Vereniging Noordelijke Land- en Tuinbouw Organisatie v Staatssecretaris van Financiën.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2008:769
Docket NumberC-515/07
Celex Number62007CC0515
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date22 December 2008

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO Mengozzi

présentées le 22 décembre 2008 (1)

Affaire C‑515/07

Vereniging Noordelijke Land- en Tuinbouw Organisatie

contre

Staatssecretaris van Financiën

[demande de décision préjudicielle formée par le Hoge Raad der Nederlanden (Pays-Bas)]

«Articles 6, paragraphe 2, premier alinéa, et 17 de la sixième directive TVA – Biens et services utilisés en partie pour les besoins de l’entreprise et en partie pour des activités non économiques – Notion de ‘fins étrangères à l’entreprise’ – Intégration dans le patrimoine professionnel de l’assujetti – Possibilité de déduction immédiate et intégrale de la TVA affectée à l’achat de biens et de services autres que des biens d’investissement»





I – Introduction

1. Par le présent renvoi préjudiciel, le Hoge Raad der Nederlanden (Pays-Bas) interroge la Cour sur la question de savoir, en substance, si le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) acquittée en amont s’applique non seulement à l’acquisition de biens d’investissement mais peut s’étendre à celle d’autres biens et services utilisés tant pour des opérations professionnelles effectuées en aval qu’à d’autres fins, c’est-à-dire pour la réalisation, par l’assujetti, d’activités de nature non économique, considérées, par la juridiction de renvoi, comme étant des fins étrangères à l’entreprise. Dans l’affirmative, la juridiction de renvoi se questionne sur les modalités de mise en œuvre dudit droit à déduction.

II – Le cadre juridique communautaire

2. L’article 2, paragraphe 1, de la sixième directive 77/388/CEE du Conseil, du 17 mai 1977, en matière d’harmonisation des législations des États membres relatives aux taxes sur le chiffre d’affaires – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée: assiette uniforme (2), telle que modifiée par la directive 95/7/CE du Conseil, du 10 avril 1995 (3) (ci‑après la «sixième directive»), soumet à la TVA «les livraisons de biens et les prestations de services, effectuées à titre onéreux à l’intérieur du pays par un assujetti agissant en tant que tel», c’est-à-dire lorsqu’une telle personne effectue des opérations dans le cadre de son activité taxable (4).

3. L’article 6, paragraphe 2, premier alinéa, sous a), de la sixième directive assimile à des prestations de services effectuées à titre onéreux «l’utilisation d’un bien affecté à l’entreprise pour les besoins privés de l’assujetti ou pour ceux de son personnel ou, plus généralement, à des fins étrangères à son entreprise, lorsque ce bien a ouvert droit à une déduction complète ou partielle de la taxe sur la valeur ajoutée».

4. L’article 6, paragraphe 2, premier alinéa, sous b), de la même directive assimile à des prestations à titre onéreux les «prestations de services à titre gratuit effectuées par l’assujetti pour ses besoins privés ou pour ceux de son personnel ou, plus généralement, à des fins étrangères à son entreprise».

5. Selon l’article 17, paragraphe 2, sous a), de la sixième directive, dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de ses opérations taxées, l’assujetti est autorisé à déduire de la taxe dont il est redevable la TVA due ou acquittée à l’intérieur du pays pour les biens qui lui sont ou lui seront livrés et pour les services qui lui sont ou lui seront rendus par un autre assujetti.

6. Aux termes de l’article 17, paragraphe 5, de la sixième directive, en ce qui concerne les biens et les services qui sont utilisés par un assujetti pour effectuer à la fois des opérations ouvrant droit à déduction visées aux paragraphes 2 et 3 de cette disposition et des opérations n’ouvrant pas droit à déduction, la déduction n’est admise que pour la partie de la TVA qui est proportionnelle au montant afférent aux premières opérations.

7. L’article 17, paragraphe 6, de la sixième directive dispose:

«Au plus tard avant l’expiration d’une période de quatre ans à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente directive, le Conseil, statuant à l’unanimité sur proposition de la Commission, déterminera les dépenses n’ouvrant pas droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée.

En tout état de cause, seront exclues du droit à déduction les dépenses n’ayant pas un caractère strictement professionnel, telles que les dépenses de luxe, de divertissement ou de représentation.

Jusqu’à l’entrée en vigueur des règles visées ci-dessus, les États membres peuvent maintenir toutes les exclusions prévues par leur législation nationale au moment de l’entrée en vigueur de la présente directive.»

8. L’article 20, paragraphe 2, de la sixième directive prévoit que, en ce qui concerne les biens d’investissement, une régularisation est opérée pendant une période de cinq années, dont celle au cours de laquelle le bien a été acquis ou fabriqué. Chaque année, cette régularisation ne porte que sur le cinquième de la taxe dont ces biens ont été grevés. Cette régularisation est effectuée en fonction des modifications du droit à déduction intervenues au cours des années suivantes, par rapport à celui de l’année au cours de laquelle le bien a été acquis ou fabriqué. Cette disposition précise également que, par dérogation au premier alinéa, les États membres peuvent, lors de la régularisation, se baser sur une période de cinq années entières à compter du début de l’utilisation du bien. Elle ajoute notamment que, en ce qui concerne les biens d’investissement immobiliers, la durée de la période servant de base au calcul des régularisations peut être portée jusqu’à vingt ans.

III – Les faits du litige au principal et les questions préjudicielles

9. La Vereniging Noordelijke Land- en Tuinbouw Organisatie (ci‑après la «VNLTO»), partie requérante au principal, promeut les intérêts du secteur rural dans les provinces de Groningue, de la Frise, de la Drenthe et du Flevoland. Ses membres, c’est-à-dire des entrepreneurs dudit secteur, lui acquittent des cotisations. Hormis la défense des intérêts généraux de ses membres, la VNLTO effectue un certain nombre de prestations de services individuels au bénéfice tant de ses membres que de tiers, pour lesquelles elle facture une rémunération séparée.

10. Il est constant que la VNLTO doit être qualifiée d’assujetti à la TVA pour les prestations de services individuels rendues contre rémunération et que les cotisations qui sont affectées à la défense des intérêts généraux de ses membres ne constituent pas une rémunération au titre de la TVA.

11. Au cours de l’année 2000, la VNLTO a acquis des biens et des services qu’elle a utilisés tant pour ses activités économiques soumises à la TVA au titre de l’article 2 de la sixième directive que pour ses activités relatives à la défense des intérêts généraux de ses membres qui n’ont pas de lien avec les premières. La VNLTO a demandé une déduction des montants de la TVA acquittés en amont pour lesdits biens et services, parmi lesquels figurent ceux concernant ses activités relatives à la défense des intérêts généraux de ses membres.

12. L’inspecteur fiscal a refusé de reconnaître la déduction demandée et a infligé à la VNLTO un avis de redressement. Dans le cadre de cet avis, une imputation de montants de TVA payés en amont concernant les activités relatives à la défense des intérêts généraux des membres a été opérée, proportionnellement aux revenus de la VNLTO générés par ces activités. La réclamation de la VNLTO contre cet avis de redressement a été rejetée, tout comme, ensuite, l’appel interjeté contre la décision rendue sur la réclamation. Dans son arrêt, le Gerechtshof Leeuwarden a estimé que la défense générale des intérêts des membres ne constituait pas le prolongement direct, durable et nécessaire des activités économiques de la VNLTO et que, partant, celle-ci ne saurait déduire la TVA qui lui a été facturée dans la mesure où les biens et les services en cause ont été utilisés dans le cadre de la défense des intérêts généraux de ses membres.

13. Saisi en dernière instance du litige, le Hoge Raad der Nederlanden fait référence à l’arrêt Charles et Charles‑Tijmens (5), selon lequel les articles 6, paragraphe 2, et 17 paragraphes 2 et 6, de la sixième directive s’opposent à une législation nationale qui ne permet pas à un assujetti d’affecter à son entreprise la totalité d’un bien d’investissement utilisé en partie pour les besoins de l’entreprise et en partie à des fins étrangères à celle-ci et, le cas échéant, de déduire intégralement et immédiatement la TVA due sur l’acquisition d’un tel bien. La juridiction de renvoi précise qu’il ne fait aucun doute raisonnable que l’arrêt Charles et Charles-Tijmens, précité, s’applique également dans le cas d’une personne morale qui, comme en l’espèce, parallèlement à ses activités économiques exerce des activités qui ne relèvent pas du champ d’application de la TVA. Dans ce cas et dans la mesure où les biens acquis seraient des biens d’investissement, la juridiction de renvoi indique que la VNLTO aurait droit à la déduction de la totalité de la TVA portée en compte au titre de frais généraux, mais les pièces de procédure dans l’affaire au principal ne permettent pas de déterminer la part de la TVA déduite qui concerne des biens d’investissement. En revanche, le Hoge Raad der Nederlanden considère qu’il existe des doutes quant à l’extension du dispositif de l’arrêt Charles et Charles-Tijmens, précité, à la situation des biens autres que des biens d’investissement ainsi qu’à celle des services. La juridiction de renvoi se pose également la question de savoir si l’assujetti a le droit d’affecter à son patrimoine d’entreprise des biens autres que des biens d’investissement et des services de sorte qu’il peut déduire immédiatement la totalité de la TVA acquittée sur l’acquisition de ces biens et de ces services, quand bien même ceux-ci sont partiellement utilisés dans le cadre d’activités qui n’ont aucun rapport avec les prestations taxées sur le fondement de l’article 2 de la sixième directive.

14. Dans...

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