Ryanair Ltd v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2008:585
CourtGeneral Court (European Union)
Docket NumberT-196/04
Date17 December 2008
Celex Number62004TJ0196
Procedure TypeRecours en annulation - fondé

Affaire T-196/04

Ryanair Ltd

contre

Commission des Communautés européennes

« Aides d’État — Accords conclus par la Région wallonne et l’aéroport de Charleroi Bruxelles Sud avec la compagnie aérienne Ryanair — Existence d’un avantage économique — Application du critère de l’investisseur privé en économie de marché »

Sommaire de l'arrêt

1. Aides accordées par les États — Notion — Appréciation selon le critère de l'investisseur privé

(Art. 87, § 1, CE)

2. Aides accordées par les États — Notion — Appréciation selon le critère de l'investisseur privé — Autorité publique gérant des installations aéroportuaires relevant du domaine public

(Art. 87, § 1, CE)

1. Dans le cadre de l’application du critère de l’investisseur privé, il est nécessaire d’envisager la transaction commerciale dans son ensemble en vue de vérifier si l’entité étatique et l’entité contrôlée par celle-ci, prises ensemble, se sont comportées comme des opérateurs rationnels en économie de marché. En effet, la Commission a l’obligation de tenir compte, dans l’évaluation des mesures litigieuses, de tous les éléments pertinents et de leur contexte, y compris ceux relatifs à la situation de la ou des autorités dispensatrices desdites mesures.

(cf. point 59)

2. Aux fins de déterminer si une mesure étatique constitue un avantage au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, une distinction doit être établie entre les obligations que l’État doit assumer en tant qu’entreprise exerçant une activité économique et les obligations qui peuvent lui incomber en tant que puissance publique. S’il apparaît nécessaire, dans le cas où l’État agit en qualité d’entreprise opérant comme un investisseur privé, d’analyser son comportement à la lumière du principe de l’investisseur privé en économie de marché, l’application dudit principe doit être exclue dans l’hypothèse où celui-ci agit en tant que puissance publique. En effet, dans cette dernière hypothèse, le comportement de l’État ne peut jamais être comparé à celui d’un opérateur ou d’un investisseur privé en économie de marché.

Constitue une activité économique toute activité consistant à offrir des biens ou des services sur un marché donné. La fixation du montant des redevances d’atterrissage, ainsi que la garantie d’indemnisation qui s’y rattache, est une activité directement rattachable à la gestion des infrastructures aéroportuaires, laquelle constitue une activité économique. Les charges aéroportuaires fixées par une autorité publique doivent être considérées comme une rémunération des prestations de services rendus au sein de l’aéroport, nonobstant le fait que le lien direct et manifeste existant entre le niveau des charges et le service rendu aux usagers est faible.

Aussi, la mise à la disposition des compagnies aériennes, par une autorité publique, d’installations aéroportuaires, ainsi que leur gestion, moyennant le paiement d’une redevance dont le taux est fixé librement par celle-ci, peuvent être qualifiées d’activités de nature économique, de telles activités étant certes exécutées sur le domaine public, mais ne relevant pas, de ce seul fait, de l’exercice de prérogatives de puissance publique. En effet, ces activités ne se rattachent pas, du fait de leur nature, de leur objet et des règles auxquelles elles sont soumises, à l’exercice de prérogatives qui sont typiquement des prérogatives de puissance publique.

Que le propriétaire d’installations aéroportuaires relevant du domaine public soit une autorité publique ne saurait ainsi exclure qu’il puisse être considéré comme une entité exerçant une activité économique.

Pareillement, la seule circonstance que l'autorité publique dispose de pouvoirs de nature réglementaire en matière de fixation des redevances aéroportuaires n'exclut pas que l'examen d'un système de rabais desdites redevances doive s'effectuer à la lumière du principe de l'investisseur privé en économie de marché, un tel système pouvant être mis en place par un opérateur privé.

(cf. points 84-85, 87-89, 91-92, 101)








ARRÊT DU TRIBUNAL (huitième chambre élargie)

17 décembre 2008 (*)

« Aides d’État – Accords conclus par la Région wallonne et l’aéroport de Charleroi Bruxelles Sud avec la compagnie aérienne Ryanair – Existence d’un avantage économique – Application du critère de l’investisseur privé en économie de marché »

Dans l’affaire T‑196/04,

Ryanair Ltd, établie à Dublin (Irlande), représentée initialement par MM. D. Gleeson, A. Collins, SC, V. Power et D. McCann, solicitors, puis par MM. Power, McCann, solicitors, J. Swift, QC, J. Holmes, barrister, et Me G. Berrisch, avocat,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M. N. Khan, en qualité d’agent,

partie défenderesse,

soutenue par

Association of European Airlines (AEA), représentée par Mes S. Völcker, F. Louis et J. Heithecker, avocats,

partie intervenante,

ayant pour objet une demande d’annulation de la décision 2004/393/CE de la Commission, du 12 février 2004, concernant les avantages consentis par la Région wallonne et Brussels South Charleroi Airport à la compagnie aérienne Ryanair lors de son installation à Charleroi (JO L 137, p. 1),

