Commission of the European Communities v Council of the European Union.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2003:667
CourtCourt of Justice (European Union)
Date11 December 2003
Docket NumberC-110/02
Celex Number62002CC0110
Procedure TypeRecours en annulation - fondé
Conclusions
CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. F. G. JACOBS
présentées le 11 décembre 2003(1)



Affaire C-110/02

Commission des Communautés européennes
contre
Conseil de l'Union européenne


«»






1. Dans la présente affaire, introduite au titre de l'article 230CE, la Commission des Communautés européennes demande l'annulation de la décision 2002/114/CE (2) . 2. La décision attaquée a été prise en vertu de l'article 88, paragraphe 2, troisième alinéa, CE, qui autorise le Conseil de l'Union européenne, si des circonstances exceptionnelles le justifient, à déclarer une aide instituée ou à instituer par un État membre compatible avec le marché commun. Elle autorise la République portugaise à effectuer des versements à un groupe d'éleveurs de porc portugais pour un montant équivalant aux aides que ces éleveurs ont déjà reçues mais ont été tenus de rembourser à la suite de décisions de la Commission (3) qui les ont déclarées incompatibles avec le marché commun. 3. La décision attaquée n'est apparemment pas la seule décision récente du Conseil prise sur le fondement de la procédure prescrite à l'article 88, paragraphe 2, troisième alinéa, CE, qui autorise une aide servant à rembourser les bénéficiaires tenus de restituer une autre aide ayant fait l'objet d'une décision négative antérieure (4) . La présente affaire offre donc à la Cour la possibilité de déterminer si un tel usage de ses pouvoirs par le Conseil est conforme avec le système institué par le traité CE pour le contrôle des aides d'État. Le cadre juridique 4. L'article 87, paragraphe 1, CE énonce que «sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d'État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions». L'article 87, paragraphe 2, CE indique les catégories d'aide qui sont compatibles avec le marché commun. L'article 87, paragraphe 3, CE précise les catégories d'aide qui peuvent être considérées comme compatibles. 5. Le traité confère un rôle central à la Commission dans la surveillance et le contrôle des aides instituées par les États membres. Conformément à l'article 88, paragraphe 1, CE, il incombe à la Commission de procéder avec les États membres à «l'examen permanent des régimes d'aides existant dans ces États». L'article 88, paragraphe 2, premier alinéa, CE investit la Commission du pouvoir et lui impose d'apprécier la compatibilité des aides avec l'article 87 CE et de décider, en cas d'incompatibilité d'une aide, que l'État intéressé doit la supprimer dans un délai déterminé. L'article 88, paragraphe 3, CE impose aux États membres de notifier à la Commission leurs projets tendant à instituer ou à modifier des aides et leur interdit de mettre à exécution de tels projets, avant que la Commission ne soit parvenue à une décision conformément à l'article 88, paragraphe 2, premier alinéa, CE. Si l'État en cause ne se conforme pas à cette décision, l'article 88, paragraphe 2, deuxième alinéa, CE autorise la Commission ou tout autre État intéressé à saisir directement la Cour de justice. 6. L'article 88, paragraphe 2, troisième et quatrième alinéas, CE dispose: «Sur demande d'un État membre, le Conseil, statuant à l'unanimité, peut décider qu'une aide, instituée ou à instituer par cet État, doit être considérée comme compatible avec le marché commun, en dérogation des dispositions de l'article 87 ou des règlements prévus à l'article 89, si des circonstances exceptionnelles justifient une telle décision. Si, à l'égard de cette aide, la Commission a ouvert la procédure prévue au présent paragraphe, premier alinéa, la demande de l'État intéressé adressée au Conseil aura pour effet de suspendre ladite procédure jusqu'à la prise de position du Conseil. Toutefois, si le Conseil n'a pas pris position dans un délai de trois mois à compter de la demande, la Commission statue.» 7. L'article 89 CE habilite le Conseil à prendre des règlements en vue de l'application des articles 87 CE et 88 CE. En vertu de cette habilitation, le Conseil a adopté le règlement (CE) n° 659/1999 qui édicte des règles précises concernant les procédures à suivre aux fins de l'application de l'article 88 CE (5) . 