Proceedings brought by Società Immobiliare Al Bosco Srl.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:472
Docket NumberC-379/17
Celex Number62017CC0379
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date20 June 2018
62017CC0379

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 20 juin 2018 ( 1 )

Affaire C‑379/17

Società Immobiliare Al Bosco Srl

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne)]

« Renvoi préjudiciel – Coopération judiciaire en matière civile – Reconnaissance et exécution des décisions – Délai d’exécution prévu dans le droit de l’État requis pour saisir un bien – Applicabilité de ce délai à un titre adopté dans un autre État membre et déclaré exécutoire dans l’État requis »

I. Introduction

1.

Dans le cadre du règlement (CE) no 44/2001 ( 2 ), une décision de saisie conservatoire rendue dans un État membre peut, en principe, être exécutée dans un autre État membre après avoir été déclarée exécutoire dans ce dernier. Toutefois, les modalités d’exécution des décisions de saisie conservatoire sont caractérisées par de profondes différences. Dès lors, il n’est pas évident de déterminer quelles dispositions du droit de l’État membre dans lequel l’exécution est demandée sont applicables lors de l’exécution de décisions étrangères. C’est dans ce contexte que s’inscrit l’affaire au principal.

2.

Le présent renvoi préjudiciel permettra à la Cour de se prononcer sur le point de savoir si, sous le régime du règlement no 44/2001, une disposition du droit national de l’État membre dans lequel l’exécution est demandée, qui fixe le délai à l’intérieur duquel un créancier doit procéder à l’exécution d’une décision de saisie conservatoire, s’applique à de telles décisions émanant d’autres États membres.

3.

Plus précisément, la juridiction de renvoi nourrit des doutes quant à l’applicabilité d’une disposition du droit allemand, à savoir l’article 929, paragraphe 2, de la Zivilprozessordnung (code de procédure civile, ci-après la « ZPO »), dans le cadre de l’affaire au principal qui concerne l’exécution d’une décision de saisie conservatoire rendue par des autorités italiennes ( 3 ).

4.

Toutefois, la pertinence de l’arrêt que la Cour sera amenée à prononcer en l’espèce dépasse le cadre des États visés dans la présente affaire. En effet, il s’agit d’une problématique potentiellement importante pour tous les États membres dont le droit national prévoit un délai pour introduire une demande d’exécution d’une décision de saisie conservatoire. Par ailleurs, cette problématique se poserait également dans le cadre du règlement (UE) no 1215/2012 ( 4 ), qui a remplacé le règlement no 44/2001.

II. Le cadre juridique

A. Le droit de l’Union

1. Le règlement no 44/2001

5.

Le chapitre III du règlement no 44/2001, qui comprend les articles 32 à 58 de ce règlement, régit essentiellement la reconnaissance et l’exécution des décisions rendues par les juridictions des États membres, y compris la procédure d’exequatur.

6.

Aux termes de l’article 38, paragraphe 1, du règlement no 44/2001 :

« Les décisions rendues dans un État membre et qui y sont exécutoires sont mises à exécution dans un autre État membre après y avoir été déclarées exécutoires sur requête de toute partie intéressée. »

2. Le règlement no 1215/2012

7.

Le chapitre III du règlement no 1215/2012 comprend les articles 36 à 57 et concerne la reconnaissance et l’exécution des décisions rendues par les juridictions des États membres. Toutefois, lors de l’adoption du règlement no 1215/2012, le législateur de l’Union a décidé d’introduire le système de la reconnaissance et de l’exécution automatiques. À cette fin, l’article 39 du règlement no 1215/2012 prévoit que les décisions rendues dans d’autres États membres peuvent être exécutées sans qu’il soit nécessaire de recourir à la procédure d’exequatur.

8.

Par ailleurs, l’article 41, paragraphe 1, du règlement no 1215/2012 est libellé comme suit :

« Sous réserve des dispositions de la présente section, la procédure d’exécution des décisions rendues dans un autre État membre est régie par le droit de l’État membre requis. Une décision rendue dans un État membre et qui est exécutoire dans l’État membre requis est exécutée dans ce dernier dans les mêmes conditions qu’une décision rendue dans l’État membre requis. »

B. Le droit allemand

9.

L’article 929, paragraphe 2, de la ZPO dispose :

« L’exécution d’un ordre de saisie n’est pas autorisée après l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date à laquelle l’ordre a été donné ou notifié à la partie à la demande de laquelle il a été émis. »

10.

Par ailleurs, aux termes de l’article 932, paragraphes 1 et 3, de la ZPO :

« (1) L’exécution d’une saisie immobilière […] a lieu par inscription d’une hypothèque en garantie de la créance […].

