Irina Nikolajeva v Multi Protect OÜ.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2016:467
Docket NumberC-280/15
Celex Number62015CJ0280
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date22 June 2016
62015CJ0280

ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)

22 juin 2016 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Marque de l’Union européenne — Règlement (CE) no 207/2009 — Article 9, paragraphe 3, et article 102, paragraphe 1 — Obligation pour un tribunal des marques de l’Union européenne de rendre une ordonnance interdisant à un tiers de poursuivre des actes de contrefaçon — Absence de demande tendant à l’obtention d’une telle ordonnance — Notion de “raisons particulières” de ne pas prononcer une telle interdiction — Notion d’“indemnité raisonnable” pour des faits postérieurs à la publication d’une demande d’enregistrement d’une marque de l’Union européenne et antérieurs à la publication de l’enregistrement d’une telle marque»

Dans l’affaire C‑280/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Harju Maakohus (tribunal de première instance de Harju, Estonie), par décision du 2 juin 2015, parvenue à la Cour le 10 juin 2015, dans la procédure

Irina Nikolajeva

contre

Multi Protect OÜ,

LA COUR (septième chambre),

composée de Mme C. Toader, président de chambre, Mme A. Prechal (rapporteur) et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général : M. M. Wathelet,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour Multi Protect OÜ, par Mes U. Ustav et T. Pukk, vandeadvokaadid,

pour le gouvernement estonien, par Mme K. Kraavi-Käerdi, en qualité d’agent,

pour le gouvernement hellénique, par M. K. Georgiadis, en qualité d’agent,

pour la Commission européenne, par Mmes J. Samnadda et E. Randvere ainsi que par M. T. Scharf, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 21 avril 2016,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 9, paragraphe 3, et de l’article 102, paragraphe 1, du règlement (CE) no 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Irina Nikolajeva à Multi Protect OÜ, au sujet d’une action en contrefaçon d’une marque de l’Union européenne engagée par Mme Nikolajeva contre cette société.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

Le règlement no 207/2009

3

Aux termes de l’article 9 du règlement no 207/2009, intitulé « Droit conféré par la marque de l’Union européenne » :

« 1. La marque de l’Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires :

a)

d’un signe identique à la marque de l’Union européenne pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels celle-ci est enregistrée ;

b)

d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque de l’Union européenne et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou des services couverts par la marque de l’Union européenne et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque ;

[...]

2. Il peut notamment être interdit, si les conditions énoncées au paragraphe 1 sont remplies :

a)

d’apposer le signe sur les produits ou sur leur conditionnement ;

b)

d’offrir les produits ou de les mettre dans le commerce ou de les détenir à ces fins ou d’offrir ou de fournir des services sous le signe ;

c)

d’importer ou d’exporter les produits sous le signe ;

d)

d’utiliser le signe dans les papiers d’affaires et la publicité.

3. Le droit conféré par la marque de l’Union européenne n’est opposable aux tiers qu’à compter de la publication de l’enregistrement de la marque. Toutefois, une indemnité raisonnable peut être exigée pour des faits postérieurs à la publication d’une demande de marque de l’Union européenne qui, après la publication de l’enregistrement de la marque, seraient interdits en vertu de celle-ci. Le tribunal saisi ne peut statuer au fond tant que l’enregistrement n’a pas été publié. »

4

L’article 14 du règlement no 207/2009, intitulé « Application complémentaire du droit national en matière de contrefaçon », dispose :

« 1. Les effets de la marque de l’Union européenne sont exclusivement déterminés par les dispositions du présent règlement. Par ailleurs, les atteintes à une marque de l’Union européenne sont régies par le droit national concernant les atteintes à une marque nationale conformément aux dispositions du titre X.

2. Le présent règlement n’exclut pas que des actions portant sur une marque de l’Union européenne soient intentées sur la base du droit des États membres concernant notamment la responsabilité civile et la concurrence déloyale.

