Arrêt de la Cour (première chambre) du 30 septembre 2020.#LM contre Centre public d'action sociale de Seraing.#Renvoi préjudiciel – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Directive 2008/115/CE – Retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier – Parent d’un enfant majeur atteint d’une grave maladie – Décision de retour – Recours juridictionnel – Effet suspensif de plein droit – Garanties dans l’attente du retour – Besoins de base – Articles 7, 19 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.#Affaire C-402/19.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2020:759
Celex Number62019CJ0402
Date30 September 2020
Docket NumberC-402/19
CourtCourt of Justice (European Union)

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

30 septembre 2020 (*)

« Renvoi préjudiciel – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Directive 2008/115/CE – Retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier – Parent d’un enfant majeur atteint d’une grave maladie – Décision de retour – Recours juridictionnel – Effet suspensif de plein droit – Garanties dans l’attente du retour – Besoins de base – Articles 7, 19 et 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne »

Dans l’affaire C‑402/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la cour du travail de Liège (Belgique), par décision du 17 mai 2019, parvenue à la Cour le 24 mai 2019, dans la procédure

LM

contre

Centre public d’action sociale de Seraing,

LA COUR (première chambre),

composée de M. J.-C. Bonichot, président de chambre, MM. M. Safjan, L. Bay Larsen (rapporteur), Mme C. Toader et M. N. Jääskinen, juges,

avocat général : M. P. Pikamäe,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

– pour le gouvernement belge, par M. P. Cottin ainsi que par Mmes M. Jacobs et C. Pochet, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement néerlandais, par Mme M. K. Bulterman ainsi que par M. J. M. Hoogveld, en qualité d’agents,

– pour la Commission européenne, par Mmes C. Cattabriga et A. Azema, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 4 mars 2020,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 5 et 13 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier (JO 2008, L 348, p. 98).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant LM, ressortissant d’un pays tiers, au centre public d’action sociale de Seraing (Belgique) (ci-après le « CPAS ») au sujet des décisions de ce dernier retirant à LM le bénéfice de l’aide sociale.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3 L’article 3 de la directive 2008/115 dispose :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

3) “retour” : le fait, pour le ressortissant d’un pays tiers, de rentrer – que ce soit par obtempération volontaire à une obligation de retour ou en y étant forcé – dans :

– son pays d’origine, ou

– un pays de transit conformément à des accords ou autres arrangements de réadmission communautaires ou bilatéraux, ou

– un autre pays tiers dans lequel le ressortissant concerné d’un pays tiers décide de retourner volontairement et sur le territoire duquel il sera admis ;

4) “décision de retour” : une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d’un ressortissant d’un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour ;

5) “éloignement” : l’exécution de l’obligation de retour, à savoir le transfert physique hors de l’État membre »

4 L’article 5 de cette directive énonce :

« Lorsqu’ils mettent en œuvre la présente directive, les États membres tiennent dûment compte :

[...]

c) de l’état de santé du ressortissant concerné d’un pays tiers,

et respectent le principe de non-refoulement. »

5 L’article 8, paragraphe 3, de ladite directive prévoit :

« Les États membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l’éloignement. »

6 L’article 9 de la même directive, intitulé « Report de l’éloignement », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les États membres reportent l’éloignement :

a) dans le cas où il se ferait en violation du principe de non-refoulement, ou

b) tant que dure l’effet suspensif accordé conformément à l’article 13, paragraphe 2. »

7 L’article 13, paragraphes 1 et 2, de la directive 2008/115 énonce :

« 1. Le ressortissant concerné d’un pays tiers dispose d’une voie de recours effective pour attaquer les décisions liées au retour visées à l’article 12, paragraphe 1, devant une autorité judiciaire ou administrative compétente ou une instance compétente composée de membres impartiaux et jouissant de garanties d’indépendance.

2. L’autorité ou l’instance visée au paragraphe 1 est compétente pour réexaminer les décisions liées au retour visées à l’article 12, paragraphe 1, et peut notamment en suspendre temporairement l’exécution, à moins qu’une suspension temporaire ne soit déjà applicable en vertu de la législation nationale. »

8 L’article 14, paragraphe 1, de cette directive est libellé comme suit :

« Sauf dans la situation visée aux articles 16 et 17, les États membres veillent à ce que les principes ci-après soient pris en compte dans la mesure du possible en ce qui concerne les ressortissants de pays tiers au cours du délai de départ volontaire accordé conformément à l’article 7 et au cours des périodes pendant lesquelles l’éloignement a été reporté conformément à l’article 9 :

a) l’unité familiale avec les membres de la famille présents sur le territoire est maintenue ;

b) les soins médicaux d’urgence et le traitement indispensable des maladies sont assurés ;

c) les mineurs ont accès au système éducatif de base en fonction de la durée de leur séjour ;

d) les besoins particuliers des personnes vulnérables sont pris en compte. »

Le droit belge

9 L’article 57, paragraphe 2, de la loi organique du 8 juillet 1976 des centres publics d’action sociale, dans sa version applicable au litige au principal, prévoit :

« Par dérogation aux autres dispositions de la présente loi, la mission du centre public d’action sociale se limite à :

1° l’octroi de l’aide médicale urgente, à l’égard d’un étranger qui séjourne illégalement dans le Royaume ;

[...] »

Le litige au principal et la question préjudicielle

10 Le 20 août 2012, LM a présenté, pour lui-même et pour sa fille R, alors mineure, des demandes d’autorisation de séjour pour raisons médicales, motivées par le fait que R souffre de plusieurs maladies graves.

11 Ces demandes ayant été déclarées recevables le 6 mars 2013, LM a bénéficié de l’aide sociale, cette dernière étant à la charge du CPAS.

12 Trois décisions rejetant les demandes d’autorisation de séjour introduites par LM ont successivement été adoptées puis retirées par l’autorité compétente. Le 8 février 2016, une quatrième décision de rejet de ces demandes a été adoptée. Cette décision était assortie d’un ordre de quitter le territoire belge.

13 LM a introduit, le 25 mars 2016, un recours tendant à l’annulation et à la suspension de ladite décision de rejet de ses demandes et de l’ordre de quitter le territoire devant le Conseil du contentieux des étrangers (Belgique).

14 Le CPAS a retiré à LM le bénéfice de l’aide sociale à compter du 26 mars 2016, date d’expiration du délai de départ volontaire qui lui avait été octroyé par l’ordre de quitter le territoire belge. Le CPAS a, en revanche, accordé à LM le bénéfice de l’aide médicale urgente à compter du 22 mars 2016.

15 À la suite d’une procédure en référé engagée par LM devant le tribunal du travail de Liège (Belgique), les droits de l’intéressé à l’aide sociale ont été rétablis.

16 Par deux décisions du 16 mai 2017, le CPAS a retiré ces droits à l’aide sociale à compter du 11 avril 2017, date à laquelle la fille de LM est devenue majeure.

17 LM a introduit un recours contre ces décisions devant le tribunal du travail de Liège. Par un jugement du 16 avril 2018, cette juridiction a considéré que le retrait des droits à l’aide sociale était légalement fondé à compter de la...

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