French Republic v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1992:529
CourtCourt of Justice (European Union)
Date16 December 1992
Docket NumberC-325/91
Celex Number61991CC0325
Procedure TypeRecours en annulation - fondé
EUR-Lex - 61991C0325 - FR 61991C0325

Conclusions de l'avocat général Tesauro présentées le 16 décembre 1992. - République française contre Commission des Communautés européennes. - Acte attaquable. - Affaire C-325/91.

Recueil de jurisprudence 1993 page I-03283
édition spéciale suédoise page 00087
édition spéciale finnoise page I-00251


Conclusions de l'avocat général

++++

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1. Par le présent recours, la République française demande l' annulation, au titre de l' article 173, premier alinéa, du traité CEE, d' un acte dénommé "Communication de la Commission aux États membres - Application des articles 92 et 93 du traité CEE et de l' article 5 de la directive 80/723/CEE de la Commission aux entreprises publiques du secteur manufacturier" (1) (ci-après "communication").

2. Cette communication, notifiée aux États membres par lettre du 8 novembre 1991, se compose de deux parties. Dans la première (points 1 à 44), la Commission expose son interprétation de la jurisprudence de la Cour concernant les entreprises publiques ainsi que la manière dont elle entend appliquer les règles en matière d' aides d' État aux interventions publiques suivantes: apports en capital, garanties, prêts et rendement du capital investi.

Dans la seconde partie (points 45 et suivants), la Commission invite les États membres à lui transmettre annuellement, relativement aux entreprises du secteur manufacturier dont le chiffre d' affaires est supérieur à 250 millions d' écus, une série d' informations détaillées. C' est précisément cette partie que conteste le gouvernement français, au motif qu' il en résulterait une modification de la nature de l' obligation, telle que mise à la charge des États membres par la directive 80/723/CEE (2) (ci-après "directive sur la transparence"), d' informer la Commmission de leurs relations financières avec les entreprises publiques.

3. Tout en renvoyant au rapport d' audience pour une description détaillée du contexte normatif dans lequel s' inscrit le présent litige, nous rappelons que la directive sur la transparence, adoptée sur la base de l' article 90, paragraphe 3, a comme but essentiel (ainsi qu' il résulte de ses considérants) de promouvoir, à l' égard des entreprises publiques, une application efficace des articles 92 et 93 du traité concernant les aides d' État. La transparence est garantie par l' obligation pour les États membres de faire ressortir les mises à disposition de ressources, qu' elles soient effectuées directement par les pouvoirs publics ou par l' intermédiaire d' autres entreprises publiques ou d' institutions financières, en faveur des entreprises publiques, ainsi que l' utilisation effective par ces dernières desdites ressources (article premier). Les relations financières, dont la transparence est à assurer, sont notamment la compensation des pertes d' exploitation, les apports en capital ou en dotation, les apports à fonds perdus ou les prêts à des conditions privilégiées, l' octroi d' avantages financiers sous forme de la non-perception de bénéfices ou du non-recouvrement de créances, la renonciation à une rémunération normale des ressources publiques engagées et la compensation de charges imposées par les pouvoirs publics (article 3).

L' obligation d' informer la Commission des relations financières en question est régie par l' article 5, qui impose aux États membres de tenir à sa disposition les données y relatives pendant cinq ans (par. 1) et de les lui communiquer, à sa demande, pour le cas où elle l' estime nécessaire (par. 2).

4. Et c' est précisément en rapport avec les dispositions précitées qu' est né le présent litige. Le gouvernement français estime en effet que, à la différence de ce que prévoit l' article 5, paragraphe 2, de la directive sur la transparence, la communication comporte à la charge des États membres et des entreprises publiques intéressées une obligation systématique et généralisée de fournir à la Commission les données relatives aux relations financières en question, données qui, au moins en partie, s' ajoutent à celles déjà prévues par cette directive.

Plus précisément, le gouvernement requérant invoque une violation de l' article 190 du traité et du principe de sécurité juridique, dans la mesure où - à travers un acte dénué de base juridique - la Commission a introduit de nouvelles obligations juridiques à la charge des États membres et des entreprises publiques intéressées. De plus, en tout état de cause, ladite communication excède, selon lui, les limites du pouvoir discrétionnaire reconnu à la Commission par l' article 90, paragraphe 3, du traité, compte tenu de son absence de nécessité, du caractère disproportionné des exigences qu' elle impose et de la discrimination qu' elle opère à l' égard des entreprises publiques par rapport aux entreprises privées.

La Commission demande, par contre, que le recours soit déclaré irrecevable, dans la mesure où l' acte attaqué n' ajoute, comme le démontre l' examen de son contenu, aucune nouvelle obligation à celles prévues par la directive sur la transparence. A titre subsidiaire, elle conclut à son rejet.

5. Comme on le sait, l' article 173, premier alinéa, habilite la Cour à exercer un contrôle de légalité uniquement sur les "actes autres que les recommandations ou avis", c' est-à-dire seulement sur les actes contraignants. Un acte qualifié de "communication" ne devrait donc pas, en tant que - au moins dans le principe - acte non contraignant, être attaquable devant la Cour.

Toutefois, il résulte de la jurisprudence en la matière que la forme sous laquelle l' acte se présente extérieurement paraît peut importante aux fins de l' admissibilité du contrôle juridictionnel, alors que ce sont les effets et le contenu de l' acte qu' il faut vérifier.

Plus spécialement, en ce qui concerne la notion d' acte attaquable au sens de l' article 173, premier alinéa, la Cour a précisé dès l' arrêt AETR (3) que le recours en annulation doit être ouvert à l' égard de "toutes dispositions prises par les institutions (quelles qu' en soient la nature ou la forme) qui visent à produire des effets de droit". Une telle approche a été confirmée dans l' arrêt instructions internes du 9 octobre 1990 (4) et encore dans l' arrêt code de conduite du 13 novembre 1991 (5); la Cour a en effet considéré comme étant susceptibles de recours tant les instructions internes que le code de conduite, actes sur lesquels portaient les affaires en cause, dans la mesure où ils étaient destinés à produire des effets juridiques.

6. Dans le cas d' espèce, nous sommes en présence d' un acte qualifié de communication, dépourvu de base juridique, qui ne porte la signature d' aucun membre de la Commission, mais qui a été adopté par celle-ci collégialement, publié dans la série C du journal officiel et ayant comme destinataires tous les États membres, auxquels il a par ailleurs été notifié par lettre du Commissaire compétent.

L' acte en question, tout en ne rentrant pas dans la catégorie des actes types, a donc été accompagné de modalités de rédaction et de publicité de nature à rendre claire la volonté de lier ses destinataires. Du reste, cela n' est aucunement contesté par la Commission, qui n' a jamais, au cours de toute la procédure, mis en doute sa portée obligatoire, affirmant même à l' audience que le non-respect des obligations prévues dans la communication en question entraînerait l' ouverture d' une procédure d' infraction à l' encontre de l' État membre concerné.

Cela étant, et conformément à la jurisprudence précitée de la Cour en la matière, il s' avère par conséquent indispensable d' examiner le contenu de l' acte aux fins de vérifier s' il contient des obligations juridiques nouvelles par rapport à l' article 5 de la directive sur la transparence; dans cette optique, les problèmes de recevabilité seront examinés en même temps que le fond.

7. L' acte litigieux concerne l' application des articles 92 et 93 du traité ainsi que de l' article 5 de la directive sur la transparence: cela figure dans l' intitulé même de l' acte en question, la Commission et le gouvernement français l' ont soutenu de manière...

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