ERGO Poist’ovňa, a.s. v Alžbeta Barlíková.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2017:15
Docket NumberC-48/16
Celex Number62016CC0048
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date12 January 2017
62016CC0048

PROVISIONAL TEXT OF 09/12/2016

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 12 janvier 2017 ( 1 )

Affaire C-48/16

ERGO Poist’ovňa, a.s.

contre

Alžbeta Barlíková

[demande de décision préjudicielle formée par le Okresný súd Dunajská Streda (tribunal de district de Dunajská Streda, Slovaquie)]

«Demande de décision préjudicielle — Agents commerciaux indépendants — Directive 86/653/CEE — Article 11 — Droit à la commission — Extinction — Inexécution partielle d’un contrat entre le tiers et le commettant — Notion de ‘circonstances imputables au commettant’»

1.

La demande de décision préjudicielle formée dans la présente affaire par le Okresný súd Dunajská Streda (tribunal de district de Dunajská Streda, Slovaquie) donne à la Cour l’occasion de préciser plusieurs notions essentielles figurant à l’article 11 de la directive 86/653/CEE ( 2 ), concernant la rémunération d’un agent commercial en cas d’inexécution partielle du contrat conclu entre un commettant et un tiers.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

2.

L’article 11 de la directive 86/653 dispose :

« 1.

Le droit à la commission ne peut s’éteindre que si et dans la mesure où :

il est établi que le contrat entre le tiers et le commettant ne sera pas exécuté

et

l’inexécution n’est pas due à des circonstances imputables au commettant.

2.

Les commissions que l’agent commercial a déjà perçues sont remboursées si le droit y afférent est éteint.

3.

Il ne peut être dérogé par accord à la disposition du paragraphe 1 au détriment de l’agent commercial ».

Le droit slovaque

3.

La directive 86/653 a été transposée en droit slovaque aux articles 652 et suivants de l’Obchodný zákonník (code de commerce).

4.

En vertu de l’article 652, paragraphes 1 et 5 :

« 1) En concluant un contrat d’agence commerciale, l’agent en sa qualité de professionnel s’engage, à l’égard du commettant, à développer une activité consistant à conclure un certain type de contrats (ci-après les « opérations ») ou à négocier et à conclure les contrats au nom et pour le compte du commettant, et ce dernier s’engage à lui verser une commission.

[…]

5) À moins que ce chapitre n’en dispose autrement, le contrat d’agence commerciale est régi par les dispositions applicables au contrat d’intermédiation. »

5.

En outre, l’article 801 de l’Občiansky zákonník (code civil) prévoit :

« 1. Le contrat d’assurance s’éteint si les cotisations dues pour la première période d’assurance ou la prime d’assurance unique n’ont pas été versées dans un délai de trois mois à partir du jour de leur exigibilité.

2. Le contrat d’assurance s’éteint également si les cotisations dues pour la période d’assurance ultérieure n’ont pas été versées dans le mois suivant la date de notification de la lettre par laquelle l’entreprise d’assurance a mis le preneur d’assurance en demeure de procéder au paiement des sommes dues, si le paiement n’est pas intervenu avant la notification de la lettre de mise en demeure. […] »

Les faits, la procédure au principal et les questions préjudicielles

6.

Le 13 mars 2012, la société d’assurances ERGO Poist’ovňa, a.s. (ci-après « ERGO ») et Mme Alžbeta Barlíková, qui sont respectivement la requérante et la défenderesse au principal, ont conclu un contrat intitulé « contrat d’intermédiation avec un agent financier lié » (ci-après le « contrat litigieux »).

7.

Dans le contrat litigieux, il était stipulé que Mme Barlíková exerçait une activité d’intermédiation dans le secteur des assurances en sa qualité d’agent financier lié. L’« intermédiation » au sens du contrat consistait à démarcher des tiers (ci‑après les « clients ») afin de leur proposer de conclure un contrat d’assurance, puis à conclure celui‑ci, ainsi qu’à exercer d’autres activités aboutissant à la conclusion de contrats d’assurance avec les clients. Mme Barlíková était habilitée à conclure et à signer des contrats d’assurance au nom d’ERGO.

8.

Le contrat litigieux précisait également que l’intermédiation était fructueuse si le client versait à ERGO la prime d’assurance négociée. En outre, Mme Barlíková devait rechercher activement des clients, effectuer des analyses et informer les clients.

9.

