Fixtures Marketing Ltd v Oy Veikkaus Ab.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2004:332
Docket NumberC-46/02
Celex Number62002CC0046
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date08 June 2004
Conclusions
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
MME CHRISTINE STIX-HACKL
présentées le 8 juin 2004(1)



Affaire C-46/02

Fixtures Marketing Ltd
contre
Oy Veikkaus Ab


[demande de décision préjudicielle formée par le Vantaan käräjäoikeus (Finlande)]

«Directive 96/9/CE – Bases de données – Protection juridique – Protection sui generis – Utilisateur légitime – Investissement substantiel – Obtention, vérification et présentation du contenu d'une base de données – Partie substantielle du contenu d'une base de données – Extraction et réutilisation – Sport – Jeux de paris»






I – Observations liminaires 1. La présente demande de décision préjudicielle est l’une des quatre procédures parallèles (2) relatives à l’interprétation de la directive 96/9/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 1996, concernant la protection juridique des bases de données (3) (ci‑après la «directive»). Au même titre que les autres, la présente procédure concerne la protection accordée par le droit sui generis et sa portée dans le domaine des paris sportifs. II – Le cadre juridique A – Droit communautaire 2. L’article 1er de la directive comporte des dispositions relatives au champ d’application de celle-ci. Il est libellé comme suit (extrait): «1. La présente directive concerne la protection juridique des bases de données, quelles que soient leurs formes. 2. Aux fins de la présente directive, on entend par ‘base de données’: un recueil d’œuvres, de données ou d’autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou d’une autre manière.» 3. Le chapitre III, qui couvre les articles 7 à 11, régit le droit sui generis. L’article 7, qui porte sur l’objet de la protection, dispose (extrait): «1. Les États membres prévoient pour le fabricant d’une base de données le droit d’interdire l’extraction et/ou la réutilisation de la totalité ou d’une partie substantielle, évaluée de façon qualitative ou quantitative, du contenu de celle-ci, lorsque l’obtention, la vérification ou la présentation de ce contenu attestent un investissement substantiel du point de vue qualitatif ou quantitatif. 2. Aux fins du présent chapitre, on entend par:
a)
‘extraction’: le transfert permanent ou temporaire de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu d’une base de données sur un autre support par quelque moyen ou sous quelque forme que ce soit;
b)
‘réutilisation’: toute forme de mise à la disposition du public de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu de la base par distribution de copies, par location, par transmission en ligne ou sous d’autres formes. La première vente d’une copie d’une base de données dans la Communauté par le titulaire du droit, ou avec son consentement, épuise le droit de contrôler la revente de cette copie dans la Communauté.
Le prêt public n’est pas un acte d’extraction ou de réutilisation. 3. Le droit visé au paragraphe 1 peut être transféré, cédé ou donné en licence contractuelle. […] 5. L’extraction et/ou la réutilisation répétées et systématiques de parties non substantielles du contenu de la base de données qui supposeraient des actes contraires à une exploitation normale de cette base, ou qui causeraient un préjudice injustifié aux intérêts légitimes du fabricant de la base, ne sont pas autorisées.» 4. L’article 8, qui concerne les droits et obligations de l’utilisateur légitime, prévoit en son paragraphe 1: «1 Le fabricant d’une base de données qui est mise à la disposition du public de quelque manière que ce soit ne peut empêcher l’utilisateur légitime de cette base d’extraire et/ou de réutiliser des parties non substantielles de son contenu, évaluées de façon qualitative ou quantitative, à quelque fin que ce soit. Dans la mesure où l’utilisateur légitime est autorisé à extraire et/ou à réutiliser une partie seulement de la base de données, le présent paragraphe s’applique à cette partie.» 5. L’article 9 précise que les États membres peuvent prévoir des exceptions au droit sui generis. B – Droit national 6. En vertu de l’article 49, paragraphe 1, de la loi sur les droits d’auteur (1991/34), dans sa version antérieure à la modification entraînée par la directive, les listes, tableaux, programmes et autres documents similaires qui regroupent une grande quantité de données ne peuvent être reproduits sans le consentement de leur auteur pendant une période de dix ans à compter de l’année de publication. 