Gerhard Schultz-Hoff v Deutsche Rentenversicherung Bund (C-350/06) and Stringer and Others v Her Majesty's Revenue and Customs (C-520/06).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2008:37
Docket NumberC-350/06,C-520/06
Celex Number62006CC0350
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date24 January 2008

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

Mme VERICA TRSTENJAK

présentées le 24 janvier 2008 (1)

Affaire C‑350/06

Gerhard Schultz-Hoff

contre

Deutsche Rentenversicherung Bund

[demande de décision préjudicielle formée par le Landesarbeitsgericht Düsseldorf (Allemagne)]

«Directive 2003/88/CE – Aménagement du temps de travail – Article 7 – Droit au congé annuel payé minimal– Droit à l’indemnité compensatrice du congé non pris – Droits sociaux fondamentaux en droit communautaire – Perte du droit au congé à l’expiration du délai prescrit par la loi»






Table des matières


I – Introduction

II – Cadre juridique

A – Droit communautaire

B – La réglementation nationale

1. La loi

2. Les conventions collectives en vigueur

III – Les faits, la procédure au principal et les questions préjudicielles

IV – La procédure devant la Cour

V – Principaux arguments des parties

VI – Analyse juridique

A – Sur la première question

1. Remarques préliminaires

2. Le droit au congé annuel payé en tant que droit social fondamental

3. Le droit au congé annuel payé minimal en droit communautaire

a) Le pouvoir de transposition des États membres

b) Le niveau de protection garanti en droit communautaire

c) Rattachement du droit au congé avec la capacité de travail

i) Application par analogie des principes développés par la jurisprudence

ii) Incompatibilité avec la finalité de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2003/88

– Risque d’une interprétation contraire à l’objectif poursuivi

– Interprétation à la lumière des intérêts des parties au contrat de travail

iii) Comparaison avec les règles prévues dans la convention n° 132 de l’OIT

B – Sur la deuxième question

C – Sur la troisième question

VII – Conclusion

I – Introduction

1. Par sa demande de décision à titre préjudiciel, le Landesarbeitsgericht Düsseldorf (Allemagne) demande à la Cour en vertu de l’article 234 CE d’interpréter l’article 7, paragraphes 1 et 2, de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil, du 4 novembre 2003, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (2).

2. Les questions préjudicielles ont été soulevées dans le cadre d’un litige opposant Gerhard Schultz-Hoff (le requérant) à son ancien employeur, le Deutscher Versicherungsbund (partie défenderesse au principal), dans lequel la juridiction de renvoi est tenue de décider si le requérant peut se prévaloir d’une indemnité compensatrice de congé auprès de la partie défenderesse après la cessation de la relation de travail.

3. La juridiction de renvoi aimerait savoir en substance s’il n’est pas contraire à l’article 7 de la directive 2003/88 que le droit d’un travailleur d’obtenir un congé payé minimal de quatre semaines s’éteigne à la fin de l’année de référence, mais au plus tard à la fin de la période de report, et que, en cas de cessation de la relation de travail, le congé ne puisse être remplacé par une indemnité financière lorsque le travailleur est ultérieurement en incapacité de travail pour maladie avant la fin de la période de report.

II – Cadre juridique

A – Droit communautaire

4. La directive 2003/88 est entrée en vigueur le 2 août 2004 en remplacement de la directive 93/104/CE du Conseil, du 23 novembre 1993, concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail (3). Comme la directive 93/104, elle a pour objet de fixer certaines règles minimales de sécurité et de protection de la santé en cas d’aménagement du temps de travail. L’article 7 de la directive 2003/88, tel que repris de manière inchangée de la directive antérieure, est libellé comme suit:

«Congé annuel

1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’un congé annuel payé d’au moins quatre semaines, conformément aux conditions d’obtention et d’octroi prévues par les législations et/ou pratiques nationales.

2. La période minimale de congé annuel payé ne peut être remplacée par une indemnité, sauf en cas de fin de relation de travail.»

5. L’article 17 de la directive 2003/88 prévoit que les États membres peuvent déroger à certaines dispositions de ladite directive. Aucune dérogation n’est admise à l’égard de l’article 7.

B – La réglementation nationale

1. La loi

6. La loi fédérale sur les congés («Bundesurlaubsgesetz», ci-après le «BUrlG»), du 8 janvier 1963, dans sa version du 7 mai 2002, dispose notamment ce qui suit:

«Article premier – Droit au congé

Chaque travailleur a droit aux congés payés pour chaque année civile.

[…]

Article 3 – Durée du congé

(1) Le congé est d’au moins 24 jours ouvrables par an.

[…]

Article 7 – Fixation, report et indemnisation du congé

(1) Lors de la détermination du congé, il y a lieu de tenir compte des souhaits du travailleur en la matière, à moins que cette prise en compte ne s’oppose aux intérêts vitaux de l’entreprise ou aux souhaits d’autres travailleurs qui en raison de facteurs sociaux méritent la priorité.

