Xabier Ormaetxea Garai and Bernardo Lorenzo Almendros v Administración del Estado.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2016:780
Date19 October 2016
Celex Number62015CJ0424
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-424/15
62015CJ0424

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

19 octobre 2016 ( *1 )

«Renvoi préjudiciel — Réseaux et services de communications électroniques — Directive 2002/21/CE — Article 3 — Impartialité et indépendance des autorités réglementaires nationales — Réforme institutionnelle — Fusion de l’autorité réglementaire nationale avec d’autres autorités de réglementation — Congédiement du président et d’un conseiller de l’autorité réglementaire nationale fusionnée avant l’échéance de leurs mandats — Motif de congédiement non prévu par le droit national»

Dans l’affaire C‑424/15,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Supremo (Cour suprême, Espagne), par décision du 3 juillet 2015, parvenue à la Cour le 31 juillet 2015, dans la procédure

Xabier Ormaetxea Garai,

Bernardo Lorenzo Almendros

contre

Administración del Estado,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, Mme A. Prechal, M. A. Rosas, Mme C. Toader et M. E. Jarašiūnas (rapporteur), juges,

avocat général : M. Y. Bot,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour le gouvernement espagnol, par M. A. Rubio González, en qualité d’agent,

pour le gouvernement belge, par Mmes J. Van Holm et M. Jacobs, en qualité d’agents,

pour le gouvernement néerlandais, par M. J. Langer ainsi que par Mmes M. Bulterman et M. de Ree, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. J. Rius et G. Braun ainsi que par Mme L. Nicolae, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 30 juin 2016,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre ») (JO 2002, L 108, p. 33), telle que modifiée par la directive 2009/140/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009 (JO 2009, L 337, p. 37, et rectificatif JO 2013, L 241, p. 8) (ci-après la « directive‑cadre »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant MM. Xabier Ormaetxea Garai et Bernardo Lorenzo Almendros à l’Administración del Estado (administration de l’État, Espagne) au sujet de décrets royaux ayant mis fin à leurs mandats de, respectivement, conseiller et président de la Comisión del Mercado de las Telecomunicaciones (Commission du marché des télécommunications, Espagne, ci-après « CMT »), une autorité réglementaire nationale (ci-après une « ARN ») au sens de la directive‑cadre.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive-cadre

3

Le considérant 11 de la directive-cadre énonce :

« Conformément au principe de la séparation des fonctions de réglementation et d’exploitation, les États membres devraient garantir l’indépendance de la ou des [ARN], afin d’assurer l’impartialité de leurs décisions. Cette exigence d’indépendance ne porte pas atteinte à l’autonomie institutionnelle ni aux obligations constitutionnelles des États membres, ni au principe de neutralité, établi à l’article [345 TFUE], à l’égard des règles régissant le régime de la propriété applicables dans les États membres. Il convient que les [ARN] soient en possession de toutes les ressources nécessaires, en termes de personnel, de compétences et de moyens financiers, pour l’exécution de leurs missions. »

4

L’article 2, sous g), de la directive-cadre définit la notion d’« [ARN] » comme visant « l’organisme ou les organismes chargés par un État membre d’une quelconque des tâches de réglementation assignées dans la présente directive et dans les directives particulières ». Cet article 2, sous l), énumère les directives qui, outre la directive-cadre, composent le cadre réglementaire applicable en matière de communications électroniques et qui sont visées par la notion de « directives particulières ».

5

La directive 2009/140 a introduit, à l’article 3 de la version initiale de la directive-cadre, de nouveaux paragraphes 3 à 3 quater, relatifs à l’indépendance des ARN. Le considérant 13 de la directive 2009/140 précise à cet égard :

« Il convient de renforcer l’indépendance des [ARN] afin d’assurer une application plus efficace du cadre réglementaire et d’accroître leur autorité et la prévisibilité de leurs décisions. À cet effet, il y a lieu de prévoir, en droit national, une disposition expresse garantissant que, dans l’exercice de ses fonctions, une [ARN] responsable de la régulation du marché ex ante ou du règlement des litiges entre entreprises est à l’abri de toute intervention extérieure ou pression politique susceptible de compromettre son impartialité dans l’appréciation des questions qui lui sont soumises. […] À cette fin, il convient d’établir préalablement des règles concernant les motifs de congédiement du chef de l’[ARN] afin de dissiper tout doute raisonnable quant à la neutralité de cet organisme et à son imperméabilité aux facteurs extérieurs. Il est important que les [ARN] responsables de la régulation du marché ex ante disposent de leur propre budget qui leur permette, en particulier, de recruter suffisamment de personnel qualifié. Afin de garantir la transparence, ce budget devrait être publié tous les ans. »

6

L’article 3 de la directive-cadre, intitulé « [ARN] », dispose :

«1. Les États membres veillent à ce que chacune des tâches assignées aux [ARN] dans la présente directive et dans les directives particulières soit accomplie par un organisme compétent.

2. Les États membres garantissent l’indépendance des [ARN] en faisant en sorte que celles-ci soient juridiquement distinctes et fonctionnellement indépendantes de toutes les organisations assurant la fourniture de réseaux, d’équipements ou de services de communications électroniques. Les États membres qui conservent la propriété ou le contrôle d’entreprises qui assurent la fourniture de réseaux et/ou de services de communications électroniques veillent à la séparation structurelle effective de la fonction de réglementation d’une part, et des activités inhérentes à la propriété ou à la direction de ces entreprises d’autre part.

3. Les États membres veillent à ce que les [ARN] exercent leurs pouvoirs de manière impartiale, transparente et au moment opportun. Les États membres veillent à ce que les [ARN] disposent des ressources financières et humaines nécessaires pour accomplir les tâches qui leur sont assignées.

3 bis. Sans préjudice des paragraphes 4 et 5, les [ARN] responsables de la régulation du marché ex ante ou du règlement des litiges entre entreprises […] agissent en toute indépendance et ne sollicitent ni n’acceptent d’instruction d’aucun autre organe en ce qui concerne l’accomplissement des tâches qui leur sont assignées en vertu du droit national transposant le droit communautaire. Ceci n’empêche pas une surveillance conformément aux dispositions nationales de droit constitutionnel. Seuls les organismes de recours établis conformément à l’article 4 ont le pouvoir de suspendre ou d’infirmer les décisions prises par les [ARN].

Les États membres veillent à ce que le chef d’une [ARN] visée au premier alinéa ou son remplaçant ou, le cas échéant, les membres de l’instance collégiale exerçant cette fonction au sein de l’[ARN] ou leurs remplaçants ne puissent être congédiés que s’ils ne remplissent plus les conditions requises pour exercer leurs fonctions, préalablement définies en droit national. La décision de congédier le chef de l’[ARN] concernée ou, le cas échéant, les membres de l’instance collégiale exerçant cette fonction est rendue publique au moment du congédiement. Le chef congédié ou, le cas échéant, les membres congédiés de l’instance collégiale exerçant cette fonction reçoivent un exposé des motifs et ont le droit d’en demander publication si celle-ci n’intervient pas d’office, auquel cas celui-ci est publié.

Les États membres veillent à ce que les [ARN] visées au premier alinéa disposent des budgets annuels distincts. Les budgets sont rendus publics. Les États membres veillent également à ce que les [ARN] disposent des ressources financières et humaines adéquates pour leur permettre de participer activement et de contribuer à l’organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE) [créé par le règlement (CE) no 1211/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009, instituant l’Organe des régulateurs européens des communications électroniques (ORECE) ainsi que l’Office (JO 2009, L 337, p. 1)].

[…]

4. Les États membres publient les tâches à accomplir par les [ARN] d’une manière aisément accessible, en particulier lorsque ces tâches sont confiées à plusieurs organismes. Les États membres assurent, le cas échéant, la consultation et la coopération entre ces autorités, ainsi qu’entre ces autorités et les autorités nationales chargées de l’application du droit de la concurrence et les autorités nationales chargées de l’application de la législation en matière de protection des consommateurs, sur des sujets d’intérêt commun. […]

5. Les [ARN] et les autorités nationales en matière de concurrence se communiquent les informations nécessaires à l’application des dispositions de la présente directive et des directives particulières. […]

6. Les États membres notifient à la Commission toutes les [ARN] chargées d’accomplir des tâches en application de la présente directive et des directives particulières, ainsi que leurs responsabilités respectives. »

7

L’article 4 de la directive-cadre, intitulé « Droit de recours », prévoit, en substance, que les États membres veillent à ce que des mécanismes...

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