[…]

(3) La demande d’inscription de l’hypothèque tient lieu, au sens de l’article 929, paragraphes 2 et 3, d’exécution de l’ordre de saisie. »

III. Les faits de l’affaire au principal

11.

Le 19 novembre 2013, Società Immobiliare Al Bosco Srl, société de droit italien, a obtenu devant le Tribunale di Gorizia (tribunal de Gorizia, Italie) une saisie conservatoire (sequestro conservativo) à concurrence d’un million d’euros sur les biens mobiliers et immobiliers de M. Gunter Hober (ci-après le « défendeur »).

12.

Par décision du 22 août 2014, la juridiction compétente a déclaré la décision exécutoire en Allemagne.

13.

Plus de huit mois après, le 23 avril 2015, la requérante a demandé, en garantie de sa créance, l’inscription d’une hypothèque sur un bien immobilier situé en Allemagne et appartenant au défendeur.

14.

Cette demande d’inscription a été rejetée par la juridiction de première instance.

15.

Par la suite, la juridiction d’appel a rejeté le recours formé par la requérante à l’encontre de cette décision. Cette juridiction a considéré que l’hypothèque n’aurait pas dû être inscrite en raison du fait que la requérante n’avait pas respecté le délai d’un mois fixé à l’article 929, paragraphe 2, de la ZPO.

16.

Selon la juridiction d’appel, le caractère exécutoire conféré par l’article 38 du règlement no 44/2001 à une décision rendue dans un autre État membre correspond, en substance, au caractère exécutoire conféré à une décision nationale équivalente. En outre, l’exécution proprement dite des décisions rendues dans d’autres États membres serait soumise à la lex fori.

17.

Par ailleurs, selon la juridiction d’appel, la saisie en vertu du droit italien (sequestro conservativo) et la saisie conservatoire en vertu du droit allemand sont similaires. Partant, en raison de cette similarité, il conviendrait de respecter, dans l’affaire au principal, les dispositions procédurales applicables à ce type de décision et, par conséquent, l’article 929, paragraphe 2, de la ZPO.

18.

Par son pourvoi sur un point de droit autorisé par la juridiction d’appel et introduit devant le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice, Allemagne), la requérante maintient sa demande d’inscription de l’hypothèque en garantie de la créance.

IV. La question préjudicielle et la procédure devant la Cour

19.

C’est dans ces conditions que le Bundesgerichtshof (Cour fédérale de justice) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« Le fait d’appliquer également à un titre comparable au regard de sa fonction, émis dans un autre État membre et reconnu et déclaré exécutoire dans l’État d’exécution, un délai prévu par le droit de l’État d’exécution, en vertu duquel, après l’écoulement d’un certain laps de temps, un titre ne peut plus être exécuté, est-il conforme à l’article 38, paragraphe 1, du règlement no 44/2001 ? »

20.

La demande de décision préjudicielle est parvenue au greffe de la Cour le 26 juin 2017.

21.

Des observations écrites ont été déposées uniquement par la Commission. Le gouvernement allemand et la Commission européenne ont participé à l’audience qui s’est tenue le 11 avril 2018.

V. Analyse

22.

Par sa question préjudicielle, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si l’application d’un délai prévu par le droit de l’État membre d’exécution, en vertu duquel une décision de saisie conservatoire ne peut plus être exécutée après l’écoulement d’un certain laps de temps, à une décision de saisie conservatoire rendue dans un autre État membre est conforme à l’article 38, paragraphe 1, du règlement no 44/2001.

23.

Afin de répondre à la question préjudicielle telle que formulée par la juridiction de renvoi, il convient de déterminer, en substance, si une disposition du droit de l’État membre d’exécution, en vertu de laquelle une décision de saisie conservatoire ne peut plus être exécutée après l’écoulement d’un certain laps de temps, se rattache au caractère exécutoire de la décision, qui est réglementé par le droit de l’État membre dans lequel cette décision a été rendue (l’État membre d’origine), ou si cette disposition doit être considérée comme une règle, relative à l’exécution proprement dite, du droit de l’État membre dans lequel l’exécution de la décision a été demandée (l’État membre requis).

24.

La juridiction de renvoi part de la prémisse selon laquelle la saisie conservatoire italienne devrait être considérée, au regard de sa fonction, comme une saisie conservatoire en droit allemand. Dans ce contexte, la juridiction de renvoi nourrit des doutes quant à la question de savoir si, en l’espèce, les conditions de l’exécution de la décision italienne en Allemagne sont régies par les dispositions allemandes en matière d’exécution des décisions de saisie conservatoire.

25.

...

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