Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR v Finanzamt Paderborn.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1999:625
Docket NumberC-396/98
Celex Number61998CC0396
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date16 December 1999
EUR-Lex - 61998C0396 - FR 61998C0396

Conclusions de l'avocat général Ruiz-Jarabo Colomer présentées le 16 décembre 1999. - Grundstückgemeinschaft Schloßstraße GbR contre Finanzamt Paderborn. - Demande de décision préjudicielle: Bundesfinanzhof - Allemagne. - Taxes sur le chiffre d'affaires - Système commun de taxe sur la valeur ajoutée - Article 17 de la sixième directive 77/388/CEE - Déduction de la taxe payée en amont - Impossibilité d'opérer la déduction en raison d'une modification de la législation nationale qui supprime la possibilité d'opter pour la taxation de la location de biens immeubles. - Affaire C-396/98.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-04279


Conclusions de l'avocat général

1 Cette demande de décision préjudicielle, présentée par le Bundesfinanzhof allemand conformément à l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), traduit les doutes que cette juridiction conçoit relativement à la portée de la jurisprudence que la Cour a consacrée récemment au droit de déduire la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») qui a été acquittée sur les dépenses d'investissement.

La question qu'il s'agit de résoudre en l'espèce est celle de savoir si, conformément aux dispositions de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil (1) (ci-après la «sixième directive»), un assujetti conserve le droit à déduction lorsqu'une modification légale, intervenue après qu'il eut acquis un bien ou acheté un service dans le but d'exercer une activité économique soumise à la TVA, le prive du droit de renoncer à l'exonération de cette activité et si le fait que la taxe a été liquidée sous réserve d'un contrôle a posteriori a une incidence sur la solution à donner à ce problème.

I - Faits et procédure au principal

2 La société civile Grundstücksgemeinschaft Schloßstraße GbR (ci-après «Schloßstraße») a pour objet de détenir un droit de superficie sur un terrain, d'y construire un immeuble de bureaux et d'habitation et d'exploiter cette propriété foncière à long terme.

3 Schloßstraße a acquis ce droit de superficie en mars 1991 et a alors introduit une demande de permis de bâtir. En raison de problèmes de conformité avec les règles d'urbanisme, ce permis ne lui a été délivré qu'en mai 1993. La juridiction de renvoi signale que, jusqu'au mois de juin 1993 au moins, les associés avaient l'intention de céder le permis de bâtir à un tiers. Faute d'acquéreur, ils ont néanmoins conclu un contrat avec un architecte en vue de procéder à la construction. Les travaux ont commencé en janvier 1994 et se sont terminés en décembre de la même année. Schloßstraße a donné 39,38 % de la surface totale en location à des fins d'habitation, elle en a loué 13,96 % à un bureau d'architecte et 46,49 % à une société anonyme dont l'activité consistait à 90 % en la prestation de services financiers bénéficiant de l'exonération fiscale.

4 Dans les déclarations TVA des exercices 1992 à 1994, Schloßstraße a opté pour la taxation des opérations de location projetées ou exécutées et elle a fait valoir le droit à déduction sur les factures liées à la construction. Ce droit à déduction lui a été accordé dans un premier temps. Toutefois, conformément aux articles 164 et 168 de l'Abgabenordnung (code allemand des impôts, ci-après l'«AO»), les avis d'imposition ont été émis sous réserve de vérification a posteriori.

5 Après avoir opéré une vérification, le Finanzamt Paderborn a décidé de rectifier les avis d'imposition de Schloßstraße pour les exercices 1992 à 1994. Il n'a accepté la déduction de la TVA qu'à concurrence de 13,96 % des montants déclarés, considérant que la seule utilisation taxable de l'immeuble était celle du bureau de l'architecte. Selon l'administration fiscale, il n'était plus possible d'accorder la déduction en ce qui concerne les 46,49 % relatifs à l'utilisation exonérée de l'immeuble par la société anonyme parce que, pour ce type d'opérations, la possibilité de renoncer à l'exonération avait été supprimée à partir du 1er janvier 1994 à la suite de la modification de l'article 9, paragraphe 2, de l'Umsatzsteuergesetz (loi relative à la taxe sur le chiffre d'affaires, ci-après l'«UStG»), introduite par le Mißbrauchsbekämpfungs- und Steuerbereinigungsgesetz (loi relative à la simplification de la législation fiscale et à la lutte contre la fraude, ci-après le «StMBG») du 21 décembre 1993. Par ailleurs, le Finanzamt a estimé que Schloßstraße ne pouvait pas non plus se prévaloir des dispositions transitoires inscrites à l'article 27, paragraphe 2, de l'UStG, tel que modifié par le StMBG, parce que la construction du bâtiment n'avait pas commencé avant le 11 novembre 1993, date limite prévue par cette disposition.

6 Schloßstraße a introduit une réclamation, puis un recours, contre cette décision du Finanzamt, mais l'une et l'autre ont été rejetés. Elle a alors introduit un recours en «Revision», dans lequel elle a fait valoir que la restriction du droit d'opter pour la taxation qui a été introduite par la nouvelle réglementation inscrite à l'article 9, paragraphe 2, de l'UStG ne lui est pas applicable parce qu'il y a lieu de considérer que la construction du bâtiment a commencé au moment où elle a introduit sa demande de permis de bâtir ou, du moins, lorsque celui-ci lui a été accordé. D'autre part, elle a déduit de l'arrêt Inzo de la Cour (2) qu'elle peut se prévaloir du principe de la protection de la confiance légitime pour réclamer le droit de déduire la taxe acquittée au cours des exercices 1992 et 1993 (notamment sur les frais d'architecte et de notaire).

7 Dans son ordonnance de renvoi, le Bundesfinanzhof émet des doutes sur les chances de succès du recours en Revision. Il affirme, en premier lieu, que Schloßstraße ne peut pas invoquer les dispositions transitoires de l'article 27, paragraphe 2, de l'UStG parce que la construction du bâtiment n'a pas commencé avant le mois de janvier 1994. Les prestations déjà fournies en 1992 et en 1993 font partie des frais de construction du bâtiment et, en ce sens, elles font partie de celui-ci en tant que «bien d'investissement». Par conséquent, la décision relative à la déduction de la TVA acquittée sur ces prestations ne peut pas être prise sans tenir compte de la date de construction du bâtiment - ni, donc, de la limitation inscrite à l'article 27, paragraphe 2, de l'UStG, tel que modifié par le StMBG -, car elle dépend de la destination effective du bâtiment, c'est-à-dire des opérations de location effectuées en 1994, et du point de savoir si ces opérations sont imposables ou exonérées.

Étant donné que, conformément à la jurisprudence que le Bundesfinanzhof a consacrée à l'UStG, la décision définitive sur le droit à déduction ne peut être prise que lorsque l'utilisation réelle des biens d'investissement est connue - et étant donné qu'elle ne peut pas être prise sur la base de son utilisation alléguée -, le Finanzamt était fondé, conformément à l'article 164, paragraphe 2, de l'AO, à modifier les avis d'imposition qu'il avait émis sous réserve de vérification et à refuser la déduction dans la mesure où les services fournis ont finalement été utilisés pour réaliser des opérations exonérées de la TVA.

En deuxième lieu, le Bundesfinanzhof signale que l'application rétroactive de la nouvelle version de l'article 9, paragraphe 2, de l'UStG à la déduction des prestations fournies en 1992 et en 1993 n'enfreint pas le principe constitutionnel de non-rétroactivité. Au moment où la nouvelle législation est entrée en vigueur, le droit à déduction relativement aux investissements indiqués n'était pas définitif puisque l'utilisation finale des biens d'investissement n'avait pas encore été établie et que cet élément est déterminant pour la décision relative au droit à déduction.

Enfin, la juridiction de renvoi considère que Schloßstraße ne peut pas se prévaloir de la confiance légitime et invoquer la conviction qu'elle avait de pouvoir exercer l'option prévue par l'ancien article 9, paragraphe 2, de l'UStG relativement à la location du bâtiment qu'elle envisageait puisque la construction de celui-ci n'a débuté qu'après l'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation.

8 Néanmoins, le Bundesfinanzhof se demande si cette interprétation des dispositions applicables du droit allemand est conforme à la jurisprudence que la Cour a dégagée à propos de l'article 17 de la sixième directive. C'est la raison pour laquelle il a décidé de surseoir à statuer et d'adresser les questions préjudicielles suivantes à la Cour:

«Aux termes de la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (arrêt du 15...

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