En contrepartie de la conclusion de chaque nouveau contrat d’assurance, Mme Barlíková devait recevoir une commission correspondant à un certain pourcentage du montant de la cotisation ou de la prime annuelle. Cette commission devait être payée à l’avance à Mme Barlíková, à la date de conclusion d’un nouveau contrat d’assurance, sous réserve que le contrat d’assurance concerné dure et que la prime soit versée par le client pendant une période déterminée de trois ou cinq ans. Si le client ne versait pas la cotisation le premier mois, le droit à la commission sur le contrat d’assurance concerné devait s’éteindre. Si le client cessait de payer la cotisation pour une raison quelconque après expiration du délai de trois mois prévu par le contrat d’assurance, la commission était réduite proportionnellement.

10.

Mme Barlíková a trouvé pour ERGO plusieurs clients, qui ont conclu des contrats d’assurance avec cet assureur. Sur la base de ces contrats, des commissions lui ont provisoirement été versées (à l’avance). Lorsque, trois à six mois après la conclusion des contrats d’assurance, certains clients ont cessé de payer les cotisations convenues, ERGO les a infructueusement mis en demeure de payer, à la suite de quoi les contrats d’assurance se sont éteints de plein droit. Certains des clients avaient cessé de payer les cotisations au motif d’une « perte de confiance en la requérante ».

11.

À la suite de l’extinction des contrats d’assurance, ERGO a facturé une indemnité d’annulation à Mme Barlíková en invoquant les clauses précitées, pour un montant total de 11421,42 euros. Mme Barlíková n’ayant pas payé cette somme, ERGO a entamé des poursuites.

12.

Mme Barlíková fait valoir que la cessation des différents contrats d’assurance découle d’une faute d’ERGO. Elle estime ainsi qu’ERGO n’a pas traité les clients correctement et souligne qu’elle leur a posé de nombreuses questions, même après la conclusion du contrat, et leur a envoyé des lettres de rappel alors même que les cotisations avaient été versées. Les clients auraient par conséquent perdu confiance en ERGO en tant qu’assureur et auraient cessé de payer leurs cotisations. Les clients auraient adressé des lettres en ce sens à ERGO.

13.

La juridiction de renvoi cherche à établir si, en vertu de l’article 11 de la directive 86/653, un agent commercial est en droit de conserver une commission déjà perçue dans une affaire comme celle en cause au principal.

14.

C’est dans le cadre de cette procédure que, par ordonnance du 23 novembre 2015, reçue à la Cour le 27 janvier 2016, l’Okresný súd Dunajská Streda (tribunal de district de Dunajská Streda) a saisi la Cour des questions préjudicielles suivantes :

1)

L’expression « le contrat entre le tiers et le commettant ne sera pas exécuté », visée à l’article 11 de la [directive 86/653], doit‑elle être interprétée en ce sens qu’elle s’entend :

a)

soit d’une inexécution totale du contrat, c’est‑à‑dire que ni le tiers ni le commettant ne fournit, même partiellement, la prestation contractuelle à l’autre partie,

b)

soit d’une inexécution partielle du contrat, telle que la non‑réalisation du volume prévu d’opérations ou le non‑respect de la durée contractuelle prévue ?

2)

À supposer correcte l’interprétation figurant au point b) de la première question, l’article 11, paragraphe 2, de la directive 86/653 doit-il être interprété en ce sens que ne constitue pas une dérogation au détriment de l’agent la clause d’un contrat d’agence commerciale en vertu de laquelle l’agent est tenu de rembourser au prorata une partie de sa commission dans l’hypothèse où le contrat entre le tiers et le commettant ne serait pas exécuté dans la mesure prévue par ledit contrat ou dans celle prévue par le contrat d’agence commerciale ?

3)

Dans des cas tels que ceux de l’affaire en cause, l’appréciation de l’« [imputabilité] au commettant » au sens de l’article 11, paragraphe 1, second tiret, de la directive 86/653 implique‑t‑elle :

a)

d’examiner uniquement les circonstances de droit conduisant directement à la cessation du contrat (telles que l’extinction du contrat résultant de l’inexécution des obligations contractuelles par le tiers) ou

b)

de rechercher également si ces circonstances sont dues ou non au comportement du commettant dans le cadre de la relation juridique avec le tiers, qui auraient conduit ce dernier à perdre confiance dans le commettant et à violer par la suite ses obligations contractuelles ?

15.

Les gouvernements slovaque et allemand ainsi que la Commission européenne ont présenté des observations écrites.

Analyse

La compétence de la Cour

16.

Il ressort de l’article 1er de la directive 86/653 que celle‑ci vise à harmoniser les dispositions nationales qui régissent les relations entre les agents commerciaux et leurs commettants lorsqu’ils négocient la vente ou l’achat de marchandises ( 3 ). Cependant, l’affaire au principal ne porte pas sur la vente de marchandises, mais sur celle de services (d’assurance). Par conséquent, les dispositions de la directive 86/653 ne s’appliquent pas en l’espèce.

17.

On pourrait donc se demander si la Cour est compétente pour rendre une décision préjudicielle...

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