MEO – Serviços de Comunicações e Multimédia SA contra Autoridade Tributária e Aduaneira.

JurisdictionEuropean Union
ECLIECLI:EU:C:2018:942
Docket NumberC-295/17
Date22 November 2018
Procedure TypeReference for a preliminary ruling
CourtCourt of Justice (European Union)
Celex Number62017CJ0295
62017CJ0295

ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)

22 novembre 2018 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Système commun de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) – Directive 2006/112/CE – Champ d’application – Opérations imposables – Prestation à titre onéreux – Distinction entre des dommages et intérêts non imposables et des prestations de services imposables fournies moyennant le paiement d’une “indemnité” »

Dans l’affaire C‑295/17,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunal Arbitral Tributário (Centro de Arbitragem Administrativa) [tribunal arbitral en matière fiscale (centre d’arbitrage administratif), Portugal], par décision du 8 janvier 2017, parvenue à la Cour le 22 mai 2017, dans la procédure

MEO – Serviços de Comunicações e Multimédia SA

contre

Autoridade Tributária e Aduaneira,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. K. Lenaerts, président de la Cour, faisant fonction de président de la cinquième chambre, M. E. Levits (rapporteur) et Mme M. Berger, juges,

avocat général : Mme J. Kokott,

greffier : Mme R. Şereş, administratrice,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 26 avril 2018,

considérant les observations présentées :

pour MEO – Serviços de Comunicações e Multimédia SA, par Mes V. Codeço, M. Machado de Almeida et R. M. Fernandes Ferreira, advogados,

pour le gouvernement portugais, par MM. L. Inez Fernandes, M. Figueiredo et R. Campos Laires, en qualité d’agents,

pour le gouvernement irlandais, par Mmes M. Browne et J. Quaney ainsi que par M. A. Joyce, en qualité d’agents, assistés de M. N. J. Travers, SC, et de Mme A. Keirse, BL,

pour la Commission européenne, par Mme L. Lozano Palacios et M. A. Caeiros, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 7 juin 2018,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 2, paragraphe 1, sous c), de l’article 64, paragraphe 1, de l’article 66, premier alinéa, sous a), et de l’article 73 de la directive 2006/112/CE du Conseil, du 28 novembre 2006, relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée (JO 2006, L 347, p. 1, ci-après la « directive TVA »).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant MEO – Serviços de Comunicações e Multimédia SA (ci-après « MEO ») à l’Autoridade Tributária e Aduaneira (autorité fiscale et douanière, Portugal) au sujet de la liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ainsi que d’intérêts compensatoires y afférents.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

3

L’article 2, paragraphe 1, sous c), de la directive TVA prévoit que sont soumises à la TVA « les prestations de services, effectuées à titre onéreux sur le territoire d’un État membre par un assujetti agissant en tant que tel ».

4

L’article 64, paragraphe 1, de cette directive dispose :

« Lorsqu’elles donnent lieu à des décomptes ou à des paiements successifs, les livraisons de biens [...] et les prestations de services sont considérées comme effectuées au moment de l’expiration des périodes auxquelles ces décomptes ou paiements se rapportent. »

5

L’article 66, premier alinéa, de ladite directive prévoit :

« Par dérogation aux articles 63, 64 et 65, les États membres peuvent prévoir que la taxe devient exigible pour certaines opérations ou certaines catégories d’assujettis à un des moments suivants :

a)

au plus tard lors de l’émission de la facture ;

[...] »

6

L’article 73 de la même directive est rédigé comme suit :

« Pour les livraisons de biens et les prestations de services autres que celles visées aux articles 74 à 77, la base d’imposition comprend tout ce qui constitue la contrepartie obtenue ou à obtenir par le fournisseur ou le prestataire pour ces opérations de la part de l’acquéreur, du preneur ou d’un tiers, y compris les subventions directement liées au prix de ces opérations. »

7

L’article 90 de la directive TVA dispose :

« 1. En cas d’annulation, de résiliation, de résolution, de non-paiement total ou partiel ou de réduction de prix après le moment où s’effectue l’opération, la base d’imposition est réduite à due concurrence dans les conditions déterminées par les États membres.

2. En cas de non-paiement total ou partiel, les États membres peuvent déroger au paragraphe 1. »

Le droit portugais

8

Aux termes de l’article 1er, paragraphe 1, sous a), du Código do Imposto sobre o Valor Acrescentado (code de la taxe sur la valeur ajoutée) :

« Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée :

a)

les transmissions de biens et les prestations de services effectuées sur le territoire national, à titre onéreux, par un assujetti agissant en tant que tel ».

9

L’article 16, paragraphe 1, du code de la taxe sur la valeur ajoutée est libellé comme suit :

« Sous réserve des dispositions des paragraphes 2 et 10, la base d’imposition des transmissions de biens et des prestations de services assujetties à la taxe correspond à la valeur de la contrepartie perçue ou devant être perçue de la part de l’acquéreur, du preneur ou d’un tiers. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

10

MEO, société établie à Lisbonne (Portugal), a pour principale activité la fourniture, sur le territoire portugais, de prestations de services dans le domaine des télécommunications. Elle exerce ainsi une activité économique au sens de l’article 9, paragraphe 1, second alinéa, de la directive TVA et est, de ce fait, assujettie à la TVA.

11

Dans le cadre de son activité, MEO conclut avec ses clients des contrats de prestation de services, dans les domaines des télécommunications, d’accès à Internet, de la télévision et des multimédias, dont certains prévoient des périodes minimales d’engagement, tout en accordant aux clients des conditions avantageuses, notamment sous forme de mensualités d’abonnement moins élevées.

12

Ces contrats stipulent également que, en cas de désactivation des produits et des services qui y sont prévus avant l’échéance de la période minimale d’engagement convenue, à la demande des clients ou pour un motif qui leur est imputable, MEO a droit à une indemnité correspondant au montant de la redevance d’abonnement mensuelle convenue multiplié par la différence entre la durée de la période minimale d’engagement prévue au contrat et le nombre de mois pendant lesquels la prestation de service a été fournie.

13

Selon la juridiction de renvoi, le montant dû par le client à MEO en cas de résiliation anticipée du contrat de prestation de services serait donc constitué du montant de la redevance d’abonnement correspondant à la totalité de la période minimale d’engagement, même si la prestation de services n’est pas fournie au client jusqu’au terme de cette période.

14

Il ressort également de la décision de renvoi que le client est redevable dudit montant lorsque les services sont désactivés avant la fin de la période minimale d’engagement, notamment si le client manque à son obligation de payer les redevances d’abonnement mensuelles convenues.

15

Au cours d’un contrôle réalisé auprès de MEO entre le 1er avril et le 20 novembre 2014, l’autorité fiscale et douanière a constaté que, pour l’exercice fiscal relatif à l’année 2012, MEO n’avait pas acquitté la TVA sur le montant qui avait été facturé aux clients à la suite de la résiliation anticipée de contrats de prestation de services et a, en conséquence, émis des actes de liquidation de la TVA.

16

Il ressort de la décision de renvoi que, à la suite de la rupture anticipée par le client du contrat de prestation de services, MEO désactive les services prévus à ce contrat et adresse une facture au client sur laquelle figure le montant de l’indemnité contractuellement prédéterminé due à MEO ainsi que la mention « non soumis à la TVA ».

17

Étant d’avis que le montant dû au titre de la résiliation anticipée des contrats de prestation de services constitue une indemnité qui n’est pas soumise à la TVA, au motif qu’elle ne vise à rémunérer aucune prestation de services, MEO a formé un recours gracieux contre lesdits actes de liquidation de la TVA, lequel a été rejeté.

18

Le 23 décembre 2015, MEO a formé, contre la décision de rejet de son recours gracieux, un recours hiérarchique sur lequel il n’a pas été statué dans le délai légal.

19

Le 20 mai 2016, MEO a saisi la juridiction de renvoi, le Tribunal Arbitral Tributário (Centro de Arbitragem Administrativa) [tribunal arbitral en matière fiscale (centre d’arbitrage administratif), Portugal], d’un recours tendant à faire constater l’illégalité des actes de liquidation de la TVA.

20

La juridiction de renvoi considère que les montants dus par les clients à MEO pour non-respect de la période minimale d’engagement contractuelle représentent, aux fins de la TVA, la contrepartie d’une prestation de services et constituent donc une rémunération.

21

Selon cette juridiction, ces montants présentent le caractère d’une rémunération au motif également qu’ils permettent de garantir à MEO le maintien d’un même niveau de recettes qu’en l’absence d’interruption des prestations. MEO ne subirait aucun manque à gagner puisque ces montants seraient contractuellement convenus.

22

Dans ces conditions, le Tribunal Arbitral Tributário (Centro de Arbitragem Administrativa) [tribunal arbitral en matière fiscale (centre d’arbitrage administratif)] a décidé de...

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