7. La loi n° 250, du 3 avril 1998, prise pour la mise en œuvre de la directive, a modifié l’article 49, paragraphe 1, de la loi sur les droits d’auteur, qui s’énonce désormais ainsi: «L’auteur 1) de listes, tableaux, programmes et autres supports similaires qui regroupent une grande quantité de données, ou 2) d’une base de données, dont l’obtention, la vérification ou la présentation du contenu ont exigé un investissement substantiel, a le droit exclusif de disposer de la totalité ou d’une partie substantielle, évaluée de façon qualitative ou quantitative, du contenu de son œuvre en la reproduisant et en la mettant à la disposition du public.» III – Éléments de fait du litige au principal A – Partie générale 8. Les championnats de football professionnel des divisions supérieures sont organisés en Angleterre par la Football Association Premier League Limited ainsi que par la Football League Limited et, en Écosse, par la Scottish Football League. Ensemble, la Premier League et la Football League (qui regroupe les première, deuxième et troisième divisions) constituent les quatre divisions. Avant le début de chaque saison sportive, les calendriers des matchs à disputer sont établis pour la saison et pour chaque division. Ces informations sont stockées sous forme électronique et diffusées. La planification des matchs est notamment annoncée dans des brochures imprimées, par ordre chronologique, d’une part, et pour chaque équipe au sein de chaque division, d’autre part. Les paires d’équipes qui doivent se rencontrer y figurent sous la forme X contre Y (par exemple Southampton contre Arsenal). Chaque saison implique environ 2 000 rencontres, qui s’étalent sur plus de 41 semaines. 9. Les organisateurs des championnats de football anglais et écossais ont choisi la société de droit écossais Football Fixtures Limited pour gérer, notamment par le biais de contrats de licence, l’utilisation des calendriers des matchs. De son côté, Football Fixtures Limited a concédé ses droits d’exploitation et d’utilisation hors de Grande-Bretagne à la société Fixtures Marketing Limited (ci‑après «Fixtures»). B – Partie spécifique 10. La présente procédure préjudicielle trouve son origine dans un recours de Fixtures dirigé contre Oy Veikkaus Ab (ci‑après «Veikkaus»). D’après les indications du juge de renvoi, Veikkaus a utilisé chaque semaine pour ses activités d’organisation de paris (Vakioveikkaus, Tulosveto, Pitkäveto et Moniveto) environ un quart des données concernant les matchs futurs de la division d’honneur et des autres divisions, pour la période de référence 1998/1999. Pour le Vakioveikkaus et le Pitkäveto, elle a utilisé chaque semaine surtout les informations relatives à la division d’honneur et à la division I et, occasionnellement aussi, celles qui ont trait aux championnats inférieurs. La proportion des données utilisées a varié entre environ les deux tiers pour la division d’honneur et un tiers pour la division I. Quant au Tulosveto et au Moniveto, seules quelques données ont été utilisées à chaque fois, tout au plus. Pendant la période en question, Veikkaus a utilisé chaque semaine aux fins des paris environ 80 rencontres, parmi lesquelles des matchs de football non seulement en Angleterre, mais aussi ailleurs en Europe, des compétitions de hockey sur glace, etc. 11. Veikkaus a utilisé comme objets de paris toutes les rencontres de la division d’honneur et de la division I pendant la saison sportive ainsi que d’autres rencontres, occasionnellement. Quelque 200 matchs sont concernés chaque semaine. Des renseignements relatifs à 400 rencontres, environ, qui servent de base au choix des supports de paris, sont recueillis chaque semaine entre autres via Internet, dans les journaux ou directement auprès des clubs. Veikkaus vérifie à plusieurs sources l’exactitude des données relatives aux événements choisis et procède le cas échéant aux modifications nécessaires. Des changements peuvent encore intervenir dans la semaine où ont lieu les rencontres. Chaque année, les paris sur les championnats anglais de football procurent à Veikkaus un chiffre d’affaires de plusieurs dizaines de millions (d’euros). 12. Dans un jugement (S 94/8994), le käräjäoikeus Vantan a considéré que la planification des rencontres en question était une liste qui regroupait une grande quantité de données au sens de l’article 49, paragraphe 1, de la loi sur les droits d’auteur, tel qu’il s’énonçait alors. Le käräjäoikeus a aussi estimé que la protection ne visait que la reproduction et que les grilles de paris devaient être envisagées globalement aux fins de déterminer si une partie substantielle de la planification avait été utilisée. La juridiction de renvoi a considéré qu’il y avait eu infraction à la protection des listes et elle a accueilli le recours. Le hovioikeus Helsinki a par contre considéré qu’il n’y avait pas eu infraction à la protection des listes, dans la mesure où les données utilisées pour l’établissement des grilles de paris provenaient de sources diverses et qu’elles avaient encore été vérifiées directement en Angleterre, puisqu’il y avait des différences entre les matchs indiqués sur les grilles et la planification des rencontres; de plus, les grilles ne présentaient plus d’intérêt après le match sur...

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