Arben Kaba contra Secretary of State for the Home Department.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1999:470
Date30 September 1999
Celex Number61998CC0356
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-356/98
EUR-Lex - 61998C0356 - FR 61998C0356

Conclusions de l'avocat général La Pergola présentées le 30 septembre 1999. - Arben Kaba contre Secretary of State for the Home Department. - Demande de décision préjudicielle: Immigration Adjudicator - Royaume-Uni. - Règlement (CEE) nº 1612/68 - Libre circulation des travailleurs - Avantage social - Droit pour le conjoint d'un travailleur migrant d'obtenir une autorisation de séjourner indéfiniment sur le territoire de l'Etat membre d'accueil. - Affaire C-356/98.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-02623


Conclusions de l'avocat général

1 Les questions préjudicielles sur lesquelles la Cour est invitée à statuer en l'espèce ont été posées par l'Immigration Adjudicator du Royaume-Uni dans le cadre d'un recours formé par M. Arben Kaba contre la décision du Secretary of State for the Home Department (ministre de l'Intérieur; ci-après le «Secretary of State» ou «SSHD») rejetant sa demande visant à obtenir un permis de séjour à durée indéterminée sur le territoire du Royaume-Uni.

I - Les dispositions communautaires pertinentes

2 L'article 7 du règlement (CEE) n_ 1612/68 du Conseil, du 15 octobre 1968, relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de la Communauté (1) (ci-après le «règlement»), prévoit que «1. Le travailleur ressortissant d'un État membre ne peut, sur le territoire des autres États membres, être, en raison de sa nationalité, traité différemment des travailleurs nationaux, pour toutes conditions d'emploi et de travail, notamment en matière de rémunération, de licenciement, et de réintégration professionnelle ou de réemploi s'il est tombé en chômage.

2. Il y bénéficie des mêmes avantages sociaux et fiscaux que les travailleurs nationaux».

L'article 10, paragraphe 1, du règlement dispose que «[o]nt le droit de s'installer avec le travailleur ressortissant d'un État membre employé sur le territoire d'un autre État membre, quelle que soit leur nationalité: a) son conjoint ...».

En vertu de l'article 3, paragraphe 1, de la directive 68/360/CEE du Conseil, du 15 octobre 1968, relative à la suppression des restrictions au déplacement et au séjour des travailleurs des États membres et de leur famille à l'intérieur de la Communauté (2) (ci-après la «directive»), les ressortissants communautaires et les membres de leur famille jouissent d'un droit d'entrée sur le territoire des autres États membres «sur simple présentation d'une carte d'identité ou d'un passeport en cours de validité». L'article 3, paragraphe 2, de la directive prévoit qu'un visa d'entrée peut être imposé aux membres de la famille d'un ressortissant communautaire migrant qui ne possèdent pas la nationalité d'un des États membres, sous réserve que les États membres accordent à ces personnes «toutes facilités pour obtenir les visas qui leur seraient nécessaires».

Conformément à l'article 4, paragraphe 1, de la directive, les travailleurs migrants et les membres de leur famille ont un droit de séjourner sur le territoire des États membres autres que celui d'origine, à la condition qu'ils soient en mesure de présenter une carte de séjour (3). En vertu de l'article 6, paragraphe 1, sous b), de la directive, la carte de séjour «doit avoir une durée de validité de cinq ans au moins à dater de la délivrance et être automatiquement renouvelable».

Aux termes de l'article 4, paragraphe 4, de la directive, «[l]orsqu'un membre de la famille n'a pas la nationalité d'un État membre, il lui est délivré un document de séjour ayant la même validité que celui délivré au travailleur dont il dépend».

II - Le cadre juridique national

A - La réglementation pertinente

3 L'entrée et le séjour sur le territoire du Royaume-Uni sont régis, notamment, par l'Immigration Act de 1971 (loi sur l'immigration; ci-après l'«Immigration Act») (4), par l'Immigration (European Economic Area) Order de 1994 (loi sur l'immigration concernant les personnes en provenance de l'Espace Économique Européen; ci-après l'«EEA Order») (5), qui ne vise pas les ressortissants britanniques ou les membres de leur famille et par lequel le Royaume-Uni a, inter alia, transposé la directive, et par les Immigration Rules de 1994 (ci-après les «Immigration Rules») (6), grâce auxquelles le Secretary of State a - en vertu des pouvoirs lui conférés par l'article 3, paragraphe 2, de l'Immigration Act - donné des instructions concernant l'application par l'administration des lois sur l'immigration relatives à l'entrée et au séjour sur le territoire du Royaume-Uni (7).

B - Autorisation de séjour (leave to remain)

4 En vertu de l'Immigration Act, les ressortissants du Royaume-Uni ont le droit d'y vivre, pénétrer, aller et venir sans permis ni entraves: ils jouissent du «right of abode» (8). A la différence des ressortissants communautaires (voir point 11 ci-après), les ressortissants des pays tiers qui n'ont pas ce droit ne peuvent vivre, travailler et s'installer au Royaume-Uni qu'après avoir obtenu une autorisation préalable (9). Une personne qui n'est pas ressortissante britannique peut obtenir une autorisation d'entrée ou, si elle est déjà présente sur le territoire du Royaume-Uni, une autorisation de séjour à durée déterminée ou indéterminée (10).

