People’s Mojahedin Organization of Iran v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:T:2008:461
CourtGeneral Court (European Union)
Date23 October 2008
Docket NumberT-256/07
Celex Number62007TJ0256
Procedure TypeRecours en annulation - fondé

Affaire T-256/07

People’s Mojahedin Organization of Iran

contre

Conseil de l’Union européenne

« Politique étrangère et de sécurité commune — Mesures restrictives prises à l’encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme — Gel des fonds — Recours en annulation — Droits de la défense — Motivation — Contrôle juridictionnel »

Sommaire de l'arrêt

1. Procédure — Décision ou règlement remplaçant en cours d'instance l'acte attaqué

2. Actes des institutions — Présomption de validité — Acte inexistant — Notion

(Art. 249 CE)

3. Recours en annulation — Arrêt d'annulation — Effets — Obligation d'adopter des mesures d'exécution

(Art. 233 CE)

4. Actes des institutions — Motivation — Obligation — Portée

(Art. 253 CE; position commune du Conseil 2001/931, art. 1er, § 6; règlement du Conseil nº 2580/2001, art. 2, § 3)

5. Union européenne — Politique étrangère et de sécurité commune — Mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme

(Position commune du Conseil 2001/931, art. 1er; règlement du Conseil nº 2580/2001, art. 2, § 3)

6. Union européenne — Politique étrangère et de sécurité commune — Mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme

(Position commune du Conseil 2001/931, art. 1er, § 4 et 6; règlement du Conseil nº 2580/2001, art. 2, § 3)

7. Communautés européennes — Contrôle juridictionnel de la légalité des actes des institutions

(Art. 60 CE, 301 CE et 308 CE)

1. Lorsqu'une décision ou un règlement concernant directement et individuellement un particulier sont, en cours de procédure, remplacés par un acte ayant le même objet, celui-ci doit être considéré comme un élément nouveau permettant au requérant d'adapter ses conclusions et moyens. Il serait, en effet, contraire à une bonne administration de la justice et à une exigence d'économie de procédure d'obliger le requérant à introduire un nouveau recours. Il serait, en outre, injuste que l'institution en cause puisse, pour faire face aux critiques contenues dans une requête présentée au juge communautaire contre un acte, adapter l'acte attaqué ou lui en substituer un autre et se prévaloir, en cours d'instance, de cette modification ou de cette substitution pour priver l'autre partie de la possibilité d'étendre ses conclusions et ses moyens initiaux à l'acte ultérieur ou de présenter des conclusions et moyens supplémentaires contre celui-ci.

(cf. point 46)

2. Les actes des institutions communautaires, même irréguliers, jouissent en principe d'une présomption de validité et produisent, dès lors, des effets juridiques aussi longtemps qu'ils n'ont pas été retirés, annulés dans le cadre d'un recours en annulation ou déclarés invalides à la suite d'un renvoi préjudiciel ou d'une exception d'illégalité.

Par exception à ce principe, les actes entachés d'une irrégularité dont la gravité est si évidente qu'elle ne peut être tolérée par l'ordre juridique communautaire doivent être réputés n'avoir produit aucun effet juridique, même provisoire, c'est-à-dire être regardés comme juridiquement inexistants. Cette exception vise à préserver un équilibre entre deux exigences fondamentales, mais parfois antagonistes, auxquelles doit satisfaire un ordre juridique, à savoir la stabilité des relations juridiques et le respect de la légalité. La gravité des conséquences qui se rattachent à la constatation de l'inexistence d'un acte des institutions de la Communauté postule que, pour des raisons de sécurité juridique, cette constatation soit réservée à des hypothèses tout à fait extrêmes.

