Safety Hi-Tech Srl v S. & T. Srl.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1998:38
Docket NumberC-341/95
Celex Number61995CC0284
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date03 February 1998
EUR-Lex - 61995C0284 - FR 61995C0284

Conclusions jointes de l'avocat général Léger présentées le 3 février 1998. - Safety Hi-Tech Srl contre S. & T. Srl. - Demande de décision préjudicielle: Giudice di Pace di Genova - Italie. - Règlement (CE) nº 3093/94 - Mesures de protection de la couche d'ozone - Restrictions relatives à l'utilisation des hydrochlorofluorocarbures et des halons - Validité. - Affaire C-284/95. - Gianni Bettati contre Safety Hi-Tech Srl. - Demande de décision préjudicielle: Pretura circondariale di Avezzano - Italie. - Affaire C-341/95.

Recueil de jurisprudence 1998 page I-04301


Conclusions de l'avocat général

1 Les présentes questions préjudicielles, qui émanent du Giudice di Pace di Genova et de la Pretura circondariale di Avezzano, portent sur l'interprétation de l'article 5 du règlement (CE) n_ 3093/94 du Conseil, du 15 décembre 1994, relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone (1) (ci-après le «règlement»), ainsi que son appréciation en validité au regard, notamment, des articles 30 et 130 R du traité CE.

Il vous est demandé, en substance, de dire si cette disposition interdit totalement l'utilisation, l'importation, la mise en libre pratique ou la commercialisation des hydrochlorofluorocarbures (ci-après les «HCFC»), substances dont les effets sont nocifs pour la couche d'ozone, et, dans l'affirmative, si ces interdictions ne violent pas le traité.

Ces questions sont posées à la suite des litiges opposant la société Safety Hi-Tech Srl (ci-après «Safety»), producteur de matériel destiné à l'extinction d'incendies dont le produit de base, le NAF S III, est chimiquement composé d'HCFC Blend A (un certain type d'HCFC), à deux de ses clients, la société S. & T. Srl (ci-après «S. & T.») et M. Bettati, en sa qualité de propriétaire de l'entreprise Bettati Antincendio di Reggio Emilia (ci-après «Bettati»).

Le cadre réglementaire

2 Adopté sur la base de l'article 130 S du traité CE, ce règlement abroge et remplace les règlements (CEE) nos 594/91 (2) et 3952/92 (3) du Conseil. Il traduit, au niveau communautaire, l'acte par lequel sont tenus les engagements découlant de la convention de Vienne pour la protection de la couche d'ozone, du 22 mars 1985 (ci-après la «convention de Vienne»), et du protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone, du 16 septembre 1987 (4) (ci-après le «protocole de Montréal»), tel qu'adapté par le deuxième amendement adopté lors de la quatrième réunion qui s'est tenue à Copenhague en novembre 1992 (5) (ci-après le «deuxième amendement»). Les États membres et la Communauté sont parties à la convention de Vienne et au protocole de Montréal.

3 Le but du règlement est, en tenant compte des connaissances techniques et scientifiques disponibles et de l'existence de substances de remplacement moins nuisibles et pouvant être employées aux mêmes fins (6), d'éliminer progressivement les substances qui appauvrissent la couche d'ozone (7) et, nous le verrons, conformément à la convention de Vienne et au traité, d'introduire des mesures de contrôle plus rigoureuses que celles prévues par le deuxième amendement (8).

4 Aux termes de ses articles 1er et 2, le règlement s'applique à la production, l'importation, l'exportation, l'offre, l'utilisation et la récupération d'une série de substances qui sont appelées «substances réglementées», parmi lesquelles figurent les HCFC.

5 L'article 2, douzième tiret, du règlement définit les HCFC comme l'une des substances réglementées énumérées dans le groupe VIII de l'annexe I, y compris leurs isomères (9).

6 L'article 5 du règlement prévoit, en substance, que l'utilisation, l'importation, la mise en libre pratique et la commercialisation des HCFC sont progressivement interdites dans certains types d'utilisations. Il est libellé comme suit:

«1. A partir du premier jour du sixième mois suivant la date d'entrée en vigueur du présent règlement (10), l'utilisation des [HCFC] est interdite, excepté:

- en tant que solvants,

- en tant qu'agents réfrigérants,

...

2. A partir du 1er janvier 1996, l'utilisation des [HCFC] est interdite:

- dans les utilisations non confinées en tant que solvants, y compris ... lorsqu'ils ne sont pas mis en oeuvre ... s'il n'y a pas récupération des [HCFC], et dans les aérosols, excepté l'utilisation...

- dans des équipements fabriqués après le 31 décembre 1995 en vue des utilisations suivantes:

...

c) dans les climatiseurs de voitures;

d) dans la climatisation des transports publics par route.

3. A partir du 1er janvier 1998, l'utilisation des [HCFC] est interdite dans des équipements fabriqués après le 31 décembre 1997 pour les utilisations suivantes:

- dans la climatisation des transports publics par rail,

...

4. A partir du 1er janvier 2000, l'utilisation des [HCFC] est interdite dans des équipements fabriqués après le 31 décembre 1999 pour les utilisations suivantes:

- en tant que réfrigérants dans les dépôts et entrepôts frigorifiques du secteur public et de la distribution,

...

sauf lorsque des codes, règles de sécurité ou autres contraintes de cette nature limitent l'utilisation de l'ammoniac.

5. L'importation, la mise en libre pratique ou la commercialisation d'équipements faisant l'objet d'une restriction d'utilisation en vertu du présent article sont interdites à compter de la date à laquelle la restriction d'utilisation entre en vigueur. Les équipements dont il est établi qu'ils ont été fabriqués avant la date de restriction d'utilisation ne font pas l'objet d'une interdiction.

6. La Commission peut, conformément à la procédure définie à l'article 16 (11), compte tenu du progrès technique, compléter, réduire ou modifier la liste figurant aux paragraphes 1 à 4.»

7 En outre, l'article 4 du règlement détermine, notamment, la quantité d'HCFC que les producteurs et importateurs sont autorisés à commercialiser ou à utiliser pour leur propre compte au cours d'une période allant du 1er janvier 1995 au 31 décembre 2014. L'article 4, paragraphe 8, dernier tiret, du règlement précise qu'après 2014 cette commercialisation ou cette utilisation ne seront plus possibles.

Le contexte de l'affaire C-284/95

8 Safety a vendu à S. & T. du matériel destiné à la lutte contre les incendies contenant un produit de sa propre fabrication, le NAF S III, chimiquement composé d'HCFC. Un ordre de commande de S. & T. daté du 20 juillet 1995, la confirmation de cette commande datée du 24 juillet 1995 ainsi que la facture correspondante du 4 août 1995 figurent au dossier.

9 S. & T. a contesté la validité de ce contrat de vente en faisant valoir que le produit composé d'HCFC était interdit à la vente depuis le 1er juin 1995 en application de l'article 5, paragraphe 1, du règlement.

10 Le 8 août 1995, Safety a introduit une requête en injonction de payer auprès du Giudice di Pace di Genova. Elle lui a demandé d'ordonner à S. & T. de lui payer le montant prévu par le contrat majoré des accessoires et honoraires et, subsidiairement, de saisir votre Cour aux fins d'interprétation et d'appréciation en validité du règlement au regard du traité.

11 Estimant que la solution du litige dépend de l'appréciation en validité et de l'interprétation de l'article 5 du règlement, le juge de renvoi vous saisit des questions préjudicielles suivantes:

«1) Le règlement n_ 3093/94 du Conseil doit-il être interprété (à la lumière de l'article 130 R du traité) comme permettant la libre utilisation du halon (c'est-à-dire de produits ayant un effet sérieux sur l'environnement), en en limitant uniquement la production ou l'utilisation de la part des producteurs et en autorisant en revanche librement son importation, alors qu'il interdit totalement l'usage (et donc aussi bien la production que l'importation) des HCFC (c'est-à-dire de produits ayant un effet réduit sur l'environnement) à des fins non prévues à son article 5?

2) La règle fixée par le règlement n_ 3093/94 ne constitue-t-elle pas une mesure d'effet équivalant à des restrictions quantitatives puisque, en l'absence des justifications énoncées à l'article 36 du traité, elle limite la libre circulation d'un produit dans tout le territoire communautaire?

3) L'action de la Communauté et de ses institutions, dans le cadre de l'adoption du règlement n_ 3093/94 ainsi que, en particulier, dans les étapes suivant cette adoption, ne constitue-t-elle pas une intervention de pouvoirs publics destinée à renforcer la position dominante de certains opérateurs, une telle intervention constituant en soi un cas d'abus relevant de l'article 86 du traité?

4) Les règles destinées à la protection de l'environnement - et en particulier le règlement n_ 3093/94 - peuvent-elles être interprétées en ce sens qu'elles dérogent à la réglementation communautaire de la concurrence (en permettant ou en facilitant ainsi la réalisation d'ententes ou d'abus de position dominante), ou les interdictions énoncées dans la réglementation précitée sont-elles inconditionnelles et non susceptibles de dérogation, aucune dérogation ou limite n'étant autorisée, ni de la part de la Communauté ni de la part des différents États membres?»

Le contexte de l'affaire C-341/95

12 Le 31 juillet 1995, le Pretore di Avezzano a rendu, à l'encontre de Bettati, une ordonnance d'injonction de payer à Safety le montant correspondant au prix de vente restant dû pour du matériel fourni par elle et destiné à la lutte contre les incendies contenant également du NAF S III, majoré des intérêts et des frais.

13 Par citation notifiée le 26 septembre 1995, Bettati a formé opposition contre cette décision en faisant valoir que le matériel acheté s'était révélé, postérieurement à la passation du contrat, soit le 12 mai 1995, inapproprié et dénué d'utilité au point de justifier la résolution du contrat au titre de l'article 1497 du code civil italien, la commercialisation dudit matériel ayant été exclue et interdite, à partir du 1er juin 1995, par l'effet de l'article 5 du...

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