Commission of the European Communities v Federal Republic of Germany.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1996:194
CourtCourt of Justice (European Union)
Docket NumberC-61/94
Date07 May 1996
Procedure TypeRecours en constatation de manquement - non fondé
Celex Number61994CC0061
61994C0061

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

M. GIUSEPPE TESAURO

présentées le 7 mai 1996 ( *1 )

1.

Par le recours qui fait l'objet de la présente affaire, la Commission demande à la Cour de constater que la République fédérale d'Allemagne, en autorisant l'importation de produits laitiers dans le cadre du régime du perfectionnement actif alors que leur valeur en douane est inférieure au prix minimal fixé par l'arrangement international concernant le secteur laitier, arrangement conclu dans le cadre du GATT et approuvé par la Communauté par décision 80/271/CEE du Conseil, du 10 décembre 1979, concernant la conclusion des accords multilatéraux résultant des négociations commerciales de 1973-1979 ( 1 ) (ci-après: l'« arrangement »), a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CEE.

Plus précisément, la Commission fait grief au gouvernement allemand d'avoir ainsi violé, ou en toute hypothèse de ne pas avoir pris en considération: a) l'obligation de coopération en matière de prix minimaux à l'importation, telle qu'elle est prévue dans les trois protocoles annexés à l'arrangement [article 6, paragraphe 1, sous a), du protocole n° 1; article 6, sous a), des protocoles nos 2 et 3]; b) l'obligation de respecter les prix minimaux à l'exportation telle qu'elle figure à l'article 3, paragraphe 1, de chacun des trois protocoles annexés à l'arrangement; c) les articles 5 à 8 du règlement (CEE) n° 1999/85 du Conseil, du 16 juillet 1985, relatif au régime du perfectionnement actif ( 2 ), notamment en ce qui concerne l'existence des conditions économiques qui permettent d'accorder l'autorisation.

2.

Pour bien comprendre la portée des moyens et des arguments avancés par la défenderesse, il est opportun de rappeler ici les dispositions pertinentes de l'accord et du régime du perfectionnement actif, ainsi que le déroulement de la phase précontentieuse.

Les dispositions pertinentes

3.

L'arrangement, entré en vigueur le 1er janvier 1980, se propose de réaliser l'expansion et une libéralisation de plus en plus large du commerce mondial des produits laitiers dans des conditions de marché aussi stables que possible, sur la base d'avantages mutuels des pays exportateurs et importateurs (article Ier). Cet arrangement s'applique aux produits suivants: lait et crème de lait conservés, concentrés ou sucrés; beurre; fromages et caillebotte; caséines (article II). Il prévoit des obligations générales d'information (article III) et de coopération entre les participants (article IV), notamment en matière d'aides aux pays en voie de développement (article IV). Les fonctions nécessaires à la mise en oeuvre de l'arrangement sont exercées par le conseil international des produits laitiers instauré par l'arrangement lui-même et composé de représentants de tous les participants (article VII).

A l'arrangement sont annexés trois protocoles, concernant respectivement certaines poudres de lait (protocole n° 1), les matières grasses laitières (protocole n° 2) et certains fromages (protocole n° 3). Ces protocoles, qui constituent une partie intégrante de l'arrangement, imposent des obligations analogues: a) les prix à l'exportation ne doivent pas être fixés à un niveau inférieur aux prix minimaux fixés par l'arrangement (article 3, paragraphe 1, de chaque protocole); b) chaque protocole s'applique aux exportations de produits qui sont manufacturés ou reconditionnés sur le territoire douanier de l'un des participants (article 3, paragraphe 7, du protocole n° 1; article 3, paragraphe 6, des protocoles nos 2 et 3); c) l'importation des produits relevant de ces protocoles ne doit pas être effectuée, dans la mesure du possible, à des prix inférieurs à la valeur en douane équivalant aux prix minimaux prescrits [article 6, paragraphe 1, sous a), du protocole nos 1; article 6, sous a), des protocoles nos 2 et 3]; d) les participants s'engagent à appliquer des mesures correctives appropriées si l'importation à des prix inférieurs aux prix minimaux est de nature à compromettre l'application du protocole [article 6, paragraphe 1, sous c), du protocole n° 1; article 6, sous c), des protocoles nos 2 et 3]; e) sur demande d'un participant, il pourra être accordé des dérogations à l'obligation de respecter les prix minimaux visés à l'article 3, paragraphe 1, de chaque protocole (article 7 de chaque protocole) ( 3 ).