3. Les règles de procédure applicables sont déterminées conformément aux dispositions du titre X. »

5

Aux termes de l’article 96 de ce règlement, intitulé « Compétence en matière de contrefaçon et de validité » :

« Les tribunaux des marques de l’Union européenne ont compétence exclusive :

a)

pour toutes les actions en contrefaçon [...] ;

[...]

c)

pour toutes les actions intentées à la suite de faits visés à l’article 9, paragraphe 3, deuxième phrase ;

[...] »

6

L’article 101 dudit règlement, intitulé « Droit applicable », prévoit :

« 1. Les tribunaux des marques de l’Union européenne appliquent les dispositions du présent règlement.

2. Pour toutes les questions qui n’entrent pas dans le champ d’application du présent règlement, le tribunal des marques de l’Union européenne applique son droit national, y compris son droit international privé.

3. À moins que le présent règlement n’en dispose autrement, le tribunal des marques de l’Union européenne applique les règles de procédure applicables au même type d’actions relatives à une marque nationale dans l’État membre sur le territoire duquel ce tribunal est situé. »

7

L’article 102 du même règlement, intitulé « Sanctions », dispose :

« 1. Lorsqu’un tribunal des marques de l’Union européenne constate que le défendeur a contrefait ou menacé de contrefaire une marque de l’Union européenne, il rend, sauf s’il y a des raisons particulières de ne pas agir de la sorte, une ordonnance lui interdisant de poursuivre les actes de contrefaçon ou de menace de contrefaçon. Il prend également, conformément à la loi nationale, les mesures propres à garantir le respect de cette interdiction.

2. Par ailleurs, le tribunal des marques de l’Union européenne applique la loi de l’État membre, y compris son droit international privé, dans lequel les actes de contrefaçon ou de menace de contrefaçon ont été commis. »

La directive 2004/48/CE

8

L’article 13 de la directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au respect des droits de propriété intellectuelle (JO 2004, L 157, p. 45, et rectificatif JO 2004, L 195, p.16), intitulé « Dommages-intérêts », prévoit :

« 1. Les États membres veillent à ce que, à la demande de la partie lésée, les autorités judiciaires compétentes ordonnent au contrevenant qui s’est livré à une activité contrefaisante en le sachant ou en ayant des motifs raisonnables de le savoir de verser au titulaire du droit des dommages-intérêts adaptés au préjudice que celui-ci a réellement subi du fait de l’atteinte.

Lorsqu’elles fixent les dommages-intérêts, les autorités judiciaires :

a)

prennent en considération tous les aspects appropriés tels que les conséquences économiques négatives, notamment le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices injustement réalisés par le contrevenant et, dans des cas appropriés, des éléments autres que des facteurs économiques, comme le préjudice moral causé au titulaire du droit du fait de l’atteinte,

ou

b)

à titre d’alternative, peuvent décider, dans des cas appropriés, de fixer un montant forfaitaire de dommages-intérêts, sur la base d’éléments tels que, au moins, le montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrevenant avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit de propriété intellectuelle en question.

2. Lorsque le contrevenant s’est livré à une activité contrefaisante sans le savoir ou sans avoir de motifs raisonnables de le savoir, les États membres peuvent prévoir que les autorités judiciaires pourront ordonner le recouvrement des bénéfices ou le paiement de dommages-intérêts susceptibles d’être préétablis. »

Le droit estonien

9

L’article 8, paragraphe 2, de la kaubamärgiseadus (loi sur les marques), du 22 mai 2002 (RT I 2002, 49, 308), dans sa version applicable au litige au principal, prévoit :

« Une marque enregistrée est juridiquement protégée à compter de la date du dépôt de la demande d’enregistrement [...] et jusqu’à l’expiration d’un délai de 10 ans à partir de la date de l’enregistrement. »

10

L’article 57 de cette loi, intitulé « Protection du droit exclusif », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Le titulaire d’une marque peut introduire un recours contre toute personne portant atteinte à son droit exclusif, y compris contre un preneur de licence ayant méconnu les conditions du contrat de licence :

1)

afin de faire cesser l’atteinte ;

2)

aux fins de la réparation d’un dommage patrimonial causé volontairement ou par négligence, en ce compris les gains non réalisés, ainsi que du préjudice moral.

[...] »

11

Aux termes de l’article 4, paragraphe 2, du...

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