European Commission v Federal Republic of Germany.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2015:230
CourtCourt of Justice (European Union)
Date16 April 2015
Docket NumberC-591/13
Procedure TypeRecurso por incumplimiento – fundado
Celex Number62013CJ0591
62013CJ0591

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

16 avril 2015 ( *1 )

«Manquement d’État — Législation fiscale — Report de l’imposition de plus-values issues de la cession à titre onéreux de certains biens d’investissement — Recouvrement de l’impôt — Liberté d’établissement — Article 49 TFUE — Article 31 de l’accord EEE — Différence de traitement entre établissements stables situés sur le territoire d’un État membre et établissements stables situés sur le territoire d’un autre État membre de l’Union européenne ou de l’Espace économique européen — Proportionnalité»

Dans l’affaire C‑591/13,

ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 20 novembre 2013,

Commission européenne, représentée par MM. W. Mölls et W. Roels, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie requérante,

contre

République fédérale d’Allemagne, représentée par M. T. Henze et Mme K. Petersen, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, M. A. Ó Caoimh, Mme C. Toader, MM. E. Jarašiūnas et C. G. Fernlund (rapporteur), juges,

avocat général: M. Y. Bot,

greffier: M. K. Malacek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 26 novembre 2014,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en adoptant et en maintenant en vigueur des dispositions prévoyant que l’imposition des plus-values réalisées lors de la cession à titre onéreux de certains biens d’investissement (ci-après les «biens remplacés») est reportée, au moyen du «transfert» de ces plus-values vers des biens d’investissement nouvellement acquis ou nouvellement produits (ci-après les «biens de remplacement»), jusqu’à la cession de ces derniers biens, à condition toutefois que ceux-ci fassent partie du patrimoine d’un établissement stable de l’assujetti situé sur le territoire national, alors qu’un tel report est impossible lorsque ces biens font partie du patrimoine d’un établissement stable de l’assujetti situé dans un autre État membre de l’Union européenne ou dans un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3, ci-après l’«accord EEE»), la République fédérale d’Allemagne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 49 TFUE et 31 de cet accord.

Le cadre juridique

2

L’article 6b de la loi relative à l’impôt sur le revenu (Einkommensteuergesetz, ci-après l’«EStG») dispose à ses paragraphes 1 à 4:

«(1) Les assujettis qui cèdent

des terrains,

des végétaux qui poussent sur le terrain avec le terrain y afférent, lorsque lesdits végétaux font partie d’une exploitation agricole ou forestière,

des bâtiments ou des bateaux destinés à la navigation intérieure

peuvent, durant l’exercice au cours duquel a eu lieu la cession, porter un montant équivalant au maximum à la plus-value réalisée lors de la cession en déduction des frais d’acquisition ou de production des biens économiques visés à la deuxième phrase, qui ont été acquis ou produits durant l’exercice correspondant à la cession ou durant l’exercice précédent. La déduction est autorisée pour les frais d’acquisition ou de production

1.

de terrains,

si la plus-value a été réalisée lors de la cession de terrains,

2.

de végétaux qui poussent sur le terrain avec le terrain y afférent, lorsque les végétaux font partie d’une exploitation agricole ou forestière,

si la plus-value a été réalisée lors de la cession de terrains ou de la cession de végétaux qui poussent sur le terrain avec le terrain y afférent,

3.

de bâtiments,

si la plus-value a été réalisée lors de la cession de terrains, de végétaux qui poussent sur le terrain avec le terrain y afférent ou de bâtiments, ou

4.

de bateaux destinés à la navigation intérieure,

si la plus-value a été réalisée lors de la cession de bateaux destinés à la navigation intérieure.

Par acquisition ou production de bâtiments, on entend également leur extension, leur agrandissement ou leur rénovation. Dans ce cas, la plus-value ne peut être portée en déduction que pour des frais encourus pour l’extension, l’agrandissement ou la rénovation des bâtiments.

(2) Est considérée comme plus-value au sens du paragraphe 1, première phrase, la différence, après déduction des frais de cession, entre le prix de vente et la valeur comptable qui aurait été attribuable au bien économique vendu au moment de la cession. La valeur comptable est la valeur qu’il convient d’attribuer à un bien économique en vertu de l’article 6.

