Carrefour Hypermarchés SAS v ITM Alimentaire International SASU.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2017:95
Date08 February 2017
Celex Number62015CJ0562
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-562/15
62015CJ0562

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

8 février 2017 ( 1 )

«Renvoi préjudiciel — Publicité comparative — Directive 2006/114/CEArticle 4Directive 2005/29/CE — Article 7 — Comparaison objective des prix — Omission trompeuse — Publicité comparant les prix de produits vendus dans des magasins de tailles ou de formats différents — Licéité — Information substantielle — Degré et support de l’information»

Dans l’affaire C‑562/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la cour d’appel de Paris (France), par décision du 29 octobre 2015, parvenue à la Cour le 4 novembre 2015, dans la procédure

Carrefour Hypermarchés SAS

contre

ITM Alimentaire International SASU,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, Mme A. Prechal, M. A. Rosas, Mme C. Toader et M. E. Jarašiūnas (rapporteur), juges,

avocat général : M. H. Saugmandsgaard Øe,

greffier : M. V. Tourrès, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 6 juillet 2016,

considérant les observations présentées :

pour Carrefour Hypermarchés SAS, par Mes B. Moreau-Margotin, M. Karsenty-Ricard, B. Lhomme-Houzai et F. Guerre, avocates,

pour ITM Alimentaire International SASU, par Mes P. Deprez et J.‑C. André, avocats,

pour le gouvernement français, par MM. D. Colas et J. Traband, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme C. Valero et M. D. Roussanov, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 19 octobre 2016,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 4, sous a) et c), de la directive 2006/114/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, en matière de publicité trompeuse et de publicité comparative (JO 2006, L 376, p. 21), et de l’article 7 de la directive 2005/29/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2005, relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs dans le marché intérieur et modifiant la directive 84/450/CEE du Conseil et les directives 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE du Parlement européen et du Conseil et le règlement (CE) no 2006/2004 du Parlement européen et du Conseil (« directive sur les pratiques commerciales déloyales ») (JO 2005, L 149, p. 22).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant ITM Alimentaire International SASU (ci-après « ITM ») à Carrefour Hypermarchés SAS (ci-après « Carrefour ») au sujet d’une campagne publicitaire télévisée, lancée par cette dernière, comparant les prix de produits de grandes marques pratiqués dans des magasins de l’enseigne Carrefour et dans des magasins d’enseignes concurrentes.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

Selon l’article 2, sous b), de la directive 2006/114, on entend par « publicité trompeuse », aux fins de cette directive, « toute publicité qui, d’une manière quelconque, y compris sa présentation, induit en erreur ou est susceptible d’induire en erreur les personnes auxquelles elle s’adresse ou qu’elle touche et qui, en raison de son caractère trompeur, est susceptible d’affecter leur comportement économique ou qui, pour ces raisons, porte préjudice ou est susceptible de porter préjudice à un concurrent ».

4

L’article 4 de cette directive dispose :

« Pour ce qui concerne la comparaison, la publicité comparative est licite dès lors que les conditions suivantes sont remplies :

a)

elle n’est pas trompeuse au sens de l’article 2, [sous] b, de l’article 3 et de l’article 8, paragraphe 1, de la présente directive ou des articles 6 et 7 de la directive 2005/29 [...] ;

b)

elle compare des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif ;

c)

elle compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens et services, y compris éventuellement le prix ;

d)

elle n’entraîne pas le discrédit ou le dénigrement des marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens, services, activités ou situation d’un concurrent ;

e)

pour les produits ayant une appellation d’origine, elle porte dans chaque cas sur des produits ayant la même appellation ;

f)

elle ne tire pas indûment profit de la notoriété attachée à une marque, à un nom commercial ou à d’autres signes distinctifs d’un concurrent ou de l’appellation d’origine de produits concurrents ;

g)

elle ne présente pas un bien ou un service comme une imitation ou une reproduction d’un bien ou d’un service portant une marque ou un nom commercial protégés ;

h)

elle n’est pas source de confusion parmi les professionnels, entre l’annonceur et un concurrent ou entre les marques, noms commerciaux, autres signes distinctifs, biens ou services de l’annonceur et ceux d’un concurrent. »

