Knauf Gips KG v European Commission.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2010:70
CourtCourt of Justice (European Union)
Date11 February 2010
Docket NumberC-407/08
Procedure TypeRecurso de casación - infundado
Celex Number62008CC0407

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÁN Mazák

présentées le 11 février 2010 (1)

Affaire C‑407/08 P

Knauf Gips KG, anciennement Gebr. Knauf Westdeutsche Gipswerke KG

contre

Commission européenne

«Pourvoi – Concurrence – Entente – Marché des plaques en plâtre – Violation de l’article 81 CE – Procédure administrative – Violation des droits de la défense – Accès au dossier – Refus de communiquer les éléments de preuve à charge – Refus de communiquer les éléments de preuve à décharge – Accords et pratiques concertées constituant une infraction unique – Violation du plafond de 10 % de l’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 – Unité économique»





I – Introduction

1. Par son pourvoi, Knauf Gips KG, anciennement Gebrüder Knauf Westdeutsche Gipswerke KG (ci-après «Knauf Gips» ou la «requérante»), demande à la Cour, notamment, d’annuler l’arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes (troisième chambre) rendu le 8 juillet 2008 dans l’affaire T-52/03 (2) (ci-après l’«arrêt attaqué») dans son intégralité. À titre subsidiaire, la requérante demande à la Cour de renvoyer l’affaire devant le Tribunal en vue d’un nouvel examen par celui-ci, et, à titre plus subsidiaire encore, de réduire d’un montant qui ne soit, en tout état de cause, pas inférieur à 54,51 millions d’euros l’amende qui lui a été infligée.

II – Cadre juridique

2. L’article 15, paragraphe 2, du règlement n° 17 du Conseil, du 6 février 1962, premier règlement d’application des articles [81] et [82] du traité (3), dispose:

«La Commission peut, par voie de décision, infliger aux entreprises et associations d’entreprises des amendes de mille unités de compte au moins et d’un million d’unités de compte au plus, ce dernier montant pouvant être porté à dix pour cent du chiffre d’affaires réalisé au cours de l’exercice social précédent par chacune des entreprises ayant participé à l’infraction, lorsque, de propos délibéré ou par négligence:

a) elles commettent une infraction aux dispositions de l’article [81], paragraphe 1, ou de l’article [82] du traité […]»

III – Contexte du pourvoi

A – La décision attaquée

3. Le 27 novembre 2002, la Commission des Communautés européennes a adopté la décision 2005/471/CE, relative à une procédure d’application de l’article 81 du traité CE à l’encontre de BPB PLC, Gebrüder Knauf Westdeutsche Gipswerke KG, Société Lafarge SA et Gyproc Benelux NV (affaire COMP/E‑1/37.152 – plaques en plâtre) (ci-après la «décision attaquée»), par laquelle elle a constaté que BPB plc (ci-après «BPB»), le groupe Knauf, la Société Lafarge SA (ci-après «Lafarge») et Gyproc Benelux NV (ci-après «Gyproc») avaient enfreint l’article 81, paragraphe 1, CE en ayant participé à un ensemble d’accords et de pratiques concertées dans le secteur des plaques en plâtre (4). La Commission a estimé que BPB, Knauf (5), Lafarge et Gyproc avaient conclu un accord complexe et continu, contraire à l’article 81, paragraphe 1, CE, et participé de manière ininterrompue audit accord, lequel s’était manifesté par les comportements suivants, constitutifs d’accords ou de pratiques concertées:

– les représentants de BPB et de Knauf se sont rencontrés à Londres en 1992 et ont exprimé la volonté commune de stabiliser les marchés en Allemagne (ci-après le «marché allemand»), au Royaume-Uni (ci-après le «marché du Royaume-Uni»), en France (ci-après le «marché français»), ainsi qu’en Belgique, aux Pays-Bas et au Luxembourg (ci-après le «marché Benelux»);

– les représentants de BPB et de Knauf ont mis en place, à partir de 1992, des systèmes d’échange d’informations, auxquels Lafarge et ensuite Gyproc ont adhéré, portant sur leurs volumes de vente sur les marchés allemand, du Royaume-Uni, français et du Benelux;

– les représentants de BPB, de Knauf et de Lafarge se sont, à diverses reprises, informés réciproquement à l’avance des hausses de prix sur le marché du Royaume-Uni;

– faisant face à des développements particuliers sur le marché allemand, les représentants de BPB, de Knauf, de Lafarge et de Gyproc se sont rencontrés à Versailles en 1996, à Bruxelles en 1997 et à La Haye en 1998, en vue de se répartir ou, tout au moins, de stabiliser le marché allemand;

– les représentants de BPB, de Knauf, de Lafarge et de Gyproc se sont informés réciproquement à diverses reprises et se sont concertés sur l’application de hausses des prix sur le marché allemand entre 1996 et 1998 (6).

4. Selon l’article 1er de la décision attaquée, l’infraction a eu la durée suivante:

– «BPB PLC: du 31 mars 1992, au plus tard, au 25 novembre 1998;

– Knauf: du 31 mars 1992, au plus tard, au 25 novembre 1998;

– Société Lafarge SA: du 31 août 1992, au plus tard, au 25 novembre 1998;

– Gyproc Benelux NV: du 6 juin 1996, au plus tard, au 25 novembre 1998.»