(3) Si l’assujetti n’a pas opéré la déduction visée au paragraphe 1, il peut, au cours de l’exercice durant lequel a eu lieu la cession, constituer une réserve minorant son bénéfice fiscal. L’assujetti peut, en tenant compte des restrictions visées au paragraphe 1, deuxième à quatrième phrases, porter un montant à concurrence, au maximum, de cette réserve en déduction des frais d’acquisition ou de production des biens économiques décrits au paragraphe 1, deuxième phrase, qui ont été acquis ou produits au cours des quatre exercices suivants, durant l’exercice correspondant à leur acquisition ou à leur production. Le délai de quatre ans est porté à six ans pour les bâtiments nouveaux, lorsque leur production a commencé avant la fin du quatrième exercice suivant la constitution de la réserve. La réserve doit être passée en profits à hauteur du montant déduit. Si une réserve existe encore à la fin du quatrième exercice suivant sa constitution, elle doit être passée en profits à cette date, à moins qu’une déduction des frais de production de bâtiments dont la production a commencé à ce moment-là ne soit envisageable; si la réserve existe encore à la fin du sixième exercice suivant sa constitution, elle doit être passée en profits à cette date.

(4) L’application des paragraphes 1 et 3 est subordonnée aux conditions suivantes:

1.

l’assujetti doit déterminer le bénéfice en application de l’article 4, paragraphe 1, ou de l’article 5,

2.

les biens économiques cédés doivent avoir fait partie intégrante du patrimoine d’un établissement stable situé sur le territoire national depuis au moins six ans sans interruption au moment de la cession,

3.

les biens économiques acquis ou produits doivent faire partie intégrante du patrimoine d’un établissement stable situé sur le territoire national,

4.

la plus-value issue de la vente ne doit pas être omise lors du calcul du bénéfice imposable sur le territoire national, et

5.

la déduction en vertu du paragraphe 1 ainsi que la constitution de la réserve et sa passation en profits en vertu du paragraphe 3 doivent pouvoir être retracées dans la comptabilité.

La déduction en vertu des paragraphes 1 et 3 n’est pas autorisée pour les biens économiques faisant partie d’une exploitation agricole ou forestière ou utilisés dans le cadre d’une activité indépendante lorsque la plus-value résulte de la cession des biens économiques d’une entreprise industrielle ou commerciale.»

La procédure précontentieuse

3

Le 15 mai 2009, la Commission a adressé une lettre de mise en demeure à la République fédérale d’Allemagne. Par cette lettre, elle a attiré l’attention de cet État membre sur le risque d’incompatibilité de l’article 6b de l’EStG avec la libre circulation des capitaux.

4

Par une lettre du 13 juillet 2009, le République fédérale d’Allemagne a exprimé son désaccord sur la position de la Commission, en faisant valoir que la réglementation litigieuse relève non pas de la libre circulation des capitaux, mais uniquement de la liberté d’établissement, avec laquelle elle est compatible.

5

Le 7 mai 2010, la Commission a adressé à la République fédérale d’Allemagne une lettre de mise en demeure complémentaire, dans laquelle elle a admis que cette réglementation relève de la liberté d’établissement, mais a considéré, après avoir examiné les arguments de cet État membre, que ladite réglementation enfreint les articles 49 TFUE et 31 de l’accord EEE.

6

Par une lettre du 7 juillet 2010, la République fédérale d’Allemagne a contesté la position de la Commission, en maintenant que la réglementation en cause est compatible avec la liberté d’établissement.

7

Le 30 septembre 2011, la Commission a adressé à la République fédérale d’Allemagne un avis motivé dans lequel elle a confirmé sa position exposée dans la lettre de mise en demeure complémentaire, et a invité la République fédérale d’Allemagne à se conformer à cet avis motivé dans un délai de deux mois à compter de sa notification.

8

La République fédérale d’Allemagne ayant, dans sa réponse du 28 novembre 2011, réitéré que la position de la Commission était erronée, cette dernière a décidé d’introduire le présent recours.

Sur le recours

Sur la recevabilité

9

La République fédérale d’Allemagne conteste la recevabilité du présent recours pour deux motifs tirés, en substance, d’une part, du retard apporté à l’introduction du recours et, d’autre part, de la modification de l’objet de ce dernier.

Sur le retard apporté à l’introduction du recours

– Argumentation des parties

10

La République fédérale d’Allemagne soutient que la Commission n’était plus en droit de former un recours en raison du fait que, à l’issue de la procédure écrite, cette institution a trop tardé à introduire son recours. Elle aurait ainsi commis un abus de droit dès lors qu’aucune raison objective ne justifiait le retard constaté. Au cours de cette période d’attente, la Commission...

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