Phil Collins v Imtrat Handelsgesellschaft mbH and Patricia Im- und Export Verwaltungsgesellschaft mbH and Leif Emanuel Kraul v EMI Electrola GmbH.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1993:276
Docket NumberC-92/92,C-326/92
Celex Number61992CC0092
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date30 June 1993
EUR-Lex - 61992C0092 - FR 61992C0092

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 30 juin 1993. - Phil Collins contre Imtrat Handelsgesellschaft mbH et Patricia Im- und Export Verwaltungsgesellschaft mbH et Leif Emanuel Kraul contre EMI Electrola GmbH. - Demandes de décision préjudicielle: Landgericht München I et Bundesgerichtshof - Allemagne. - Article 7 du traité - Droit d'auteur et droits voisins. - Affaires jointes C-92/92 et C-326/92.

Recueil de jurisprudence 1993 page I-05145
édition spéciale suédoise page I-00351
édition spéciale finnoise page I-00385


Conclusions de l'avocat général

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Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1. Deux juridictions allemandes ont demandé à la Cour de se prononcer à titre préjuciel sur les questions de savoir si le droit d' auteur et les droits voisins relèvent du traité CEE et si un État membre qui permet à ses propres ressortissants de s' opposer à la reproduction non autorisée de leurs représentations musicales doit accorder une protection identique aux ressortissants d' autres États membres, conformément à l' interdiction de discrimination en raison de la nationalité prévue par l' article 7 du traité.

Affaire C-92/92

2. Le demandeur dans l' affaire C-92/92 est Phil Collins, un chanteur et compositeur de nationalité britannique. La défenderesse - Imtrat Handelsgesellschaft mbH (ci-après "Imtrat") - est une productrice de phonogrammes (1). En 1983, M. Collins a donné en Californie un concert qui a été enregistré sans son consentement. Des reproductions de l' enregistrement ont été vendues en Allemagne par Imtrat sur disque compact sous le titre "Live and Alive". M. Collins a saisi le Landgericht Muenchen I d' une demande tendant à faire interdire à Imtrat la commercialisation de ces enregistrements en Allemagne et à la mise sous séquestre des copies en sa possession.

3. Il semble que si M. Collins était allemand son recours aurait sans aucun doute été accueilli. L' article 75 de la Gesetz ueber Urheberrecht und verwandte Schutzrechte (loi relative au droit d' auteur et aux droits dérivés, ci-après "Urheberrechtsgesetz", BGBl 1965 I, p. 1273) prévoit que la prestation de l' artiste exécutant ne peut être enregistrée qu' avec son accord. L' article 125, paragraphe 1 de l' Urheberrechtsgesetz stipule que les ressortissants allemands jouissent de la protection de l' article 75, entre autres, pour toutes leurs prestations, quel que soit le lieu de leur exécution. Par contre, les ressortissants étrangers bénéficient d' une protection moins étendue dans le cadre de cette loi. Aux termes de l' article 125, paragraphe 2, ils jouissent de cette protection pour toutes leurs prestations qui se déroulent en Allemagne, et aux termes de l' article 125, paragraphe 5, ils jouissent de la protection découlant des traités internationaux. Le Landgericht Muenchen I renvoie à la convention de Rome du 26 octobre 1961 sur la protection des artistes interprètes ou exécutants, des producteurs de phonogrammes et des organismes de radiodiffusion, mais il en déduit que l' Allemagne est tenue d' accorder aux artistes exécutants étrangers le même traitement qu' à ses propres ressortissants uniquement en ce qui concerne les prestations se déroulant sur le territoire d' un État contractant; les États-Unis n' ayant pas adhéré à la convention de Rome, l' article 125, paragraphe 5 de l' Urheberrechtsgesetz n' est d' aucune utilité à M. Collins dans les circonstances de l' espèce. M. Collins prétend au contraire qu' il avait le droit au même traitement qu' un ressortissant national en application de l' article 7 du traité CEE. Le Landgericht Muenchen I a donc décidé de renvoyer à la Cour les questions suivantes:

"1. Le droit d' auteur relève-t-il de l' interdiction de discrimination consacrée à l' article 7, premier alinéa, du traité CEE?

