Opinion of Advocate General Bobek delivered on 20 December 2017.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2017:1013
Date20 December 2017
Celex Number62017CC0571
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypePetición de decisión prejudicial - procedimiento de urgencia
Docket NumberC-571/17
62017CC0571

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MICHAL BOBEK

présentées le 20 décembre 2017 ( 1 ) ( 2 )

Affaire C‑571/17 PPU

Openbaar Ministerie

contre

Samet Ardic

[demande de décision préjudicielle formée par le Rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam, Pays-Bas)]

« Renvoi préjudiciel – Mandat d’arrêt européen – Décision-cadre 2002/584/JAI – Mandat d’arrêt européen délivré aux fins de l’exécution d’une peine privative de liberté – Motifs de non-exécution facultative – Article 4 bis de la décision-cadre – Notion de « procès ayant mené à la décision » – Portée – Personne ayant été définitivement condamnée à une peine privative de liberté à l’issue d’un procès qui s’est déroulé en présence de l’intéressé – Sursis à exécution sous conditions d’une peine privative de liberté partiellement purgée – Non-respect des conditions prévues – Procédure ultérieure ayant abouti à la révocation du sursis à exécution de la peine – Procédure s’étant déroulée sans que l’intéressé ait été présent »

I. Introduction

1.

M. Samet Ardic, ressortissant allemand, fait l’objet d’un mandat d’arrêt européen (MAE) émis par une autorité judiciaire allemande. Cette autorité demande la remise de M. Ardic, détenu actuellement aux Pays-Bas, en vue de l’exécution du reste de la peine prévue par deux jugements ayant imposé chacun une peine privative de liberté. Après avoir purgé une partie de ces peines, M. Ardic s’est vu accorder un sursis à leur exécution. Ce sursis a été par la suite révoqué au motif que M. Ardic n’avait pas respecté les conditions de sa remise en liberté conditionnelle.

2.

Bien que M. Ardic ait comparu en personne au procès ayant mené aux deux jugements définitifs le condamnant à deux peines privatives de liberté, il n’a pas comparu en personne à la procédure ayant conduit aux décisions de révocation du sursis à exécution du reste desdites peines.

3.

La présente affaire porte sur le champ d’application de l’article 4 bis de la décision-cadre 2002/584/JAI ( 3 ). La juridiction de renvoi s’interroge sur la question de savoir si la notion de « procès qui a mené à la décision » y figurant concerne une procédure qui a mené aux décisions révoquant le sursis à exécution du reste des peines privatives de liberté.

II. Cadre juridique

A. La CEDH

4.

L’article 6, paragraphe 1, de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ( 4 ) (ci‑après la « CEDH ») prévoit :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. […] »

B. Le droit de l’Union

1. La Charte

5.

En vertu de l’article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte ») :

« Toute personne dont les droits et libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal dans le respect des conditions prévues au présent article.

Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable par un tribunal indépendant et impartial, établi préalablement par la loi. Toute personne a la possibilité de se faire conseiller, défendre et représenter.

[…] »

6.

Aux termes de l’article 48, paragraphe 2, de la Charte, « [l]e respect des droits de la défense est garanti à tout accusé ».

2. La décision-cadre

7.

L’article 1, paragraphe 2, de la décision-cadre dispose que « [l]es États membres exécutent tout [MAE], sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément aux dispositions de la présente décision-cadre ».

8.

L’article 1, paragraphe 3, prévoit que ladite décision-cadre « ne saurait avoir pour effet de modifier l’obligation de respecter les droits fondamentaux et les principes juridiques fondamentaux tels qu’ils sont consacrés par l’article 6 [TUE] ».

9.

L’article 4 bis de la décision-cadre a été introduit par la décision-cadre 2009/299/JAI ( 5 ) aux fins de préciser les motifs facultatifs de refus d’exécuter un MAE lorsque l’intéressé n’a pas comparu en personne à son procès :

