Carol Marilyn Robins and Others v Secretary of State for Work and Pensions.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2007:56
Date25 January 2007
Celex Number62005CJ0278
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-278/05

Affaire C-278/05

Carol Marilyn Robins e.a.

contre

Secretary of State for Work and Pensions

(demande de décision préjudicielle, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division)

«Protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur — Directive 80/987/CEE — Transposition — Article 8 — Régimes complémentaires de prévoyance professionnels ou interprofessionnels — Prestations de vieillesse — Protection des droits acquis — Étendue de la protection — Responsabilité d'un État membre du fait d'une transposition incorrecte d'une directive — Conditions»

Conclusions de l'avocat général Mme J. Kokott, présentées le 13 juillet 2006

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 25 janvier 2007

Sommaire de l'arrêt

1. Politique sociale — Rapprochement des législations — Protection des travailleurs en cas d'insolvabilité de l'employeur — Directive 80/987

(Directive du Conseil 80/987, art. 8)

2. Politique sociale — Rapprochement des législations — Protection des travailleurs en cas d'insolvabilité de l'employeur — Directive 80/987

(Directive du Conseil 80/987, art. 8)

3. Droit communautaire — Droits conférés aux particuliers — Violation par un État membre — Obligation de réparer le préjudice causé aux particuliers

(Directive du Conseil 80/987, art. 8)

1. L'article 8 de la directive 80/987, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, doit être interprété en ce sens que, en cas d'insolvabilité de l'employeur et d'insuffisance de ressources de régimes complémentaires de prévoyance professionnels ou interprofessionnels, le financement des droits acquis à des prestations de vieillesse ne doit pas obligatoirement être assuré par les États membres eux-mêmes ni être intégral.

En effet, d'une part, le libellé de l'article 8 de la directive, en tant que celui-ci énonce, de manière générale, que les États membres «s'assurent que les mesures nécessaires sont prises», n'impose pas à ces États de financer eux-mêmes les droits à prestations dont la protection doit être mise en oeuvre en vertu de la directive, mais leur laisse une marge d'appréciation quant au mécanisme à adopter aux fins de cette protection. D'autre part, en tant qu'il se borne à prescrire, en termes généraux, l'adoption des mesures nécessaires pour «protéger les intérêts» des personnes concernées, l'article 8 de la directive confère aux États membres, aux fins de la détermination du niveau de protection, une large marge d'appréciation, qui exclut une obligation de garantie intégrale.

(cf. points 35-36, 45-46, disp. 1)

2. L'article 8 de la directive 80/987, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, qui impose aux États membres de s'assurer que les mesures nécessaires sont prises pour protéger les intérêts desdits travailleurs en ce qui concerne leurs droits à des prestations de vieillesse au titre de régimes complémentaires de prévoyance, s'oppose à un système de protection susceptible d'aboutir, dans certaines situations, à une garantie de prestations limitée à moins de la moitié des droits auxquels pouvait prétendre un travailleur salarié.

En effet, même si ni cet article ni aucune autre disposition de ladite directive ne contiennent des éléments permettant d'établir avec précision le niveau minimal exigé pour la protection des droits à prestations au titre des régimes complémentaires de prévoyance, un tel système ne peut, en l'état de l'expression de la volonté du législateur communautaire, être considéré comme répondant à la définition du terme «protéger» utilisé audit article 8.

(cf. points 56-57, 62, disp. 2)

3. La responsabilité d'un État membre pour des dommages causés aux particuliers par une violation du droit communautaire suppose que la règle de droit violée ait pour objet de conférer des droits aux particuliers, que la violation soit suffisamment caractérisée et qu'il existe un lien de causalité direct entre la violation de l'obligation qui incombe à l'État et le dommage subi par les personnes lésées. S'agissant de la condition d'une violation suffisamment caractérisée du droit communautaire, elle implique une méconnaissance manifeste et grave par l'État membre des limites qui s'imposent à son pouvoir d'appréciation, les éléments à prendre en considération à cet égard étant, notamment, le degré de clarté et de précision de la règle violée ainsi que l'étendue de la marge d'appréciation que la règle enfreinte laisse aux autorités nationales. Cette marge d'appréciation, qui constitue un critère important, est largement tributaire du degré de clarté et de précision de la règle violée.