5 Ladite autorisation ne peut être subordonnée à des conditions que lorsque (qu'il s'agisse d'une autorisation d'entrée ou de séjour) elle est accordée à durée déterminée (par exemple, en l'assortissant de restrictions quant aux emplois que le titulaire de l'autorisation peut exercer au Royaume-Uni, ou de l'obligation pour l'intéressé de subvenir à ses besoins ou de disposer d'un logement sans avoir à recourir aux fonds publics) (11). L'autorisation peut être retirée lorsque l'intéressé ne respecte pas les conditions qu'elle énonce ou lorsque les critères de délivrance ne sont plus satisfaits (12).

C - (suite) En particulier, autorisation de séjour à durée indéterminée (indefinite leave to remain)

6 Le gouvernement du Royaume-Uni, qui est intervenu dans la présente procédure, nous dit que le titulaire d'une autorisation de séjour à durée indéterminée n'est soumis à aucune condition, restriction ou contrainte, et que cette autorisation ne peut pas lui être retirée. Une fois qu'elle a été accordée, l'autorisation peut être révoquée: en effet, dans des cas exceptionnels, et à la condition qu'il ne s'agisse pas d'un ressortissant britannique, l'intéressé peut être expulsé du Royaume-Uni (13). Normalement, une autorisation de séjour à durée indéterminée est accordée - en présence d'autres conditions - après une période de quatre ans de résidence continue sur le territoire du Royaume-Uni. Aux fins de la présente analyse, l'hypothèse qui revêt un intérêt particulier, parmi les différents cas dans lesquels un immigrant peut obtenir une autorisation de séjour à durée indéterminée, est celle d'une personne qui est admise sur le territoire du Royaume-Uni en tant que titulaire d'un permis de travail, à condition notamment que, pendant quatre ans, elle ait continué à exercer au Royaume-Uni l'emploi pour lequel elle y avait été admise (14). Toutefois, dans certains cas, l'autorisation peut être obtenue plus rapidement, à savoir en douze mois seulement au lieu du délai normal de quatre ans. Tel est le cas notamment, et pour ce qui nous occupe, lorsque le demandeur est le conjoint d'une personne «présente et établie» (present and settled) au Royaume-Uni.

7 Conformément aux dispositions de l'article 33, paragraphe 2 A, de l'Immigration Act, est considérée comme «établie» au Royaume-Uni une personne qui «y est ordinairement résidente, sans être soumise, en vertu des Immigration Laws, à quelque restriction que ce soit en ce qui concerne la période pendant laquelle elle peut séjourner sur le territoire» (15). Parmi les personnes «établies» au Royaume-Uni figurent non seulement les ressortissants britanniques qui y «résident normalement» (16), mais également les titulaires d'une autorisation de séjour à durée indéterminée. Selon la jurisprudence nationale pertinente évoquée par la juridiction de renvoi, un travailleur migrant communautaire qui établit sa résidence au Royaume-Uni n'y est pas, ipso facto, «établi» au sens de l'article 33, paragraphe 2 A, de l'Immigration Act (17).

D. - (suite) En particulier, autorisation de séjour à durée indéterminée pour le conjoint d'une personne présente et établie au Royaume-Uni (article 287 des Immigration Rules)

8 Dans la version en vigueur à l'époque des faits du litige au principal, l'article 287 des Immigration Rules - intitulé «Conditions pour [la délivrance de l'] autorisation de séjour à durée indéterminée au conjoint d'une personne présente et établie au Royaume-Uni» - disposait que

«[p]our que le conjoint d'une personne présente et tablie au Royaume-Uni puisse obtenir une autorisation de séjour à durée indéterminée, il faut que:

i) le demandeur ait été admis sur le territoire du Royaume-Uni ... et ait accompli une période [de résidence] de douze mois en tant que conjoint d'une personne présente et établie au Royaume-Uni; et que

ii) le demandeur soit toujours le conjoint de la personne qu'il a été autorisé à rejoindre ... et que le mariage subsiste; et que

iii) chacune des parties ait l'intention de vivre de façon permanente avec l'autre en tant que conjoint».

9 Le gouvernement du Royaume-Uni a souligné que l'expression «admis sur le territoire du Royaume-Uni» utilisée à l'article 287 doit être exclusivement comprise, dans le contexte des Immigration Rules, comme signifiant «admis au Royaume-Uni à la suite de l'obtention de l'autorisation de pénétrer» au Royaume-Uni prévue par l'article 281 des Immigration Rules, intitulé «Conditions pour l'autorisation de pénétrer au Royaume-Uni dans le but de s'y établir en qualité de conjoint d'une personne présente et établie au Royaume-Uni ...» (18). L'autorisation de pénétrer au Royaume-Uni en vue de s'y établir est accordée en cas de résultat...

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