4.

En ce qui concerne le régime communautaire du perfectionnement actif, il faut d'abord rappeler que, en application de l'article 1er, paragraphe 2, du règlement n° 1999/85, ce régime permet, sous réserve d'une autorisation préalable, de manufacturer sur le territoire douanier de la Communauté, pour leur faire subir une ou plusieurs opérations de perfectionnement: a) des marchandises non communautaires destinées à être réexportées hors du territoire douanier de la Communauté sous forme de produits compensateurs, sans que ces marchandises soient soumises aux droits à l'importation (régime de suspension); b) des marchandises mises en libre pratique, avec remboursement ou remise des droits à l'importation y afférents (à ces marchandises) si elles sont réexportées hors du territoire douanier de la Communauté sous forme de produits compensateurs (régime de remboursement). Les opérations de perfectionnement, telles que définies à l'article 1er, paragraphe 3, sous h), du même règlement, comprennent l'ouvraison, la transformation et la réparation de marchandises, ainsi que l'utilisation de certaines marchandises qui permettent ou facilitent l'obtention des produits compensateurs, et qui sont destinées à disparaître totalement ou partiellement au cours de leur utilisation. L'autorisation nécessaire pour pouvoir bénéficier du perfectionnement actif est accordée, conformément à l'article 5 du règlement n° 1999/85, dans le cas où ce régime « peut contribuer à créer les conditions les plus favorables à l'exportation des produits compensateurs, pour autant que les intérêts essentiels des producteurs de la Communauté ne soient pas atteints (conditions économiques) ». Les conditions économiques sont remplies, entre autres, lorsque les marchandises qui sont destinées à subir les opérations de perfectionnement « sont produites dans la Communauté, mais ne peuvent être utilisées parce que leur prix rend économiquement impossible l'opération commerciale envisagée » [article 6, paragraphe 1, sous d)].

5.

Aux fins qui sont pertinentes ici, il y a lieu de rappeler en outre le règlement (CEE) n° 2228/91 de la Commission, du 26 juin 1991, fixant certaines dispositions d'application du règlement (CEE) n° 1999/85 ( 4 ). L'article 16 de ce règlement dispose que le placement des marchandises sous le régime du perfectionnement actif, en cas de recours au système de la suspension, a pour conséquence la non-application des mesures spécifiques de politique commerciale à l'importation prévues pour lesdites marchandises ( 5 ). Les mesures spécifiques de politique commerciale sont les mesures non tarifaires établies, dans le cadre de la politique commerciale commune, par les dispositions communautaires relatives au régime applicable aux importations et aux exportations de marchandises, telles que les mesures de surveillance ou de sauvegarde, les restrictions ou limites quantitatives et les interdictions d'importation ou d'exportation (article 1er, paragraphe 12).

Bien qu'il ne soit pas applicable aux faits de la présente affaire, nous rappelons enfin que le règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire ( 6 ) (qui a d'ailleurs remplacé et abrogé le règlement n° 1999/85), prévoit, à l'article 114, paragraphe 1, sous a), que le régime du perfectionnement actif permet de manufacturer sur le territoire douanier de la Communauté, pour leur faire subir une ou plusieurs opérations de perfectionnement, « des marchandises non communautaires destinées à être réexportées hors du territoire douanier de la Communauté sous forme de produits compensateurs, sans que ces marchandises soient soumises aux droits à l'importation ni aux mesures de politique commerciale» ( 7 ).

La phase précontentieuse

6.

Considérant contraire au droit communautaire la pratique qui consiste à autoriser des opérations de perfectionnement actif alors que la valeur en douane des marchandises est inférieure au prix minimal fixé par l'arrangement, la Commission a engagé, par lettre de mise en demeure du 26 mars 1991, une procédure d'infraction contre la République fédérale d'Allemagne. Le gouvernement allemand a contesté, par lettre du 8 mai suivant, que les marchandises soumises au régime du perfectionnement actif constituaient des importations au sens de l'arrangement et a rappelé, en tout état de cause, qu'il avait saisi le comité de l'article 113 en vue d'éclaircir cette question.

La Commission, qui n'était pas satisfaite des explications fournies par le gouvernement allemand, lui a adressé, le 3 février 1993, un avis motivé dans lequel elle a confirmé sa position et a demandé qu'il soit mis fin à l'infraction dans un délai de deux mois. En réponse à l'avis motivé, le gouvernement allemand a fait valoir, d'une part, que la réglementation communautaire sur le perfectionnement actif elle-même prévoit que les mesures de politique commerciale ne s'appliquent pas aux marchandises soumises à ce régime; d'autre part, que le comité de l'article 113 n'avait pas encore approfondi cette question.

