Arbeitsgemeinschaft Deutscher Rundfunkanstalten (ARD) v PRO Sieben Media AG, supported by SAT 1 Satellitenfernsehen GmbH, Kabel 1, K 1 Fernsehen GmbH.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1999:328
Date24 June 1999
Celex Number61998CC0006
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-6/98
EUR-Lex - 61998C0006 - FR 61998C0006

Conclusions de l'avocat général Jacobs présentées le 24 juin 1999. - Arbeitsgemeinschaft Deutscher Rundfunkanstalten (ARD) contre PRO Sieben Media AG, en présence de SAT 1 Satellitenfernsehen GmbH, Kabel 1, K 1 Fernsehen GmbH. - Demande de décision préjudicielle: Oberlandesgericht Stuttgart - Allemagne. - Radiodiffusion télévisuelle - Limitation du temps de transmission consacré à la publicité. - Affaire C-6/98.

Recueil de jurisprudence 1999 page I-07599


Conclusions de l'avocat général

1 Le présent litige concerne l'interruption par des publicités de films diffusés à la télévision: notamment, la méthode selon laquelle, d'après la directive «télévision sans frontière» (1), il convient de calculer le nombre d'interruptions autorisées.

Les faits et la procédure au principal

2 Les demanderesses sont onze sociétés de radiodiffusion de droit public des Länder, réunies au sein de l'Arbeitsgemeinschaft Deutscher Rundfunkanstalten (ci-après l'«ARD»). Selon la loi fondamentale allemande, la radiodiffusion télévisuelle relève de la compétence des Länder. Ces sociétés sont conjointement responsables de la chaîne de télévision ARD. La défenderesse, PRO Sieben Media AG (ci-après «Pro Sieben») est une société privée de radiodiffusion télévisuelle.

3 Le litige a pour origine le libellé de l'article 11, paragraphe 3, de la directive, qui dispose que le nombre d'interruptions publicitaires autorisé par film diffusé à la télévision doit être calculé par référence à une période qualifiée de «durée programmée».

4 Selon le principe du `brut', qui est soutenu par Pro Sieben, la durée des publicités doit être incluse dans la période de temps par rapport à laquelle le nombre d'interruptions autorisé est calculé. Selon le principe du `net', qui est soutenu par l'ARD, les publicités ne doivent pas être incluses dans cette période: c'est-à-dire, que la durée en cause ne vise que la longueur du film lui-même. La différence est que, dans certaines circonstances, l'application du principe du brut permettrait un plus grand nombre d'interruptions que ne le permettrait le principe du net.

5 L'ARD a soulevé la question devant les juridictions allemandes en introduisant un recours contre Pro Sieben pour concurrence déloyale. Deux autres organismes privés de radiodiffusion télévisuelle, SAT 1 Satellitenfernsehen GmbH et Kabel 1, K1 Fernsehen GmbH, sont intervenues dans la procédure allemande à l'appui des conclusions de Pro Sieben. En octobre 1996, le Landgericht Stuttgart (juridiction régionale), interprétant la législation allemande pertinente (2), a enjoint à Pro Sieben de ne pas interrompre les films plus souvent que ne le permettrait l'application du principe du net. Ayant interjeté appel devant l'Oberlandesgericht Stuttgart (juridiction régionale supérieure), Pro Sieben a soutenu que, même si la législation allemande prévoyait l'application du principe du net, cette législation était contraire à la directive et au droit communautaire primaire.

6 En novembre 1997, l'Oberlandesgericht Stuttgart a décidé de surseoir à statuer et a déféré à la Cour de justice les questions préjudicielles suivantes:

«1) L'article 11, paragraphe 3, de la directive 97/36/CE (3) du Parlement européen et du Conseil, du 30 juin 1997 modifiant la directive 89/552/CEE (directive modifiant la directive dite `de radiodiffusion télévisuelle') ou l'article 11, paragraphe 3, identique dans les termes, de la directive 89/552/CEE, du Conseil, du 3 octobre 1989 visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle (directive dite de radiodiffusion télévisuelle) prévoit-il le principe du brut ou du net?

2) A supposer que l'article 44, paragraphe 4, du Dritter Staatsvertrag zur Änderung rundfunkrechtlicher Staatsverträge (troisième traité d'État visant à la modification des traités d'État relatifs au droit de la radiodiffusion - annexe B 33 = p. 437 de l'annexe) prescrive le principe du net, cela est-il compatible avec l'article 11, paragraphe 3, combiné avec l'article 3, paragraphe 1 de la directive relative à la radiodiffusion télévisuelle ou le droit communautaire primaire (les articles 5, 6, 30 et suiv., 59 et suiv., 85 et suiv. du traité CE, le principe général d'égalité de traitement)?»

Question 1

7 Les États membres qui ont présenté des observations à la Cour sont divisés sur la première question: la France, les Pays-Bas et le Portugal sont partisans du principe du net; l'Italie, le Luxembourg et le Royaume-Uni sont partisans du principe du brut, tout comme la Commission. La Suède n'a répondu qu'à la deuxième question.

La directive télévision

8 La directive télévision a été adoptée le 3 octobre 1989 et ses dispositions devaient être mises en oeuvre pour le 3 octobre 1991 (4). La directive a été modifiée par la directive 97/36/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 juin 1997, qui devait être mise en oeuvre pour le 31 décembre 1998 (5). Bien que le litige en l'espèce ait débuté avant l'adoption de cette dernière directive, l'ordonnance de renvoi de l'Oberlandesgericht Stuttgart n'a pas été prise avant décembre 1997 et ses termes se réfèrent donc aux deux directives. L'article 1er, paragraphe 13, de la dernière directive a modifié l'article 11 de la directive originale, mais n'a pas modifié de manière significative le texte de l'article 11, paragraphe 3, qui est en cause en l'espèce. Les passages de la directive cités dans les présentes conclusions sont ceux de la directive telle que modifiée, sauf indication contraire.

9 La directive a été adoptée sur la base des articles 47, paragraphe 2 (ex-article 57, paragraphe 2) et 55 (ex-article 66), du traité CE. Il ressort du préambule de la directive que l'objectif poursuivi par cette dernière était d'établir le cadre légal de la radiodiffusion télévisuelle sur le marché interne, l'adoption de règles communes pour la radiodiffusion étant considérée comme contribuant notamment à la libre circulation des services. Parmi ces règles communes, celles relatives à la publicité constituent une part importante de la directive, et figurent au chapitre IV de la directive intitulé «Publicité télévisuelle et parrainage» (articles 10 à 20).

10 La publicité doit être aisément identifiable comme telle et être distincte des programmes (article 10, paragraphe 1). Elle doit en principe être insérée entre les émissions; elle peut être insérée pendant des émissions à la seule condition de «ne pas porter atteinte à l'intégrité et à la valeur des émissions en tenant compte des interruptions naturelles du programme ainsi que de sa durée et de sa nature, et de manière à ce qu'il ne soit pas porté préjudice aux droits des ayants droit» (article 11, paragraphe 1). Par le biais de ces dispositions, la directive cherche manifestement à établir un équilibre entre plusieurs intérêts potentiellement contradictoires: ceux des spectateurs, des organismes de radiodiffusion télévisuelle, des annonceurs dont dépend financièrement la radiodiffusion télévisuelle, et ceux des producteurs de programmes.

11 L'article 11, paragraphe 2 prévoit une mesure spéciale pour les programmes qui se composent naturellement de parties distinctes, tels la retransmission télévisée d'événements sportifs: dans ce cas, la publicité doit être insérée dans les intervalles, par exemple à la mi-temps.

12 L'article 11, paragraphe 3, dispose:

«La transmission d'oeuvres audiovisuelles, telles que longs métrages et films conçus pour la télévision (à l'exclusion des séries, feuilletons, émissions de divertissement et documentaires) pour autant que leur durée programmée soit supérieure à quarante-cinq minutes, peut être interrompue une fois par tranche de quarante-cinq minutes. Une autre interruption est autorisée si leur durée programmée est supérieure d'au moins vingt minutes à deux ou plusieurs tranches complètes de quarante-cinq minutes.»

13 En général, les écrans publicitaires au sein d'un programme doivent être séparés par une période d'au moins vingt minutes (article 11, paragraphe 4).

14 L'article 11, paragraphe 15, dispose:

«La publicité et le télé-achat ne peuvent être insérés dans les diffusions de services religieux. Les journaux télévisés, les émissions d'information politique, les documentaires, les émissions religieuses et les émissions pour enfants, dont la durée programmée est inférieure à trente minutes, ne peuvent être interrompus par la publicité ou le télé-achat. Lorsqu'ils ont une durée programmée égale ou supérieure à trente minutes, les paragraphes précédents s'appliquent.»

15 Les articles 12 à 20 comportent d'autres dispositions relatives à la publicité et au parrainage, auxquelles, pour certaines d'entre elles, il sera nécessaire de se référer ci-après.

16 L'effet de l'article 11, paragraphe 3, dépendra de la question de savoir si on applique le principe du brut ou le principe du net. Si, par exemple, un film dure quarante minutes, selon le principe du net, il ne pourrait être interrompu par de la publicité, alors que, selon le principe du brut, il pourrait être interrompu par six minutes de publicité. Mais toujours sous réserve de la limite globale prévue à l'article 18: l'article 18, paragraphe 2, par exemple, définit la longueur maximale des publicités à l'intérieur d'une période d'une heure. Par conséquent, bien que l'application du principe du net autoriserait moins d'interruptions que le principe du brut, il n'y aura pas de conséquence sur le volume total de publicités si le maximum prévu à l'article 18 est entièrement utilisé. La question pourrait donc se résumer à choisir entre des interruptions plus fréquentes, mais plus courtes, selon le principe du brut, et des interruptions moins fréquentes, mais plus longues, selon le principe du net. Néanmoins, la question est d'un grand intérêt dans...

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