S and Others v United Nations High Commissioner for Refugees (UNHCR).

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2023:688
Date21 September 2023
Docket NumberC-151/22
Celex Number62022CJ0151
CourtCourt of Justice (European Union)
62022CJ0151

ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

21 septembre 2023 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Espace de liberté, de sécurité et de justice – Politique commune en matière d’asile – Conditions pour pouvoir bénéficier du statut de réfugié – Directive 2011/95/UE – Article 10, paragraphe 1, sous e), et paragraphe 2 – Motifs de la persécution – “Opinions politiques” – Notion – Opinions politiques développées dans l’État membre d’accueil – Article 4 – Évaluation de la crainte fondée de persécution du fait de ces opinions politiques »

Dans l’affaire C‑151/22,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Raad van State (Conseil d’État, Pays-Bas), par décision du 16 février 2022, parvenue à la Cour le 2 mars 2022, dans la procédure

S,

A

contre

Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie,

en présence de :

Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR),

LA COUR (troisième chambre),

composée de Mme K. Jürimäe, présidente de chambre, MM. M. Safjan, N. Piçarra (rapporteur), N. Jääskinen et M. Gavalec, juges,

avocat général : M. J. Richard de la Tour,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour S, par Me M. M. J. van Zantvoort, advocate,

pour le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), par Me C. J. Ullersma, advocate,

pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. K. Bulterman et A. Hanje, en qualité d’agents,

pour le gouvernement allemand, par M. J. Möller et Mme A. Hoesch, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par Mme A. Azéma et M. F. Wilman, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 10, paragraphe 1, sous e), de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011, concernant les normes relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir bénéficier d’une protection internationale, à un statut uniforme pour les réfugiés ou les personnes pouvant bénéficier de la protection subsidiaire, et au contenu de cette protection (JO 2011, L 337, p. 9).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre de deux litiges opposant, le premier, S et, le second, A au Staatssecretaris van Veiligheid en Justitie (secrétaire d’État à la Sécurité et à la Justice, Pays-Bas) (ci‑après le « secrétaire d’État ») au sujet du refus de ce dernier de leur octroyer le statut de réfugié.

Le cadre juridique

Le droit international

3

L’article 1er, section A, point 2, premier alinéa, de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951 et entrée en vigueur le 22 avril 1954 [Recueil des traités des Nations unies, vol. 189, p. 150, no 2545 (1954)], telle que complétée par le protocole relatif au statut des réfugiés, conclu à New York le 31 janvier 1967 et entré en vigueur le 4 octobre 1967 (ci‑après la « convention de Genève »), dispose que le terme « réfugié » s’applique à toute personne qui, « craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ».

Le droit de l’Union

4

Les considérants 4, 12 et 16 de la directive 2011/95 énoncent :

« (4)

La convention [relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951] et le protocole y afférent constituent la pierre angulaire du régime juridique international de protection des réfugiés.

[...]

(12)

L’objectif principal de la présente directive est, d’une part, d’assurer que tous les États membres appliquent des critères communs pour l’identification des personnes qui ont réellement besoin de protection internationale et, d’autre part, d’assurer un niveau minimal d’avantages à ces personnes dans tous les États membres.

[...]

(16)

La présente directive respecte les droits fondamentaux, ainsi que les principes reconnus notamment par la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne. En particulier, la présente directive vise à garantir le plein respect de la dignité humaine et du droit d’asile des demandeurs d’asile et des membres de leur famille qui les accompagnent et à promouvoir l’application des articles 1er, 7, 11, 14, 15, 16, 18, 21, 24, 34 et 35 de ladite charte, et devrait être mise en œuvre en conséquence. »

5

L’article 2 de cette directive prévoit :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

[...]

d)

“réfugié”, tout ressortissant d’un pays tiers qui, parce qu’il craint avec raison d’être persécuté du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de ses opinions politiques ou de son appartenance à un certain groupe social, se trouve hors du pays dont il a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays, ou tout apatride qui, se trouvant pour les raisons susmentionnées hors du pays dans lequel il avait sa résidence habituelle, ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut y retourner et qui n’entre pas dans le champ d’application de l’article 12 ;

e)

“statut de réfugié”, la reconnaissance, par un État membre, de la qualité de réfugié pour tout ressortissant d’un pays tiers ou apatride ;

[...]

h)

“demande de protection internationale”, la demande de protection présentée à un État membre par un ressortissant d’un pays tiers ou un apatride, qui peut être comprise comme visant à obtenir le statut de réfugié ou le statut conféré par la protection subsidiaire, le demandeur ne sollicitant pas explicitement un autre type de protection hors du champ d’application de la présente directive et pouvant faire l’objet d’une demande séparée ;

i)

“demandeur”, tout ressortissant d’un pays tiers ou tout apatride ayant présenté une demande de protection internationale sur laquelle il n’a pas encore été statué définitivement ;

[...] »

6

L’article 4 de ladite directive, intitulé « Évaluation des faits et circonstances », dispose, à ses paragraphes 3 à 5 :

« 3. Il convient de procéder à l’évaluation individuelle d’une demande de protection internationale en tenant compte des éléments suivants :

a)

tous les faits pertinents concernant le pays d’origine au moment de statuer sur la demande, y compris les lois et règlements du pays d’origine et la manière dont ils sont appliqués ;

b)

les informations et documents pertinents présentés par le demandeur, y compris les informations permettant de déterminer si le demandeur a fait ou pourrait faire l’objet de persécutions [...]

c)

le statut individuel et la situation personnelle du demandeur, y compris des facteurs comme son passé, son sexe et son âge, pour déterminer si, compte tenu de la situation personnelle du demandeur, les actes auxquels le demandeur a été ou risque d’être exposé pourraient être considérés comme une persécution [...]

d)

le fait que, depuis qu’il a quitté son pays d’origine, le demandeur a ou non exercé des activités dont le seul but ou le but principal était de créer les conditions nécessaires pour présenter une demande de protection internationale, pour déterminer si ces activités l’exposeraient à une persécution [...] s’il retournait dans ce pays ;

[...]

4. Le fait qu’un demandeur a déjà été persécuté [...] ou a déjà fait l’objet de menaces directes d’une telle persécution [...] est un indice sérieux de la crainte fondée du demandeur d’être persécuté [...], sauf s’il existe de bonnes raisons de penser que cette persécution [...] ne se reproduir[a] pas.

5. Lorsque les États membres appliquent le principe selon lequel il appartient au demandeur d’étayer sa demande, et lorsque certains aspects des déclarations du demandeur ne sont pas étayés par des preuves documentaires ou autres, ces aspects ne nécessitent pas confirmation lorsque les conditions suivantes sont remplies :

a)

le demandeur s’est réellement efforcé d’étayer sa demande ;

b)

tous les éléments pertinents à la disposition du demandeur ont été présentés et une explication satisfaisante a été fournie quant à l’absence d’autres éléments probants ;

c)

les déclarations du demandeur sont jugées cohérentes et plausibles et elles ne sont pas contredites par les informations générales et particulières connues et pertinentes pour sa demande ;

[...]

e)

la crédibilité générale du demandeur a pu être établie. »

7

Aux termes de l’article 6 de la même directive :

« Les acteurs des persécutions ou des atteintes graves peuvent être :

a)

l’État ;

b)

des partis ou organisations qui contrôlent l’État ou une partie importante du territoire de celui-ci ;

[...] »

8

L’article 9 de la directive 2011/95 fixe les conditions pour qu’un acte puisse être considéré comme un « acte de persécution » au sens de l’article 1er, section A, de la convention de Genève. À cette fin, il contient une liste non exhaustive des formes que peuvent prendre les actes de persécution et exige qu’un lien puisse être établi entre ces actes et les motifs de la persécution mentionnées à l’article 10 de celle-ci.

9

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