8. Au titre de l'article 36 CE, les règles de concurrence contenues dans le traité, y compris celles en matière d'aides d'État, ne sont applicables à la production et au commerce des produits agricoles que dans la mesure déterminée par le Conseil dans le cadre de dispositions prévoyant l'élaboration et la mise en oeuvre de la politique agricole commune conformément à l'article 37 CE. 9. L'article 21 du règlement (CEE) nº 2759/75 du Conseil, du 29 octobre 1975, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la viande de porc (6) prévoit que, sous réserve de dispositions contraires dudit règlement, les dispositions du traité en matière d'aides d'État seront applicables à la production et au commerce du porc et de la viande de porc. Le contexte factuel et la décision attaquée 10. En 1994 et 1999, le Portugal a octroyé des aides en faveur du secteur de l'élevage porcin (ci-après les «aides initiales»). L'aide octroyée en 1994 n'a pas été notifiée à la Commission tandis que l'aide de 1999 l'a été, mais a été mise en oeuvre avant que la Commission ne se soit prononcée sur sa compatibilité avec le marché commun. 11. Par ses décisions 2000/200 et 2001/86 (7) , la Commission a déclaré la plupart des aides initiales incompatibles avec le marché commun et ordonné leur restitution. 12. Le 21 janvier 2002, le Conseil a, sur demande du gouvernement portugais, adopté la décision attaquée, par laquelle a été déclarée compatible avec le marché commun l'octroi par la République portugaise d'une aide aux éleveurs de porc qui avaient bénéficié des aides initiales, aide d'un montant «équivalant aux montants que ces bénéficiaires devront restituer» en vertu des décisions 2000/200 et 2001/86. 13. Les points 13 et 14 des motifs de la décision attaquée justifient celle-ci de la manière suivante: «(13) […] le remboursement des aides [initiales] compromet la viabilité économique de bon nombre de bénéficiaires et aurait un impact social très négatif dans certaines régions, ainsi, 50 % des porcins sont concentrés sur moins de 5 % du territoire. (14) Il existe donc des circonstances exceptionnelles permettant de considérer cette aide, à titre dérogatoire et dans la mesure strictement nécessaire au redressement de la situation de déséquilibre constatée, comme compatible avec le marché commun, dans les conditions prévues par la présente décision.» La procédure et les prétentions des parties 14. Dans son recours présenté au titre de l'article 230 CE, la Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour annuler la décision attaquée et condamner le Conseil aux dépens. Elle fait valoir en substance que le Conseil n'était pas compétent pour adopter une telle décision étant donné l'existence des décisions 2000/200 et 2001/86 sur les aides initiales. Le Conseil aurait ainsi outrepassé ses compétences, commis un détournement de pouvoir et violé le traité ainsi que des principes généraux du droit communautaire. À titre subsidiaire, la Commission invoque que le Conseil aurait commis une erreur d’appréciation manifeste en concluant que des circonstances exceptionnelles au sens de l’article 88, paragraphe 2, troisième alinéa, CE existent. À titre plus subsidiaire encore, la Commission allègue que la décision attaquée est entachée d’un défaut ou d’une erreur de motivation. 15. Le Conseil conclut à ce qu’il plaise à la Cour rejeter le recours, comme non fondé, et condamner la Commission aux dépens. Le gouvernement portugais est intervenu à l'appui des conclusions du Conseil. Le gouvernement français a aussi demandé à être admis à intervenir mais son mémoire a été déposé après l'expiration du délai prévu à l'article 93, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour. En conséquence, il a été autorisé à présenter des observations lors de la procédure orale si celle-ci avait lieu. En l'occurrence, l'audience n'a pas été demandée et n'a donc pas eu lieu. 16. Le Conseil et le gouvernement portugais font valoir pour l'essentiel que la décision attaquée viserait une aide nouvelle et que, sur le plan juridique, elle laisserait dès lors subsister les décisions antérieures de la Commission et ne serait pas affectée par elles. Les questions à résoudre 17. Au vu des arguments présentés par les parties, les questions à résoudre sont les suivantes:
Le Conseil est-il compétent, au titre de l'article 88, paragraphe 2, troisième alinéa, CE, pour adopter une décision concernant une aide qui a fait l'objet d'une décision négative antérieure de la Commission?
En tout état de cause, le Conseil peut-il autoriser une aide qui a pour objet et pour effet d'aider les bénéficiaires à rembourser une aide ayant fait l'objet d'une décision négative antérieure de la Commission?
Le Conseil a-t-il commis une erreur manifeste en constatant que des circonstances exceptionnelles justifiaient l'adoption de la décision attaquée?
La décision attaquée est-elle dûment et suffisamment motivée?
Le Conseil est-il compétent pour adopter une décision concernant une aide qui a fait l'objet d'une décision négative antérieure de la Commission? 18. La Commission avance un certain nombre d'arguments qui se chevauchent tendant à démontrer que, dès lors qu'elle s'est opposée à une aide donnée, le Conseil n'est pas autorisé à prendre une décision contraire. Les quatre...

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