Bundesverband der Arzneimittel-Importeure eV and Commission of the European Communities v Bayer AG.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2003:299
CourtCourt of Justice (European Union)
Date22 May 2003
Docket NumberC-2/01,C-3/01
Procedure TypeRecurso de casación - inadmisible
Celex Number62001CC0002
EUR-Lex - 62001C0002 - FR 62001C0002

Conclusions de l'avocat général Tizzano présentées le 22 mai 2003. - Bundesverband der Arzneimittel-Importeure eV et Commission des Communautés européennes contre Bayer AG. - Pourvois - Concurrence - Importations parallèles - Article 85, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 81, paragraphe 1, CE) - Notion d''accord entre entreprises' - Preuve de l'existence d'un accord - Marché de produits pharmaceutiques. - Affaires jointes C-2/01 P et C-3/01 P.

Recueil de jurisprudence 2004 page 00000


Conclusions de l'avocat général

1 Les présentes affaires ont pour objet un pourvoi formé par le Bundesverband der Arzneimittel-Importeure eV (une association allemande d'importateurs de médicaments, ci-après le «BAI») et par la Commission des Communautés européennes contre l'arrêt du Tribunal de première instance du 26 octobre 2000, Bayer/Commission (ci-après «l'arrêt attaqué») (1), annulant la décision 96/478/CE de la Commission, du 10 janvier 1996, relative à une procédure d'application de l'article 85 du traité CE (ci-après la «décision litigieuse») (2).

I - Faits et procédure

Les faits à l'origine du litige

2 Dans l'arrêt attaqué, le cadre factuel à l'origine du litige est décrit comme suit:

«1. La requérante, Bayer AG (ci-après `Bayer' ou le `groupe Bayer'), est la société mère d'un des principaux groupes chimiques et pharmaceutiques européens et est présente dans tous les États membres de la Communauté par la voie de ses filiales nationales. Elle produit et commercialise depuis de nombreuses années, sous la marque `Adalat' ou `Adalate', une gamme de médicaments dont le principe actif est la nifédipine, destinée à soigner des maladies cardio-vasculaires.

2. Dans la plupart des États membres, le prix de l'Adalat est, directement ou indirectement, fixé par les autorités sanitaires nationales. De 1989 à 1993, les prix fixés par les services de santé espagnols et français étaient, en moyenne, inférieurs de 40 % à ceux appliqués au Royaume-Uni.

3. En raison de ces différences de prix, des grossistes établis en Espagne ont, dès 1989, entrepris l'exportation d'Adalat vers le Royaume-Uni. À partir de 1991, ils ont été suivis sur cette voie par des grossistes établis en France. D'après la requérante, de 1989 à 1993, les ventes d'Adalat effectuées par sa filiale britannique, Bayer UK, auraient baissé de presque la moitié en raison des importations parallèles, emportant ainsi une perte de chiffre d'affaires de 230 millions de marks allemands (DEM) pour la filiale britannique, ce qui aurait représenté pour Bayer une perte de recettes de 100 millions de DEM.

4. Face à cette situation, le groupe Bayer a changé sa politique de livraison et a commencé à ne plus honorer l'intégralité des commandes, de plus en plus importantes, passées par les grossistes établis en Espagne et en France auprès de ses filiales espagnole et française. Cette modification a eu lieu en 1989 pour les commandes reçues par Bayer Espagne et au quatrième trimestre de 1991 pour celles reçues par Bayer France.»

La décision litigieuse

3 À la suite de plaintes déposées par certains des grossistes concernés, la Commission a engagé une procédure administrative d'enquête concernant de prétendues infractions à l'article 85, paragraphe 1, du traité CE (devenu article 81, paragraphe 1, CE) (3). À l'issue de cette enquête, la Commission a adopté la décision litigieuse, par laquelle elle a:

- constaté une violation de l'article 85, paragraphe 1, du traité, consistant dans «l'interdiction d'exporter les produits Adalate et Adalate 20 mg LP à partir de la France ainsi que les produits Adalat et Adalat Retard à partir de l'Espagne dans d'autres États membres, contenue dans l'accord avec leurs grossistes depuis 1991 par Bayer France et depuis au moins 1989 par Bayer Espagne» (article 1er);

- enjoint à Bayer de mettre fin à l'infraction constatée, et notamment, a) d'«envoyer, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la [...] décision [litigieuse], une circulaire aux grossistes en France et en Espagne précisant que les exportations sont permises au sein de la Communauté et ne sont pas sanctionnées», et b) d'«indiquer, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la [...] décision [litigieuse], ces éléments de façon claire dans les conditions générales de vente applicables en France et en Espagne» (article 2);

- infligé à Bayer une amende de 3 000 000 d'écus (article 3).

4 Dans les motifs de la décision litigieuse, la Commission a notamment cherché à démontrer i) que Bayer France et Bayer Espagne avaient conclu avec les grossistes un accord prévoyant une interdiction d'exportation (points 156 à 188), ii) que cet accord avait pour objet et pour effet de restreindre la concurrence (points 189 à 197) et iii) que cet accord affectait de manière sensible le commerce entre les États membres (point 198).