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE
DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES (huitième chambre élargie),

composé de Mme M. E. Martins Ribeiro, président, MM. D. Šváby, S. Papasavvas, N. Wahl (rapporteur) et A. Dittrich, juges,

greffier : Mme K. Pocheć, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 12 mars 2008,

rend le présent

Arrêt

Antécédents du litige

1 La requérante, Ryanair Ltd, est la première et la plus importante compagnie aérienne à bas prix d’Europe. Elle a été pionnière du modèle commercial dit « low cost » en Europe, qui consiste à minimiser les coûts et à maximiser l’efficience dans tous les domaines de son activité afin d’offrir les prix les plus bas sur chaque marché et ainsi d’attirer de gros volumes de passagers.

2 Ryanair a commencé ses opérations depuis l’aéroport de Charleroi (Belgique) en mai 1997 par l’ouverture d’une liaison aérienne à destination de Dublin.

3 Au cours de l’année 2000, des négociations ont été entreprises au sujet de l’installation par Ryanair de sa première base continentale à Charleroi.

4 Au début du mois de novembre 2001, Ryanair a conclu deux accords distincts (ci-après les « accords litigieux »), l’un avec la Région wallonne, propriétaire de l’aéroport de Charleroi, l’autre avec Brussels South Charleroi Airport (BSCA), entreprise publique contrôlée par la Région wallonne qui, depuis le 4 juillet 1991, gère et exploite cet aéroport en qualité de concessionnaire.

5 Conformément aux termes du premier accord, la Région wallonne a, outre une modification des heures d’ouverture de l’aéroport, octroyé à Ryanair une réduction de l’ordre de 50 % des redevances d’atterrissage par rapport au niveau réglementaire et s’est engagée à indemniser Ryanair pour toute perte de bénéfice résultant directement ou indirectement d’une modification décrétale ou réglementaire de toutes les taxes aéroportuaires ou des horaires d’ouverture de l’aéroport.

6 En application du second accord, Ryanair s’est engagée à baser entre deux et quatre avions à l’aéroport de Charleroi et à effectuer, sur une période de quinze ans, un minimum de trois rotations par jour et par avion. Elle s’est engagée par ailleurs, en cas de « retrait important » par celle-ci de l’aéroport, à rembourser la totalité ou une partie des versements effectués par BSCA (voir points 7 et 9 ci‑après).

7 Quant à BSCA, elle s’est engagée à contribuer aux coûts supportés par Ryanair pour l’installation de sa base. Cette contribution se décomposait comme suit :

– un versement pouvant s’élever à 250 000 euros pour les frais d’hôtel et de subsistance du personnel de Ryanair ;

– un versement de 160 000 euros par nouvelle route ouverte à concurrence de trois routes au maximum par avion basé à Charleroi, soit un maximum de 1 920 000 euros ;

– un versement de 768 000 euros au titre des frais de recrutement et d’entraînement du personnel navigant affecté aux nouvelles destinations desservies par l’aéroport de Charleroi ;

– un versement de 4 000 euros pour l’achat d’équipements de bureau ;

– une mise à disposition « à un coût minimal ou nul » de divers locaux à usage technique ou de bureaux.

8 Par ailleurs, en vertu de cet accord, BSCA facture un euro par passager à Ryanair pour la prestation des services d’assistance en escale, au lieu des dix euros correspondant au tarif affiché pour les autres utilisateurs.

9 Enfin, BSCA et Ryanair ont créé une société commune, Promocy, dont l’objectif est de financer la promotion des activités de Ryanair à Charleroi et celle de l’aéroport de Charleroi. Les deux parties se sont engagées à participer dans les mêmes proportions au fonctionnement de Promocy, d’une part, par un apport de 62 500 euros en vue de constituer le capital social et, d’autre part, par une contribution annuelle au budget de Promocy équivalente à quatre euros par passager au départ.

10 Ces mesures n’ont pas été notifiées à la Commission.

11 Après avoir été saisie de plaintes et à la suite d’informations publiées dans la presse, la Commission a informé le Royaume de Belgique, par lettre du 11 décembre 2002 [SG (2002) D/233141], de sa décision d’ouvrir la procédure prévue à l’article 88, paragraphe 2, CE à l’encontre de ces mêmes mesures. Elle a en outre invité, par la publication de cette décision au Journal officiel des Communautés européennes le 25 janvier 2003 (JO C 18, p. 3), les intéressés à présenter leurs observations sur les mesures litigieuses.

12 C’est après avoir analysé les commentaires des parties intéressées et du Royaume de Belgique que la Commission a adopté, le 12 février 2004, la décision 2004/393/CE concernant les avantages consentis par la Région wallonne et Brussels South Charleroi Airport à la compagnie aérienne Ryanair lors de son installation à Charleroi (JO L 137...

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