Staatssecretaris van Financiën contra B.G.M. Verkooijen.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1999:329
Docket NumberC-35/98
Celex Number61998CC0035
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date24 June 1999
EUR-Lex - 61998C0035 - FR 61998C0035

Conclusions de l'avocat général La Pergola présentées le 24 juin 1999. - Staatssecretaris van Financiën contre B.G.M. Verkooijen. - Demande de décision préjudicielle: Hoge Raad - Pays-Bas. - Libre circulation des capitaux - Imposition directe des dividendes d'actions - Exonération - Limitation aux dividendes d'actions de sociétés ayant leur siège sur le territoire national. - Affaire C-35/98.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-04071


Conclusions de l'avocat général

I - Objet des présentes questions préjudicielles

1 La Cour a été saisie en l'espèce de trois questions préjudicielles relatives à l'interprétation de la directive 88/361/CEE (1) et des articles 6 et 52 du traité CE (respectivement devenus, après modification par le traité d'Amsterdam, articles 12 CE et 43 CE). En particulier, le Hoge Raad der Nederlanden (ci-après le «Hoge Raad») demande à la Cour d'indiquer si une disposition fiscale subordonnant l'exonération (à concurrence d'un montant déterminé) de l'impôt sur le revenu des personnes physiques pesant sur les dividendes distribués aux détenteurs d'actions ou de parts sociales à la condition qu'il s'agisse de dividendes de sociétés ayant leur siège dans l'État membre de résidence du contribuable est compatible avec les dispositions garantissant la libre circulation des capitaux, la non-discrimination sur la base de la nationalité et le libre établissement. Les questions préjudicielles posées à la Cour par le juge a quo sont les suivantes:

«1) Convient-il d'interpréter les dispositions combinées de l'article 1er, paragraphe 1, de la directive 88/361/CEE et du point I, 2 de l'annexe I à cette directive en ce sens qu'une restriction découlant d'une disposition de la législation relative à l'impôt sur le revenu qui, à concurrence d'un certain montant, exonère ces dividendes de la perception de l'impôt sur le revenu incombant aux actionnaires en limitant toutefois cette exonération aux dividendes d'actions de sociétés établies dans ledit État membre, est interdite depuis le 1er juillet 1990 en vertu de l'article 6, paragraphe 1, de ladite directive?

2) En cas de réponse négative à la première question, convient-il d'interpréter l'article 6 et/ou l'article 52 du traité CE (devenus, après modification, respectivement les articles 120 et 43 CE) en ce sens qu'une disposition restrictive telle que celle visée à la première question est incompatible avec lesdits articles 6 et/ou 52?

3. Les questions énoncées ci-dessus appellent-elles une réponse différente selon que la personne qui réclame l'application d'une telle exonération est un actionnaire ordinaire ou un travailleur salarié (d'une filiale) qui détient les actions concernées dans le cadre d'un plan d'épargne d'entreprise (werknemersspaarplan)?»

II - Les dispositions communautaires pertinentes

2 L'article 1er, paragraphe 1, de la directive prévoit que: «Les États membres suppriment les restrictions aux mouvements de capitaux intervenant entre les personnes résidant dans les États membres, sans préjudice des dispositions figurant ci-après. Pour faciliter l'application de la présente directive, les mouvements de capitaux sont classés selon la nomenclature établie à l'annexe I» (2). Le point I, sous 2, de l'annexe I de la directive, intitulée «Nomenclature des mouvements de capitaux visés à l'article 1er de la directive» (ci-après la «nomenclature»), cite, parmi les «investissements directs» la «participation à des entreprises nouvelles ou existantes en vue de créer ou maintenir des liens économiques durables». En vertu de son article 6, paragraphe 1, la directive est entrée en vigueur le 1er juillet 1990. Rappelons, enfin, que l'article 6 du traité interdit en règle générale toute discrimination exercée en raison de la nationalité, alors que l'article 52 du traité, lu en combinaison avec l'article 58 du traité CE (devenu article 48 CE), garantit pour les sociétés la liberté d'établissement en assurant le bénéfice du «traitement national», c'est-à-dire l'application, par l'État membre d'accueil, de la législation en vigueur pour ses ressortissants.

III - Le cadre normatif national

3 Il ressort du dossier que l'article 47b (3) de la Wet op de inkomstenbelasting (loi relative à l'impôt sur le revenu) de 1964 prévoyait (4) l'exonération, jusqu'à un certain montant, de l'impôt sur le revenu des personnes physiques pour les dividendes perçus sur les actions ou parts de capital social. Aux termes du paragraphe 1 dudit article: «L'exonération des dividendes s'applique au revenu d'actions ou parts sociales pris en compte comme revenu aux fins de la détermination du revenu brut, sur lequel a été opérée la retenue de l'impôt sur les dividendes» (5). L'article 1er, paragraphe 1, de la Wet op de dividendbelasting (loi relative à l'impôt sur les dividendes) de 1965 (6) prévoit que l'impôt est perçu, au moyen d'une retenue à la source, uniquement sur les dividendes de sociétés établies aux Pays-Bas. Par conséquent, l'exonération visée à l'article 47b s'applique uniquement aux dividendes distribués par des sociétés établies aux Pays-Bas. Il ne résulte nullement du dossier que l'on procède, lors de la liquidation de l'impôt sur le revenu, à la déduction de ce qui a déjà été perçu au moyen de l'impôt sur les dividendes. La disposition litigieuse ne prévoit aucune distinction selon que le titulaire des actions ayant engendré des dividendes soumis à l'impôt est ou non employé de la société émettrice en les ayant acquises dans le cadre d'un plan d'épargne d'entreprise.