En ce qui concerne l'article 8 de la directive 80/987, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, qui impose aux États membres de s'assurer que les mesures nécessaires sont prises pour protéger les intérêts desdits travailleurs en ce qui concerne leurs droits à des prestations de vieillesse au titre de régimes complémentaires de prévoyance, il confère aux États membres, en raison de la généralité de ses termes, une large marge d'appréciation aux fins de la détermination du niveau de protection des droits à prestations. Dès lors, la responsabilité d'un État membre du fait d'une transposition incorrecte de cette disposition est subordonnée à la constatation d'une méconnaissance manifeste et grave, par cet État, des limites qui s'imposaient à son pouvoir d'appréciation.

Afin de déterminer si cette condition est réunie, le juge national saisi d'une demande en réparation doit tenir compte de tous les éléments qui caractérisent la situation qui lui est soumise. Parmi ces éléments figurent, notamment, outre le degré de clarté et de précision de la règle violée et l'étendue de la marge d'appréciation que la règle enfreinte laisse aux autorités nationales, le caractère intentionnel ou involontaire du manquement commis ou du préjudice causé, le caractère excusable ou inexcusable d'une éventuelle erreur de droit, la circonstance que les attitudes prises par une institution communautaire ont pu contribuer à l'omission, à l'adoption ou au maintien de mesures ou de pratiques nationales contraires au droit communautaire.

(cf. points 69-70, 72-77, 82, disp. 3)




ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

25 janvier 2007 (*)

«Protection des travailleurs salariés en cas d’insolvabilité de l’employeur – Directive 80/987/CEE – Transposition – Article 8 – Régimes complémentaires de prévoyance professionnels ou interprofessionnels – Prestations de vieillesse – Protection des droits acquis – Étendue de la protection – Responsabilité d’un État membre du fait d’une transposition incorrecte d’une directive – Conditions»

Dans l’affaire C-278/05,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 234 CE, introduite par la High Court of Justice (England & Wales), Chancery Division (Royaume-Uni), par décision du 22 juin 2005, parvenue à la Cour le 6 juillet 2005, dans la procédure

Carol Marilyn Robins e.a.

contre

Secretary of State for Work and Pensions,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, M. J. Klučka, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. J. Makarczyk et L. Bay Larsen (rapporteur), juges,

avocat général: Mme J. Kokott,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 1er juin 2006,

considérant les observations présentées:

– pour Mme Robins e.a., par MM. I. Walker, solicitor, D. Anderson, QC, et P. Newman, barrister,

– pour le gouvernement du Royaume-Uni, par Mme C. White, en qualité d’agent, assistée de MM. D. Pannick et D. Wyatt, QC, ainsi que de M. R. Hitchcock et Mme K. Smith, barristers,

– pour l’Irlande, par M. D. J. O’Hagan, en qualité d’agent, assisté de M. P. McGarry, BL,

– pour le gouvernement néerlandais, par Mme H. G. Sevenster, en qualité d’agent,

– pour la Commission des Communautés européennes, par MM. G. Rozet et J. Enegren, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 13 juillet 2006,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 8 de la directive 80/987/CEE du Conseil, du 20 octobre 1980, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d’insolvabilité de l’employeur (JO L 283, p. 23, ci-après la «directive»).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Mme Robins et 835 autres affiliés de deux régimes privés professionnels de retraite (ci-après, ensemble, les «demandeurs au principal») au Secretary of State for Work and Pensions, compétent au Royaume‑Uni pour les questions d’emploi et de retraite, au sujet de la réduction de leurs droits à prestations de vieillesse par suite de l’insolvabilité de leur employeur.

Le cadre juridique du litige

La législation communautaire

3 L’article 1er, paragraphe 1, de la directive dispose:

«La présente directive s’applique aux créances des travailleurs salariés résultant de contrats de travail ou de relations de travail et existant à l’égard d’employeurs qui se trouvent en état d’insolvabilité au sens de l’article 2 paragraphe 1.»

4 L’article 2 de la directive énonce:

«1. Au sens de la présente directive, un employeur est considéré comme se trouvant en état d’insolvabilité:

a) lorsqu’a été demandée l’ouverture d’une procédure prévue par les dispositions législatives, réglementaires et administratives de l’État membre concerné qui porte sur le patrimoine de l’employeur et vise à désintéresser collectivement ses créanciers et qui permet la prise en considération des créances visées à l’article...

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