5

L’article 6 de la directive 2005/29, intitulé « Actions trompeuses », dispose :

« 1. Une pratique commerciale est réputée trompeuse si elle contient des informations fausses, et qu’elle est donc mensongère ou que, d’une manière quelconque, y compris par sa présentation générale, elle induit ou est susceptible d’induire en erreur le consommateur moyen, même si les informations présentées sont factuellement correctes, en ce qui concerne un ou plusieurs des aspects ci-après et que, dans un cas comme dans l’autre, elle l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement :

[...]

d)

le prix ou le mode de calcul du prix, ou l’existence d’un avantage spécifique quant au prix ;

[...] »

6

L’article 7 de la directive 2005/29, intitulé « Omissions trompeuses », prévoit :

« 1. Une pratique commerciale est réputée trompeuse si, dans son contexte factuel, compte tenu de toutes ses caractéristiques et des circonstances ainsi que des limites propres au moyen de communication utilisé, elle omet une information substantielle dont le consommateur moyen a besoin, compte tenu du contexte, pour prendre une décision commerciale en connaissance de cause et, par conséquent, l’amène ou est susceptible de l’amener à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement.

2. Une pratique commerciale est également considérée comme une omission trompeuse lorsqu’un professionnel, compte tenu des aspects mentionnés au paragraphe 1, dissimule une information substantielle visée audit paragraphe ou la fournit de façon peu claire, inintelligible, ambiguë ou à contretemps, ou lorsqu’il n’indique pas sa véritable intention commerciale dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du contexte et lorsque, dans l’un ou l’autre cas, le consommateur moyen est ainsi amené ou est susceptible d’être amené à prendre une décision commerciale qu’il n’aurait pas prise autrement.

3. Lorsque le moyen de communication utilisé aux fins de la pratique commerciale impose des limites d’espace ou de temps, il convient, en vue de déterminer si des informations ont été omises, de tenir compte de ces limites ainsi que de toute mesure prise par le professionnel pour mettre les informations à la disposition du consommateur par d’autres moyens.

[...] »

Le droit français

7

L’article L. 121-8 du code de la consommation, dans sa version en vigueur à la date des faits en cause au principal, dispose :

« Toute publicité qui met en comparaison des biens ou des services en identifiant, implicitement ou explicitement, un concurrent ou des biens ou services offerts par le concurrent n’est licite que si :

Elle n’est pas trompeuse ou de nature à induire en erreur ;

Elle porte sur des biens ou services répondant aux mêmes besoins ou ayant le même objectif ;

Elle compare objectivement une ou plusieurs caractéristiques essentielles, pertinentes, vérifiables et représentatives de ces biens ou services, dont le prix peut faire partie. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

8

Au cours du mois de décembre 2012, Carrefour a lancé une campagne publicitaire télévisée de grande ampleur intitulée « garantie prix le plus bas Carrefour » comparant les prix de 500 produits de grandes marques pratiqués dans des magasins à l’enseigne Carrefour et dans des magasins d’enseignes concurrentes, parmi lesquels figuraient les magasins Intermarché, et offrant au consommateur de lui rembourser deux fois la différence de prix s’il trouvait moins cher ailleurs.

9

Les spots publicitaires diffusés faisaient apparaître des écarts de prix favorables à Carrefour et, en particulier, les produits vendus dans les magasins de l’enseigne Intermarché y étaient montrés comme étant systématiquement plus chers que ceux de Carrefour. À partir du deuxième spot télévisé, les magasins Intermarché sélectionnés pour la comparaison étaient tous des supermarchés et les magasins Carrefour étaient tous des hypermarchés. Cette information ne figurait que sur la page d’accueil du site Internet de Carrefour avec la mention en petits caractères que la garantie était « valable uniquement dans les magasins Carrefour et Carrefour Planet » et qu’elle n’était donc « pas valable dans les magasins Carrefour Market, Carrefour Contact, Carrefour City ». Dans les spots publicitaires télévisés, apparaissait, en dessous du nom Intermarché, en lettres plus petites, la mention « Super ».

10

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