Internetportal und Marketing GmbH v Richard Schlicht.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2010:65
Date10 February 2010
Celex Number62008CC0569
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-569/08

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

Mme VERICA Trstenjak

présentées le 10 février 2010 (1)

Affaire C‑569/08

Internetportal und Marketing GmbH

contre

Richard Schlicht

[demande de décision préjudicielle formée par l'Oberster Gerichtshof (Autriche)]

«Internet – Domaine de premier niveau .eu – Règlement (CE) nº 874/2004 – Article 21 – Enregistrement d'un domaine par le propriétaire d'une marque nationale acquise dans le seul but de permettre cet enregistrement pendant la première phase de l'enregistrement par étapes – Notion de ‘droit’ – Notion d’‘intérêt légitime’ – Notion de ‘mauvaise foi’ – Article 11 – Règles de transcription des caractères spéciaux – Marque nationale enregistrée de mauvaise foi»





I – Introduction

1. La présente affaire se fonde sur une décision de renvoi de l'Oberster Gerichtshof (Autriche) au titre de l’article 234 CE, par laquelle la juridiction de renvoi a saisi la Cour de cinq questions relatives à l’interprétation de l’article 21 du règlement (CE) n° 874/2004 (2).

2. Ces questions ont été soulevées dans le cadre d’un litige entre l’entreprise Internetportal und Marketing GmbH, qui exploite des sites Internet et commercialise des produits sur Internet (ci-après la «requérante»), d’une part, et M. Richard Schlicht, titulaire de la marque Benelux «Reifen» qu’il entend utiliser pour de nouveaux produits de nettoyage, notamment pour vitres (3) (ci-après le «défendeur»), d’autre part, ayant pour objet le nom de domaine «reifen.eu».

3. Les questions portent en substance sur les critères pour établir l’existence d’un «droit», d’un «intérêt légitime» et de la «mauvaise foi» dans le sens dudit article 21 du règlement nº 874/2004.

II – Cadre juridique

4. Le règlement (CE) n° 733/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 22 avril 2002, concernant la mise en œuvre du domaine de premier niveau .eu (4), contient, d'après son article 1er, les règles générales de la mise en œuvre du domaine de premier niveau .eu, y compris la désignation d'un registre, et établit le cadre de politique générale dans lequel le registre fonctionnera.

5. Aux termes de son seizième considérant, cette politique générale devrait garantir aux titulaires de droits antérieurs reconnus ou établis par le droit national et/ou communautaire et aux organismes publics en matière d'enregistrements spéculatifs et abusifs de noms de domaine qu'ils bénéficieront d'un délai spécifique («sunrise period») durant lequel l'enregistrement de leurs noms de domaine «sera exclusivement réservé» à de tels titulaires de droits antérieurs et à ces organismes publics.

6. L’article 5 («Cadre d’action») du règlement n° 733/2002 est libellé comme suit:

«1. La Commission adopte […] les règles de politique d'intérêt général relatives à la mise en œuvre et aux fonctions du TLD.eu et les principes de politique d'intérêt général en matière d'enregistrement. Ces règles incluent notamment:

a) une politique de règlement extrajudiciaire des différends;

b) la politique d'intérêt général en matière d'enregistrements spéculatifs et abusifs de noms de domaine, y compris la possibilité d'enregistrer des noms de domaine de façon progressive afin de garantir, de manière appropriée et temporaire, aux titulaires de droits antérieurs reconnus ou établis par le droit national et/ou communautaire et aux organismes publics des possibilités d'enregistrer leurs noms;

[…]»

7. Le règlement n° 874/2004, adopté en application dudit article, dispose dans son douzième considérant que:

«Pour préserver les droits antérieurs reconnus ou établis par le droit national ou communautaire, il convient de mettre en place une procédure d'enregistrement par étapes. Cette procédure doit comprendre deux étapes afin de garantir aux titulaires de droits antérieurs des possibilités convenables de faire enregistrer les noms sur lesquels ils détiennent des droits. […] L'attribution de ce nom doit alors se faire selon le principe du ‘premier arrivé, premier servi’ si pour un nom de domaine il y a plus d'un candidat titulaire d'un droit antérieur.»

8. L’article 3 («Demandes d’enregistrement d’un nom de domaine») du règlement n° 874/2004 dispose que:

«La demande d'enregistrement d'un nom de domaine doit comporter les éléments suivants:

[…]

c) une déclaration, sous forme électronique, par laquelle la partie qui introduit la demande affirme qu'à sa connaissance la demande d'enregistrement du nom de domaine est faite de bonne foi et n'empiète pas sur des droits détenus par des tiers.

[…]»

9. L’article 10 («Parties éligibles et noms qu’elles peuvent faire enregistrer») du règlement n° 874/2004 est libellé comme suit:

«1. Les titulaires de droits antérieurs reconnus ou établis par le droit national et/ou communautaire […] sont autorisés à demander l'enregistrement de noms de domaine pendant une durée déterminée selon une procédure d'enregistrement par étapes avant que l'enregistrement dans le domaine .eu ne soit ouvert au public.