5 En ce qui concerne plus spécifiquement le premier aspect, la Commission a cherché à démontrer l'existence d'un accord au sens de l'article 85, paragraphe 1, du traité, en indiquant qu'il résultait des documents en sa possession que, d'une part, Bayer France et Bayer Espagne avaient imposé aux grossistes une interdiction d'exporter (points 156 à 170) et que, d'autre part, l'imposition de cette interdiction ne relevait pas d'un comportement unilatéral, étant donné qu'il s'insérait dans le cadre des relations commerciales continues entretenues par les deux sociétés du groupe Bayer avec leurs clients (points 171 à 185).

6 Le fait d'imposer aux grossistes une interdiction d'exportation se déduisait, selon la Commission, de «deux éléments complémentaires»: i) un système de détection des grossistes exportateurs, mis au point par Bayer France et Bayer Espagne; ii) les réductions successives des volumes livrés par ces sociétés au cas où les grossistes exporteraient tout ou partie des produits commandés.

7 Quant à ces réductions, la Commission a notamment indiqué que «les éléments dont [elle disposait] [montraient] que la livraison des volumes consentis par Bayer France et Bayer Espagne [était] subordonnée au respect d'une interdiction d'exporter. La réduction des volumes livrés par Bayer France et Bayer Espagne [était] modulée par Bayer Espagne et Bayer France en fonction du comportement que les grossistes [adoptaient] vis-à-vis de cette interdiction d'exporter. Si les grossistes [violaient] l'interdiction d'exporter, cela [entraînait] pour eux une nouvelle réduction automatique des livraisons» (4). Après un examen attentif des documents pertinents, la Commission a ensuite conclu en ce sens que «ces éléments du comportement de Bayer France et Bayer Espagne [permettaient] de montrer que celles-ci ont soumis leurs grossistes à une menace permanente de réduction des quantités livrées, menace qui [avait] été mise à exécution de façon répétée s'ils [ne s'étaient pas conformés] à l'interdiction d'exporter» (5).

8 Ayant ainsi établi l'interdiction d'exporter imposée par Bayer France et Bayer Espagne, pour démontrer que cette interdiction s'insérait dans le cadre de relations commerciales continues entretenues avec les grossistes (et ne constituait dès lors pas un comportement unilatéral), la Commission a ensuite observé ce qui suit:

- «les commandes régulières passées par les grossistes, renouvelées régulièrement, [montraient] que les relations commerciales [étaient] continues et permanentes pour le produit ADALAT» (6);

- «Bayer Espagne et Bayer France [avaient] mis en place une interdiction applicable de façon systématique et uniforme à toutes les opérations de vente entre elles et leurs grossistes respectifs, dans la mesure où elles savaient qu'ils étaient exportateurs» (7);

- «les grossistes [avaient] adopté dans cette affaire un comportement implicite d'acquiescement à l'interdiction d'exporter» (8).

9 Cette acceptation implicite a été en particulier déduite du comportement des grossistes, lequel montrait qu'ils «[avaient] non seulement compris qu'une interdiction d'exporter s'appliquait aux marchandises livrées mais encore qu'ils [avaient aligné] leur comportement sur cette interdiction» (9). À cet égard, la Commission a précisé que «les grossistes, en utilisant différents systèmes pour être livrés, en particulier le système de la répartition des commandes destinées à l'exportation sur les différentes agences [...] et les commandes auprès d'autres petits grossistes `non contrôlés' [...], se sont adaptés dans la présentation de leurs commandes à l'exigence de Bayer France et Bayer Espagne selon laquelle il était interdit d'exporter le produit. Les grossistes ont alors modulé les volumes commandés à leurs fournisseurs Bayer France ou Bayer Espagne de manière à ne couvrir formellement que leurs besoins nationaux. Lorsque ces sociétés ont compris ce premier mécanisme, les grossistes ont alors respecté les `quotas' nationaux qui leur étaient imposés, en négociant au mieux pour les gonfler au maximum, dans la mesure où ils se sont pliés à l'application stricte et au respect des chiffres considérés par Bayer France et Bayer Espagne comme normaux pour l'approvisionnement du marché national» (10). Selon la Commission, «cette attitude [montrait] que les grossistes avaient connaissance des raisons véritables de Bayer France et Bayer Espagne et des mécanismes mis en place par ces sociétés pour contrer les exportations parallèles: ils [se sont adaptés] au système mis en place par leur partenaire contractuel pour respecter les exigences de celui-ci. Ce comportement [démontrait] donc leur adhésion à l'interdiction d'exportation des marchandises s'insérant dans les relations contractuelles continues entre Bayer France et Bayer Espagne et leurs grossistes» (11).

La procédure devant le Tribunal et l'arrêt attaqué

10 Par requête enregistrée au greffe du Tribunal le 22 mars 1996, Bayer a introduit un recours en annulation à l'encontre de la décision...

To continue reading

Request your trial
5 practice notes
5 cases

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT