Marca Mode CV contra Adidas AG y Adidas Benelux BV.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2000:56
Date27 January 2000
Celex Number61998CC0425
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-425/98
EUR-Lex - 61998C0425 - FR 61998C0425

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 27 janvier 2000. - Marca Mode CV contre Adidas AG et Adidas Benelux BV. - Demande de décision préjudicielle: Hoge Raad - Pays-Bas. - Directive 89/104/CEE - Article 5, paragraphe 1, sous b) - Marques - Risque de confusion - Risque d'association entre le signe et la marque. - Affaire C-425/98.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-04861


Conclusions de l'avocat général

1 L'article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive sur les marques (1) protège les titulaires de marques contre l'enregistrement d'une marque identique ou similaire pour des produits ou services identiques ou similaires lorsqu'il existe «dans l'esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d'association avec la marque antérieure». Dans l'affaire SABEL/Puma (2), la Cour a été invitée à se prononcer sur le point de savoir si la simple association faite par le public entre les deux marques comporte un risque de confusion à cet égard, bien qu'il n'y ait pas de confusion entre les deux. La Cour a déclaré qu'il découle de ce libellé que la notion de risque d'association n'est pas une alternative à la notion de risque de confusion, mais sert à en préciser l'étendue; que les termes mêmes de cette disposition excluent qu'elle puisse être appliquée s'il n'existe pas, dans l'esprit du public, un risque de confusion; et que cette interprétation résulte également du dixième considérant de la directive, aux termes duquel «le risque de confusion ... constitue la condition spécifique de la protection» (3).

2 La présente affaire concerne l'article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive qui, tout en utilisant pour l'essentiel les mêmes termes, protège les titulaires de marques contre l'usage d'un signe identique ou similaire pour des produits ou services identiques ou similaires lorsqu'il existe «dans l'esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d'association entre le signe et la marque». Le Hoge Raad (la juridiction suprême des Pays-Bas) a déféré à la Cour, à titre préjudiciel, la question suivante:

«Faut-il interpréter la disposition de l'article 5, paragraphe 1, sous b), de la directive 89/104/CE en ce sens que,

a) lorsqu'une marque possède un caractère distinctif particulier, soit intrinsèquement, soit grâce à la notoriété dont elle jouit auprès du public, et

b) lorsque, sans le consentement du titulaire de la marque, un tiers fait usage, dans la vie des affaires, pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, d'un signe qui ressemble à ce point à la marque qu'il suscite la possibilité de l'associer à la marque, le droit exclusif du titulaire de la marque l'habilite à interdire à ce tiers cet usage du signe quand le caractère distinctif de la marque est tel qu'il n'est pas exclu que cette association puisse susciter une confusion?»

La directive sur les droits de marque

3 La directive sur les droits de marque a été adoptée au titre de l'article 100 A du traité CE (devenu, après modification, article 95 CE). Elle avait pour but non «de procéder à un rapprochement total des législations des États membres en matière de marques» mais simplement «de limiter le rapprochement aux dispositions nationales ayant l'incidence la plus directe sur le fonctionnement du marché intérieur» (4).

4 Les neuvième et dixième considérants du préambule de la directive sont, pour autant qu'il importe, libellés comme suit:

«Considérant qu'il est fondamental, pour faciliter la libre circulation des produits et la libre prestation des services, de faire en sorte que les marques enregistrées jouissent désormais de la même protection dans la législation de tous les États membres; que cela, cependant, n'enlève pas aux États membres la faculté d'accorder une protection plus large aux marques ayant acquis une renommée;

...qu'il est indispensable d'interpréter la notion de similitude en relation avec le risque de confusion; que le risque de confusion, dont l'appréciation dépend de nombreux facteurs et notamment de la connaissance de la marque sur le marché, de (5) l'association qui peut en être faite avec le signe utilisé ou enregistré, du (6) degré de similitude entre la marque et le signe et entre les produits ou services désignés, constitue la condition spécifique de la protection; que les moyens par lesquels le risque de confusion peut être constaté, et en particulier la charge de la preuve, relèvent des règles nationales de procédure auxquelles la présente directive ne porte pas préjudice».

5 L'article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive dispose qu'une marque est refusée à l'enregistrement ou est susceptible, si elle est enregistrée, d'être déclarée nulle «lorsqu'en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque antérieure ou en raison de l'identité ou de la similitude des produits ou des services que les deux marques désignent, il existe, dans l'esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d'association avec la marque antérieure.»

6 L'article 5, paragraphe 1, sous b), dispose que le titulaire d'une marque est habilité à interdire à tout tiers de faire usage, dans la vie des affaires, «d'un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque et en raison de l'identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque et le signe, il existe, dans l'esprit du public, un risque de confusion qui comprend le risque d'association entre le signe et la marque.»

7 Il est évident - et ce point paraît admis par les parties ayant présenté des observations - que les articles 4, paragraphe 1, sous b) et 5, paragraphe 1, sous b), doivent être interprétés de la même manière.

8 Nous voudrions mentionner à ce niveau une divergence entre les différentes versions linguistiques de la directive. La plupart des versions autres que la version anglaise utilisent la notion de «risque» ou de «danger» de confusion et d'association plutôt que de «probabilité» («likelihood»); la version néerlandaise utilise cependant le concept de possibilité de confusion et d'association à l'article 4, paragraphe 1, sous b), et de possibilité de confusion et de risque d'association à l'article 5, paragraphe 1, sous b), bien que le dixième considérant du préambule se réfère au «risque» ou au «danger» de confusion. Pour des raisons que nous expliquerons par après, nous ne pensons pas que ces différences de terminologie jouent un rôle quelconque.

9 L'article 5, paragraphe 2, dispose que tout État membre «peut également prescrire que le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l'absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires d'un signe identique ou similaire à la marque pour des produits ou des services qui ne sont pas similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, lorsque celle-ci jouit d'une renommée dans l'État membre et que l'usage du signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque ou leur porte préjudice.»

Le droit national

10 Selon la loi uniforme Benelux sur les marques (7) (ci-après «la loi Benelux»), antérieurement à la mise en oeuvre de la directive, le titulaire d'une marque pouvait s'opposer à tout emploi pour des produits identiques ou similaires d'une marque identique ou similaire à sa propre marque enregistrée (8). La ressemblance des marques était donc suffisante; contrairement à la position arrêtée dans d'autres États membres, la loi Benelux n'exigeait pas un risque de confusion. Elle ne se référait pas non plus expressément à un risque d'association. Cette notion a été introduite par la Cour Benelux dans l'affaire «Union/Union Soleure» en 1983 (9) et a par la suite trouvé son expression dans la loi Benelux après modification de cette dernière, en vue de la mise en oeuvre de la directive: l'article 13 A, paragraphe 1, sous b), de la loi Benelux, telle que modifiée (10), prévoit que le droit exclusif à la marque permet au titulaire de s'opposer à tout usage qui, dans la vie des affaires, serait fait de la marque ou d'un signe ressemblant pour les produits pour lesquels la marque est enregistrée ou pour des produits similaires, lorsqu'il existe, dans l'esprit du public, un «risque d'association» entre le signe et la marque.

Les faits et la procédure au principal

11 Adidas AG est titulaire dans le bénélux d'une marque figurative à trois bandes. Il est notoirement connu que cette marque provient d'Adidas; les trois bandes ne sont pas considérées comme un élément purement décoratif. Adidas Benelux est le licencié exclusif d'Adidas AG pour le Benelux. Les deux sociétés seront conjointement désignées ci-après sous le terme «Adidas».

12 Marca distribue une collection de vêtements de sport, dont un certain nombre sont pourvus sur les côtés de deux bandes parallèles s'étalant sur la longueur. Marca commercialise également un polo blanc et orange comportant sur toute la longueur de la face avant au centre trois bandes noires verticales parallèles, interrompues à l'avant par un médaillon représentant un chat sur lequel est écrit le vocable TIM.

13 En juillet 1996, Adidas, considérant que Marca avait porté atteinte à sa marque figurative à trois bandes, a obtenu une ordonnance en référé du président du Rechtbank te Breda (le Tribunal de grande instance de Breda), ordonnant à Marca de cesser à utiliser pour environ sept vêtements et pour le polo TIM dans le Benelux un signe consistant dans le motif à deux ou trois bandes ou dans tout autre signe ressemblant à la marque figurative d'Adidas. Adidas a fondé sa demande sur l'article 13 A, point 1, de la loi Benelux.

14 En avril 1997, le Gerechtshof te 's-Hertogenbosch (la Cour d'appel de Bois-le-Duc) a confirmé cette décision. Selon la juridiction de renvoi, le Gerechtshof a estimé i) que l'impression d'ensemble qui se...

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