[…]

(3) Le congé doit être octroyé et pris dans l’année civile en cours. Un report du congé à l’année civile suivante est uniquement permis si des raisons urgentes tenant à l’entreprise ou à la personne du travailleur le justifient. En cas de report, le congé peut être octroyé et pris dans les trois premiers mois de l’année civile suivante.

(4) Si en raison de la cessation de la relation de travail, le congé ne peut plus être octroyé en tout ou en partie, alors il y a lieu de l’indemniser.»

7. L’article 13 du BUrlG prévoit que les conventions collectives peuvent déroger à certaines dispositions, dont l’article 7, paragraphe 3, du BUrlG, à condition que ces dérogations ne soient pas défavorables aux employés.

2. Les conventions collectives en vigueur

8. La convention collective générale pour les employés de l’agence fédérale des assurances pour les employés (Manteltarifvertrag für die Angestellten der Bundesversicherungsanstelt für Angestellte, ci-après la «convention collective») prévoit:

«Article 47 – Congés annuels

(1) Les employés reçoivent pour chaque année de référence des congés payés. L’année de référence est l’année civile.

[…]

(7) Il y a lieu de prendre ses congés avant la fin de l’année de référence. S’il n’est pas possible de prendre ses congés avant la fin de l’année de référence, alors il y a lieu de les prendre avant le 30 avril de l’année de référence suivante. Si les congés ne peuvent être pris avant le 30 avril pour des raisons professionnelles, d’incapacité de travail ou en raison de la période de protection suivant le congé de maternité, il y a lieu de les prendre avant le 30 juin. Si des congés fixés dans le cadre de l’année de référence pour cette année de référence ont été déplacés à l’initiative de la Bundesversicherungsanstalt für Angestellte à une période postérieure au 31 décembre de l’année de référence et qu’ils ne pouvaient être pris en raison de l’incapacité de travail avant le 30 juin selon le paragraphe 2, il y a lieu de les prendre avant le 30 septembre.

[.... ]

Les congés qui ne sont pas pris dans le cadre des délais précités, sont perdus.

[.... ]

Article 51 – Indemnité compensatrice pour congé non pris

(1) Si, au moment de la cessation de la relation de travail, le droit au congé n’est pas encore exécuté, le congé doit, dans la mesure où cela est possible dans l’intérêt du service ou de l’entreprise, être octroyé et pris au cours du délai de préavis. Dans la mesure où le congé ne peut pas être accordé ou que le délai de préavis ne suffit pas, il y a lieu d’indemniser le congé. Il en va de même lorsque la relation de travail prend fin par une convention de dissolution (article 58) ou en raison d’une diminution de la capacité de travail (article 59) ou lorsque la relation de travail est suspendue en vertu de l’article 59, paragraphe 1, premier alinéa, cinquième phrase.

[...]»

III – Les faits, la procédure au principal et les questions préjudicielles

9. À la suite de la cessation de la relation de travail au 30 septembre 2005, les parties ne s’entendent pas sur la question de savoir si la défenderesse est débitrice des indemnités de congé pour les années 2004 et 2005.

10. Le requérant était employé depuis le 1er avril 1971 auprès de la défenderesse ou du prédécesseur de celle-ci. La convention collective s’appliquait à la relation de travail entre les parties. Le requérant relevait à ce moment là de la catégorie d’indemnisation du groupe II. Depuis 1985, il exerçait ses activités comme collaborateur extérieur dans la filiale de Düsseldorf. Son travail consistait en la réalisation de contrôles d’entreprises et de contrôles des caisses de recouvrement. Il bénéficiait à cet égard d’un véhicule.

11. Le requérant, reconnu comme gravement handicapé (au grade 60 «G» (4)) a dû subir, en raison de graves problèmes aux disques intervertébraux, 16 opérations au total depuis 1995. Depuis lors, des périodes d’incapacité pour maladie succédaient aux périodes d’aptitude au travail. En 2004, le requérant était physiquement apte au travail jusqu’au début du mois de septembre. À partir du 8 septembre 2004, il a été déclaré malade par certificat médical sans interruption jusqu’au 30 septembre 2005. Depuis lors, l’absorption continue d’antidouleurs à base de morphine empêche le requérant de conduire son véhicule.

12. Par courrier du 13 mai 2005, le requérant a demandé à ce qu’on lui octroie à partir du 1er juin 2005 le congé 2004. La défenderesse a refusé cette demande le 25 mai 2005 en la motivant par le fait que le service médical de l’entreprise devait d’abord constater l’aptitude au travail au titre de l’article 7, paragraphe 2, de la convention collective. Par courrier du 10 août 2005, le requérant a demandé la possibilité d’effectuer son travail à domicile au moyen d’une mesure de réintégration (modèle de Hambourg). Dans sa réponse du 6 septembre 2005, la défenderesse l’a informé qu’elle voulait tout d’abord attendre l’issue de la procédure relative à la mise à la retraite après que le requérant a...

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