Beamglow Ltd v European Parliament, Council of the European Union and Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2005:453
CourtGeneral Court (European Union)
Docket NumberT-383/00
Date14 December 2005
Celex Number62000TJ0383
Procedure TypeRecurso por responsabilidad - infundado

Affaire T-383/00

Beamglow Ltd

contre

Parlement européen e.a.

« Responsabilité non contractuelle de la Communauté — Incompatibilité du régime communautaire d’importation des bananes avec les règles de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) — Instauration par les États-Unis d’Amérique de mesures de rétorsion sous la forme d’une surtaxe douanière prélevée sur les importations en provenance de la Communauté en vertu d’une autorisation de l’OMC — Décision de l’organe de règlement des différends de l’OMC — Effets juridiques — Responsabilité de la Communauté en l’absence de comportement illicite de ses organes — Lien de causalité — Préjudice anormal et spécial »

Arrêt du Tribunal (grande chambre) du 14 décembre 2005

Sommaire de l’arrêt

1. Recours en indemnité — Objet — Réparation du préjudice découlant d’une surtaxe douanière prélevée sur les importations en provenance de la Communauté en vertu d’une autorisation de l’Organisation mondiale du commerce — Incompatibilité du régime communautaire d’importation des bananes avec les règles de l’OMC — Recours dirigé contre le Parlement européen — Irrecevabilité

[Traité CE, art. 43, § 2, al. 3 (devenu, après modification, art. 37, § 2, al. 3, CE) ; règlement du Conseil nº 1637/98 ; règlement de la Commission nº 2362/98]

2. Responsabilité non contractuelle — Conditions — Violation suffisamment caractérisée d’une règle ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers — Institution ne disposant d’aucune marge d’appréciation — Suffisance d’une simple infraction au droit communautaire

(Art. 288, al. 2, CE)

3. Recours en indemnité — Organisation mondiale du commerce — Impossibilité d’invoquer les accords OMC pour contester la légalité d’un acte communautaire — Exceptions — Acte communautaire visant à en assurer l’exécution ou s’y référant expressément et précisément — Régime communautaire d’importation des bananes — Incompatibilité avec les règles de l’OMC constatée par l’organe de règlement des différends de l’OMC — Contrôle juridictionnel de la légalité de ce régime au regard des règles de l’OMC — Exclusion

(Art. 288, al. 2, CE ; règlements du Conseil nº 404/93 et nº 1637/98 ; règlement de la Commission nº 2362/98)

4. Responsabilité non contractuelle — Conditions — Absence de comportement illicite des institutions communautaires — Préjudice réel, lien de causalité et préjudice anormal et spécial — Caractère cumulatif

(Art. 288, al. 2, CE)

5. Responsabilité non contractuelle — Conditions — Maintien d’un régime communautaire d’importation des bananes incompatible avec les accords OMC — Préjudice résultant de l’instauration d’une mesure de rétorsion par l’administration américaine — Lien de causalité

(Art. 288, al. 2, CE)

6. Responsabilité non contractuelle — Conditions — Absence de comportement illicite des institutions communautaires — Préjudice résultant de l’incompatibilité du régime communautaire d’importation des bananes avec les accords OMC — Préjudice anormal — Absence — Responsabilité de la Communauté — Exclusion

(Art. 288, al. 2, CE)

1. Est irrecevable en tant que dirigé contre le Parlement européen le recours en réparation du préjudice censé découler de la surtaxe douanière dont le prélèvement par les États-Unis d’Amérique sur les importations d’un opérateur économique a été autorisé par l’organe de règlement des différends (ORD) de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), à la suite de la constatation de l’incompatibilité du régime communautaire d’importation des bananes avec les accords de l’OMC.

En effet, le demandeur en indemnité est justifié à diriger son action contre la Communauté représentée par la Commission et le Conseil, dès lors que, conformément aux prescriptions du paragraphe 2, troisième alinéa, de l’article 43 du traité (devenu, après modification, article 37 CE), la première a proposé et, le second, adopté la réglementation agricole communautaire dont l’illégalité serait à l’origine du préjudice allégué. Cette disposition ne confère en la matière aucune compétence décisionnelle au Parlement et lui permet seulement d’intervenir en qualité d’organe consultatif au cours de la procédure d’adoption par le seul Conseil de règlements, de directives et de décisions relatives à la politique agricole commune.

Il n’apparaît donc pas que le Parlement ait pu contribuer à engager la responsabilité non contractuelle que la Communauté est susceptible d’encourir du fait de l’incompatibilité ainsi constatée, car tant l’adoption du règlement nº 1637/98 modifiant le règlement nº 404/93, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la banane, et du règlement nº 2362/98, portant modalités d’application du règlement nº 404/93, considérés par l’ORD comme incompatibles avec les accords OMC que l’absence supposée de mise en conformité du régime communautaire d’importation des bananes doivent être considérées comme relevant des seules compétences du Conseil et de la Commission.

