Kingdom of Denmark v Commission of the European Communities.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:1998:126
CourtCourt of Justice (European Union)
Date24 March 1998
Docket NumberC-233/96
Celex Number61996CC0233
Procedure TypeRecurso de anulación - infundado
EUR-Lex - 61996C0233 - FR 61996C0233

Conclusions de l'avocat général Alber présentées le 24 mars 1998. - Royaume de Danemark contre Commission des Communautés européennes. - FEOGA - Apurement des comptes - Exercices 1992 et 1993 - Viande bovine. - Affaire C-233/96.

Recueil de jurisprudence 1998 page I-05759


Conclusions de l'avocat général

A - Introduction

1 La présente affaire a pour objet une réduction forfaitaire des fonds du FEOGA (1) attaquée par le requérant. La Commission, partie défenderesse, justifie cette réduction par le fait que les autorités nationales ont accepté, dans le cadre des achats à l'intervention, des offres multiples (offres groupées ou associées), de nature illicite (2). Celles-ci pourraient présenter un caractère spéculatif. Elle souligne en effet que, lorsque de grandes quantités de viande bovine sont proposées à l'intervention, il devient nécessaire de réduire ces quantités par application d'un coefficient (3). Les soumissionnaires restant cependant désireux de vendre la totalité de leur viande à l'organisme d'intervention, ils spéculent, indique la Commission, en déposant des offres surévaluées. Tablant sur la fixation d'un certain coefficient de réduction, le soumissionnaire offre une quantité d'autant supérieure à l'intervention. Qu'un coefficient inférieur à celui qu'avait prévu le soumissionnaire soit alors fixé et celui-ci doit livrer à l'organisme d'intervention plus de viande qu'il n'en dispose réellement. S'il n'est pas en mesure de remplir le contrat passé avec l'organisme d'intervention à concurrence d'une proportion égale, selon le cas, à 85 ou à 95 %, il perd tout ou partie de la garantie constituée pour le montant total (4).

2 Que le soumissionnaire divise toutefois son offre initiale en plusieurs offres, proposées par l'intermédiaire d'hommes de paille, et le risque de perdre la garantie se réduit. S'il est incapable de livrer la totalité de la quantité proposée, il lui est tout au moins possible, dans l'hypothèse d'offres distinctes de faible volume, d'en exécuter certaines de façon suffisante pour ne pas perdre la garantie. Il est vrai que la garantie reste acquise pour les offres restantes, qu'il ne peut plus exécuter; celle-ci n'est toutefois pas calculée sur le montant total des offres qu'il a faites, mais uniquement sur la base, plus réduite, de chacune de ces offres. Le montant de la garantie perdue est ainsi inférieur et généralement dépassé par le bénéfice réalisé.

3 Selon la Commission, il en ressort clairement que le dépôt de plusieurs offres favorise la spéculation, car l'effet du dépôt de garantie se réduit.

4 Elle estime que faire croire fallacieusement à l'existence de plus grandes quantités tout en spéculant est contraire à l'esprit de l'intervention. Cette dernière vise - lorsque les cours du marché tombent en dessous d'un certain montant - à stabiliser le marché communautaire et à éviter ou à atténuer une baisse importante des prix, au moyen, par exemple, d'achats effectués par les organismes d'intervention (5). Elle précise que le règlement n_ 859/89 (6) a instauré un système d'achats par voie d'adjudications (7). Dans le cadre de ce système, les prix et les quantités sont fixés sur la base des offres reçues (8).

5 Les offres spéculatives, qui étaient favorisées - comme indiqué - par le dépôt d'offres multiples, ont empêché, selon la Commission, la mise en oeuvre réussie des mesures d'intervention. Une quantité de viande supérieure à celle réellement disponible sur le marché étant proposée, les prix et les quantités, qui sont fixés sur la base des offres reçues, ne pouvaient plus, souligne-t-elle, être déterminés en fonction des conditions du marché. Elle estime donc que les offres spéculatives l'ont empêchée d'avoir une vision précise de la situation du marché. De ce fait, elle soutient qu'il faut considérer comme quasi certain que, sous l'effet de ces offres spéculatives et des offres «multiples» qui les favorisaient, les organismes d'intervention ont acheté des quantités supérieures de viande à des prix plus élevés. Elle souligne également la nécessité de tenir compte du fait que la remise de plusieurs offres permet aussi une spéculation sur le prix. En achetant des quantités excessives, le FEOGA aurait exposé des frais supérieurs à ceux nécessaires au soutien du marché.

B - Faits et dispositions légales

6 Dans sa requête, le gouvernement danois conclut à l'annulation de la décision de la Commission de ne pas prendre en charge une somme de 26 867 909 DKR au titre des dépenses engagées par le royaume de Danemark pour les exercices 1991 et 1992 dans le cadre des achats de viande bovine (9) (ci-après la «décision»). La non-reconnaissance de ces frais résulte de l'annexe I de la décision. Cette somme correspond à une correction forfaitaire de 2 % des dépenses pour 1991 et 1992.

