The heirs of H. Barbier v Inspecteur van de Belastingdienst Particulieren/Ondernemingen buitenland te Heerlen.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2002:763
Docket NumberC-364/01
Celex Number62001CC0364
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date12 December 2002
EUR-Lex - 62001C0364 - FR 62001C0364

Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 12 décembre 2002. - Héritiers de M. H. Barbier contre Inspecteur van de Belastingdienst Particulieren/Ondernemingen buitenland te Heerlen. - Demande de décision préjudicielle: Gerechtshof 's-Hertogenbosch - Pays-Bas. - Interprétation des articles 48 et 52 du traité CEE (devenus articles 48 et 52 du traité CE, eux-mêmes devenus, après modification, articles 39 CE et 43 CE), 67 du traité CEE (devenu article 67 du traité CE, abrogé par le traité d'Amsterdam), 6 et 8 A du traité CE (devenus, après modification, articles 12 CE et 18 CE) - Directives 88/361/CEE et 90/364/CEE - Impôt sur les successions - Nécessité d'une activité économique transfrontalière - Non-discrimination en fonction de l'État membre de résidence. - Affaire C-364/01.

Recueil de jurisprudence 2003 page 00000


Conclusions de l'avocat général

1 Le Gerechtshof te 's-Hertogenbosch (Pays-Bas) a posé à la Cour cinq questions préjudicielles relatives à l'imposition de la succession d'un de cujus non-résident.

I - Le cadre juridique

A - Le droit communautaire

2 Les faits en l'espèce se sont déroulés avant l'entrée en vigueur du traité de Maastricht. Les dispositions communautaires applicables relèvent donc du traité CEE. Plus particulièrement, s'agissant de la libre circulation des personnes, sont invoqués les articles 48 et 52 du traité CEE (devenus articles 48 et 52 du traité CE, eux-mêmes devenus, après modification, articles 39 CE et 43 CE) et la directive 90/364/CEE du Conseil, du 28 juin 1990, relative au droit de séjour (1). S'agissant de la libre circulation des capitaux, est pertinent l'article 67 du traité CEE (devenu article 67 du traité CE, abrogé par le traité d'Amsterdam), tel que mis en oeuvre par la directive 88/361/CEE du Conseil, du 24 juin 1988, pour la mise en oeuvre de l'article 67 du traité (2).

3 Il est également fait état des articles 6 et 8 A du traité CE (devenus, après modification, articles 12 CE et 18 CE).

B - La législation nationale

4 Les éléments suivants ressortent du dossier.

5 En droit néerlandais, toute succession fait l'objet d'un impôt. L'article 1er, paragraphe 1, de la Successiewet 1956 (loi sur les successions de 1956 (3)) fait une distinction selon que le défunt résidait aux Pays-Bas ou à l'étranger:

1))S'il résidait aux Pays-Bas, les biens qu'il laisse font l'objet de droits de succession sur la valeur de l'ensemble des biens transmis.

2))S'il ne résidait pas aux Pays-Bas, un droit de mutation sur la valeur des «possessions intérieures» est perçu (ce qui, pour autant qu'il importe en l'espèce, comprend les biens immobiliers sis aux Pays-Bas), éventuellement après déduction des dettes.

6 Toutefois, en vertu de l'article 13 de la Wet op de vermogensbelasting 1964 (loi relative à l'impôt sur le patrimoine de 1964 (4)), tel qu'interprété par les juridictions néerlandaises, lors de l'évaluation de la succession d'un défunt non-résident, il n'est pas possible de déduire, aux fins du calcul de l'assiette de l'impôt, les dettes autres que celles garanties par une hypothèque sur un bien immobilier sis aux Pays-Bas. Plus particulièrement, cette disposition s'applique lorsque le défunt avait cédé, avant son décès, l'intérêt économique afférent à ce bien, par une convention d'achat/vente, à une autre personne juridique. Contrairement à l'héritier d'un défunt résident, celui d'un défunt non-résident doit déclarer la pleine valeur de ce bien immobilier nonobstant le fait qu'un tiers est le titulaire de sa propriété économique.

II - Faits et procédure

7 M. Barbier, ressortissant néerlandais né en 1941, est décédé le 24 août 1993 en Belgique, son dernier lieu de résidence. Ses héritiers sont son épouse et son fils unique (ci-après, conjointement, les «héritiers»).

8 M. Barbier avait acquis au cours de la période allant de 1970 à 1988, lorsqu'il résidait en Belgique, certains biens immobiliers sis aux Pays-Bas dont il percevait des loyers. La majorité de ces biens immobiliers était affectée à des fins commerciales en tant que magasins, entrepôts ou débits de boissons.

9 En 1988, M. Barbier avait passé une série d'opérations de vente par lesquelles il avait cédé la majorité de ses biens immobiliers à des sociétés privées néerlandaises qu'il contrôlait.