7.

Il convient à cet égard de préciser que, comme cela résulte d'un document produit par la Commission à la demande de la Cour, le point soulevé par les autorités allemandes a effectivement été porté devant le comité de l'article 113 à la séance du 15 février 1991. Dans le procès-verbal relatif à cette séance, il est affirmé que « la Commission a commencé à examiner, avec les délégations intéressées, un problème...

To continue reading

Request your trial
27 practice notes
  • Council of the European Union and Others v Vereniging Milieudefensie and Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 8 May 2014
    ...(30/88, EU:C:1989:422, paragraph 13). With regard to the communitisation of mixed agreements, see judgment in Commission v Germany (C‑61/94, EU:C:1996:313) and Commission v France (C‑239/03, EU:C:2004:598). See also judgment in Opel Austria v Council (T‑115/94, ( 30 ) Judgment in Internatio......
  • Staatssecretaris van Financiën v Kamino International Logistics BV.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 10 September 2008
    ...the CN. 26 – See, generally, in relation to that obligation, Case C-286/90 Poulsen and Diva Navigation [1992] ECR I-6019, paragraph 9; Case C-61/94 Commission v Germany [1996] ECR I-3989, paragraph 52; and Case C‑341/95 Bettati [1998] ECR I-4355, paragraph 20. With specific reference to the......
  • Office of Communications v Information Commissioner.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 10 March 2011
    ...voir document du Conseil 14917/02 ADD 1 REV 1, du 13 décembre 2002 (p. 1). 22 – Arrêts des 10 septembre 1996, Commission/Allemagne (C-61/94, Rec. p. I-3989, point 52); 1er avril 2004, Bellio F.lli (C-286/02, Rec. p. I-3465, point 33), et du 10 janvier 2006, IATA et ELFAA (C-344/04, Rec. p. ......
  • European Commission v Republic of Finland.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 10 February 2009
    ...Rec. p. 203); de 21 de septiembre de 1988, Comisión/Francia (50/87, Rec. p. 4797); y de 10 de septiembre de 1996, Comisión/Alemania (C‑61/94, Rec. p. 3989). 34 – DO 1991, L 176, p. 7 (rectificación DO 1992, L 383, p. 117), versión consolidada con las modificaciones de 21 de febrero de 1995 ......
  • Request a trial to view additional results
27 cases
  • Council of the European Union and Others v Vereniging Milieudefensie and Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 8 May 2014
    ...(30/88, EU:C:1989:422, paragraph 13). With regard to the communitisation of mixed agreements, see judgment in Commission v Germany (C‑61/94, EU:C:1996:313) and Commission v France (C‑239/03, EU:C:2004:598). See also judgment in Opel Austria v Council (T‑115/94, ( 30 ) Judgment in Internatio......
  • Staatssecretaris van Financiën v Kamino International Logistics BV.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 10 September 2008
    ...the CN. 26 – See, generally, in relation to that obligation, Case C-286/90 Poulsen and Diva Navigation [1992] ECR I-6019, paragraph 9; Case C-61/94 Commission v Germany [1996] ECR I-3989, paragraph 52; and Case C‑341/95 Bettati [1998] ECR I-4355, paragraph 20. With specific reference to the......
  • Office of Communications v Information Commissioner.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 10 March 2011
    ...voir document du Conseil 14917/02 ADD 1 REV 1, du 13 décembre 2002 (p. 1). 22 – Arrêts des 10 septembre 1996, Commission/Allemagne (C-61/94, Rec. p. I-3989, point 52); 1er avril 2004, Bellio F.lli (C-286/02, Rec. p. I-3465, point 33), et du 10 janvier 2006, IATA et ELFAA (C-344/04, Rec. p. ......
  • European Commission v Republic of Finland.
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 10 February 2009
    ...Rec. p. 203); de 21 de septiembre de 1988, Comisión/Francia (50/87, Rec. p. 4797); y de 10 de septiembre de 1996, Comisión/Alemania (C‑61/94, Rec. p. 3989). 34 – DO 1991, L 176, p. 7 (rectificación DO 1992, L 383, p. 117), versión consolidada con las modificaciones de 21 de febrero de 1995 ......
  • Request a trial to view additional results

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT