

13. Dans un premier moyen, la Commission fait valoir que le Tribunal a fait une interprétation erronée du droit communautaire en ce qui concerne "les intérêts moratoires" et les "intérêts compensatoires" accordés dans la présente affaire aux requérants comme compensation pour la dépréciation monétaire. Dans un second moyen, elle critique en premier lieu la motivation de l' arrêt sur le point précité, en alléguant qu' elle est insuffisante et contradictoire (première branche). Selon la Commission, la motivation de l' arrêt est en outre critiquable, au motif que le Tribunal omet de prendre en considération le fait que la créance principale était déjà déterminable en 1986 (deuxième branche) et qu' il lui impute la responsabilité du comportement d' une autre institution (du Conseil). Sur ce dernier point, le Tribunal aurait appliqué le droit communautaire d' une manière inexacte (troisième branche). Par son troisième moyen, la Commission critique les considérations figurant au point 40 précité de l' arrêt litigieux et reproche au Tribunal d' "avoir interprété et appliqué de manière erronée le droit communautaire, en ce qui concerne la preuve du préjudice" subi qui est "nécessaire pour le versement d' intérêts compensatoires".

14. La Commission conclut à ce qu' il plaise à la Cour :

- annuler l' arrêt rendu par le Tribunal de première instance des Communautés européennes dans les affaires jointes T-17, T-21 et T-25/89, dans la mesure où il condamne la Commission "à verser aux requérants des intérêts compensatoires en réparation du préjudice qu' ils ont subi, lors de la liquidation de leurs arriérés de rémunération, en raison de la perte du pouvoir d' achat qui a affectée ces derniers entre le 1er janvier 1984 et novembre 1988";

- accueillir les conclusions formulées par la Commission devant le Tribunal de première instance et rejeter les demandes de la partie adverse;

- statuer sur les dépens.

Les fonctionnaires concluent à ce qu' il plaise à la Cour :

- à titre principal

a) déclarer irrecevable le pourvoi introduit par la Commission contre l' arrêt du 26 février 1992 du Tribunal de première instance des Communautés européennes dans les affaires T-17/89, T-21/89 et T-25/89;

b) condamner la Commission au remboursement des dépens et des honoraires de la présente affaire;

- à titre subsidiaire, si elle décide de statuer en tout ou en partie sur le fond du pourvoi;

a) rejeter, comme non fondé, le pourvoi tel qu' il a été formé ci-dessus par la Commission;

b) admettre intégralement, en réformant l' arrêt du Tribunal, les demandes initiales des parties requérantes en première instance;

c) condamner la Commission au remboursement complet des dépens et des honoraires des deux procédures.

15. La Commission considère le pourvoi incident (point b) des conclusions des fonctionnaires) comme tardif et partant, irrecevable, eu égard à l' article 49 du statut de la Cour de justice.

16. Les parties ont renoncé à la procédure orale.

17. Nous reviendrons si nécessaire dans le cadre des présentes conclusions sur d' autres détails de fait et de droit ainsi que sur certains arguments des parties. Pour le reste, nous renvoyons au rapport du juge rapporteur.

B Analyse

Le pourvoi de la Commission

18. Les moyens exposés ci-dessus (17) se fondent sur deux séries de critiques. La première vise les différents types d' intérêts envisagés par le Tribunal ("intérêts moratoires" et "intérêts compensatoires") ainsi que les critères retenus pour la...

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