5. La Commission a considéré que, eu égard à la nature des comportements en cause, aux effets concrets qu’ils ont eus sur le marché des plaques en plâtre, qui était hautement concentré et, par nature, oligopolistique, et au fait qu’ils s’étendaient aux quatre principaux marchés au sein de la Communauté européenne, les destinataires de la décision attaquée avaient gravement enfreint les dispositions de l’article 81, paragraphe 1, CE. La Commission a infligé les amendes suivantes aux entreprises indiquées ci-après:

– BPB: 138,6 millions d’euros,

– Gebrüder Knauf Westdeutsche Gipswerke KG: 85,8 millions d’euros,

– Lafarge: 249,6 millions d’euros,

– Gyproc: 4,32 millions d’euros (7).

6. S’agissant de l’amende infligée à la requérante, la Commission déclare, aux points 495 à 499 des motifs de la décision attaquée, que:

«(495) Il est constant que [le groupe] Knauf a activement participé à tous les comportements anticoncurrentiels décrits dans la présente décision et que les dirigeants au plus haut niveau du groupe Knauf, MM. [B] et [C], ont été personnellement impliqués dans ces comportements.

(496) La décision est adressée à Knauf Westdeutsche Gipswerke, compte tenu de la structure particulière du groupe Knauf. En effet, la Commission n’est pas en mesure d’identifier une personne morale qui dirige le groupe de sociétés constituant l’entreprise. Dès lors, il n’y a pas une personne juridique qui, à sa tête, aurait pu, en tant que responsable de la coordination de l’action du groupe, se voir imputer les infractions commises par les diverses sociétés la composant.

(497) Or, Knauf Westdeutsche Gipswerke, dont MM. [B] et [C] sont les associés indéfiniment responsables, est la société la plus représentative de cette entreprise. En particulier, en ce qui concerne Gebrüder Knauf Verwaltungsgesellschaft KG, dont la fonction est d’administrer d’autres sociétés du groupe Knauf, il faut noter que celle-ci dépend de Knauf Westdeutsche Gipswerke tant pour ses locaux que pour son personnel, au moins en partie.

(498) Dans ces conditions, et afin d’éviter que des questions purement formelles ne puissent s’opposer à la constatation du comportement sur le marché des plaques en plâtre [du groupe] Knauf aux fins de l’application des règles de concurrence, la Commission estime que Knauf Westdeutsche Gipswerke doit être tenue pour responsable de l’ensemble des agissements [du groupe] Knauf. Par ailleurs, Knauf Westdeutsche Gipswerke ne s’est pas opposée au fait que la Commission lui ait envoyé les griefs, qui pourtant établissait que la Commission entendait la tenir pour responsable de l’ensemble des comportements [du groupe] Knauf.

(499) La Commission considère qu’en vue de l’éventuelle imposition d’une amende […] le chiffre d’affaires à retenir aux fins de la présente décision est celui de l’‘entreprise’ au sens de l’article 81, paragraphe 1, [CE], c’est-à-dire en l’occurrence le chiffre d’affaires mondial réalisé par l’ensemble des sociétés du groupe Knauf, tel que communiqué par Knauf à la Commission» (8).

7. Avant cela, aux points 38 et 39 des motifs de la décision attaquée, la Commission avait également relevé:

«(38) Fondée en 1932 et ayant son siège à Iphofen en Bavière (Allemagne) où elle possède une importante usine, Knauf comprend désormais un ensemble de sociétés non cotées en bourse qui sont toujours détenues par […] [un certain nombre d’] associés appartenant à la famille Knauf. La société se présente volontiers comme l’entreprise familiale Knauf Westdeutsche Gipswerke: ‘L’entreprise Gebr. Knauf Westdeutsche Gipswerke, sise à Iphofen, fondée en 1932 est, à présent, non seulement l’un des principaux producteurs européens de matériaux de construction, mais aussi un groupe qui opère dans le monde entier et dont les activités ne se limitent pas à la production de matériaux à base de gypse. En dépit de son évolution croissante, Knauf demeure une entreprise familiale, détenue par les familles Alfons et Karl Knauf […]’.

(39) Knauf Westdeutsche Gipswerke est en réalité la plus ancienne des sociétés du groupe Knauf et emploie bon nombre (plus de 1 000) des travailleurs du groupe; elle est désormais une société en commandite dont les deux dirigeants au plus haut niveau sont MM. [B] et [C] […]. La société travaille en union spatiale et personnelle avec une autre société, Gebrüder Knauf Verwaltungsgesellschaft KG, qui est également une société en commandite dont les deux dirigeants au plus haut niveau sont également MM. [B] et [C], et dont la fonction est d’administrer d’autres sociétés du groupe Knauf. Il convient aussi de relever que, outre le fait d’avoir les mêmes organes dirigeants, les deux sociétés en commandite présentent exactement la même structure de détention des parts (les mêmes personnes détenant exactement un nombre de parts identique dans le capital de la société). Gebrüder Knauf Verwaltungsgesellschaft KG n’emploie qu’un nombre très restreint de travailleurs, également sur le site d’Iphofen.»

B – La procédure devant le Tribunal

8. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 13 février 2003 et inscrite sous le numéro d’affaire T-52/03, Knauf Gips a demandé l’annulation de la...

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