2. Dans l' affirmative: en résulte-t-il un effet direct en ce sens qu' un État membre qui accorde à ses ressortissants une protection pour chacune de leurs exécutions artistiques, quel qu' en soit le lieu d' exécution, est également tenu d' accorder cette protection aux ressortissants d' autres États membres, ou bien est-il compatible avec l' article 7, premier alinéa, du traité de subordonner à certaines conditions (voir article 125, paragraphes 2 à 6 de l' Urheberrechtsgesetz du 9 septembre 1965), l' octroi de la protection accordée aux ressortissants d' autres États membres?"

Affaire C-326/92

4. La partie demanderesse et défenderesse en "Revision" dans l' affaire C-326/92 - EMI Electrola GmbH (ci-après "EMI Electrola") - produit et distribue des phonogrammes. Elle a le droit exclusif d' exploiter en Allemagne les enregistrements de certaines prestations de Cliff Richard, un chanteur de nationalité britannique. Les parties défenderesses et demanderesses en "Revision" sont Patricia Im- und Export Verwaltungsgesellschaft mbH (ci-après "Patricia"), une société qui vend des phonogrammes, ainsi que M. L. E. Kraul, son gérant. EMI Electrola a demandé au tribunal d' interdire à Patricia et à M. Kraul (ainsi qu' à d' autres personnes) d' enfreindre ses droits exclusifs sur les enregistrements de certains concerts de Cliff Richard. Ces enregistrements ont d' abord été publiés au Royaume-Uni en 1958 et 1959, apparemment par un producteur britannique de phonogrammes auquel Cliff Richard avait cédé ses droits les concernant. Cette société a par la suite cédé les droits en question à EMI Electrola.

5. Le Landgericht a fait droit au recours d' EMI Electrola et ce jugement a été confirmé en appel. Patricia et M. Kraul se sont pourvus en "Revision" devant le Bundesgerichtshof, qui considère qu' en droit allemand la demande d' EMI Electrola serait fondée si Cliff Richard était de nationalité allemande, mais comme il est britannique, elle ne l' est pas. L' ordonnance de renvoi ne laisse pas tout à fait clairement entrevoir comment et pourquoi le Bundesgerichtshof est arrivé à la conclusion que le droit allemand prévoit une telle différence de traitement. La raison semble en être que les prestations artistiques en question ont eu lieu avant le 21 octobre 1966, date à laquelle la convention de Rome est entrée en vigueur en Allemagne, et que l' Allemagne est uniquement tenue d' accorder "le traitement national" aux artistes étrangers, en application de la convention de Rome, à l' égard de prestations qui ont lieu après cette date (2).

6. Il est en tout état de cause constant qu' il existe en droit allemand une différence de traitement, selon la nationalité de l' exécutant. Le Bundesgerichtshof a en conséquence déféré les questions suivantes à la Cour:

" Le droit d' auteur national d' un État membre relève-t-il de l' interdiction de discrimination consacrée à l' article 7, premier alinéa, du traité CEE?

Dans l' affirmative: la réglementation qui protège les prestations artistiques dans un État membre (article 125, paragraphes 2 à 6 de l' Urheberrechtsgesetz), est-elle compatible avec l' article 7, premier alinéa du traité CEE, lorsqu' elle n' assure pas aux ressortissants d' un autre État membre les mêmes conditions de protection (protection nationale) qu' aux artistes nationaux?"

Les questions posées par les deux affaires

7. Les deux affaires soulèvent essentiellement les mêmes questions: a) est-il compatible avec le droit communautaire, en particulier avec l' article 7 du traité CEE, qu' un État membre accorde une protection plus large à l' égard de prestations fournies par ses propres ressortissants qu' à l' égard de celles de ressortissants d' autres États membres et b) au cas où une telle différence de traitement ne serait pas compatible avec le droit communautaire, les dispositions pertinentes du droit communautaire produisent-elles des effets directs, en ce sens qu' un artiste qui a la nationalité d' un autre État membre est en droit de revendiquer, dans une procédure contre une personne qui commercialise des enregistrements non autorisés de ses prestations, les mêmes droits qu' un ressortissant de l' État membre en question?

8. Nous notons en passant que, bien que les deux juridictions nationales fassent référence au droit d' auteur, ces affaires ne portent en fait pas sur le droit d' auteur au sens strict mais sur certains droits voisins connus comme sous le nom de "droits des exécutants".

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