« 1. L’autorité judiciaire d’exécution peut également refuser d’exécuter le mandat d’arrêt européen délivré aux fins d’exécution d’une peine ou d’une mesure de sûreté privatives de liberté, si l’intéressé n’a pas comparu en personne au procès qui a mené à la décision, sauf si le mandat d’arrêt européen indique que l’intéressé, conformément aux autres exigences procédurales définies dans la législation nationale de l’État membre d’émission :

a)

en temps utile,

i)

soit a été cité à personne et a ainsi été informé de la date et du lieu fixés pour le procès qui a mené à la décision, soit a été informé officiellement et effectivement par d’autres moyens de la date et du lieu fixés pour ce procès, de telle sorte qu’il a été établi de manière non équivoque qu’il a eu connaissance du procès prévu ;

et

ii)

a été informé qu’une décision pouvait être rendue en cas de non-comparution ;

ou

b)

ayant eu connaissance du procès prévu, a donné mandat à un conseil juridique, qui a été désigné soit par l’intéressé soit par l’État, pour le défendre au procès, et a été effectivement défendu par ce conseil pendant le procès ;

ou

c)

après s’être vu signifier la décision et avoir été expressément informé de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel, à laquelle l’intéressé a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une infirmation de la décision initiale :

i)

a indiqué expressément qu’il ne contestait pas la décision ;

ou

ii)

n’a pas demandé une nouvelle procédure de jugement ou une procédure d’appel dans le délai imparti ;

ou

d)

n’a pas reçu personnellement la signification de la décision, mais :

i)

la recevra personnellement sans délai après la remise et sera expressément informé de son droit à une nouvelle procédure de jugement ou à une procédure d’appel, à laquelle l’intéressé a le droit de participer et qui permet de réexaminer l’affaire sur le fond, en tenant compte des nouveaux éléments de preuve, et peut aboutir à une infirmation de la décision initiale ;

et

ii)

sera informé du délai dans lequel il doit demander une nouvelle procédure de jugement ou une procédure d’appel, comme le mentionne le mandat d’arrêt européen concerné.

[…] »

III. Les faits, la procédure au principal et la question préjudicielle

10.

Le 13 juin 2017, le Rechtbank Amsterdam (tribunal d’Amsterdam, Pays-Bas) a été saisi par l’officier van justitie bij de rechtbank (ministère public près le tribunal, Pays-Bas) d’une demande concernant le traitement d’un MAE émis le 9 mai 2017 par le Staatsanwaltschaft Stuttgart (parquet de Stuttgart, Allemagne).

11.

Ce MAE tend à l’arrestation et à la remise de M. Ardic, ressortissant allemand, aux fins de l’exécution en Allemagne de deux peines privatives de liberté. Deux jugements définitifs qui visent neuf infractions constituent le fondement dudit MAE. En premier lieu, le jugement du 4 mars 2009 de l’Amtsgericht Böblingen (tribunal de district de Böblingen, Allemagne) a condamné M. Ardic à une peine privative de liberté d’un an et huit mois. En second lieu, le jugement du 10 novembre 2010 de l’Amtsgericht Stuttgart-Bad Cannstatt (tribunal de district de Stuttgart-Bad Cannstatt, Allemagne) a condamné M. Ardic à une peine privative de liberté d’un an et huit mois.

12.

La partie d) du MAE en cause confirme que M. Ardic a comparu en personne au procès qui a mené à ces deux jugements.

13.

Par deux décisions (respectivement du 4 janvier 2010 et du 31 mai 2011), les juridictions ayant prononcé les jugements mentionnés au point 11 des présentes conclusions ont sursis à l’exécution du reste des peines prévues dans ceux-ci ( 6 ).

14.

Ces sursis ont été révoqués par deux décisions de l’Amtsgericht Stuttgart-Bad Cannstatt (tribunal de district de Stuttgart-Bad Cannstatt), rendues respectivement les 18 et 4 avril 2013 (ci-après les « décisions de révocation »). L’exécution du reste des peines privatives de liberté a été ordonnée au motif que l’intéressé n’avait pas respecté les conditions de sa libération conditionnelle et s’était soustrait, nonobstant les rappels, au contrôle et à la direction de son agent de reclassement ainsi qu’au contrôle du tribunal. Ces décisions de révocation sont définitives. Aussi, M. Ardic doit encore purger 338 jours de la peine privative de liberté infligée dans l’affaire jugée le 4 mars 2009 par l’Amtsgericht Böblingen (tribunal de district de Böblingen) et 340 jours de celle infligée dans l’affaire jugée le 10 novembre 2010 par l’Amtsgericht Stuttgart-Bad Cannstatt (tribunal de district de Stuttgart-Bad Cannstatt).

15.

La juridiction de renvoi infère du MAE en question que M. Ardic n’a pas comparu en personne à la procédure qui a mené aux décisions de révocation, ce que M. Ardic a confirmé. Ce dernier a également déclaré que, s’il avait eu connaissance de la date et du lieu dudit procès, il aurait comparu afin de convaincre le juge compétent de ne pas procéder à la révocation.

16.

La partie f) du MAE (informations facultatives concernant les « autres circonstances pertinentes en l’espèce »)...

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