4 Il ressort des travaux préparatoires relatifs à l'introduction de l'article 47b dans l'ordre juridique néerlandais qu'il faisait partie d'un train de mesures «destinées à améliorer les fonds propres des entreprises et à stimuler l'intérêt des personnes privées pour les actions néerlandaises» (7). Une deuxième justification n'est apparue que dans la dernière phase des travaux préparatoires, alors que le projet de loi était devant la première chambre des États généraux (Eerste Kamer): il s'agissait en effet de tenir également compte de l'effet «atténuant» qui s'attacherait à l'exonération des dividendes, par rapport à ce qui constitue en substance une «double imposition». Comme nous venons à l'instant de le souligner, le régime fiscal du royaume des Pays-Bas prévoit à la fois une retenue à source sur les dividendes et un impôt sur le revenu des personnes physiques bénéficiaires de ces dividendes (8).

IV - Les faits et la procédure au principal

5 En 1991, M. Verkooijen résidait aux Pays-Bas et y travaillait comme employé de la société néerlandaise Fina Nederland BV, indirectement contrôlée par la société anonyme Petrofina NV, dont le siège est en Belgique, et cotée aux bourses de Bruxelles et d'Anvers (ci-après «Petrofina»). Dans le cadre d'un plan d'épargne d'entreprise ouvert aux travailleurs du groupe Petrofina, M. Verkooijen a acquis des actions de ce groupe. En 1991, elles lui ont procuré des dividendes pour un montant égal environ à 2 337 HFL (9). Il ressort également du dossier que ces dividendes ont fait l'objet en Belgique d'une retenue à la source, mais n'ont pas été assujettis à une imposition aux Pays-Bas, à l'exception de celle qui, comme nous le verrons par la suite, a concerné M. Verkooijen lui-même. Celui-ci avait inclus les dividendes en question dans sa déclaration de revenu pour l'année fiscale 1991. En liquidant l'impôt sur le revenu de M. Verkooijen, le service des impôts a liquidé le revenu imposable sans appliquer, en ce qui concerne les dividendes distribués par Petrofina, l'exonération prévue à l'article 47b. L'administration a estimé en effet que M. Verkooijen ne pouvait pas bénéficier de l'exonération étant donné que celle-ci n'était prévue que pour les dividendes d'actions ou de parts sociales sur lesquels l'impôt (néerlandais) sur les dividendes avait déjà été prélevé. En substance, l'administration fiscale, au lieu de constater, dans le chef de M. Verkooijen, un revenu imposable de 164 697 HFL, a porté ce montant à 166 697 HFL (10).

6 Après avoir vainement introduit une réclamation à l'encontre de cette fixation, M. Verkooijen a attaqué devant le Gerechtshof te 's-Gravenhage la décision par laquelle le service des contributions avait confirmé ladite fixation. Faisant droit au recours, par arrêt du 10 avril 1996, le Gerechtshof a réduit le montant imposable de M. Verkooijen d'un montant égal à 2 000 HFL, en estimant que la réglementation fiscale néerlandaise faisait obstacle aux mouvements de capitaux et à la liberté d'établissement. A l'encontre de la décision du Gerechtshof, le Staatssecretaris van Financiën (11) a formé un recours en cassation devant le Hoge Raad, lequel a estimé devoir poser à la Cour les questions préjudicielles précitées. Nous nous proposons de les examiner sur le fond par référence au cadre juridique national tel que délimité ci-dessus. Nous rappellerons, autant que de besoin, les arguments avancés dans la présente procédure par la partie défenderesse et par les gouvernements des États membres ayant présenté des observations en l'espèce.

V - Le fond

A - La première question préjudicielle

7 Par sa première question, le juge néerlandais vous demande en substance si une disposition nationale exonérant partiellement de l'impôt sur le revenu des personnes physiques les seuls dividendes d'actions ou parts de sociétés établies dans l'État membre intéressé est compatible avec la directive.

1) L'ordre communautaire et les impôts directs

8 Se démarquant de la position prise par M. Verkooijen, le gouvernement du Royaume-Uni et la Commission, le gouvernement italien a, à titre préliminaire, soutenu que la mesure en cause ne limite pas la libre circulation des capitaux, parce que la matière des impôts directs n'est pas harmonisée au niveau communautaire: chaque État membre serait donc libre de déterminer en son sein les modalités de...

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