Sentencia del Tribunal de Justicia (Sala Novena) de 25 de abril de 2024. F C C y M A B contra Caixabank SA, anciennement Bankia SA.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2024:360
Celex Number62021CJ0484
Docket NumberC-484/21
Date25 April 2024
CourtCourt of Justice (European Union)

ARRÊT DE LA COUR (neuvième chambre)

25 avril 2024 (*)

« Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 93/13/CEE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Contrat de prêt hypothécaire – Clause prévoyant le paiement des frais liés au contrat à charge du consommateur – Décision judiciaire définitive constatant le caractère abusif de cette clause et annulant celle-ci – Action en restitution des sommes acquittées au titre de la clause abusive – Point de départ du délai de prescription »

Dans l’affaire C‑484/21,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Juzgado de Primera Instancia nº 20 de Barcelona (tribunal de première instance nº 20 de Barcelone, Espagne), par décision du 22 juillet 2021, parvenue à la Cour le 6 août 2021, dans la procédure

F C C,

M A B

contre

Caixabank SA, anciennement Bankia SA,

LA COUR (neuvième chambre),

composée de Mme O. Spineanu‑Matei, présidente de chambre, M. S. Rodin (rapporteur) et Mme L. S. Rossi, juges,

avocat général : M. A. M. Collins,

greffier : Mme L. Carrasco Marco, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 19 octobre 2023,

considérant les observations présentées :

– pour F C C et M A B, par Mes I. Fernández Grañeda, F. Gómez Hidalgo Terán et J. Zaera Herrera, abogados,

– pour Caixabank SA, par Mes J. Gutiérrez de Cabiedes Hidalgo de Caviedes, J. Rodríguez Cárcamo et E. Valencia Ortega, abogados,

– pour le gouvernement espagnol, par M. A. Ballesteros Panizo et Mme A. Pérez-Zurita Gutiérrez, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. G. Rocchitta, avvocato dello Stato,

– pour la Commission européenne, par MM. J. Baquero Cruz et N. Ruiz García, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 6, paragraphe 1, et de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO 1993, L 95, p. 29).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant F C C et M A B, deux consommateurs, à Caixabank SA, anciennement Bankia SA, un établissement de crédit, au sujet d’une demande de restitution de sommes payées au titre d’une clause contractuelle dont le caractère abusif a été constaté par une décision judiciaire définitive.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3 L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 prévoit :

« Les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s’il peut subsister sans les clauses abusives. »

4 L’article 7, paragraphe 1, de cette directive est ainsi libellé :

« Les États membres veillent à ce que, dans l’intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l’utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel. »

Le droit espagnol

5 L’article 121–20 de la Ley 29/2002, primera Ley del Código Civil de Cataluña (loi 29/2002, première loi du code civil de Catalogne), du 30 décembre 2002 (BOE nº 32, du 6 février 2003, ci-après le « code civil catalan »), prévoit :

« Les actions de toute nature se prescrivent par dix ans, à moins qu’une personne ait acquis auparavant le droit par usucapion ou que le présent code ou les lois spéciales en disposent autrement. »

6 L’article 121–23, paragraphe 1, du code civil catalan dispose :

« Le délai de prescription commence à courir lorsque, une fois que l’action est née et peut être exercée, son titulaire connaît ou peut raisonnablement connaître les circonstances qui la fondent et la personne contre laquelle elle peut être exercée. »

7 Aux termes de l’article 121–11 de ce code :

« Constituent des causes d’interruption de la prescription :

a) L’introduction de l’action devant les tribunaux, même si elle est rejetée pour vice de procédure.

b) L’engagement de la procédure d’arbitrage relative à la créance ou le dépôt de la requête demandant la désignation des arbitres par le juge.

c) La réclamation extrajudiciaire de la créance.

d) La reconnaissance du droit ou la renonciation à la prescription par la personne à qui la créance peut être opposée au cours du délai de prescription. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

8 Les parties au litige au principal avaient conclu un contrat de prêt hypothécaire en 2007. La clause de ce contrat qui imposait aux requérants au principal le paiement de tous les frais relatifs à la constitution de l’hypothèque (ci-après la « clause relative aux frais ») ayant été annulée par un jugement du Juzgado de Primera Instancia nº 50 de Barcelona (tribunal de première instance nº 50 de Barcelone, Espagne) du 2 mai 2019, les sommes acquittées au titre des frais notariés ont été restituées aux requérants au principal.

9 Le 23 février 2021, ces derniers ont introduit un recours devant la juridiction de renvoi, le Juzgado de Primera Instancia nº 20 de Barcelona (tribunal de première instance nº 20 de Barcelone, Espagne), tendant au remboursement des sommes acquittées au titre de la clause relative aux frais pour ce qui concerne les droits d’enregistrement et les frais pour des services de gestion, d’un montant de 295,36 euros.

10 Devant la juridiction de renvoi, Caixabank fait valoir que l’action des requérants au principal est prescrite. D’après celle-ci, le délai de prescription, qui conformément au code civil catalan, est de dix ans, a commencé à courir au moment de la constitution de l’hypothèque en 2007, lorsque les montants dont le remboursement fait l’objet de la procédure au principal ont été acquittés.

11 De leur côté, les requérants au principal affirment que, en vertu de l’enseignement qui se dégage de l’arrêt du 22 avril 2021, Profi Credit Slovakia (C‑485/19, EU:C:2021:313), le délai de prescription n’a commencé à courir qu’au moment où la nullité de la clause relative aux frais a été constatée par le Juzgado de Primera Instancia nº 50 de Barcelona (tribunal de première instance nº 50 de Barcelone). Ils ajoutent que, dans l’arrêt du 10 juin 2021, BNP Paribas Personal Finance (C‑776/19 à C‑782/19, EU:C:2021:470), la Cour a dit pour droit que le délai de prescription ne saurait commencer à courir au moment de la conclusion du contrat.

12 Selon la juridiction de renvoi, se pose la question de savoir à quel moment le consommateur est réputé avoir connaissance des faits qui fondent l’action en remboursement des sommes versées au titre de la clause annulée. Selon elle, il ne fait aucun doute que l’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 seraient respectés, de même, partant, que le principe d’effectivité du droit de l’Union, si le point de départ du délai de prescription était fixé au moment de la constatation de la nullité de la clause relative aux frais. Cependant il pourrait, de façon plus discutable selon la juridiction de renvoi, également s’agir soit de la date à laquelle le consommateur en question a procédé au paiement de ces sommes, soit de la date à laquelle le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne) a rendu un arrêt déclarant abusive une clause standardisée dont la portée serait équivalente à celle de la clause relative aux frais.

13 Enfin, la juridiction de renvoi considère que, si le point de départ du délai de prescription était fixé au moment du paiement des frais, l’action serait en ce cas prescrite et les consommateurs ne pourraient pas obtenir le remboursement des sommes indues. En revanche, si le point de départ du délai de prescription devait être fixé à la date de l’arrêt du Tribunal Supremo (Cour suprême) susmentionné, à savoir le 23 décembre 2015, ou à celle à laquelle une décision de justice a constaté la nullité de la clause relative aux frais, en l’occurrence le 2 mai 2019, le délai de prescription de dix ans ne serait pas encore atteint et ils pourraient encore être indemnisés de leur préjudice.

14 Dans ces conditions, le Juzgado de Primera Instancia nº 20 de Barcelona (tribunal de première instance nº 20 de Barcelone) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Le fait que le délai de prescription de l’action en remboursement des sommes versées en vertu d’une clause abusive, telle que la clause relative aux frais, commence à courir avant la constatation de la nullité de cette clause en raison de son caractère abusif est-il conforme à l’article 38 de la [charte des droits fondamentaux de l’Union européenne], au principe d’effectivité du droit de l’Union ainsi qu’à l’article 6, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, de la [directive 93/13] ?

2) Le fait qu’un tel délai de prescription commence à courir à la date à laquelle un arrêt rendu par une juridiction dont les décisions font jurisprudence, comme le Tribunal Supremo (Cour suprême), constate le caractère abusif d’une clause déterminée, et ce que le consommateur concerné ait ou non connaissance du contenu de cet arrêt, est-il conforme à l’article 38 de la charte des droits fondamentaux, au principe d’effectivité du droit de l’Union ainsi qu’à l’article 6, paragraphe 1, et à l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 ?

3) Le fait que, dans un contrat de longue durée, le délai de prescription d’une action en remboursement des frais exposés [en vertu d’une clause abusive] au titre de la constitution de l’hypothèque commence à courir au moment du paiement de ces frais est-il, dans la mesure où la clause abusive épuise ses effets au moment...

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