Protect Natur-, Arten- und Landschaftsschutz Umweltorganisation v Bezirkshauptmannschaft Gmünd.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2017:760
Docket NumberC-664/15
Celex Number62015CC0664
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date12 October 2017
62015CC0664

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME ELEANOR SHARPSTON

présentées le 12 octobre 2017 ( 1 )

Affaire C‑664/15

Protect Natur-, Arten- und Landschaftsschutz Umweltorganisation

contre

Bezirkshauptmannschaft Gmünd

[demande de décision préjudicielle formée par le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche)]

«Renvoi préjudiciel – Environnement – Convention d’Aarhus – Accès à la justice – Qualité pour agir d’organisations non gouvernementales de défense de l’environnement – Droit de ces organisations non gouvernementales de former un recours juridictionnel contre une décision des autorités compétentes – Qualité de ces organisations non gouvernementales en tant que parties à une procédure administrative – Perte de la qualité de partie à une procédure administrative lorsque l’organisation concernée omet de soumettre des objections en temps utile au cours de cette procédure »

1.

Aux termes du présent renvoi préjudiciel, le Verwaltungsgerichtshof (Cour administrative, Autriche) souhaite obtenir des éclaircissements quant à la qualité pour agir d’une organisation de défense de l’environnement sollicitant un accès à la justice conformément à la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (ci-après la « convention d’Aarhus ») ( 2 ). Les questions en cause sont apparues dans le contexte d’une demande d’autorisation portant sur le captage d’eau d’une rivière en vue de produire de la neige pour une station de ski (ci-après « la procédure d’autorisation ») ( 3 ). Les problématiques environnementales corrélées à cette procédure particulière entrent dans le champ d’application de la directive 2000/60/CE (ci-après la « directive-cadre sur l’eau ») ( 4 ).

2.

La délicate question de la qualité pour agir des organisations de défense de l’environnement dans le cadre de procédures d’autorisation en matière d’environnement a donné lieu à une jurisprudence abondante dont, en dernier lieu, l’affaire Lesoochranárske zoskupenie VLK ( 5 ).

3.

En l’espèce, la Cour devra traiter des problématiques suivantes. La directive-cadre sur l’eau, lue conjointement avec la convention d’Aarhus, confère‑t-elle à une organisation de défense de l’environnement la qualité pour agir aux fins de contester des décisions administratives dans le cadre de procédures administratives ou judiciaires, notamment lorsqu’une autorisation est demandée pour le captage d’eau à des fins de production de neige ? L’organisation en cause doit‑elle se voir reconnaître la qualité de partie dès la phase administrative de la procédure ou suffit-il qu’elle ait qualité pour former un recours contre l’autorisation délivrée par les autorités compétentes ? Les règles de droit procédural national peuvent-elles empêcher une organisation de défense de l’environnement de contester une décision administrative par voie de recours, lorsque ladite organisation n’a pas soumis ses objections quant à l’autorisation en cause « en temps utile », au cours de la procédure administrative, ainsi que le prévoit le droit national ?

La convention d’Aarhus

4.

Les objectifs de la convention d’Aarhus incluent les éléments suivants : l’affirmation de la nécessité de protéger, de préserver et d’améliorer l’état de l’environnement ( 6 ) ; la reconnaissance de ce que chacun a le devoir, tant individuellement qu’en association avec d’autres, de protéger et d’améliorer l’environnement dans l’intérêt des générations présentes et futures ( 7 ) ; la prise en compte du rôle important que les organisations non gouvernementales peuvent notamment jouer dans le domaine de la protection de l’environnement ( 8 ) ; ainsi que la garantie que le public, y compris les organisations, ait accès à des mécanismes judiciaires efficaces afin que leurs intérêts légitimes soient protégés et la loi respectée ( 9 ).

5.

L’article 1er prévoit qu'« [a]fin de contribuer à protéger le droit de chacun, dans les générations présentes et futures, de vivre dans un environnement propre à assurer sa santé et son bien-être, chaque [p]artie garantit les droits d’accès à l’information sur l’environnement, de participation du public au processus décisionnel et d’accès à la justice en matière d’environnement conformément aux dispositions de la présente [c]onvention ». À ce titre, la convention d’Aarhus peut trouver à s’appliquer dès qu’une législation en matière d’environnement entre en jeu.

6.

Conformément à l’article 2, paragraphe 4, le terme « public » désigne « une ou plusieurs personnes physiques ou morales et, conformément à la législation ou à la coutume du pays, les associations, organisations ou groupes constitués par ces personnes ». En vertu de l’article 2, paragraphe 5, « les organisations non gouvernementales qui œuvrent en faveur de la protection de l’environnement et qui remplissent les conditions pouvant être requises en droit interne sont réputées avoir un intérêt » à faire valoir à l’égard du processus décisionnel en matière d’environnement ; à ce titre, ces organisations entrent dans le champ d’application de la notion de « public concerné », au sens de cette disposition.

7.

L’article 6 est intitulé « Participation du public aux décisions relatives à des activités particulières ». L’article 6, paragraphe 1, sous a), dispose que les dispositions relatives à la participation du public s’appliquent lorsqu’il s’agit de décider d’autoriser ou non des activités proposées du type de celles énumérées à l’annexe I ( 10 ). L’article 6, paragraphe 1, sous b), prévoit que ces dispositions doivent également être appliquées, conformément au droit interne, lorsqu’il s’agit de prendre une décision au sujet d’activités proposées non énumérées à l’annexe I qui peuvent avoir un effet important sur l’environnement. C’est à l’État concerné qu’il appartient de déterminer si l’activité proposée tombe sous le coup de l’article 6. L’article 6, paragraphes 2 à 10, de la convention d’Aarhus confère notamment au public le droit de participer au début de la procédure de prise de décision en matière d’environnement et de soumettre toutes observations, informations, analyses ou opinions qu’il estime pertinentes au regard de l’activité proposée.

8.

L’article 9, paragraphe 2, dispose :

« Chaque partie veille, dans le cadre de sa législation nationale, à ce que les membres du public concerné

a)

ayant un intérêt suffisant pour agir

ou, sinon,

b)

faisant valoir une atteinte à un droit, lorsque le code de procédure administrative d’une [p]artie pose une telle condition, puissent former un recours devant une instance judiciaire et/ou un autre organe indépendant et impartial établi par loi pour contester la légalité, quant au fond et à la procédure, de toute décision, tout acte ou toute omission tombant sous le coup des dispositions de l’article 6 et, si le droit interne le prévoit et sans préjudice du paragraphe 3 […], des autres dispositions pertinentes de la [convention d’Aarhus].

Ce qui constitue un intérêt suffisant et une atteinte à un droit est déterminé selon les dispositions du droit interne et conformément à l’objectif consistant à accorder au public concerné un large accès à la justice dans le cadre de la [convention d’Aarhus]. À cet effet, l’intérêt qu’a toute organisation non gouvernementale répondant aux conditions visées au paragraphe 5 de l’article 2 est réputé suffisant au sens du [point a) susmentionné]. Ces organisations sont également réputées avoir des droits auxquels il pourrait être porté atteinte au sens du [point b)] ci‑dessus.

[…] »

9.

L’article 9, paragraphe 3, dispose :

« En outre, et sans préjudice des procédures de recours visées aux paragraphes 1 et 2 [de la convention d’Aarhus], chaque [p]artie veille à ce que les membres du public qui répondent aux critères éventuels prévus par son droit interne puissent engager des procédures administratives ou judiciaires pour contester les actes ou omissions de particuliers ou d’autorités publiques allant à l’encontre des dispositions du droit national de l’environnement. »

10.

L’article 9, paragraphe 4, ajoute :

« [S]ans préjudice du paragraphe 1, les procédures visées aux paragraphes 1, 2 et 3 [de la convention d’Aarhus] doivent offrir des recours suffisants et effectifs, y compris un redressement par injonction s’il y a lieu, et doivent être objectives, équitables et rapides sans que leur coût soit prohibitif. Les décisions prises au titre du présent article sont prononcées ou consignées par écrit. Les décisions des tribunaux et, autant que possible, celles d’autres organes doivent être accessibles au public. »

Le droit de l’Union

La directive « habitats »

11.

La directive 92/43/CEE (ci-après la « directive “habitats” ») ( 11 ) a pour objet de contribuer à assurer la biodiversité par la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages sur le territoire de l’Union ( 12 ). En vertu de cette directive, un réseau européen cohérent de zones spéciales de conservation est constitué afin d’assurer le maintien ou, le cas échéant, le rétablissement, dans un état de conservation favorable, des types d’habitats naturels et des habitats d’espèces concernés dans leur aire de répartition naturelle ( 13 ). Dans les zones spéciales de conservation, les États membres doivent éviter la détérioration des habitats naturels et des habitats d’espèces ainsi que les perturbations touchant les espèces pour lesquelles les zones ont été désignées. Tout plan ou projet non directement lié ou nécessaire à la gestion du site, mais susceptible d’affecter ce site de manière significative, fait l’objet d’une évaluation appropriée de ses incidences sur le site eu égard aux...

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