Royal Bank of Scotland plc v Elliniko Dimosio (Greek State).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1998:557
Date19 November 1998
Celex Number61997CC0311
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Docket NumberC-311/97
EUR-Lex - 61997C0311 - FR 61997C0311

Conclusions de l'avocat général Alber présentées le 19 novembre 1998. - Royal Bank of Scotland plc contre Elliniko Dimosio (Etat hellénique). - Demande de décision préjudicielle: Dioikitiko Protodikeio Peiraios - Grèce. - Liberté d'établissement - Législation fiscale - Impôt sur les bénéfices des sociétés. - Affaire C-311/97.

Recueil de jurisprudence 1999 page I-02651


Conclusions de l'avocat général

A - Introduction

1 Le présent renvoi préjudiciel soulève la question de la compatibilité, avec le droit communautaire, d'une disposition fiscale grecque (1) qui soumet systématiquement les bénéfices des sociétés étrangères à un taux d'imposition de 40 %, alors que les sociétés anonymes grecques, lorsqu'elles émettent des actions nominatives ou que leurs actions au porteur sont cotées à la bourse d'Athènes, ne sont pas imposées au taux de 40 %, mais de 35 %.

2 La demanderesse au principal, la Royal Bank of Scotland plc (ci-après la «demanderesse»), a son siège en Grande-Bretagne et exploite une succursale au Pirée (Grèce). C'est à propos de l'imposition de cette succursale au titre de l'exercice 1995 (exercice comptable courant du 1er octobre 1994 au 30 septembre 1995) que le litige est survenu.

3 L'imposition a eu lieu conformément au code hellénique des impôts sur le revenu (ci-après le «code»), dont la deuxième partie réglemente l'imposition du revenu des personnes morales. L'article 109, paragraphe 1, du code détermine les taux d'imposition comme suit:

«1. L'impôt est calculé sur le revenu global imposable de la personne morale redevable, aux taux d'imposition suivants, selon la catégorie de contribuables:

a) pour les sociétés anonymes grecques dont à l'issue de l'exercice social, les actions sont au porteur et n'ont pas été cotées en bourse d'Athènes ainsi que pour les sociétés et organismes étrangers à but lucratif, 40 %,

b) pour les autres sociétés anonymes grecques, 35 %. S'agissant des sociétés anonymes grecques qui possèdent des actions nominales et des actions au porteur non cotées en bourse d'Athènes, le taux prévu sous a) est appliqué à la fraction des bénéfices correspondant au nombre d'actions au porteur existantes. Pour déterminer cette fraction des bénéfices, le bénéfice net global est réparti en fonction du nombre d'actions nominales et d'actions au porteur qui résultent des livres tenus à l'issue de l'exercice social;

c) pour les autres personnes morales mentionnées à l'article 101, 35 %.»

4 Sur la base de cette disposition, la demanderesse a été imposée à un taux de 40 %. Elle a assorti sa déclaration d'impôt sur le revenu au titre de l'exercice 1995 d'une réserve selon laquelle ses bénéfices auraient dû être imposés au taux plus favorable de 35 % applicable aux banques grecques. En guise de justification, elle a invoqué notamment l'article 52 du traité CE.

5 Cette réserve a été rejetée par décision administrative mentionnant la législation existante. La demanderesse a contesté cette décision de rejet devant les tribunaux.

6 La juridiction de renvoi, le Trimeles Dioikitiko Protodikeio Peiraios, expose que l'article 109, paragraphe 1, sous a), du code prévoit pour les sociétés anonymes étrangères un traitement fiscal qui déroge fondamentalement aux dispositions des articles 7 (2) et 52 du traité. Elle ajoute que cette disposition introduit une différenciation dans le traitement fiscal des sociétés anonymes a) selon qu'elles sont ou non cotées en bourse d'Athènes et b) selon la nature des actions des sociétés, tandis que les sociétés étrangères sont toutes sans exception soumises à une imposition plus lourde de 40 %. Selon la juridiction a quo, ce traitement fiscal particulier réservé aux sociétés grecques entraîne un allégement des charges pesant sur elles et a pour effet de leur faire obtenir des avantages concurrentiels face aux sociétés étrangères, et, partant, de fausser la concurrence.

7 La juridiction de renvoi saisit la Cour de justice de la question préjudicielle suivante:

«La disposition précitée de l'article 109, paragraphe 1, sous a), du code des impôts sur le revenu (loi no 2238/1994, Journal officiel de la République hellénique no 151, tome A) qui, en appliquant un taux d'imposition de 40 % aux revenus imposables des sociétés étrangères, les soumet à une imposition distincte, plus lourde par rapport à celle qui frappe les sociétés grecques, auxquelles s'applique un taux d'imposition de 35 %, peut-elle être admise et est-elle licite en droit communautaire, et en particulier cette disposition est-elle conforme aux articles 7 et 52 du traité? En d'autres termes, l'État hellénique peut-il faire supporter aux sociétés étrangères le traitement fiscal différent décrit ci-dessus?»

8 Ont pris part à la procédure la demanderesse, les gouvernements hellénique et français, ainsi que la Commission. Nous reviendrons sur leurs arguments dans le cadre de l'analyse juridique.

B - Analyse

9 La demanderesse fait valoir que l'article 109, paragraphe 1, du code engendre une inégalité de traitement prohibée entre sociétés grecques et étrangères. Alors que, selon elle, les sociétés anonymes grecques se distinguent entre elles selon la forme des actions qu'elles émettent et peuvent bénéficier du taux d'imposition plus favorable lorsqu'elles émettent des actions nominatives ou des actions au porteur cotées en bourse d'Athènes, les sociétés étrangères pour leur part sont sans exception, en application de l'article 109 du code, soumises au taux d'imposition plus élevé, sans égard à la forme juridique choisie ou au type des actions émises.

10 La demanderesse relève que, en ce qui concerne le secteur bancaire, cette inégalité de traitement est renforcée par l'obligation faite aux banques grecques par les lois nos 2190/1920 et 5076/1931 de se constituer sous la forme d'une société anonyme émettant des actions nominatives. En conséquence, les banques grecques seraient toujours imposées au taux de 35 %, et les banques étrangères toujours à celui de 40 %.

11 Elle ajoute qu'il ressort de la structure même de ces dispositions que l'imposition plus favorable des sociétés grecques constitue la règle, et l'imposition à 40 %, l'exception.

12 Aux yeux de la demanderesse, l'article 109, paragraphe 1, du code contrevient au principe général d'égalité consacré par l'article 6 du traité, ainsi qu'à l'article 52 du traité. Cette inégalité de traitement restreindrait de manière illicite la liberté d'établissement exercée par le biais de la création d'un établissement secondaire sous la forme d'agence, de succursale ou de filiale.

13 La demanderesse invoque les arrêts rendus par la Cour dans les affaires Commission/France (3) et Halliburton Services (4).

14 Le gouvernement hellénique insiste tout d'abord sur le rapport de complémentarité existant entre, d'une part, les articles 48, 52 et 59 et, d'autre part, l'article 6 du traité, et fait valoir que, dans le champ d'application des articles 48, 52 et 59, l'article 6 n'entre plus en ligne de compte. Il expose encore que le principe de la liberté d'établissement, qui découle des dispositions combinées des articles 52 et 58 du traité, vaut également pour les sociétés et que, dans ce cadre, en vertu d'une jurisprudence constante, c'est le siège de la société qui détermine sa nationalité. Dans ce contexte et à la lumière des réflexions qui suivent, il conviendrait de formuler autrement la question dont la Cour est saisie.

15 Selon le gouvernement hellénique, la règle est que l'imposition des sociétés anonymes a lieu au taux de 40 %. Selon les indications fournies par le ministère des Finances, 80 % des sociétés anonymes sont imposées à ce taux. La grande...

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