Nikolay Kantarev v Balgarska Narodna Banka.

JurisdictionEuropean Union
CourtCourt of Justice (European Union)
Date04 October 2018
62016CJ0571

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

4 octobre 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Systèmes de garantie des dépôts – Directive 94/19/CE – Article 1er, point 3, sous i) – Article 10, paragraphe 1 – Notion de “dépôt indisponible” – Responsabilité d’un État membre pour des dommages causés aux particuliers par des violations du droit de l’Union – Violation suffisamment caractérisée du droit de l’Union – Autonomie procédurale des États membres – Principe de coopération loyale – Article 4, paragraphe 3, TUE – Principes d’équivalence et d’effectivité »

Dans l’affaire C‑571/16,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Administrativen sad Varna (tribunal administratif de Varna, Bulgarie), par décision du 4 novembre 2016, parvenue à la Cour le 14 novembre 2016, dans la procédure

Nikolay Kantarev

contre

Balgarska Narodna Banka,

en présence de :

Okrazhna prokuratura – Varna,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. J. L. da Cruz Vilaça (rapporteur), président de chambre, MM. E. Levits, A. Borg Barthet, Mme M. Berger et M. F. Biltgen, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour M. Kantarev, par Mes K. Boncheva et M. Ekimdzhiev, advokati,

pour Balgarska Narodna Banka, par Mes A. Kalaydzhiev, R. Georgiev et M. Kalaydzhieva, advokati,

pour la Commission européenne, par Mmes P. Mihaylova et A. Steiblytė ainsi que par M. H. Krämer, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 7 juin 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 1er, point 3, sous i), et de l’article 10, paragraphe 1, de la directive 94/19/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 1994, relative aux systèmes de garantie des dépôts (JO 1994, L 135, p. 5), telle que modifiée par la directive 2009/14/CE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mars 2009 (JO 2009, L 68, p. 3) (ci-après la « directive 94/19 »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant M. Nikolay Kantarev à la Balgarska Narodna Banka (Banque nationale bulgare, ci-après la « BNB ») au sujet du préjudice que M. Kantarev aurait subi en raison du versement prétendument tardif de la garantie des dépôts, au titre de fonds inscrits sur un compte courant ouvert auprès de la Korporativna Targovska Banka (ci-après la « banque KTB ») et devenus indisponibles.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 94/19

3

Les premier, deuxième, quatrième, huitième, neuvième, onzième, vingt et unième ainsi que vingt-quatrième considérants de la directive 94/19 énoncent :

« considérant que, conformément aux objectifs du traité, il convient de promouvoir un développement harmonieux des activités des établissements de crédit dans l’ensemble de la Communauté en supprimant toute restriction à la liberté d’établissement et à la libre prestation des services, tout en renforçant la stabilité du système bancaire et la protection des épargnants ;

considérant que, parallèlement à la suppression des restrictions à ses activités, il convient de se préoccuper de la situation susceptible de se produire en cas d’indisponibilité des dépôts d’un établissement de crédit qui a des succursales dans d’autres États membres ; qu’il est indispensable qu’un niveau minimal harmonisé de garantie des dépôts soit assuré quelle que soit la localisation des dépôts à l’intérieur de la Communauté ; que cette protection des dépôts est aussi essentielle que les règles prudentielles pour l’achèvement du marché unique bancaire ;

[...]

considérant que le coût, pour les établissements de crédit, de la participation à un système de garantie est sans commune mesure avec le coût qu’induirait un retrait massif des dépôts bancaires non seulement d’un établissement en difficulté, mais également d’établissements sains à la suite d’une perte de confiance des déposants dans la solidité du système bancaire ;

[...]

considérant que l’harmonisation doit se limiter aux principaux éléments des systèmes de garantie des dépôts et qu’elle doit assurer, dans un délai très bref, un versement au titre de la garantie calculé en fonction d’un niveau minimal harmonisé ;

considérant que les systèmes de garantie des dépôts doivent intervenir dès qu’il y a indisponibilité des dépôts ;

[...]

considérant que, par elle-même, l’harmonisation des systèmes de garantie des dépôts dans la Communauté ne remet pas en cause l’existence des systèmes en place qui sont axés sur la protection des établissements de crédit, en garantissant notamment leur solvabilité et leur liquidité, afin d’éviter que les dépôts effectués auprès de ces établissements, y compris les succursales qu’ils ont établies dans un autre État membre, puissent devenir indisponibles ; que ces systèmes alternatifs qui poursuivent un but de protection différent peuvent, à certaines conditions, être considérés par les autorités compétentes comme satisfaisant aux objectifs de la présente directive ; qu’il appartiendra auxdites autorités compétentes de vérifier le respect de ces conditions ;

[...]

considérant que l’information des déposants est un élément essentiel pour leur protection et doit donc faire également l’objet d’un minimum de dispositions contraignantes : [...]

[...]

considérant que la présente directive ne peut avoir pour effet d’engager la responsabilité des États membres ou de leurs autorités compétentes à l’égard des déposants, dès lors qu’ils ont veillé à l’instauration ou à la reconnaissance officielle d’un ou de plusieurs systèmes garantissant les dépôts ou les établissements de crédit eux-mêmes et assurant l’indemnisation ou la protection des déposants dans les conditions définies par la présente directive ».

4

L’article 1er, point 1, premier alinéa, et point 3, de cette directive dispose :

« Aux fins de la présente directive, on entend par :

1)

“dépôt” : tout solde créditeur résultant de fonds laissés en compte ou de situations transitoires provenant d’opérations bancaires normales, que l’établissement de crédit doit restituer conformément aux conditions légales et contractuelles applicables, ainsi que toute créance représentée par un titre de créance émis par l’établissement de crédit.

[...]

3)

“dépôt indisponible” : un dépôt qui est échu et exigible et n’a pas été payé par un établissement de crédit dans les conditions légales et contractuelles qui lui sont applicables et lorsque :

i)

les autorités compétentes ont constaté que, de leur point de vue, pour le moment et pour les raisons liées directement à sa situation financière, cet établissement de crédit n’apparaît pas en mesure de pouvoir restituer les dépôts et qu’il n’y a pas de perspective rapprochée qu’il puisse le faire.

Les autorités compétentes font ce constat dès que possible et, en tout état de cause, au plus tard cinq jours ouvrables après avoir établi pour la première fois qu’un établissement de crédit n’a pas restitué les dépôts échus et exigibles ; ou

ii)

qu’une autorité judiciaire a rendu, pour des raisons liées directement à la situation financière de l’établissement de crédit, une décision qui a pour effet de suspendre l’exercice des droits des déposants de faire valoir des créances à l’égard de l’établissement, si cette décision intervient avant le constat visé ci-dessus ».

5

L’article 7, paragraphes 1 et 1 bis, de ladite directive prévoit :

« 1. Les États membres veillent à ce que la garantie de l’ensemble des dépôts d’un même déposant soit d’au moins 50000 [euros] en cas d’indisponibilité des dépôts.

1 bis. Au plus tard le 31 décembre 2010, les États membres veillent à ce que la garantie de l’ensemble des dépôts d’un même déposant soit fixée à 100000 [euros] en cas d’indisponibilité des dépôts.

[...] »

6

Aux termes de l’article 10, paragraphe 1, de la même directive :

« Les systèmes de garantie des dépôts doivent être en mesure de payer les créances dûment vérifiées des déposants se rapportant à des dépôts indisponibles dans un délai de vingt jours ouvrables à compter de la date à laquelle les autorités compétentes font un constat visé à l’article 1er , point 3 i), ou à laquelle une autorité judiciaire rend une décision visée à l’article 1er, point 3 ii). Ce délai inclut la collecte et la transmission des données précises relatives aux déposants et aux dépôts, qui sont nécessaires à la vérification des créances.

Dans des circonstances tout à fait exceptionnelles, un système de garantie des dépôts peut demander aux autorités compétentes une prolongation du délai. Cette prolongation ne peut pas dépasser dix jours ouvrables.

[...] »

La directive 2009/14

7

Les considérants 11 et 12 de la directive 2009/14 énoncent :

« (11)

De plus, dans les cas où le remboursement [des dépôts] est déclenché par un constat des autorités compétentes, il convient de réduire l’actuel délai de décision de vingt et un jours à cinq jours ouvrables pour ne pas empêcher un remboursement rapide. Les autorités compétentes devraient néanmoins s’assurer en premier lieu qu’un établissement de crédit n’a pas restitué les dépôts échus et exigibles. Cette évaluation devrait être soumise aux procédures judiciaires ou administratives des États membres.

(12)

Les dépôts peuvent être considérés comme indisponibles lorsque des mesures d’intervention préventive ou de restructuration ont échoué. Ceci ne devrait pas empêcher les autorités compétentes de fournir des efforts supplémentaires en matière de restructuration durant le délai de remboursement. »

...

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