(cf. points 55-57)

3. Pour se conformer à un arrêt d'annulation et lui donner pleine exécution, l'institution auteur de l'acte annulé est tenue de respecter non seulement le dispositif de l'arrêt, mais également les motifs qui en constituent le soutien nécessaire, en ce sens qu'ils sont indispensables pour déterminer le sens exact de ce qui a été jugé dans le dispositif. Ce sont, en effet, ces motifs qui, d'une part, identifient la disposition exacte considérée comme illégale et, d'autre part, font apparaître les raisons exactes de l'illégalité constatée dans le dispositif et que l'institution concernée doit prendre en considération en remplaçant l'acte annulé.

Mais, si la constatation de l'illégalité constatée dans les motifs de l'arrêt d'annulation oblige, en premier lieu, l'institution auteur de l'acte annulé à éliminer cette illégalité dans l'acte destiné à se substituer à l'acte annulé, elle peut également, en tant qu'elle vise une disposition d'un contenu déterminé dans une matière donnée, entraîner d'autres conséquences pour cette institution.

S’agissant de l'annulation, pour vices de forme et de procédure, d'une décision de gel des fonds qui, aux termes de l'article 1er, paragraphe 6, de la position commune 2001/931, relative à l'application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme, doit faire l'objet d'un réexamen à intervalles réguliers, l'institution qui en est l'auteur a d'abord l'obligation de veiller à ce que les éventuelles décisions subséquentes de gel des fonds devant intervenir après l'arrêt d'annulation, pour régir des périodes postérieures à cet arrêt, ne soient pas entachées des mêmes vices.

Toutefois, lorsqu'un acte a été annulé pour vices de forme ou de procédure, l'institution concernée est en droit d'adopter à nouveau un acte identique, en respectant cette fois les règles de forme et de procédure en question, et même de donner à cet acte un effet rétroactif, si cela est nécessaire à la réalisation de l'objectif d'intérêt général poursuivi et si la confiance légitime des intéressés est dûment respectée. Si les mesures que comporte l’exécution d'un arrêt d'annulation, conformément à l'article 233 CE, peuvent impliquer que l'institution modifie ou retire, le cas échéant, les actes ayant abrogé et remplacé la décision annulée, postérieurement à la clôture de la procédure orale, l'institution concernée est en droit de maintenir en vigueur ces actes pendant le temps qui lui est strictement nécessaire pour adopter un nouvel acte en se conformant aux règles de forme et de procédure concernées.

(cf. points 60-62, 64-66)

4. Tant la motivation d'une décision initiale de gel des fonds que la motivation des décisions subséquentes doivent porter non seulement sur les conditions légales d'application du règlement nº 2580/2001, concernant l'adoption de mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, en particulier l'existence d'une décision nationale prise par une autorité compétente, mais également sur les raisons spécifiques et concrètes pour lesquelles le Conseil considère, dans l'exercice de son pouvoir discrétionnaire d'appréciation, que l'intéressé doit faire l'objet d'une mesure de gel des fonds.

Par ailleurs, il ressort de l'article 1er, paragraphe 6, de la position commune 2001/931, relative à l'application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme, auquel renvoie également l'article 2, paragraphe 3, du règlement nº 2580/2001, que, si les décisions subséquentes de gel des fonds doivent bien être précédées d'un réexamen de la situation de l'intéressé, ce n'est pas à seule fin de vérifier s'il continue à se livrer à des activités terroristes mais afin de s'assurer que son maintien dans la liste figurant à l'annexe dudit règlement reste justifié, le cas échéant sur la base de nouveaux éléments d'information ou de preuve. À cet égard, lorsque les motifs d'une décision subséquente de gel des fonds sont essentiellement les mêmes que ceux déjà invoqués à l'occasion d'une précédente décision, une simple déclaration à cet effet peut suffire, en particulier lorsque l'intéressé est un groupe ou une entité.

(cf. points 81-82)

5. Ni l'article 2, paragraphe 3, du règlement nº 2580/2001 concernant l'adoption de mesures restrictives spécifiques à l'encontre de certaines personnes et entités dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, ni l'article 1er, paragraphes 2, 3 et 6, de la position commune 2001/931, relative à l'application de mesures spécifiques en vue de lutter contre le terrorisme, n'interdisent l'imposition de mesures restrictives à l'encontre de personnes ou d'entités qui ont commis par le passé des actes de terrorisme, nonobstant l'absence d'éléments prouvant qu'elles commettent actuellement de tels actes ou y participent, si les circonstances le justifient.

En premier lieu, s'il est vrai que l'article 1er, paragraphe 2, de ladite position commune recourt au présent de l'indicatif (« des personnes qui commettent ») pour définir ce qu'il y a lieu d'entendre par « personnes, groupes et entités impliqués dans des actes de terrorisme », c'est dans le sens gnomique propre aux définitions et incriminations légales, et non par référence à une période temporelle donnée. Il en va de même du participe présent utilisé dans les versions française (« les personnes [...] commettant ») et anglaise (« persons committing ») de l'article 2, paragraphe 3, du règlement nº 2580/2001, ce que confirme le recours à l'indicatif présent pour la formule équivalente utilisée dans d'autres versions linguistiques. Par ailleurs, le paragraphe 4 de l'article 1er de cette position commune permet l'adoption de mesures restrictives à l'encontre, notamment, de personnes ayant fait l'objet d'une condamnation pour faits de terrorisme, ce qui implique normalement une activité terroriste passée et non activement poursuivie au moment où la constatation en est faite dans la décision de condamnation. Enfin, le paragraphe 6 du même article prévoit que les noms des personnes et des entités reprises sur la liste litigieuse feront l'objet d'un réexamen à intervalles réguliers, au moins une fois par semestre, afin de s'assurer que leur maintien sur la liste reste...

To continue reading

Request your trial
2 practice notes
  • The Consequences of Kadi: Where the Divergence of Opinion between EU and International Lawyers Lies?
    • European Union
    • Wiley European Law Journal No. 17-2, March 2011
    • 1 March 2011
    ...a view tocombating terrorism and repealing Decisions 2006/379/EC and 2006/1008/EC, [2007] OJ L169/58.40 Application [2007] OJ C211/50, Case T-256/07, People’s Mojahedin Organization of Iran v Council(PMOI) [2008] ECR II-3019. Sison and Al-Aqsa followed the same path (Application [2007] OJ C......
  • JUSTICE/FIGHT AGAINST TERRORISM : PEOPLE'S MUJAHEDIN: COURT PROVES EU WRONG.
    • European Union
    • European Report No. 2008, January 2008
    • 24 October 2008
    ...December 2007 keeping the PMOI on the list of terrorists organisations, which means that its funds have been frozen in the EU since 1992 (Case T-256/07). The Court considers that "the Council failed to give sufficient reasons for its decision following a decision taken by a UK judicial auth......
2 cases
  • Kadi v European Council [General Court (Seventh Chamber)]
    • European Union
    • General Court (European Union)
    • 30 September 2010
    ...[2007] All ER (EC) 447, [2006] ECR II-4665 (OMPI) (paras. 154, 155, 159), People's Mojahedin Organisation of Iran v. EU CouncilECAS Case T-256/07 [2008] ECR II-3019 (PMOI I) (paras. 1413) and People's Mojahedin Organisation of Iran v. EU CouncilECAS Case T-284/08 [2008] ECR II-3487 (PMOI II......
  • Criminal proceedings against E and F.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 17 May 2010
    ...Deutscher Luftfahrt-Unternehmen and Hapag-Lloyd v Commission [1997] ECR II‑363. 47 – See Recital 3. 48 – See point 17 of this View. 49 – Case T-256/07 People’s Mojahedin Organization of Iran v Council, paragraph 65 et seq. 50 – Case 108/81 Amylum v Council [1982] ECR 3107, paragraphs 4 to 1......
1 books & journal articles

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT