Gerald Weidacher (as administrator of the insolvent company Thakis Vertriebs- und Handels GmbH) v Bundesminister für Land- und Forstwirtschaft.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2001:619
Date20 November 2001
Celex Number62000CC0179
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-179/00
EUR-Lex - 62000C0179 - FR 62000C0179

Conclusions de l'avocat général Mischo présentées le 20 novembre 2001. - Gerald Weidacher (curateur à la faillite de Thakis Vertriebs- und Handels GmbH) contre Bundesminister für Land- und Forstwirtschaft. - Demande de décision préjudicielle: Verwaltungsgerichtshof - Autriche. - Article 149 de l'acte d'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède - Mesures transitoires - Stocks excédentaires - Article 4 du règlement (CE) nº 3108/94 de la Commission - Compétence - Détenteur de la marchandise - Charge d'importation applicable - Confiance légitime - Proportionnalité - Egalité de traitement. - Affaire C-179/00.

Recueil de jurisprudence 2002 page I-00501


Conclusions de l'avocat général

1. Toute adhésion d'un nouvel État membre à l'Union européenne s'accompagne de l'édiction d'une kyrielle de mesures transitoires.

2. En effet, et même si le traité d'adhésion pose en principe l'application immédiate de l'acquis communautaire dans le nouvel État membre et dans les relations entre celui-ci et les anciens États membres, il est impossible de substituer purement et simplement d'un jour à l'autre, dans tous les domaines couverts par le droit communautaire, de nouvelles règles à celles précédemment applicables.

3. Cette impossibilité et son corollaire, la nécessité de définir avec soin les modalités suivant lesquelles un corps de règles en replacera un autre, sont particulièrement évidents dans le domaine agricole.

4. En effet, la réglementation relevant de la politique agricole commune fait appel, pour atteindre les objectifs définis à l'article 33 CE, à une gamme très variée de mesures qui, au-delà de la libre circulation des produits, visent, dans bien des secteurs, à encadrer la production, soit pour l'encourager, à travers diverses aides, soit, au contraire, pour la limiter, par le recours aux quotas.

5. L'adhésion d'un nouvel État membre se traduit à la fois par l'apparition de nouveaux producteurs agricoles et par la création de nouveaux débouchés pour les produits couverts par les différentes organisations communes des marchés, ce qui impose de procéder à des ajustements.

6. Ceux-ci ne peuvent cependant, en règle générale, s'opérer du jour au lendemain, d'où l'impérieuse nécessité de mesures transitoires permettant, par exemple, d'éviter que le marché des anciens États membres ne soit, s'agissant d'un produit faisant l'objet de quotas de production, gravement perturbé par l'écoulement des stocks constitués avant l'adhésion dans le nouvel État membre, où la production n'était soumise à aucune restriction, ou, à l'inverse, que ne se déversent sur le marché du nouvel État membre, qui ne connaissait pas de système d'aide à la production, des produits ayant bénéficié d'une telle aide dans le cadre d'une organisation commune des marchés et bénéficiant, de ce fait, d'un avantage concurrentiel tel que les producteurs locaux se trouvent dans l'impossibilité d'écouler leurs stocks.

7. S'agissant des adhésions de la république d'Autriche, de la république de Finlande et du royaume de Suède qui ont pris effet au 1er janvier 1995, l'acte concernant les conditions d'adhésion et les adaptations aux traités sur lesquels l'Union est fondée (ci-après l'«acte d'adhésion») ne fait pas exception à la règle.

8. Il comporte, en effet, dans sa quatrième partie, un titre VI entièrement consacré à l'agriculture. Son premier article, l'article 137, dispose, à son paragraphe 2:

«Sauf dispositions contraires du présent acte:

- les échanges des nouveaux États membres entre eux, avec les pays tiers ou avec les États membres actuels sont soumis au régime applicable à ces derniers États membres. Le régime applicable dans la Communauté dans sa composition actuelle en matière de droits à l'importation et taxes d'effet équivalent, restrictions quantitatives et mesures d'effet équivalent est applicable aux nouveaux États membres;

- les droits et les obligations découlant de la politique agricole commune sont entièrement applicables dans les nouveaux États membres.»

9. Suivent les articles 138 à 150, qui constituent précisément ces «dispositions contraires du présent acte».

10. L'article 145, paragraphe 2, de l'acte d'adhésion prévoit:

«Tout stock de produits se trouvant en libre pratique sur le territoire des nouveaux États membres au 1er janvier 1995 et dépassant en quantité celle qui peut être considérée comme représentant un stock normal de report doit être éliminé par ces États membres à leur charge dans le cadre des procédures communautaires à définir et dans des délais à déterminer selon la procédure citée à l'article 149 paragraphe 1. La notion de stock normal de report est définie pour chaque produit sur la base des critères et objectifs propres à chaque organisation commune de marché.»

11. L'article 149, paragraphe 1, dudit acte énonce:

«Si des mesures transitoires sont nécessaires pour faciliter le passage du régime existant dans les nouveaux États membres à celui résultant de l'application de l'organisation commune des marchés dans les conditions prévues au présent titre, ces mesures sont arrêtées suivant la procédure prévue à l'article 38 du règlement n° 136/66/CEE ou, selon le cas, aux articles correspondants des autres règlements portant organisation commune des marchés agricoles. Ces mesures peuvent être prises pendant une période expirant le 31 décembre 1997, leur application étant limitée à cette date.»

12. Sur le fondement de cette disposition, la Commission a arrêté le règlement (CE) n° 3108/94, du 19 décembre 1994, relatif aux mesures transitoires à prendre, du fait de l'adhésion de l'Autriche, de la Finlande et de la Suède, concernant les échanges de produits agricoles .

13. L'article 4 dudit règlement dispose:

«1. Sans préjudice des dispositions prévues à l'article 145 paragraphe 2 de l'acte d'adhésion et pour autant qu'aucune législation plus sévère n'existe au niveau national, les nouveaux États membres taxent les détenteurs de stocks excédentaires au 1er janvier 1995.

[...]

2. Pour déterminer le stock excédentaire de chaque détenteur, les nouveaux États membres tiennent compte notamment:

- des moyennes de stocks disponibles les années précédant l'adhésion,

- des courants d'échange effectués les années précédant l'adhésion,

- des circonstances dans lesquelles ces stocks ont été créés.

La notion de stocks excédentaires s'applique également aux produits agricoles destinés aux marchés des nouveaux États membres.

3. Le montant de la taxe visée au paragraphe 1 est égal:

- pour un produit provenant d'un pays tiers, à la différence entre la charge à l'importation applicable dans la Communauté à douze le 31 décembre 1994 et la charge à l'importation applicable dans le nouvel État membre le 31 décembre 1994, pour autant que la première soit supérieure à la seconde,

[...]

4. Pour assurer l'application correcte de la taxe prévue au paragraphe 1, les nouveaux États membres procèdent sans délai à un recensement des stocks disponibles le 1er janvier 1995.

5. Les dispositions du présent article s'appliquent aux produits relevant des codes NC suivants:

- pour l'Autriche: 1 006, 0806 20, 1702 10, 1 509, 1 510,

[...]»

14. C'est de l'application des mesures arrêtées par les autorités autrichiennes pour mettre en oeuvre ces dispositions qu'est né un litige entre M. Weidacher, curateur à la faillite de Thakis Vertriebs- und Handels GmbH (ci-après «Thakis»), et le Bundesminister für Land- und Forstwirtschaft (ministère de l'Agriculture et des Forêts autrichien), porté devant le Verwaltungsgerichtshof (Autriche), et dans le cadre duquel cette juridiction a estimé devoir saisir la Cour de cinq questions préjudicielles.

15. En octobre 1994, Thakis a acheté en Tunisie une importante quantité d'huile d'olive. Celle-ci, accompagnée des documents de transport, a quitté la Tunisie le 21 décembre 1994 et a été dédouanée le 29 décembre 1994, alors qu'elle n'avait pas encore été déchargée.

16. Auparavant, le 13 décembre 1994, la partie de la marchandise destinée à l'Autriche avait été gagée en faveur d'une banque autrichienne, la A-Bank, ce qui s'était notamment traduit par le fait que les documents de transport avaient été établis au nom de cette dernière.

17. À la date du 31 décembre 1994, une partie de l'huile d'olive importée par Thakis se trouvait dans un entrepôt d'une entreprise vinicole autrichienne, sous le contrôle de la A-Bank, créancier gagiste, une autre dans des wagons stationnés dans une gare autrichienne, sous la responsabilité du transporteur.

18. Les autorités autrichiennes ont considéré que Thakis était détentrice, au 1er janvier 1995, d'un excédent de stocks d'huile d'olive tunisienne de 1 091 341 kg, au sens de l'article 4 du règlement n° 3108/94, et ont, en conséquence, dès le 1er février 1995, délivré à Thakis un ordre de constituer une sûreté en vue de garantir une créance fiscale liquidée anticipativement au titre de la détention d'un stock excédentaire, avant de lui notifier, le 3 avril 1995, un avis d'imposition d'un montant de 11 086 683 ATS. Ce montant a été calculé, conformément à l'article 4, paragraphe 3, dudit règlement, à partir de la différence de taxation de l'huile d'olive importée existant au 31 décembre 1994 entre la Communauté à Douze et l'Autriche.

19. En Autriche, la taxation à cette époque s'élevait à 70 ATS par 100 kg, majorés d'une tare additionnelle de 18 %, alors que le prélèvement appliqué par la Communauté s'élevait, en application du règlement (CE) n° 3307/94 de la Commission, du 29 décembre 1994, fixant les prélèvements minimaux à l'importation de l'huile d'olive ainsi que les prélèvements à l'importation des autres produits du secteur de l'huile d'olive à 66,31 écus par 100 kg (1 098,48 ATS/100 kg). Entre-temps, Thakis était tombée en faillite.

20. Les deux décisions des autorités autrichiennes, l'avis de constituer une sûreté et l'avis d'imposition, ont été contestées par Thakis, puis par le curateur...

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