Jessica Porras Guisado v Bankia SA and Others.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:99
Date22 February 2018
Celex Number62016CJ0103
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-103/16
62016CJ0103

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

22 février 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Politique sociale – Directive 92/85/CEE – Mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail – Article 2, sous a) – Article 10, points 1 à 3 – Interdiction de licenciement d’une travailleuse pendant la période allant du début de sa grossesse jusqu’au terme de son congé de maternité – Champ d’application – Cas d’exception non liés à l’état de la travailleuse concernée – Directive 98/59/CE – Licenciements collectifs – Article 1er, paragraphe 1, sous a) – Motifs non inhérents à la personne des travailleurs – Travailleuse enceinte licenciée dans le cadre d’un licenciement collectif – Motivation du licenciement – Priorité de maintien du poste de la travailleuse – Priorité de reclassement »

Dans l’affaire C‑103/16,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Superior de Justicia de Cataluña (Cour supérieure de justice de Catalogne, Espagne), par décision du 20 janvier 2016, parvenue à la Cour le 19 février 2016, dans la procédure

Jessica Porras Guisado

contre

Bankia SA,

Sección Sindical de Bankia de CCOO,

Sección Sindical de Bankia de UGT,

Sección Sindical de Bankia de ACCAM,

Sección Sindical de Bankia de SATE,

Sección Sindical de Bankia de CSICA,

Fondo de Garantía Salarial (Fogasa),

en présence de :

Ministerio Fiscal,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, président de chambre, MM. J. Malenovský, M. Safjan (rapporteur), D. Šváby et M. Vilaras, juges,

avocat général : Mme E. Sharpston,

greffier : Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 26 janvier 2017,

considérant les observations présentées :

pour Bankia SA, par Mes C. Rodríguez Elias et V. García González, abogados,

pour le gouvernement espagnol, par Mmes M. J. García-Valdecasas Dorrego et A. Gavela Llopis, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mmes C. Valero, A. Szmytkowska et S. Pardo Quintillán, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 14 septembre 2017,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 10, points 1 et 2, de la directive 92/85/CEE du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail (dixième directive particulière au sens de l’article 16 paragraphe 1 de la directive 89/391/CEE) (JO 1992, L 348 p. 1), ainsi que de l’article 1er, paragraphe 1, sous a), de la directive 98/59/CE du Conseil, du 20 juillet 1998, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives aux licenciements collectifs (JO 1998, L 225, p. 16).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Jessica Porras Guisado à Bankia SA, à différentes sections syndicales et au Fondo de Garantía Salarial (Fogasa) (Fonds de garantie salariale, Espagne) au sujet de la légalité du licenciement dont Mme Porras Guisado a fait l’objet, dans le cadre d’un licenciement collectif, pendant qu’elle était enceinte.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 92/85

3

Aux termes des premier, septième, huitième et quinzième considérants de la directive 92/85 :

« considérant que l’article 118 A du traité [CEE] prévoit que le Conseil arrête, par voie de directive, les prescriptions minimales en vue de promouvoir l’amélioration, notamment du milieu de travail, pour protéger la sécurité et la santé des travailleurs ;

[...]

considérant que la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail [(JO 1989, L 183, p. 1)], prévoit à son article 15 que les groupes à risques particulièrement sensibles doivent être protégés contre les dangers les affectant spécifiquement ;

considérant que les travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes doivent être considérées à maints égards comme un groupe à risques spécifiques et que des mesures doivent être prises en ce qui concerne leur sécurité et leur santé ;

[...]

considérant que le risque d’être licenciée pour des raisons liées à leur état peut avoir des effets dommageables sur la situation physique et psychique des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes et qu’il convient de prévoir une interdiction de licenciement ».

