European Commission v Hungary.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2012:602
CourtCourt of Justice (European Union)
Date02 October 2012
Docket NumberC-286/12
Procedure TypeRecurso por incumplimiento – fundado
Celex Number62012CP0286
62012CP0286

PRISE DE POSITION DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M ME JULIANE KOKOTT

présentée le 2 octobre 2012 ( 1 )

Affaire C‑286/12

Commission européenne

contre

Hongrie

«Manquement d’État — Politique sociale — Directive 2000/78CE — Égalité de traitement en matière d’emploi et de travail — Différence de traitement fondée sur l’âge — Mise à la retraite d’office des juges, des procureurs et des notaires ayant atteint l’âge de 62 ans — Abaissement puis élévation de l’âge de départ à la retraite — Justification et proportionnalité de la mesure»

I – Introduction

1.

À quelles conditions le droit de l’Union permet-il de fixer une limite d’âge aux fins de l’exercice de fonctions officielles au sein du service public de la justice? Ce n’est pas la première fois que la Cour est confrontée à cette question depuis l’entrée en vigueur de la directive 2000/78/CE du Conseil, du 27 novembre 2000, portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail ( 2 ).

2.

Alors que l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Fuchs et Köhler ( 3 ) ne portait en substance que sur la possibilité même de fixer un âge maximal obligatoire, la présente procédure en manquement porte sur l’abaissement, pour les juges, les procureurs et les notaires, de l’âge maximal de départ à la retraite de 70 ans à 62 ans. Ce faisant, la Hongrie a aligné l’âge de départ à la retraite dans le secteur de la justice sur l’âge général de départ à la retraite. Six mois après l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions, tous les fonctionnaires ayant d’ores et déjà dépassé la nouvelle limite d’âge, soit huit classes d’âge, ont été mis d’office à la retraite. Au cours des prochaines années, l’âge général de départ à la retraite, qui s’applique désormais aussi au secteur de la justice, sera toutefois augmenté de six mois chaque année jusqu’à atteindre un âge général de départ à la retraite de 65 ans.

3.

Il s’agit de savoir, en substance, si ladite réglementation est justifiée.

II – Le cadre juridique

A – Sur la directive 2000/78

4.

Les considérants 8, 9, 11 et 25 de la directive 2000/78 sont ainsi rédigés:

«(8)

Les lignes directrices pour l’emploi en 2000, approuvées par le Conseil européen de Helsinki les 10 et 11 décembre 1999, soulignent la nécessité de promouvoir un marché du travail favorable à l’insertion sociale en formulant un ensemble cohérent de politiques destinées à lutter contre la discrimination à l’égard de groupes tels que les personnes handicapées. Elles soulignent également la nécessité d’accorder une attention particulière à l’aide aux travailleurs âgés pour qu’ils participent davantage à la vie professionnelle.

(9)

L’emploi et le travail constituent des éléments essentiels pour garantir l’égalité des chances pour tous et contribuent dans une large mesure à la pleine participation des citoyens à la vie économique, culturelle et sociale, ainsi qu’à l’épanouissement personnel.

[…]

(11)

La discrimination fondée sur […] l’âge […] peut compromettre la réalisation des objectifs du traité CE, notamment un niveau d’emploi et de protection sociale élevé, le relèvement du niveau et de la qualité de la vie, la cohésion économique et sociale, la solidarité et la libre circulation des personnes.

[…]

(25)

L’interdiction des discriminations liées à l’âge constitue un élément essentiel pour atteindre les objectifs établis par les lignes directrices sur l’emploi et encourager la diversité dans l’emploi. Néanmoins, des différences de traitement liées à l’âge peuvent être justifiées dans certaines circonstances et appellent donc des dispositions spécifiques qui peuvent varier selon la situation des États membres. Il est donc essentiel de distinguer entre les différences de traitement qui sont justifiées, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et les discriminations qui doivent être interdites.»

5.

Aux termes de l’article 1er de la directive 2000/78, celle-ci «a pour objet d’établir un cadre général pour lutter contre la discrimination fondée sur la religion ou les convictions, [le] handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle, en ce qui concerne l’emploi et le travail, en vue de mettre en œuvre, dans les États membres, le principe de l’égalité de traitement».

6.

L’article 2, paragraphes 1 et 2, sous a), de ladite directive énonce l’interdiction de discrimination:

«1. Aux fins de la présente directive, on entend par ‘principe de l’égalité de traitement’ l’absence de toute discrimination directe ou indirecte, fondée sur un des motifs visés à l’article 1er.

2. Aux fins du paragraphe 1:

a)

une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er […]».

7.

L’article 3, paragraphe 1, de la même directive, intitulé «Champ d’application», dispose ce qui suit:

«Dans les limites des compétences conférées à la Communauté, la présente directive s’applique à toutes les personnes, tant pour le secteur public que pour le secteur privé, y compris les organismes publics, en ce qui concerne:

[…]

c)

les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération;

[…]»

8.

L’article 6, paragraphes 1 et 2, de la directive 2000/78 porte sur les possibilités de justification des différences de traitement fondées sur l’âge:

«1. Nonobstant l’article 2, paragraphe 2, les États membres peuvent prévoir que des différences de traitement fondées sur l’âge ne constituent pas une discrimination lorsqu’elles sont objectivement et raisonnablement justifiées, dans le cadre du droit national, par un objectif légitime, notamment par des objectifs légitimes de politique de l’emploi, du marché du travail et de la formation professionnelle, et que les moyens de réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires.

Ces différences de traitement peuvent notamment comprendre:

a)

la mise en place de conditions spéciales d’accès à l’emploi et à la formation professionnelle, d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération, pour les jeunes, les travailleurs âgés et ceux ayant des personnes à charge, en vue de favoriser leur insertion professionnelle ou d’assurer leur protection;

b)

la fixation de conditions minimales d’âge, d’expérience professionnelle ou d’ancienneté dans l’emploi, pour l’accès à l’emploi ou à certains avantages liés à l’emploi;

c)

la fixation d’un âge maximum pour le recrutement, fondée sur la formation requise pour le poste concerné ou la nécessité d’une période d’emploi raisonnable avant la retraite.

2. Aux fins du paragraphe 1:

a)

une discrimination directe se produit lorsqu’une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est, ne l’a été ou ne le serait dans une situation comparable, sur la base de l’un des motifs visés à l’article 1er;

[…]»

B – Le droit hongrois

9.

Avant le 1er janvier 2012, l’article 57, paragraphe 2, de la loi no LXVII de 1997 permettait aux juges de rester en fonction jusqu’à l’âge de 70 ans.

10.

L’article 90, sous ha), de la loi no CLXII de 2011, entrée en vigueur le 1er janvier 2012, prévoit désormais que le juge est mis à la retraite dès qu’il a atteint l’âge limite de départ à la retraite qui lui est applicable.

11.

Jusqu’au 1er janvier 2010, l’âge maximal de départ à la retraite était fixé à 62 ans en Hongrie. En vertu de l’article 18, paragraphe 1, de la loi no LXXXI de 1997, dans sa rédaction entrée en vigueur le 1er janvier 2010, l’âge de départ à la retraite n’a été maintenu à 62 ans que pour les personnes nées avant l’année 1952. Pour toute personne née ultérieurement, l’âge de la retraite augmente de six mois par année, pour atteindre 65 ans, nouvel âge général de départ à la retraite applicable à toutes les personnes nées en 1957 ou après.

12.

En vertu de l’article 230 de la loi no CLXII de 2011, les fonctions des juges qui avaient atteint l’âge de 62 ans avant le 1er janvier 2012 ont pris fin le 30 juin 2012, tandis que celles des juges atteignant cet âge au cours de l’année 2012 prendront fin le 31 décembre 2012.

13.

Des règles analogues s’appliquent aux procureurs. S’agissant des notaires, le nouvel âge limite de départ à la retraite s’appliquera au 31 décembre 2013.

III – La procédure précontentieuse et les conclusions des parties

14.

Le 17 janvier 2012, la Commission européenne a enjoint à la Hongrie, au titre de l’article 258 TFUE, de présenter ses observations sur un grief tiré de ce qu’elle aurait manqué aux obligations lui incombant en vertu des articles 1er, 2 et 6, paragraphe 1, de la directive 2000/78 en adoptant les nouvelles dispositions relatives à l’âge maximal obligatoire de cessation d’activité applicable aux juges, aux procureurs et aux notaires. Bien que, dans sa réponse du 17 février 2012, la Hongrie ait contesté l’infraction, la Commission a maintenu son analyse dans un avis motivé du 7 mars 2012, invitant la Hongrie à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à l’avis, dans un délai d’un mois à compter de sa réception. Dans sa réponse du 30 mars 2012, la Hongrie a maintenu sa position.

15.

C’est pourquoi la Commission a introduit le présent recours le 7 juin 2012 et conclu à ce qu’il plaise à la Cour:

constater que, en adoptant un régime national imposant...

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