(cf. points 69-70, 73-75)

2. L’engagement de la responsabilité non contractuelle de la Communauté au sens de l’article 288, deuxième alinéa, CE pour comportement illicite de ses organes est subordonné à la réunion d’un ensemble de conditions, à savoir l’illégalité du comportement reproché aux institutions, la réalité du dommage et l’existence d’un lien de causalité entre le comportement allégué et le préjudice invoqué. Dès lors que l’une de ces conditions n’est pas remplie, le recours doit être rejeté dans son ensemble sans qu’il soit nécessaire d’examiner les autres conditions.

S’agissant de la première de ces conditions, le comportement illégal reproché à une institution communautaire doit consister en une violation suffisamment caractérisée d’une règle de droit ayant pour objet de conférer des droits aux particuliers. Le critère décisif permettant de considérer que cette exigence est remplie est celui de la méconnaissance manifeste et grave, par l’institution communautaire concernée, des limites qui s’imposent à son pouvoir d’appréciation. Lorsque l’institution ne dispose que d’une marge d’appréciation considérablement réduite, voire inexistante, la simple infraction au droit communautaire peut suffire pour établir l’existence d’une violation suffisamment caractérisée.

(cf. points 95-99)

3. Les accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ne figurent pas, en principe, compte tenu de leur nature et de leur économie, au nombre des normes au regard desquelles le juge communautaire contrôle la légalité de l’action des institutions communautaires.

Par conséquent, la violation éventuelle des règles de l’OMC par les institutions n’est pas, en principe, susceptible d’engager la responsabilité non contractuelle de la Communauté.

Ce n’est que dans l’hypothèse où la Communauté a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l’OMC ou dans l’occurrence où l’acte communautaire renvoie expressément à des dispositions précises des accords OMC qu’il appartiendrait au juge communautaire de contrôler la légalité du comportement des institutions au regard des règles de l’OMC.

Or, même en présence de la décision de l’organe de règlement des différends de l’OMC constatant l’incompatibilité avec les règles de l’OMC du régime d’importation des bananes dans la Communauté, tel qu’il a été instauré par le règlement nº 404/93, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la banane, et modifié par la suite par les règlements nº 1637/98 et nº 2362/98, aucune de ces deux exceptions ne trouve application de façon à permettre que le juge communautaire contrôle la légalité de la réglementation communautaire en question au regard des règles de l’OMC.

Sont dépourvues d’incidence à cet égard l’expiration du délai imparti par l’OMC à la Communauté pour mettre en conformité avec les règles de l’OMC la mesure déclarée incompatible et l’autorisation donnée par l’OMC au membre lésé d’adopter, à l’encontre de la Communauté, des mesures de compensation et de suspension de concessions commerciales.

(cf. points 127, 130-132, 142)

4. Dans l’hypothèse d’un dommage engendré par un comportement des institutions de la Communauté dont le caractère illégal n’est pas démontré, la responsabilité non contractuelle de la Communauté peut être engagée, dès lors que sont cumulativement remplies les conditions relatives à la réalité du préjudice, au lien de causalité entre celui-ci et le comportement des institutions communautaires, ainsi qu’au caractère anormal et spécial du préjudice en question.

(cf. point 174)

5. Les principes communs aux droits des États membres auxquels renvoie l’article 288, deuxième alinéa, CE ne sauraient être invoqués au soutien de l’existence d’une obligation incombant à la Communauté de réparer toute conséquence préjudiciable, même éloignée, de comportements de ses organes. En effet, la condition relative au lien de causalité exigée par cette disposition suppose l’existence d’un lien suffisamment direct de cause à effet entre le comportement des institutions communautaires et le dommage.

À cet égard, un tel lien direct existe entre, d’une part, le maintien en vigueur par le Conseil et la Commission d’un régime d’importation des bananes incompatible avec les accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et, d’autre part, le préjudice subi par un opérateur économique du fait de l’instauration d’une surtaxe douanière américaine frappant ses produits. La décision unilatérale des États-Unis d’Amérique d’instaurer cette surtaxe n’est pas de nature à rompre ledit lien de causalité. En effet, le comportement des institutions en question a nécessairement induit l’adoption de la mesure de rétorsion par l’administration américaine dans le respect du système de règlement des différends de l’OMC accepté par la Communauté, de sorte que ce comportement doit être regardé comme la cause déterminante du préjudice subi.

(cf. points 192-193, 198-200, 204)

6. S’agissant des dommages que peuvent...

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