4

L’article 1er de la directive 92/85, intitulé « Objet », prévoit, à son paragraphe 1 :

« La présente directive, qui est la dixième directive particulière au sens de l’article 16 paragraphe 1 de la directive 89/391/CEE, a pour objet la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail. »

5

L’article 2 de la directive 92/85, intitulé « Définitions », énonce :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

a)

“travailleuse enceinte” : toute travailleuse enceinte qui informe l’employeur de son état, conformément aux législations et/ou pratiques nationales ;

b)

“travailleuse accouchée” : toute travailleuse accouchée au sens des législations et/ou pratiques nationales, qui informe l’employeur de son état, conformément à ces législations et/ou pratiques ;

c)

“travailleuse allaitante” : toute travailleuse allaitante au sens des législations et/ou pratiques nationales, qui informe l’employeur de son état, conformément à ces législations et/ou pratiques. »

6

L’article 10 de ladite directive, intitulé « Interdiction de licenciement », dispose :

« En vue de garantir aux travailleuses, au sens de l’article 2, l’exercice des droits de protection de leur sécurité et de leur santé reconnus dans le présent article, il est prévu que :

1)

les États membres prennent les mesures nécessaires pour interdire le licenciement des travailleuses, au sens de l’article 2, pendant la période allant du début de leur grossesse jusqu’au terme du congé de maternité visé à l’article 8 paragraphe 1, sauf dans les cas d’exception non liés à leur état, admis par les législations et/ou pratiques nationales et, le cas échéant, pour autant que l’autorité compétente ait donné son accord ;

2)

lorsqu’une travailleuse, au sens de l’article 2, est licenciée pendant la période visée au point 1, l’employeur doit donner des motifs justifiés de licenciement par écrit ;

3)

les États membres prennent les mesures nécessaires pour protéger les travailleuses, au sens de l’article 2, contre les conséquences d’un licenciement qui serait illégal en vertu du point 1. »

La directive 98/59

7

Aux termes des considérants 2 à 4 et 7 de la directive 98/59 :

« (2)

considérant qu’il importe de renforcer la protection des travailleurs en cas de licenciements collectifs en tenant compte de la nécessité d’un développement économique et social équilibré dans la Communauté ;

(3)

considérant que, malgré une évolution convergente, des différences subsistent entre les dispositions en vigueur dans les États membres en ce qui concerne les modalités et la procédure des licenciements collectifs ainsi que les mesures susceptibles d’atténuer les conséquences de ces licenciements pour les travailleurs ;

(4)

considérant que ces différences peuvent avoir une incidence directe sur le fonctionnement du marché intérieur ;

[...]

(7)

considérant qu’il est par conséquent nécessaire de promouvoir ce rapprochement dans le progrès au sens de l’article 117 du traité [CEE] ».

8

L’article 1er de cette directive, intitulé « Définitions et champ d’application », dispose, à son paragraphe 1, sous a) :

« Aux fins de l’application de la présente directive :

a)

on entend par “licenciements collectifs” : les licenciements effectués par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne des travailleurs lorsque le nombre de licenciements intervenus est, selon le choix effectué par les États membres :

i)

soit, pour une période de trente jours :

au moins égal à 10 dans les établissements employant habituellement plus de 20 et moins de 100 travailleurs,

au moins égal à 10 % du nombre des travailleurs dans les établissements employant habituellement au moins 100 et moins de 300 travailleurs,

au moins égal à 30 dans les établissements employant habituellement au moins 300 travailleurs ;

ii)

soit, pour une période de quatre-vingt-dix jours, au moins égal à 20, quel que soit le nombre des travailleurs habituellement employés dans les établissements concernés ».

9

L’article 2 de ladite directive, intitulé « Information et consultation », prévoit, à ses paragraphes 1 à 3 :

« 1. Lorsqu’un employeur envisage d’effectuer des licenciements collectifs, il est tenu de procéder, en temps utile, à des consultations avec les représentants des travailleurs en vue d’aboutir à un accord.

2. Les consultations portent au moins sur les possibilités d’éviter ou de réduire les licenciements collectifs ainsi que sur les possibilités d’en atténuer les conséquences par le recours à des mesures sociales d’accompagnement visant notamment l’aide au reclassement ou à la reconversion des...

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