Didier Mayeur v Association Promotion de l'information messine (APIM).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2000:313
Docket NumberC-175/99
Celex Number61999CC0175
CourtCourt of Justice (European Union)
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
Date13 June 2000
EUR-Lex - 61999C0175 - FR 61999C0175

Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 13 juin 2000. - Didier Mayeur contre Association Promotion de l'information messine (APIM). - Demande de décision préjudicielle: Conseil de prud'hommes de Metz - France. - Maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'entreprise - Transfert à une commune d'une activité précédemment exercée, dans l'intérêt de cette dernière, par une personne morale de droit privé. - Affaire C-175/99.

Recueil de jurisprudence 2000 page I-07755


Conclusions de l'avocat général

1 Votre Cour est saisie à titre préjudiciel de l'interprétation de l'article 1er, paragraphe 1, de la directive 77/187/CEE du Conseil, du 14 février 1977, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements (1).

2 Le conseil de prud'hommes de Metz (France) vous demande, en substance, si le champ d'application matériel de la directive est susceptible de couvrir la reprise, par une commune, des activités de publicité et d'information sur les services qu'elle offre à ses administrés, exercées jusqu'alors, dans l'intérêt de cette commune, par une association à but non lucratif.

I - Cadre juridique

A - Le droit communautaire

3 Comme l'indique son deuxième considérant, la directive vise à «protéger les travailleurs en cas de changement de chef d'entreprise, en particulier pour assurer le maintien de leurs droits».

4 À cette fin, elle prévoit, en son article 3, paragraphe 1, premier alinéa, le transfert au cessionnaire des droits et des obligations qui résultent pour le cédant d'un contrat de travail existant à la date du transfert. Son article 4, paragraphe 1, premier alinéa, ajoute que le transfert d'une entreprise, d'un établissement ou d'une partie d'établissement ne constitue pas en lui-même un motif de licenciement pour le cédant ou le cessionnaire. Son article 4, paragraphe 2, prévoit en outre que, «Si le contrat de travail ou la relation de travail est résilié du fait que le transfert au sens de l'article 1er paragraphe 1 entraîne une modification substantielle des conditions de travail au détriment du travailleur, la résiliation du contrat de travail ou de la relation de travail est considérée comme intervenue du fait de l'employeur».

5 L'article 1er définit le champ d'application de la directive. Aux termes de son paragraphe 1, «La ... directive est applicable aux transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements à un autre chef d'entreprise, résultant d'une cession conventionnelle ou d'une fusion».

6 L'article 2 définit les principales notions utilisées. Le point b) de cet article précise ainsi que, par «cessionnaire», il faut entendre «toute personne physique ou morale qui, du fait d'un transfert au sens de l'article 1er paragraphe 1 acquiert la qualité de chef d'entreprise à l'égard de l'entreprise, de l'établissement ou de la partie d'établissement».

B - Le droit national

7 Les dispositions de la directive ont été mises en oeuvre en droit français par l'article L. 122-12 du code du travail qui prévoit:

«La cessation de l'entreprise, sauf cas de force majeure, ne libère pas l'employeur de l'obligation de respecter le délai-congé et de verser, s'il y a lieu, l'indemnité prévue à l'article L. 122-9 (2).

S'il survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise.»

II - Cadre factuel et procédural

A - Le cadre factuel

8 M. Mayeur a été embauché en qualité de salarié, à compter du 1er septembre 1989, par l'Association Promotion de l'information messine (ci-après l'«APIM»), par un contrat à durée indéterminée.

9 L'APIM, association à but non lucratif, a pour objet, conformément à l'article 3 de ses statuts, de promouvoir, de diffuser et de faire connaître, par tous les moyens et dans tous les domaines, les possibilités offertes par la ville de Metz et sa zone d'attraction afin de permettre et de susciter le développement, l'implantation et la création d'activités diverses. À cette fin, elle assure ou fait assurer l'édition et la diffusion de plaquettes, revues et dépliants. Dans ce cadre, l'APIM réalise le magazine Vivre à Metz.

10 M. Mayeur était chargé de l'activité publicitaire de l'APIM et, à ce titre, son rôle consistait à démarcher les commerçants de la ville et les annonceurs, à récolter des fonds en vue de réaliser des insertions publicitaires dans le magazine Vivre à Metz, à établir des contrats et des factures, et à rédiger un compte rendu mensuel des engagements souscrits.

11 À la suite de la dissolution de l'APIM, il été informé de son licenciement, le 16 septembre 1997, pour le motif économique suivant: cessation de l'activité de l'APIM.

B - Le cadre procédural

12 Le 10 février 1998, M. Mayeur a assigné l'APIM devant le conseil de prud'hommes de Metz aux fins d'obtenir sa condamnation au versement d'une somme de 177 262 FRF, à titre d'indemnité, pour licenciement abusif, augmentée des intérêts légaux, et aux dépens de l'instance.

