The Queen contra Secretary of State for the Home Department, ex parte Nana Yaa Konadu Yiadom.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2000:174
Docket NumberC-357/98
Celex Number61998CC0357
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date30 March 2000
EUR-Lex - 61998C0357 - FR 61998C0357

Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 30 mars 2000. - The Queen contre Secretary of State for the Home Department, ex parte Nana Yaa Konadu Yiadom. - Demande de décision préjudicielle: Court of Appeal (England & Wales) - Royaume-Uni. - Libre circulation des personnes - Dérogations - Décisions en matière de police des étrangers - Admission temporaire - Garanties juridictionnelles - Voies de recours - Articles 8 et 9 de la directive 64/221/CEE. - Affaire C-357/98.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-09265


Conclusions de l'avocat général

1 Mme Yiadom, ressortissante néerlandaise d'origine ghanéenne, qui se rendait au Royaume-Uni, a été admise à titre temporaire sur le territoire britannique, en attendant l'examen de sa demande d'entrée par les autorités nationales compétentes.

2 Après enquête, le Secretary of State for the Home Department lui a fait savoir que, pour des motifs d'ordre public, elle n'était pas autorisée à entrer, au sens juridique du terme, sur le territoire britannique. Il est reproché à Mme Yiadom d'avoir facilité, dans le passé, l'entrée illégale d'autres personnes au Royaume-Uni. Il lui a été indiqué qu'elle était susceptible de réitérer ce type d'infractions, ce qui justifiait la décision de refus qui lui était opposée.

3 Parmi les voies de recours que le droit national lui permet d'exercer figure le «out-country right of appeal», dont la particularité est de ne pouvoir être mis en oeuvre qu'à la condition que l'intéressé ne se trouve pas sur le territoire national.

4 Mme Yiadom entend bénéficier de ce droit d'appel, mais conteste le bien-fondé de l'exigence à laquelle il est subordonné.

5 C'est donc le droit pour un ressortissant communautaire de rester sur le territoire d'un État membre, en vue d'y exercer une voie de recours dirigée contre la décision de refus d'entrée dont il est l'objet, qui se trouve au centre des questions posées par le juge de renvoi. Nous verrons cependant que la réponse à ces questions est, pour une grande part, conditionnée par la nature de la décision prise à l'encontre de l'intéressée dans l'affaire au principal.

I - La réglementation applicable

La directive 64/221/CEE

6 La directive du Conseil, du 25 février 1964, vise à la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique (1).

7 Elle concerne les dispositions relatives à l'entrée sur le territoire, à la délivrance ou au renouvellement du titre de séjour, ou à l'éloignement du territoire, qui sont prises, pour ces motifs, par les États membres (2).

8 L'un des principaux objectifs poursuivis par la directive est «... d'ouvrir dans chaque État membre, aux ressortissants des autres États membres, des possibilités suffisantes de recours contre les actes administratifs dans ce domaine» (3).

9 Selon son article 8, «L'intéressé doit pouvoir introduire contre la décision d'entrée, de refus de délivrance ou de refus de renouvellement du titre de séjour, ou contre la décision d'éloignement du territoire, les recours ouverts aux nationaux contre les actes administratifs».

10 Aux termes de l'article 9:

«1. En l'absence de possibilités de recours juridictionnels ou si ces recours ne portent que sur la légalité de la décision ou s'ils n'ont pas effet suspensif, la décision de refus de renouvellement du titre de séjour ou la décision d'éloignement du territoire d'un porteur d'un titre de séjour n'est prise par l'autorité administrative, à moins d'urgence, qu'après avis donné par une autorité compétente du pays d'accueil devant laquelle l'intéressé doit pouvoir faire valoir ses moyens de défense et se faire assister ou représenter dans les conditions de procédure prévues par la législation nationale.

Cette autorité doit être différente de celle qualifiée pour prendre la décision de refus de renouvellement du titre de séjour ou la décision d'éloignement.

2. Les décisions de refus de délivrance du premier titre de séjour ainsi que les décisions d'éloignement avant toute délivrance d'un tel titre sont soumises, à la demande de l'intéressé, à l'examen de l'autorité dont l'avis préalable est prévu au paragraphe 1. L'intéressé est alors autorisé à présenter en personne ses moyens de défense à moins que des raisons de sûreté de l'État ne s'y opposent.»

Le droit national

11 L'article 3, paragraphe 1, de l'Immigration (European Economic Area) Order 1994 (règlement relatif à l'immigration au sein de l'Espace économique européen) énonce ce qui suit:

«Sous réserve de l'article 15, paragraphe 1, un ressortissant de l'EEE est admis sur le territoire du Royaume-Uni s'il produit, à son arrivée, une carte d'identité ou un passeport national valable délivré par un autre État de l'EEE.»

12 L'article 15, paragraphe 1, du même règlement dispose:

«Une personne n'a pas le droit d'être admise au Royaume-Uni en vertu de l'article 3 si son éloignement est justifié par des raisons d'ordre public, de sécurité publique ou de santé publique ... cette personne peut se pourvoir contre le refus d'admission comme s'il s'agissait d'une personne qui s'est vu refuser l'entrée et qui a le droit de former un recours en vertu de la section 13, paragraphe 1, de la loi de 1971, mais le recours ne peut pas être formé aussi longtemps que la personne est au Royaume-Uni.»

13 Aux termes de l'article 13 de l'Immigration Act 1971 (loi relative à l'immigration), une personne qui s'est vu refuser l'entrée sur le territoire du Royaume-Uni a le droit de faire appel de cette décision devant un adjudicator (4). Son droit de recours est qualifié «out of country», ce qui signifie qu'il ne peut être exercé que lorsque l'intéressé a quitté le Royaume-Uni, à moins qu'il ne soit en possession d'un permis d'entrée ou d'un permis de travail en cours de validité (5).

14 En outre, l'Immigration Act 1971 prévoit, aux paragraphes 16 et 21 de son annexe 2, que toute personne susceptible de faire l'objet d'une enquête peut être détenue sous l'autorité d'un agent du service d'immigration, en attendant que son cas soit examiné et que la décision de lui accorder ou de lui refuser l'entrée sur le territoire soit prise. À défaut de détention, toute personne susceptible d'être ainsi détenue peut, avec l'autorisation écrite d'un agent du service de l'immigration, être temporairement admise au Royaume-Uni sans être détenue ou être remise en liberté. Cette admission temporaire peut comporter des restrictions portant, notamment, sur son emploi en qualité de salarié ou sur l'exercice d'une profession libérale.

15 En vertu de l'article 11, paragraphe 1, de l'Immigration Act 1971, est notamment réputée comme n'étant pas entrée sur le territoire du Royaume-Uni une personne n'ayant pas, par ailleurs, pénétré sur le territoire national, aussi longtemps qu'elle sera détenue ou temporairement admise ou laissée en liberté provisoire, au titre des pouvoirs conférés par l'annexe 2 de cette loi.

16 Les voies de recours précédemment décrites doivent être distinguées au Royaume-Uni de la demande de contrôle juridictionnel (Application for judicial Review) par laquelle la légalité des décisions des autorités publiques peut être contrôlée par les juridictions de droit commun, à savoir, en Angleterre, au pays de Galles et en Irlande du Nord, la High Court of Justice (6).

II - Faits et procédure

17 Mme Yiadom est arrivée sur le territoire britannique le 7 août 1995 (7). Elle était accompagnée d'une ressortissante ghanéenne qu'elle a faussement déclaré être sa fille. Cette dernière a été renvoyée au Ghana, tandis que Mme Yiadom était admise à titre temporaire, sous réserve de ne pas occuper d'emploi. La décision de refus d'entrée prise par le Secretary of State a été rendue le 3 mars 1996.

18 À la suite du refus d'entrée, l'autorisation d'admission temporaire a été prolongée, tandis que, le 31 mai 1996, la restriction liée à l'emploi était levée, dans l'attente qu'il soit statué sur le recours introduit par l'intéressée.

19 Le 17 mai 1996, Mme Yiadom avait, en effet, été autorisée à former un recours juridictionnel contre la décision du Secretary of State devant la High Court of Justice (England & Wales), Queen's Bench Division (Crown Office). Ce recours ayant été rejeté le 8 juillet 1997, elle a interjeté appel devant la Court of Appeal (England & Wales). Elle a fait valoir, d'une part, que sa présence ne constituait pas une menace véritablement ou suffisamment grave affectant un intérêt fondamental du Royaume-Uni et a dénoncé, d'autre part, l'existence d'un vice de procédure, caractérisé par le fait que la loi nationale ne lui reconnaît pas le droit, découlant des articles 8 et 9 de la directive, d'introduire un recours devant l'adjudicator tout en restant sur le territoire du Royaume-Uni («in-country right of appeal»). Elle soutient qu'un recours que la personne confrontée à un refus d'entrée sur le territoire d'un État membre ne peut introduire qu'après avoir quitté ce territoire («out-country right of appeal») contrevient à ces dispositions.

III - Les questions préjudicielles

20 Estimant que la solution du litige nécessite l'interprétation de la directive, la Court of Appeal (England & Wales) a décidé de surseoir à statuer et de poser à votre Cour les six questions préjudicielles suivantes:

«1) Les articles 8 et 9 de la directive 64/221/CEE du Conseil, du 25 février 1964, pour la coordination des mesures spéciales aux étrangers en matière de déplacement et de séjour justifiées par des raisons d'ordre public, de sécurité publique et de santé publique (JO 1964, 56, p. 850) s'appliquent-ils tous deux aux décisions d'entrée sur le territoire d'un État membre ou ces décisions d'entrée sont-elles couvertes uniquement par les dispositions de l'article 8?

2) S'il est répondu à la première question que l'...

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