10 Lors de l'aliénation des immeubles sis aux Pays-Bas, la transcription dans les registres ad hoc avait été évitée en n'aliénant que la propriété dite «économique» des immeubles, ce qui avait permis d'échapper aux droits d'enregistrement de 6 %. M. Barbier avait assumé l'obligation de délivrer les biens vendus (c'est-à-dire, le droit réel) et, par anticipation de cette délivrance, il renonçait à tout droit en la matière. Cette obligation ne faisait toutefois pas l'objet d'une hypothèque.

11 Après le décès de M. Barbier, son notaire a déclaré, aux fins du droit de mutation, la valeur de trois autres immeubles détenus en pleine propriété, diminuée des dettes hypothécaires contractées en vue de leur acquisition. La valeur des biens immobiliers dont la propriété économique avait été cédée aux sociétés privées n'était pas incluse dans cette déclaration.

12 Toutefois, le chef de l'unité Particulieren/Ondernemingen buitenland du Rijksbelastingdienst (ci-après le «contrôleur») a ajouté à la succession déclarée la valeur de l'ensemble des immeubles dont M. Barbier détenait la propriété juridique. Ce faisant, il n'a pris en compte aucune déduction correspondant à l'obligation de délivrance.

13 Les héritiers ont interjeté appel de la décision du contrôleur devant le Gerechtshof te 's-Hertogenbosch, en demandant que l'impôt soit ramené à zéro en raison du fait que le contrôleur avait refusé la déduction correspondant à l'obligation de délivrance. Le Gerechtshof te 's-Hertogenbosch a posé à la Cour les cinq questions préjudicielles suivantes :

«1))L'accès au droit communautaire est-il actuellement encore conditionné par l'existence d'une activité économique transfrontalière?

2))Le droit communautaire fait-il obstacle à ce qu'un État membre (l'État de situation) prélève, en cas d'acquisition par succession d'un bien immobilier se trouvant dans l'État de situation, un impôt sur la valeur de ce bien immobilier en autorisant la déduction de la valeur de l'obligation de délivrance dudit bien immobilier si le de cujus résidait, à l'époque de son décès, dans l'État de situation, mais non pas s'il résidait à ladite époque dans un autre État membre (l'État de résidence)?

3))La question de savoir si, à l'époque où il a acquis ce bien immobilier, le de cujus n'habitait plus dans l'État de situation a-t-elle une incidence sur la réponse à la deuxième question?

4))La répartition du capital du de cujus entre l'État de situation, l'État de résidence et d'éventuels autres pays a-t-elle une incidence pour répondre à la deuxième question?

5))Dans l'affirmative, dans quel État faut-il considérer que le capital est investi dans le cas d'une créance en compte courant contre une société privée du type visé au point 2.4?»

III - Analyse

A - Quant à la première question

14 La juridiction de renvoi observe que diverses questions de droit communautaire se posent à elle. À supposer que l'existence ou non d'une activité économique transfrontalière ait encore une incidence, compte tenu de l'adoption de la directive sur le droit de séjour(5) et des dispositions du traité de Maastricht relatives à la citoyenneté européenne, il se poserait la question de déterminer laquelle des libertés fondamentales serait affectée en l'espèce.

15 À cet égard, selon la juridiction de renvoi, on ne saurait dire que la libre circulation des personnes serait en cause, puisque ni le de cujus ni ses héritiers n'étaient entravés dans leur choix personnel de résidence ou d'établissement. En effet, ils habitaient déjà en Belgique lorsque le de cujus avait acheté le premier des immeubles.

16 En revanche, le Gerechtshof estime être en présence d'une circulation transfrontalière de capitaux à partir de 1970, date du déménagement du de cujus des Pays-Bas vers la Belgique. En effet, celui-ci avait, dès lors, acheté depuis la Belgique des biens immobiliers situés aux Pays-Bas.

17 Le gouvernement néerlandais affirme, toutefois, que la première question est dénuée de pertinence. Il rappelle, à cet égard, que l'article 18 CE n'est pas applicable ratione temporis et que la directive 90/364 vise, entre autres, à harmoniser les dispositions nationales relatives au séjour des ressortissants des États membres dans un État membre autre que le leur. Or, en l'espèce, les dispositions de la SW de 1956 en cause au principal n'ont aucun rapport avec les conditions d'accès et de séjour sur le territoire d'un autre État membre et n'ont aucunement restreint ou entravé le droit de la famille Barbier de s'établir ailleurs qu'aux Pays-Bas.

18 Quant aux dispositions relatives à la libre circulation des capitaux, elles ne seraient pas applicables non plus. En effet, il n'y aurait pas, en l'espèce, d'activité économique transfrontalière qui serait entravée par le droit fiscal néerlandais. Ainsi, l'achat des biens immobiliers aux Pays-Bas par le de cujus qui résidait en Belgique n'aurait fait l'objet d'aucune entrave et il en irait de même du transfert de la propriété économique, aux fins duquel le de cujus aurait été traité de la même...

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