7 Dans ses rapports de synthèse (10), la Commission justifie cette réduction par le fait que le royaume de Danemark n'a pas contrôlé s'il s'était agi d'offres multiples.

8 Ce point eût été facile à constater, car, ainsi que l'expose la Commission, les dix-sept offres déposées lors d'une adjudication ne provenaient que de sept sources. Un groupe très important était à lui seul, indique-t-elle, à l'origine de huit offres, faites à huit prix différents. En mettant en rapport les noms, adresses, numéros de fax, le dépôt de garantie et les paiements, le FEOGA a pu constater, pour chaque adjudication examinée, que de nombreuses offres différentes émanaient de la même source. Il était en outre apparu, au vu des factures communiquées, que le paiement devait être effectué au profit d'autres sociétés. La Commission en déduit que l'autorité danoise a dû, dès l'origine, avoir connaissance des agissements des soumissionnaires.

9 Elle estime donc que le comportement de l'autorité danoise compétente n'était pas compatible avec les dispositions communautaires et qu'il a opéré une discrimination à l'égard des opérateurs ayant respecté les règles.

10 Le requérant estime en revanche que toutes les dispositions dans le cadre de l'intervention ont été respectées. Il se serait assuré qu'une personne physique ou morale, immatriculée en tant que société, ne déposait pas plus d'une offre par catégorie et adjudication. Les contrôles des autorités danoises auraient consisté à vérifier si l'offre émanait d'une entreprise enregistrée auprès desdites autorités. Selon lui, il n'existait aucune raison, à cette époque, de procéder à des contrôles plus approfondis.

11 La réglementation sur laquelle repose ce litige figure à l'article 9 du règlement n_ 859/89, qui, en son paragraphe 1, dispose: «Le soumissionnaire ne peut participer à l'adjudication que s'il s'engage par écrit à respecter l'ensemble des dispositions relatives aux achats en cause» (11).

12 Le paragraphe 2 énonce: «Les intéressés participent à l'adjudication auprès de l'organisme d'intervention des États membres où celle-ci est ouverte, soit par dépôt de l'offre écrite contre accusé de réception, soit par tout moyen de communication écrite avec accusé de réception accepté par l'organisme d'intervention; ils ne peuvent déposer qu'une seule offre par catégorie et adjudication» (12).

13 La distinction entre les notions de «soumissionnaire» et d'«intéressé» est ici d'importance selon la Commission. Le choix de termes différents indique, selon elle, que les intéressés ne sont pas assimilables aux soumissionnaires. La notion d'intéressés ne définirait pas seulement ceux qui sont effectivement intervenus et ont déposé une offre. Elle engloberait un groupe de personnes beaucoup plus large; l'interdiction de déposer plus d'une offre ne concernerait donc pas uniquement le seul soumissionnaire - c'est-à-dire celui qui dépose effectivement une offre. Elle viserait au contraire tous ceux qui proposent la même quantité de viande.

14 Le requérant estime par contre, restrictivement, que les notions de soumissionnaire et d'intéressé sont interchangeables, car on ne discernerait aucune différence entre les deux. Ni les considérants ni le texte du règlement lui-même ne donnent, indique-t-il, une explication de la notion de soumissionnaire. Il conviendrait donc d'interpréter cette notion en ce sens qu'elle vise toute personne physique ou morale indépendante déposant une offre dans le cadre d'une adjudication. Il en déduit que l'interdiction prévue à l'article 9, paragraphe 2, deuxième phrase, se borne à préciser que la personne intervenant en qualité de soumissionnaire ne peut remettre qu'une seule offre.

15 Selon le requérant, c'est seulement depuis l'article 11, paragraphe 3, du règlement (CEE) n_ 2456/93 de la Commission, du 1er septembre 1993, portant modalités d'application du règlement n_ 805/68 en ce qui concerne les mesures générales et des mesures spéciales d'intervention dans le secteur de la viande bovine (13), qui n'était pas encore en vigueur à l'époque des faits, qu'il apparaît que cette disposition concerne d'autres personnes que le soumissionnaire. Ledit article 11, paragraphe 3, prévoit:

«Chaque intéressé ne peut déposer qu'une seule offre par catégorie et adjudication.

Chaque État membre s'assure que les intéressés sont indépendants du point de vue de leur direction, de leur personnel et de leur fonctionnement.

Lorsque des indices sérieux indiquent que tel n'est pas le cas, ou qu'une offre ne correspond pas à la réalité économique, la recevabilité de cette offre est subordonnée à la présentation par le soumissionnaire de preuves appropriées du respect de la disposition du deuxième alinéa.

Lorsqu'il est établi qu'un intéressé a présenté plus d'une demande, toutes les demandes sont irrecevables.»

16 Comme le requérant estime, à l'inverse de la Commission, avoir parfaitement respecté l'article 9, paragraphe 2, deuxième phrase, du règlement n_ 859/89 lors de la procédure d'adjudication qu'il a mise en oeuvre, il a finalement saisi l'organe de...

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