13 À l'appui de sa demande, M. Mayeur fait valoir être le seul salarié à avoir été licencié à la suite de la dissolution de l'APIM et de la reprise de ses activités par la ville de Metz.

14 Il précise que, en vertu de la jurisprudence de la Cour de cassation française, les dispositions de l'article L. 122-12 du code du travail français ne sont pas applicables dans l'hypothèse où l'activité exercée par une personne morale de droit privé est transférée à un «établissement public administratif» (3), personne morale de droit public, soumis aux règles du droit public. En revanche, elles deviennent applicables lorsque la même activité exercée par une personne morale de droit privé est transférée à une personne morale de droit public, soumise aux règles du droit privé et considérée comme un «établissement public industriel et commercial» (4), au sens du droit français.

15 Il soutient que cette jurisprudence est contraire tant à la lettre qu'à la finalité de la directive et il demande à la juridiction nationale de poser une question préjudicielle à votre Cour.

16 Le juge de renvoi précise que l'article L. 122-12 du code du travail français couvre les différentes hypothèses de cession de contrats de travail d'une entité privée à une autre, mais reste silencieux en ce qui concerne la situation de cession de contrats de travail d'une entité privée à un organisme public.

17 Approuvant la présentation faite de la jurisprudence de la Cour de cassation française par le requérant au principal, il s'interroge sur la compatibilité de la distinction ainsi opérée avec les termes et la finalité de la directive. Il indique en effet que, du fait de cette distinction, seuls les salariés des entreprises cédées à des EPIC relèvent des dispositions de la directive, et il se demande si cette interprétation n'a pas pour conséquence de restreindre le champ d'application de l'article 1er de la directive, contrairement aux prévisions de ladite directive dont la portée est générale et ne comporte pas ce type d'exclusion. Il observe à cet égard que votre Cour, par une application non littérale de la directive 77/187, lui donne une portée beaucoup plus vaste en imposant le maintien des contrats de travail dans des circonstances où le transfert ne résulte ni d'une fusion ni d'une cession conventionnelle, voire lorsque n'existe aucun lien de droit entre les exploitants successifs.

18 Selon le conseil de prud'hommes de Metz, l'activité exercée par M. Mayeur était «une activité commerciale et lucrative qui a servi directement à financer le magazine municipal» (5). Il précise en outre que l'activité de l'APIM a été entièrement reprise et poursuivie par la ville de Metz qui continue, sous la même forme, à réaliser et à diffuser le magazine Vivre à Metz (6).

19 Estimant nécessaire, en vue de trancher le litige dont il est saisi, d'obtenir des éclaircissements sur la notion de «transfert d'entreprise» au sens de la directive, le conseil de prud'hommes de Metz vous pose, par jugement du 14 avril 1999, conformément à l'article 177 du traité CE (devenu article 234 CE), les questions suivantes:

«La directive 77/187/CEE, du 14 février 1977, concernant le rapprochement des législations des États membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transferts d'entreprises, d'établissements ou de parties d'établissements, est-elle applicable dans l'hypothèse du transfert d'une activité d'une personne morale de droit privé vers une personne morale de droit public? Faudrait-il exclure l'application de la directive 77/187/CEE, du 14 février 1977, dans l'hypothèse d'un transfert à un service public administratif?»

III - Discussion

A - Observations liminaires

20 Les questions telles que formulées dans le dispositif de la décision de renvoi portent sur deux problèmes distincts et complémentaires. Dans une première question, il vous est demandé de dire si le champ d'application matériel de la directive couvre l'hypothèse du transfert d'activité d'une entité de droit privé à une entité de droit public. Dans une seconde question, on vous interroge sur le point de savoir si le transfert d'entreprise prévu par l'article 1er de la directive est exclu dans l'hypothèse où l'activité exercée par une personne morale de droit privé est cédée à un «service public administratif» (7).

21 Les notions de «SPA», de «service public industriel et commercial» (8), d'«EPA» et d'«EPIC» correspondent à des réalités précises en droit administratif français (9). Les conséquences que les juridictions françaises de l'ordre judiciaire et administratif tirent de ces qualifications pour...

To continue reading

Request your trial
1 cases
  • Didier Mayeur contra Association Promotion de l'information messine (APIM).
    • European Union
    • Court of Justice (European Union)
    • 26 Septiembre 2000
    ...Transmisión a un municipio de una actividad previamente ejercida, en interés de éste, por una persona jurídica de Derecho privado. - Asunto C-175/99. Recopilación de Jurisprudencia 2000 página I-07755 Índice Partes Motivación de la sentencia Decisión sobre las costas Parte dispositiva Palab......

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT