European Parliament and European Commission v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2014:2400
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC‑103/12,C‑165/12
Date26 November 2014
Celex Number62012CJ0103
Procedure TypeRecours en annulation - fondé
62012CJ0103

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

26 novembre 2014 ( *1 )

«Recours en annulation — Décision 2012/19/UE — Base juridique — Article 43, paragraphes 2 et 3, TFUE — Accord bilatéral d’autorisation d’exploitation du reliquat du volume admissible des captures — Choix de l’État tiers intéressé que l’Union autorise à exploiter des ressources biologiques — Zone économique exclusive — Décision politique — Fixation des possibilités de pêche»

Dans les affaires jointes C‑103/12 et C‑165/12,

ayant pour objet des recours en annulation au titre de l’article 263 TFUE, introduits respectivement les 24 février et 3 avril 2012,

Parlement européen, représenté par Mme L. G. Knudsen ainsi que par MM. I. Liukkonen et I. Díez Parra, en qualité d’agents (C‑103/12),

Commission européenne, représentée par MM. A. Bouquet et E. Paasivirta, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg (C‑165/12),

parties requérantes,

contre

Conseil de l’Union européenne, représenté par Mme A. Westerhof Löfflerová et M. A. de Gregorio Merino, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

soutenu par:

République tchèque, représentée par MM. M. Smolek, E. Ruffer et D. Hadroušek, en qualité d’agents,

Royaume d’Espagne, représenté par Mme N. Díaz Abad, en qualité d’agent,

République française, représentée par MM. G. de Bergues et D. Colas ainsi que par Mme N. Rouam, en qualité d’agents,

République de Pologne, représentée par MM. B. Majczyna et M. Szpunar, en qualité d’agents,

parties intervenantes,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, M. K. Lenaerts, vice-président, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. M. Ilešič, L. Bay Larsen, présidents de chambre, MM. A. Rosas, A. Borg Barthet, J. Malenovský (rapporteur), Mme C. Toader, MM. C. G. Fernlund et J. L. da Cruz Vilaça, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: M. V. Tourrès, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 19 novembre 2013,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 15 mai 2014,

rend le présent

Arrêt

1

Par leurs requêtes, le Parlement européen et la Commission européenne demandent l’annulation de la décision 2012/19/UE du Conseil, du 16 décembre 2011, relative à l’approbation, au nom de l’Union européenne, de la déclaration relative à l’attribution de possibilités de pêche dans les eaux de l’Union européenne à des navires de pêche battant pavillon de la République bolivarienne du Venezuela, dans la zone économique exclusive située au large des côtes de la Guyane française (JO 2012, L 6, p. 8, ci-après la «décision attaquée»).

Le cadre juridique

Le droit international

2

La convention des Nations unies sur le droit de la mer, signée à Montego Bay le 10 décembre 1982 (ci-après la «convention de Montego Bay»), est entrée en vigueur le 16 novembre 1994. Elle a été approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 98/392/CE du Conseil, du 23 mars 1998 (JO L 179, p. 1).

3

La République bolivarienne du Venezuela n’est pas partie contractante à ladite convention.

4

Les articles 55 à 75 de la convention de Montego Bay figurent dans la partie V de celle-ci, intitulée «Zone économique exclusive».

5

L’article 55 de ladite convention prévoit:

«La zone économique exclusive est une zone située au-delà de la mer territoriale et adjacente à celle-ci, soumise au régime juridique particulier établi par la présente partie, en vertu duquel les droits et la juridiction de l’État côtier et les droits et libertés des autres États sont gouvernés par les dispositions pertinentes de la convention.»

6

Aux termes de l’article 56, paragraphe 1, de la même convention:

«Dans la zone économique exclusive, l’État côtier a:

a)

des droits souverains aux fins d’exploration et d’exploitation, de conservation et de gestion des ressources naturelles, biologiques ou non biologiques, des eaux surjacentes aux fonds marins, des fonds marins et de leur sous-sol […]

[...]»

7

L’article 61, paragraphe 1, de la convention de Montego Bay dispose que «[l]’État côtier fixe le volume admissible des captures en ce qui concerne les ressources biologiques dans sa zone économique exclusive».

8

L’article 62 de ladite convention, intitulé «Exploitation des ressources biologiques», prévoit à ses paragraphes 1 à 4:

«1. L’État côtier se fixe pour objectif de favoriser une exploitation optimale des ressources biologiques de la zone économique exclusive, sans préjudice de l’article 61.

2. L’État côtier détermine sa capacité d’exploitation des ressources biologiques de la zone économique exclusive. Si cette capacité d’exploitation est inférieure à l’ensemble du volume admissible des captures, il autorise d’autres États, par voie d’accords ou d’autres arrangements et conformément aux modalités, aux conditions et aux lois et règlements visés au paragraphe 4, à exploiter le reliquat du volume admissible; ce faisant, il tient particulièrement compte des articles 69 et 70, notamment à l’égard des États en développement visés par ceux-ci.

3. Lorsqu’il accorde à d’autres États l’accès à sa zone économique exclusive en vertu du présent article, l’État côtier tient compte de tous les facteurs pertinents, entre autres: l’importance que les ressources biologiques de la zone présentent pour son économie et ses autres intérêts nationaux, les articles 69 et 70, les besoins des États en développement de la région ou de la sous-région pour ce qui est de l’exploitation d’une partie du reliquat, et la nécessité de réduire à un minimum les perturbations économiques dans les États dont les ressortissants pratiquent habituellement la pêche dans la zone ou qui ont beaucoup contribué à la recherche et à l’inventaire des stocks.

4. Les ressortissants d’autres États qui pêchent dans la zone économique exclusive se conforment aux mesures de conservation et aux autres modalités et conditions fixées par les lois et règlements de l’État côtier. Ces lois et règlements doivent être compatibles avec la convention […]»

Le droit de l’Union

9

Le règlement (CE) no 1006/2008 du Conseil, du 29 septembre 2008, concernant les autorisations pour les activités de pêche des navires de pêche communautaires en dehors des eaux communautaires et l’accès des navires de pays tiers aux eaux communautaires, modifiant les règlements (CEE) no 2847/93 et (CE) no 1627/94 et abrogeant le règlement (CE) no 3317/94 (JO L 286, p. 33), prévoit, à son article 18, paragraphe 1, sous a), que «[l]es navires de pêche de pays tiers sont autorisés à […] exercer des activités de pêche dans les eaux [de l’Union européenne] à condition qu’une autorisation de pêche leur ait été délivrée [...]».

10

L’article 21, sous a), de ce règlement énonce que «[l]a Commission délivre une autorisation de pêche uniquement aux navires de pêche de pays tiers […] qui peuvent prétendre à une autorisation de pêche au titre de l’accord concerné et, le cas échéant, figurent sur la liste des navires communiquée pour exercer des activités de pêche en vertu de cet accord».

11

Aux termes de l’article 22 dudit règlement:

«Les navires de pêche de pays tiers pour lesquels une autorisation de pêche a été délivrée conformément au présent chapitre se conforment aux dispositions de la [politique commune de la pêche] relatives aux mesures de conservation et de contrôle et à d’autres dispositions régissant la pêche par des navires [de l’Union] dans la zone de pêche dans laquelle ils exercent leurs activités, ainsi qu’aux dispositions établies dans l’accord concerné.»

12

Le Conseil de l’Union européenne fixe annuellement, par des règlements concernant les totaux admissibles de capture et de quota, les possibilités de pêche dans les eaux de l’Union et, pour les navires de cette dernière, dans certaines eaux n’appartenant pas à l’Union.

13

Parmi ces règlements figure le règlement (UE) no 44/2012 du Conseil, du 17 janvier 2012, établissant, pour 2012, les possibilités de pêche dans les eaux de l’UE et, pour les navires de l’UE, dans certaines eaux n’appartenant pas à l’UE en ce qui concerne certains stocks ou groupes de stocks halieutiques faisant l’objet de négociations ou d’accords internationaux (JO L 25, p. 55).

14

L’article 36, paragraphe 1, de ce règlement énonce que «[l]e nombre maximal d’autorisations de pêche disponibles pour les navires de pays tiers pêchant dans les eaux de [l’Union] est fixé à l’annexe VIII».

15

En ce qui concerne les eaux du département d’outre-mer de la Guyane (France, ci-après la «Guyane»), cette annexe fixe le nombre d’autorisations de pêche applicables aux navires battant pavillon vénézuélien à 45. La note en bas de page de ladite annexe, relative à la République bolivarienne du Venezuela, précise en outre que «[p]our que lesdites autorisations de pêche soient délivrées, il convient d’apporter la preuve qu’un contrat valable a été conclu entre le propriétaire du navire qui demande l’autorisation de pêche et une entreprise de transformation située [en Guyane], et que ledit contrat prévoit l’obligation de débarquer dans ledit département au moins 75 % de toutes les prises de vivaneaux du navire concerné, de sorte qu’ils puissent être transformés dans les installations de cette entreprise. […]»

Les antécédents du litige

16

Le 30 septembre 1977, le Conseil a adopté le règlement (CEE) no 2159/77, modifiant le règlement (CEE) no 1014/77 fixant certaines mesures intérimaires de conservation et de gestion des ressources de pêche applicables à l’égard des navires battant pavillon de certains pays tiers dans la zone de 200 milles située au large des côtes du département français de la Guyane (JO L 250, p. 15). Par ce...

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