Les ‘droits antérieurs’ comprennent, entre autres, les marques nationales et communautaires enregistrées, les indications géographiques ou les appellations d'origine, et dans la mesure où ils sont protégés par le droit national dans l'État membre où ils sont détenus, les noms de marques non enregistrés, les noms commerciaux, les identificateurs d'entreprises, les noms de sociétés, les noms de personnes, et les titres distinctifs des œuvres littéraires et artistiques protégées.

[…]

2. L'enregistrement sur la base d'un droit antérieur consiste à enregistrer le nom complet sur lequel un droit antérieur est détenu, tel qu'il est mentionné dans la documentation attestant l'existence de ce droit.

[…]»

10. L’article 11 («Caractères spéciaux») du règlement n° 874/2004 dispose ce qui suit:

«Aux fins de l'enregistrement des noms complets constitués de plusieurs mots ou éléments de texte ou de mots séparés par des espaces, un nom de domaine formé en unissant les parties du nom complet par un trait d'union ou en les accolant les unes aux autres est réputé identique au nom complet.

Lorsque le nom pour lequel des droits antérieurs sont invoqués contient des caractères spéciaux, des espaces ou des signes de ponctuation, ceux-ci doivent être éliminés du nom de domaine correspondant, remplacés par des traits d'union ou, lorsque cela est possible, exprimés par des caractères normaux.

Les caractères spéciaux et signes de ponctuation visés au deuxième alinéa sont notamment les suivants: ~ @ # $ % ^ & * ( ) + = <> { } [ ] \ /: ; ' , . ?

[…] Pour tout le reste, le nom de domaine est identique aux éléments de texte ou de mot du nom couvert par un droit antérieur.»

11. L’article 12 («Principes de l’enregistrement par étapes») du règlement n° 874/2004 est libellé comme suit:

«1. L'enregistrement par étapes commence seulement lorsqu'il a été satisfait à la condition énoncée à l'article 6, premier alinéa.

Le registre publie au moins deux mois à l'avance la date à laquelle la période d'enregistrement par étapes va commencer et en informe tous les bureaux d'enregistrement accrédités.

[…]

2. La durée de la période prévue pour l'enregistrement par étapes est fixée à quatre mois. L'ouverture généralisée de l'enregistrement des noms de domaine [‘Landrush period’] ne doit pas commencer avant la fin de la période prévue pour l'enregistrement par étapes.

L'enregistrement par étapes comprend deux phases d'une durée de deux mois chacune.

Pendant la première phase de l'enregistrement par étapes, seuls les marques nationales et communautaires enregistrées, les indications géographiques et les noms et acronymes mentionnés à l'article 10, paragraphe 3, peuvent être proposés comme noms de domaine à enregistrer par les titulaires et les licenciés de droits antérieurs sur ces noms et par les organismes publics visés à l'article 10, paragraphe 1.

Pendant la seconde phase de l'enregistrement par étapes, les noms qui peuvent être enregistrés au cours de la première phase ainsi que les noms associés à tous les autres droits antérieurs peuvent être proposés comme noms de domaine à enregistrer par les titulaires de droits antérieurs sur ces noms.

3. La demande d'enregistrement d'un nom de domaine fondée sur un droit antérieur au sens de l'article 10, paragraphes 1 et 2, doit inclure une référence à la base juridique nationale ou communautaire sur laquelle se fonde le droit détenu sur le nom, ainsi que toute autre information pertinente, comme le numéro d'enregistrement de la marque, des informations concernant la publication dans un journal ou bulletin officiel, des informations relatives à l'inscription dans les associations professionnelles ou commerciales et dans les chambres de commerce.

[…]

6. Les litiges concernant un nom de domaine sont réglés conformément aux dispositions du chapitre VI.»

12. L’article 21 («Enregistrements spéculatifs et abusifs») du règlement n° 874/2004 est libellé comme suit:

«1. Un nom de domaine est révoqué, dans le cadre d'une procédure extrajudiciaire ou judiciaire appropriée, quand un nom de domaine enregistré est identique ou susceptible d'être confondu avec un nom sur lequel un droit est reconnu ou établi par le droit national et/ou communautaire, tel que les droits mentionnés à l'article 10, paragraphe 1, et que ce nom de domaine:

a) a été enregistré sans que son titulaire ait un droit ou intérêt légitime à faire valoir sur ce nom, ou

b) a été enregistré ou utilisé de mauvaise foi.

2. L'existence d'un intérêt légitime au sens du paragraphe 1, point a), peut être démontrée quand:

a) avant tout avis de procédure de règlement extrajudiciaire des litiges, le titulaire d'un nom de domaine a utilisé le nom de domaine ou un nom correspondant au nom de domaine dans le cadre d'une offre de biens ou de services ou qu'il peut démontrer s'y être préparé;

b) le titulaire d'un nom de domaine est une entreprise, une organisation ou une personne physique généralement connue sous ce nom de domaine, même en...

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